Histoire de la littérature française (Lanson)/Cinquième partie/Livre 2/Chapitre 2

Librairie Hachette (p. 645-652).
Cinquième partie. Livre 2.


CHAPITRE II

LA TRAGÉDIE


1. Décadence de la tragédie : ni nature ni vérité. Crébillon ; la tragédie romanesque et horrible. — 2. Voltaire : justesse de la conception, faiblesse de l’exécution. Voltaire et Shakespeare : inventions et artifices qui modifient la forme de la tragédie. Le théâtre philosophique. — 3. Rien autour ni à la suite de Voltaire.

Le xviiie siècle a fait effort pour ranimer la tragédie. Ses remèdes ont achevé de la tuer.

1. CRÉBILLON.

Elle était bien malade, dès le jour où elle perdit Racine : par un effort de génie qui ne sera pas renouvelé, il avait su pousser son observation bien au-dessous de la surface polie des mœurs actuelles jusqu’aux explosions immorales, douloureuses, brutales, des passions naturelles. Comme le hasard ne suscite après lui personne qui puisse faire équilibre aux circonstances par son tempérament, la force des circonstances l’emporte, et étouffe la tragédie. La vie de société ne laisse pas aux émotions profondes de l’individu le droit de s’exprimer, et élimine de plus en plus rigoureusement par la tyrannie des formes les réalités de sentiment et d’action qui pourraient servir de modèle à la tragédie. Or, en même temps, la condition des gens de lettres se relève ; la considération dont ils jouissent les introduit et les enferme dans le monde ; leur champ d’observation se trouve par là singulièrement restreint, et le rideau des bienséances sociales s’interpose entre leur œil et la nature. L’objet, le don, le goût de l’observation psychologique s’évanouissent également ; et cette connaissance de l’homme qui avait fait l’intérêt de la tragédie au siècle précédent disparaît sans laisser de traces. La forme du genre subsiste, mais la vie s’en est retirée.

La tragédie se fait par procédés : elle consiste dans un système de règles et de moyens que l’on considère comme inamovibles. Les formules des situations, des caractères, des passions se sont fixées. Ce n’est plus qu’un exercice littéraire, un jeu de société, où il ne s’agit que de passer adroitement par les conditions convenues. Tout l’art des auteurs, tout l’intérêt des spectateurs se portent à peu près sur cette unique question : étant donné un sujet tragique, comment les situations tragiques seront-elles ingénieusement esquivées et réduites aux bienséances ? On n’a plus à regarder la nature : il suffit de connaître Racine, Corneille et Quinault. Racine est pris pour un maître d’élégance et de noblesse. Corneille enseigne à corser un sujet par l’histoire, les intrigues de palais. Et Quinault, enfin, Quinault montre à bâtir un roman héroïque et galant : car le vide de ces tragédies ne peut être rempli que par les complications romanesques.

C’est ce que nous apprenaient déjà Campistron et Lagrange-Chancel, dont j’ai dit précédemment un mot ; et Crébillon n’est pas pour modifier nos conclusions [1]. Crébillon, qui eut un immense succès, est un homme d’imagination-active, sans cesse occupée à emmêler et à démêler les fils d’une action romanesque. La qualité des matériaux lui est indifférente : il prend à La Calprenède, à Corneille, à Racine, des situations, des caractères, des sentiments ; il amalgame des lieux communs, il invente des férocités ou des héroïsmes sans exemple ; peu lui importe ; jamais il n’a jeté un regard vers la nature. Il traite la tragédie comme un problème, dont les données sont conventionnelles et ne doivent jamais être discutées. Le tout est de tirer de ces données ce qu’elles comportent de situations surprenantes. Mais qu’est-ce qu’une situation surprenante ? Crébillon eut une idée géniale : il comprit que, dans l’état des mœurs, une belle scène était celle qui présenterait la situation la plus contraire aux bienséances, d’une manière conforme à ces bienséances [2]. Des sujets horribles, adroitement affadis, voilà tout son art.

