Traduction par Charles Bernard-Derosne.
Hachette (tome IIp. 32-42).

CHAPITRE XXIX

Départ.

Le jeudi suivant, à une heure, Dunbar se présenta dans les bureaux du marchand de diamants.

Dunbar n’était pas seul. Il s’était arrêté dans Saint-Gundolph Lane, et avait prié Balderby de l’accompagner pour examiner les diamants qu’il avait achetés pour sa fille.

Le jeune associé ouvrit de grands yeux quand on étala les diamants devant lui, et déclara que la générosité de son associé était quelque chose de plus que princière.

Mais peut-être Balderby ne se sentit-il pas aussi complètement ravi quand, deux ou trois heures après, Hartgold se présenta à la caisse de Saint-Gundolph Lane, d’où il sortait peu d’instants après, emportant avec lui soixante-quinze mille huit cents livres en billets de la banque d’Angleterre.

Dunbar s’éloigna d’Holborn son habit boutonné serré sur sa poitrine, et avec environ quatre-vingt mille livres de valeurs cachées dans les poches intérieures de son vêtement. Il ne se rendit pas directement à l’Hôtel Clarendon, mais se dirigea vers Smithfield et pénétra dans une rue boueuse et fréquentée, où il s’arrêta, un moment après, devant la boutique d’un corroyeur de fort médiocre apparence.

Il entra et choisit deux peaux de chamois très-épaisses et très-fortes. Dans une autre boutique, il acheta quelques grandes aiguilles, une demi-douzaine d’écheveaux de gros fil ciré, une paire de grands ciseaux, deux grosses boucles en acier, et un dé de tailleur. Quand il eut fini ces achats, il fit signe au premier cab vide qu’il rencontra, et retourna à son hôtel.

Il dîna, but les trois quarts d’une bouteille de bourgogne, puis demanda une tasse de thé très-fort, et donna ordre qu’on la lui apportât dans son cabinet de toilette. Il y avait toujours du feu dans sa chambre à coucher et dans son cabinet de toilette. Toutefois, ce soir-là il se retira de très-bonne heure, renvoya les domestiques qui le servaient, et ferma à double tour la porte de l’antichambre, la seule qui communiquât avec le corridor de l’hôtel.

Il prit sa tasse de thé, se baigna la tête dans de l’eau froide, et s’assit devant une table à écrire auprès du feu.

Mais son intention n’était pas d’écrire. Il se débarrassa du buvard, de l’encrier et des papiers qui encombraient sa table, et tira de sa poche les objets qu’il avait achetés dans l’après-midi. Il étala les peaux de chamois sur la table et les coupa en deux grandes bandes d’un pied de large.

Il prit avec ces bandes la mesure de sa taille, puis commença à les coudre lentement et laborieusement ensemble.

Cette besogne n’était pas facile et demanda un temps assez long au banquier pour arriver à un résultat satisfaisant. Il était minuit quand il eut fini de piquer les deux morceaux ensemble et l’un des bouts de la double ceinturé de chamois. Il laissa l’autre extrémité ouverte.

Quand il eut complété les deux côtés et le bout qu’il terminait, il tira quatre ou cinq petits sacs de toile de sa poche. Chacun de ces sacs était rempli de diamants non montés.

Un frisson de ravissement parcourut les veines du banquier lorsqu’il plongea ses doigts au milieu des pierreries étincelantes. Il prit à pleines mains les diamants et les fit tomber alternativement d’une main dans l’autre, semblables à un ruisseau lumineux. Puis, très-lentement et très-soigneusement, il laissa glisser les diamants par l’extrémité ouverte dans la ceinture de peau de chamois.

Lorsqu’il en eut ainsi introduit quelques-uns dans la ceinture, il piqua le cuir dans tous les sens, répartissant tout le long de la ceinture les pierres précieuses qu’il venait d’y faire entrer. Ce travail dura si longtemps, qu’il était quatre heures du matin lorsqu’il eut fait glisser le dernier brillant dans la ceinture. Il poussa un long soupir de soulagement lorsqu’il jeta les débris de cuir sur le feu presque éteint du foyer, et les regarda se consumer lentement en cendres noires. Alors il cacha la ceinture de chamois sous son oreiller et se mit au lit.