Il n’y a qu’un moyen de résoudre l’antithèse du sujet atroce et du goût poli : c’est d’escamoter le sujet, et Crébillon s’y applique. Le moyen le plus simple et le plus ordinaire qu’il ait employé, est l’incognito, à des degrés, et, pour ainsi dire, à des puissances diverses, selon l’écart du fait et des bienséances ; cet incognito est simple quand l’un des acteurs est connu de l’autre, réciproque, quand ils se méconnaissent tous les deux, personnel quand le sujet s’ignore lui-même. Il n’y a pas d’atrocité qui résiste à ce moyen. Prenez un inceste : si la mère et le fils sont inconnus l’un à l’autre, vous avez ôté la substance et gardé l’écorce de l’inceste [3]. Prenez un parricide : vous doserez l’horreur à volonté, selon que la mère connaîtra son fils, ou non, et selon que le fils se connaîtra lui-même, ou non [4]. Autre avantage des incognitos : les reconnaissances s’y attachent ; ce sont de bons coups de théâtre ; et rien n’est plus commode que d’y emboîter un dénouement.

Lisons Rhadamiste et Zénobie, la plus célèbre et caractéristique tragédie de Crébillon. Pharasmane et ses deux fils, Arsame et Rhadamiste, sont amoureux de Zénobie ; mais Zénobie est mariée à Rhadamiste ; l’amour de Pharasmane et d’Arsame est incestueux : voilà l’horreur. Voici l’affadissement : Zénobie se fait nommer Isménie ; Pharasmane et Arsame ignorent qu’ils l’ont, l’un pour belle-fille, et l’autre pour belle-sœur. Zénobie, qui se connaît, aime Arsame : nous voyons poindre un troisième sentiment incestueux. Mais Zénobie se croit veuve : elle est donc libre de fait. Elle a été jadis assassinée par son mari, qui était aussi l’assassin de son père : aucun souvenir n’a donc à contraindre ses sentiments. Faites venir maintenant Rhadamiste sous le nom et le costume d’un ambassadeur romain : que Zénobie le reconnaisse ; voilà un effet, d’où naîtront : 1° une lutte de sentiments dans l’âme de Zénobie, prise entre le devoir et l’amour ; 2° la jalousie du mari, amoureux de sa femme, et qui, se souvenant de l’avoir assassinée, n’en attend pas beaucoup de retour ; 3° la jalousie de Pharasmane et d’Arsame, que les entrevues de la femme et du mari inquiéteront. L’ignorance d’Arsame et de Pharasmane sera ménagée pour produire le plus d’effets possible. Arsame sera le premier instruit ; et cette révélation lui donnera occasion de développer le caractère du généreux qui se sacrifie. Pharasmane ne saura rien : il est chargé du dénouement. Il tue son fils : atrocité, — sans le connaître : excuse. Éclairé sur sa victime, il se tuera : action horrible — et bienséante. Là-dessus, les amants sympathiques seront unis, pour la satisfaction du public. On voit, par cet exemple, comment Crébillon entend son métier : mais que devient la tragédie, ainsi pratiquée ?


2. LA TRAGÉDIE DE VOLTAIRE.


Voltaire employa souvent ces artifices : mais il essaya souvent aussi d’y échapper. Admirateur enthousiaste et timoré de Racine, il conservera scrupuleusement les formes léguées par le xviie siècle ; il résistera de toutes ses forces aux doctrines subversives de La Motte qui voulait supprimer de la tragédie les confidents, les monologues, les récits, les unités, et le vers.

Le grand mérite de Voltaire, d’où découle son incomparable supériorité sur tout son siècle, c’est d’avoir compris la tragédie. Il a très bien vu dans Corneille et dans Racine que la tragédie est une action où se développent les types complets des caractères et des passions de l’humanité, dans lesquels tous les exemplaires imparfaits et les mélanges atténués, qui sont la réalité courante, se trouvent contenus. Voilà ce que Voltaire aperçut nettement, et ne cessa de répéter pendant soixante années. C’était là le fondement de son aversion pour le drame : il l’estimait surtout inutile, et, quand on lui parlait d’un certain Vindicatif que composait un des partisans du nouveau genre, il demandait s’il pouvait y avoir un plus grand « vindicatif » qu’Atrée. Avec une conviction véritablement profonde, il essaya d’exprimer les généralités des caractères et des passions dans toutes les tragédies qu’il écrivit, si l’on excepte quelques œuvres de ses vingt dernières années, où les personnages représentent plutôt des opinions philosophiques que des êtres moraux. Ses deux pièces les plus célèbres sont très caractéristiques à cet égard : Mérope et Zaïre. Mérope est « la mère » ; et Polyphonte, Egisthe, Narbas, tous les autres personnages ont pour fonction d’exciter « la mère » à développer toutes les agitations, toutes les douleurs, les espérances, les puissances de souffrir et d’agir d’une âme maternelle. Dans Zaïre, trois caractères sont en relation et réagissent l’un sur l’autre : Orosmane, l’amour jaloux ; Lusignan, la foi fervente ; Zaïre, l’amour passionné aux prises avec le respect filial.