Dunbar retourna à Maudesley Abbey par le train express, le lendemain matin du jour où il avait terminé l’acquisition des diamants. Il portait la ceinture de peau de chamois serrée fortement autour de ses reins, sous son gilet de flanelle, de manière à défier les filous les plus émérites, alors même que cette honorable classe eût été informée des trésors que le banquier portait sur lui.

Il écrivit du comté de Warwick à l’un des meilleurs joailliers du West End, et demanda qu’une personne parfaitement expérimentée dans cette matière lui fût envoyée à Maudesley Abbey, munie des dessins et des modèles les plus nouveaux en colliers de diamants, boucles d’oreilles, etc.

Mais quand le commis du joaillier arriva, deux ou trois jours après, Dunbar ne put trouver aucun modèle qui lui convînt ; et l’homme s’en retourna à Londres sans avoir reçu aucune commande, et sans avoir même aperçu les diamants que le banquier avait achetés.

— Dites à votre patron que je garderai deux ou trois de ces modèles, — dit Dunbar en choisissant les dessins tout en parlant ; — et si, après un mûr examen, je trouve que l’un d’eux puisse me plaire, j’en donnerai avis à votre maison ; sinon, je porterai les diamants à Paris, et c’est là que je les ferai monter.

Le commis se hasarda à parler de l’infériorité du travail des ouvriers parisiens comparé à celui d’une maison de premier ordre d’Angleterre ; mais Dunbar ne condescendit même pas à donner quelque attention à la remarque du jeune homme.

— J’écrirai à votre patron en temps opportun, — dit-il froidement ; — bonjour.

Le Major Vernon était revenu à la Rose et la Couronne de Lisford. L’acte qui lui transférait la possession de Woodbine Cottage avait été rapidement dressé, et il y établit son domicile. Sa maison se composait d’une vieille femme de charge, qui avait été au service de feu l’amiral, et d’un jeune domestique à tout faire qui était le neveu de la femme de charge, et qui avait été également au service du dernier propriétaire du cottage.

Vernon était à même, de sa nouvelle demeure, de savoir tout ce qui se passait dans les deux grandes maisons du voisinage : Maudesley Abbey et Jocelyn’s Rock. Les paysans savent tout ce qui intéresse leurs voisins, et Mme Manders, la femme de charge, avait tous les moyens de communication possibles avec les deux châteaux, car elle avait une nièce qui était deuxième femme de chambre au service de Dunbar, et un petit-fils qui était palefrenier chez sir Philip Jocelyn. Rien ne pouvait plaire davantage au nouvel habitant de Woodbine Cottage, qui fut très-promptement en excellents termes avec sa femme de charge.

C’est d’elle qu’il apprit que le commis d’un joaillier était venu à Maudesley, et avait donné au millionnaire un portefeuille rempli de dessins.

— Et on ajoute, — continua Mme Manders, — que M. Dunbar a acheté pour près d’un demi-million de diamants, et qu’il est sur le point de donner à sa fille, lady Jocelyn, un écrin tel que la reine n’en a jamais vu. Mais M. Dunbar n’est pas un homme ordinaire et il est difficile de le contenter, à ce qu’il paraît, car le commis du joaillier a dit à Mme Grumbleton, au pavillon de l’ouest : « Votre maître est difficile à satisfaire, madame. » D’où Mme Grumbleton a compris qu’il n’avait pas reçu la commande de M. Dunbar.

Vernon sifflota tranquillement en réfléchissant, quand Mme Manders se retira après lui avoir donné ce renseignement.

— Vous êtes un homme très-habile, mon cher ami, — marmottait-il en allumant son cigare ; — vous êtes un homme prodigieux, mon cher garçon ; mais votre ami peut voir à travers des jalousies moins claires que l’affaire des diamants. C’est bien imaginé, bien net, pour dire le dernier mot, et je fais des vœux pour vous, mon cher ami ! Mais… vous me le payerez, Henry Dunbar.

Cette petite conversation, entre le nouveau propriétaire de Woodbine Cottage et sa femme de charge, avait lieu le soir même où Vernon prenait possession de sa nouvelle demeure. Le lendemain était un dimanche, un froid dimanche d’hiver. La neige tombait depuis trois jours et trois nuits ; elle était très-épaisse sur le sol ; les toits de chaume disparaissaient sous son épaisseur et elle formait de légers festons autour des branches dépourvues de feuillages, si bien que Lisford ressemblait à un de ces villages qui ornent les gâteaux des Rois en Angleterre. Pendant que les cloches des offices sonnaient dans cette atmosphère glaciale, Vernon ouvrit la porte basse et large de son charmant petit jardin et sortit sur la grande route.

Mais il ne se dirigea pas du côté de l’église. Vernon n’allait pas à l’église par cette belle matinée d’hiver. Il prit l’autre chemin, et piétina dans la neige, du côté de la porte occidentale du parc de Maudesley. Il y pénétra par une porte basse en fer, car il y avait un sentier d’amoureux dans cette partie du parc, ce même sentier que Philip Jocelyn avait parcouru à cheval si souvent en se rendant à Lisford durant l’automne.

Vernon pénétra dans ce sentier en suivant la trace de pas récents sur la neige épaisse, et prit ainsi de chemin de l’abbaye. Là, il trouva tout tranquille. Le valet de pied hautain qui le reçut dans le vestibule semblait indécis s’il devait le laisser pénétrer plus loin dans la maison.

M. Dunbar est en haut, — dit-il, — et il vient de finir de déjeuner, d’après ce que j’en puis juger, car on n’a pas encore desservi.

— Tant mieux, — répondit Vernon avec calme. — Vous pouvez apporter du café nouvellement fait, John, car je n’ai pas copieusement déjeuné ; et si vous voulez dire au cuisinier de m’accommoder une cuisse de dinde à la diable avec beaucoup de poivre de Cayenne et de jus de citron, il me fera plaisir. Vous n’avez pas besoin de vous déranger, je connais mon chemin.

Le Major ouvrit la porte conduisant aux appartements de Dunbar, et entra sans cérémonie dans le salon à tapisseries où il trouva le banquier assis à une table sur laquelle étaient un service à café en argent, une tasse et sa soucoupe en porcelaine de Saxe, et deux ou trois plats couverts qui prouvaient que Dunbar venait de déjeuner.

Des viandes froides, des pâtés et autres comestibles se trouvaient sur un dressoir en chêne sculpté.

Le Major s’arrêta un moment sur le seuil de la chambre et contempla son ami avec gravité.

— C’est très-confortable, — s’écria-t-il ; — pour dire le dernier mot, c’est très-confortable, mon cher ami.

Le cher ami ne sembla pas particulièrement flatté lorsque ses yeux se levèrent pour se reposer sur le visage du nouveau venu,

— Je pensais que vous étiez à Londres, — dit-il.

— Ce qui prouve combien peu vous vous inquiétez de ce qui a rapport à vos voisins, — répondit Vernon ; — car si vous aviez daigné condescendre jusqu’à vous occuper des faits et gestes de votre humble ami, on vous aurait appris qu’il avait acheté une propriété très-confortable dans les environs et qu’il s’était arrangé pour vivre respectablement en gentilhomme campagnard pour le reste de ses jours, en admettant toujours que la générosité de ses honorables amis le mette à même de faire la chose décemment.

— Voulez-vous dire par là que vous avez acheté une propriété dans ces parages ?

— Je suis, par bail emphytéotique, propriétaire de Woodbine Cottage, près de Lisford et de Shorncliffe.

— Avez-vous l’intention de vous établir dans le comté ?

— Oui, sans doute.