Voltaire s’était très bien rendu compte aussi de l’affadissement de la tragédie sous la tyrannie des bienséances mondaines. Il se plaignait qu’on énervât tous les sujets par la politesse et la galanterie. Il voulait qu’on rendît à l’amour sa fureur, et qu’on n’en fit pas un échange de douceurs ingénieuses. Il voulait qu’on mît l’amour à sa place, et qu’on ne le mît pas où il n’avait que faire : pourquoi l’amour serait-il le seul ressort de la tragédie ? Pourquoi toutes les passions auxquelles peuvent donner lieu les relations de famille, pourquoi le fanatisme religieux, pourquoi l’ambition politique ne seraient-ils pas à leur tour les ressorts de l’intérêt dramatique ? Voltaire [5], en conséquence, reprenait les sujets où l’amour se montre en son plus brutal excès ; il traitait le vieux sujet traditionnel de Mariamne ; il empruntait aux Anglais leur Othello qu’il habillait en Orosmane. Dans sa première œuvre, dans Œdipe, il bannissait l’amour, et n’introduisait l’idylle surannée de Philoctète et de Jocaste que sur l’ordre des comédiens, trop jeune encore et trop inconnu pour leur imposer sa volonté. Il ira jusqu’à faire une tragédie sans femmes, la Mort de César. Il ne mettra point d’amour dans Mérope ; il n’en mettra pas dans Oreste, qu’il opposera à la trop galante Électre de Crébillon.

Il sentait que la crainte d’exposer les signes brutaux des passions aux yeux des spectateurs, et l’habitude de montrer seulement les principes moraux des faits, avaient banni à peu près toute espèce d’action de nos tragédies, qui étaient devenues d’assez vides « conversations en cinq actes ». Il ne put s’empêcher d’être frappé, pendant son séjour en Angleterre, de la sauvage énergie des pièces de Shakespeare, de l’intensité des passions, de la rapidité sensible de l’action matérielle : et si barbares qu’il les jugeât, elles lui firent paraître nos tragédies bien languissantes et bien froides. Il y eut une vingtaine d’années, après son retour l’Angleterre (1730-1750), pendant lesquelles il subit visiblement l’influence de Shakespeare. Il est vrai que plus tard, lorsqu’il vit le public s’intéresser à ce Shakespeare que lui-même avait révélé, le vieux classique qui était en lui se révolta. Le succès de la traduction de Letourneur et des adaptations de Ducis le fit éclater de rage [6].

Il se révolta aussi lorsqu’il vit, sous l’influence combinée du théâtre anglais et du drame, un pathétique grossier et brutal envahir la tragédie. Il s’emportait contre les comédiens qui voulaient montrer un échafaud tendu de noir dans Tancrède. Il se moquait de la malencontreuse idée que la Comédie eut un jour de mettre en action le dénouement d’Iphigénie. C’est tricherie de surprendre les yeux au lieu de captiver l’âme.

Le malheur de Voltaire fut de n’avoir pas assez de génie pour exécuter ses idées. Il manqua d’abord de patience, de méditation ; il écrivit trop vite : Zaïre fut bâclée en dix-sept jours ; Olympie était « l’œuvre des six jours ». Il lui arriva de refaire trois, quatre fois un acte, une pièce : c’est-à-dire qu’il improvisa trois, quatre actes pour un ; trois, quatre pièces pour une. Puis, pour remplir l’idée qu’il se faisait de la tragédie, l’essentiel lui fit défaut, la pratique de l’observation psychologique, ou la puissance de l’imagination psychologique. Elève attentif du xviie siècle, il a des vues justes, moyennes, peu personnelles, sur le mécanisme de l’âme humaine. Aussi dessine-t-il des caractères vraisemblables, en indications rapides, un peu sommaires ; voilà pourquoi ses tragédies gagnent à être vues plutôt que lues, s’il y a un bon acteur pour compléter l’esquisse tracée par le poète.