Dunbar se sourit à lui-même en entendant la réponse de son ami.

— Vous serez le très-bienvenu ici, — dit-il, — en ce qui me concerne du moins.

Le Major le regarda d’une façon inquisitoriale.

— Vos sentiments sont des plus généreux, mon cher ami ; mais je dois vous rappeler respectueusement que les dépenses nécessitées par la prise de possession de mon humble habitation ont été très-lourdes ; en bon anglais, les deux mille livres que vous m’avez avancées d’une façon si libérale, comme à-compte sur vos futures bontés, se sont fondues comme la neige par un dégel trop rapide. J’ai besoin de deux autres mille livres, ami de mon cœur ; qu’est-ce que mille livres de plus ou de moins pour le chef de la maison Dunbar, Dunbar et Balderby. Portez cela à deux mille cinq pendant que vous y êtes et votre serviteur priera toujours, etc., etc., etc. Allons, portez cela à deux mille cinq, prince de Maudesley !

Je n’ai pas besoin de narrer l’entrevue de ces deux hommes. Elle se prolongea assez longtemps, car dans cette camaraderie hétérogène, le Major Vernon avait beaucoup à dire pour lui-même. C’était seulement lorsqu’il se sentait hors de son élément et méconnu que le Major se drapait dans la dignité du silence comme dans un manteau mystique, et se retirait pendant ce temps-là du monde extérieur.

Il ne quitta pas Maudesley Abbey avant d’avoir réussi dans l’objet de sa visite, et il emporta dans son portefeuille des chèques s’élevant au chiffre de deux mille cinq cents livres.

— Je me flatte d’être arrivé au bon moment, — pensait le Major en s’en retournant à Woodbine Cottage, — car aussi sûr que je m’appelle de mon nom, mon ami songe à faire un coup… Oui, il songe à faire un coup, et l’argent que j’ai reçu aujourd’hui est le dernier que je recevrai jamais de ce côté-là.

Presque immédiatement après le départ du Major Vernon, Dunbar sonna le domestique qui remplissait, lorsqu’il était nécessaire, les fonctions de valet de chambre, ce qui n’arrivait pas souvent.

— Je partirai ce soir pour Paris, Jeffreys, — dit-il à cet homme. — J’ai envie de voir ce que les bijoutiers français peuvent faire avant de confier le collier de lady Jocelyn aux mains des ouvriers anglais. Je ne suis pas bien portant et j’ai besoin de changer d’air et de place. Donc je partirai pour Paris ce soir. Ne préparez qu’un petit portemanteau avec les choses les plus indispensables ; mais n’emballez pas les inutilités.

— Partirai-je avec vous, monsieur ? — demanda l’homme.

Dunbar regarda à sa montre et sembla réfléchir quelques instants avant de répondre à cette question.

— À quelle heure passent les trains pour Londres le dimanche ? — demanda-t-il.

— Il y a l’express venant du Nord qui s’arrête à Rugby à six heures, monsieur. Vous pourriez prendre celui-là, si vous partiez de Shorncliffe par le train de quatre heures trente-cinq minutes.

— Je le puis très-aisément, — répondit le banquier ; — il n’est que trois heures, faites d’abord mon portemanteau, Jeffreys, et donnez ordre que la voiture soit attelée à quatre heures moins un quart. Non, je ne vous emmène pas à Paris avec moi. Vous pourrez me suivre dans un ou deux jours avec le reste de mes bagages.

— Oui, monsieur.

Il ne se fit ni bruit ni confusion dans une maison organisée comme l’était celle de Dunbar. Le valet prépara le portemanteau et le nécessaire de voyage : la voiture tourna par l’allée sablée devant le perron à l’heure indiquée, et cinq minutes après Dunbar sortait du vestibule avec son pardessus étroitement boutonné sur sa large poitrine et une couverture de voyage en peau de léopard jetée sur son épaule.