Voltaire eut surtout l’entente de la scène. Il se rendait compte de ce qui devait faire impression sur le public, et il disposait sa tragédie en conséquence : c’est là encore un vice radical de son théâtre. Il a l’idée de ce que rendront en scène chaque fait, chaque état moral : la douleur chrétienne de Lusignan, par exemple. Jamais je ne trouve dans son théâtre un mot qui soit pour la vérité d’abord ; je sens que ce poète vise toujours un point de l’esprit du public ; la vérité s’y rencontre, si elle peut. Il dirige son action, il donne « le coup de pouce », pour amener telle situation, tel jeu de sentiment, tel tableau, sur lesquels il compte. Une impression inquiétante d’insincérité se dégage de la lecture même de ses meilleures pièces.

Cette habitude d’escompter les effets sûrs, unie au défaut d’invention psychologique, a été cause que Voltaire n’a pu, malgré ses bonnes intentions, se passer des artifices de ses prédécesseurs. Il a beau vouloir rendre aux passions leur énergie, la politesse l’enserre et paralyse ses mouvements. Il use et abuse des incognitos, des quiproquos, des reconnaissances retardées ou provoquées arbitrairement, de tout ce qui sera plus tard moyen de mélodrame ou de vaudeville. Voyez Zaïre : au lieu de garder la belle et naturelle énergie de l’Othello anglais, il dispose toute sorte d’artifices tout à la fois pour amener et pour affadir la violence du dénouement. Zaïre est tendre, Orosmane est tendre ; tous les deux sont « sympathiques ». Pour que l’un tue l’autre, il faut absolument qu’il y ait quiproquo ; ainsi l’on plaint la victime sans haïr le meurtrier. Le crime est combiné avec bienséance, de sorte qu’il n’y ait pas de criminel. Voilà pourquoi Zaïre et Nérestan se cachent si soigneusement d’être frère et sœur.

Asservi donc aux timidités du goût mondain, Voltaire ne pouvait pas non plus mettre dans ses pièces l’action qu’il rêvait. Il s’en tint à des inventions extérieures qui ne modifiaient pas le fond traditionnel et la banale disposition de la tragédie. Il chercha à exciter l’intérêt par des moyens sensibles, par des particularités de décor et de costume. Il croyait avoir fait merveille d’avoir porté l’action dramatique hors du monde mythologique gréco-romain, de l’avoir promenée en Asie, en Afrique, en Amérique, de l’avoir ramenée en France, en plein moyen âge féodal et chrétien. Toutes les races et tous les siècles sont représentés dans son théâtre. On y voit même des spectres, et Voltaire croit avoir fait du Shakespeare ou de l’Eschyle pour avoir imaginé ces piteuses apparitions d’Eriphyle et de Sémiramis, si acerbement et si justement critiquées par Lessing. Montrer dans Brutus des sénateurs en robe rouge, faire tirer un coup de canon dans Adélaïde du Gueselin et y mettre le bras d’un prince du sang de France en écharpe, costumer Lekain en Tartare avec un grand arc à la main et de farouches plumes ondoyant sur un casque invraisemblable dans l’Orphelin de la Chine, voilà les inventions par lesquelles Voltaire remédie à la froideur de la tragédie. Il interprétait Shakespeare en librettiste d’opéra.

Il ne faut pas méconnaître un fait important : l’Opéra devient au xviiie siècle notre première scène. La pompe du spectacle, les machines, les costumes, tout l’éclat de la mise en scène flatte les yeux et amuse la frivolité du public mondain. Voltaire a subi, lui aussi, dès sa jeunesse, sous la Régence, la fascination de l’Opéra, qui flattait ses secrets appétits de vie heureuse et sensuelle. Il prit alors des impressions qui ne s’effacèrent jamais. De là son attachement à Quinault, et de là son effort pour établir à la Comédie Française la singularité des décorations, des costumes, et tout ce qui s’y pouvait transporter de la mise en scène de l’Opéra.

Il était à craindre que, la vérité mise à part et la nature, la tragédie n’eût plus d’autre objet que de présenter d’ingénieuses applications des règles. En dépit des inventions de Voltaire, elle se vidait d’idées. Il sentit plus ou moins obscurément le danger : il jeta dans le moule tragique ses idées philosophiques, et toutes les formules analytiques de la pensée abstraite. Il usa de la tragédie, comme de toutes les autres formes littéraires, pour répandre dans le public les conclusions de son rationalisme. Il me suffira de rappeler ici les traits d’incrédulité hardie dont Œdipe même était semé, l’esprit de libéralisme politique qui animait certaines parties de Brutus, la fameuse sentence de Mérope, où le droit divin est nié. Le sous-titre de Mahomet, le Fanatisme, indique la direction d’intention dont cette tragédie est sortie. Enfin, à quoi bon citer les Guèbres, Olympie, les Lois de Minos ? À partir de 1760, on compte les pièces qui ne sont pas avant tout des pamphlets philosophiques. Ces intentions doctrinales, cette prédication, ces maximes, ces personnages qui sont ou des abstractions personnifiées ou les porte-parole du poète, nous refroidissent aujourd’hui les tragédies de Voltaire. Ils en firent alors le succès, en leur donnant une brûlante actualité. Voltaire n’eut pas tort de vouloir exprimer sa conception de la vie, du bien, de la société, par son théâtre : mais il n’eut pas le génie qu’il fallait pour traduire dramatiquement cette conception.


3. FIN DE LA TRAGÉDIE.


Voltaire, c’est toute la tragédie du xviiie siècle : hors de lui, il n’y a rien qui puisse nous arrêter. Il contient et Lanoue, et Lemière, et La Harpe, et De Belloy, et Saurin, et Chénier : il les contient tous, et à eux tous ils sont loin de lui équivaloir. L’histoire des mœurs peut enregistrer la superficielle émotion patriotique qui se manifeste à propos du Siège de Calais (1763) : mais De Belloy en lui-même n’intéresse pas l’histoire littéraire.[7] Un seul homme est à signaler, c’est Ducis, pour ses adaptations des drames shakespeariens : Hamlet (1769), Roméo et Juliette (1772), le Roi Lear (1783), Macbeth (1784), Jean Sans Terre (1791), Othello (1792). Mais ces dames qui réduisent Shakespeare à l’étroitesse de la technique voltairienne, ces drames sont illisibles, et ridicules aujourd’hui. Nous aurons à y revenir pour indiquer les causes qui ont fait de l’œuvre de Ducis un remarquable cas d’avortement littéraire.

  1. Prosper Jolyot de Crébillon, né à Dijon en 1674, fit représenter son Idoménée en 1703 ; puis vinrent Atrée et Thyeste, 1707, Électre, 1708, Rhadamiste et Zénobie, 1711, etc. Il mourut en 1762. Dans sa vieillesse, on chercha à l’opposer à Voltaire ; Mme de Pompadour, brouillée avec celui-ci, se déclara hautement pour Crébillion. — Éditions : Œuvres, Impr. royale, 2 vol. in-8, 1750 ; Didot, aîné, 1812, 2 vol. in-8 ; Lebigre frères, 1832, 3 vol. pet. in-12. — À consulter : Brunetière, Époq. du th. fr., 9e conf. M. Dutrait, la Vie et le Théâtre de Cr., Paris, 1896, in-8
  2. Cf. la Préface d’Atrée et Thyeste, ou la formule est donnée.
  3. Sémiramis, Sémiramis aime son fils Ninias.
  4. Sémiramis : « Ninias élevé sous le nom d’Agénor ». Électre : « Oreste élevé sous le nom de Tydée. »
  5. Principales tragédies : Œdipe 1718, Brutus 1730, Zaïre 1732, la Mort de César 1731, Alzire 1736, Mahomet 1742, Mérope 1743, l’Orphelin de la Chine 1755, Tancrède 1760, les Seythes 1767, les Guèbres 1769. — À consulter : F. Brunetière, Époques du théâtre français, 11e conf. ; Lemaitre, Impressions de théâtre, 2e série ; H. Lion, les Tragédies et les Théories dramatiques de Voltaire, 1896. J.-J. Ollivier, Voltaire et les Comédiens interprètes de son théâtre, 1900 ; Le Kain, 1907
  6. Lettre à l’Académie française, lue en séance publique le 25 août 1776. Cf. aussi Du théâtre anglais, 1761, sous le pseudonyme de Jérôme Carré. — À consulter : J.-J Jusserand, Shakespeare en France sous l’ancien régime. 1899.
  7. Du moins il n’interesse que l’histoire de la décoration et de la mise en scène. Les notations de décor dans ses tragédies sont très curieuses et détaillées (11e éd.).