Autour de sa taille il portait la ceinture de chamois qu’il avait faite de ses propres mains à l’Hôtel Clarendon. Cette ceinture ne l’avait jamais quitté depuis la nuit où il l’avait faite. La voiture le conduisit à la station de Shorncliffe ; il en descendit et se rendit à l’embarcadère. Bien qu’il ne fût pas encore cinq heures, le jour d’hiver s’éteignait dans le ciel gris, et, dans la station du chemin de fer, il faisait déjà nuit. Il y avait des lampes çà et là, mais elles ne produisaient que des lueurs indécises et indistinctes dans cette sombre atmosphère.

Dunbar parcourait lentement le quai de départ. Il était si profondément absorbé dans ses pensées qu’il tressaillit presque en s’entendant appeler vivement par un jeune homme qui s’était approché tout près de lui par derrière :

— Monsieur Dunbar ! — dit-il, — monsieur Dunbar !

Le banquier se retourna vivement et reconnut Lovell.

— Ah ! mon cher Lovell, c’est vous ; vous m’avez fait peur.

— Partez-vous par le premier train ? J’étais si désireux de vous voir !

— Pourquoi ?

— Parce qu’il y a ici quelqu’un qui est aussi désireux que moi de vous voir. Un de vos vieux amis, dit-il. Devinez-vous qui ce peut être ?…

— Je ne sais pas… je ne puis deviner… j’ai tant de vieux amis… Je ne puis voir personne, Lovell ; je suis très-malade. J’ai vu un médecin pendant mon séjour à Londres, et il m’a dit que j’avais le cœur malade, et que si je voulais vivre, je devais éviter toute agitation et toute émotion subite comme un poison mortel. Qui est-ce qui désire me voir ?

— Lord Herriston, le grand homme d’État anglo-indien ; c’est un ami de mon père, qui s’est montré charmant pour moi et qui m’avait offert un poste que j’ai trouvé plus sage de refuser. Il nous a beaucoup parlé de vous quand mon père lui a appris que vous habitiez Maudesley et il se serait empressé d’aller vous dire bonjour s’il n’avait pas craint de manquer le train. Vous allez le voir, n’est-ce pas ?

— Où est-il ?

— Ici, à la station… dans la salle d’attente ; il a visité le comté et il a déjeuné avec mon père en passant. Il se rend au Derby et il attend le train qui descend et qui doit le mener à la grande ligne. Vous allez venir le voir ?

— Oui… oui… je serai très-enchanté… je…

Dunbar s’arrêta tout à coup en portant la main à son côté ! La cloche avait sonné pendant que Lovell et le banquier étaient restés à causer sur le quai ; le train arrivait à la station au même moment.

— Je ne pourrai pas voir lord Herriston ce soir, — dit Dunbar vivement. Il faut que je parte par ce train, ou je perdrai un jour. Adieu, Lovell. Faites mes meilleurs compliments à Herriston ; dites-lui que j’ai été très-malade. Adieu.

— Votre portemanteau est dans le wagon, monsieur, — dit le domestique en lui indiquant la porte ouverte d’un compartiment de première classe.

Dunbar monta en voiture. En ce moment un vieux gentleman sortit de la salle d’attente.

— Est-ce là mon train, Lovell ? — demanda-t-il.

— Non, milord ; M. Dunbar est ici ; il part par ce train, vous aurez le temps de lui parler.

Le train se mettait en marche. Lord Herriston était un vigoureux vieillard. Il courut le long du quai en regardant dans les wagons.

Mais la vue du vieillard n’était pas aussi bonne que ses jambes. Il regarda vivement à travers les glaces des portières, mais il ne vit qu’un amas confus de lueurs de lampes vacillantes, de visages étrangers, de journaux dépliés entre les mains des voyageurs éveillés, et de têtes endormies qui étaient roulées et cahotées sur les côtés capitonnés des voitures.

— Mes yeux ne sont pas ce qu’ils étaient, — dit-il avec un rire de bonne humeur, lorsqu’il revint vers Lovell. — Je n’ai pas réussi à apercevoir mon vieil ami Dunbar.