Félix Alcan (p. 195-235).

La musique d’orchestre de Hændel comprend les 12 Concerti grossi (1740), les 6 Concertos de hautbois (1734), les Sinfonie de ses opéras et oratorios, et sa musique de plein air : Water Music (1715 ou 1717), Firework Music (1749), et Concerti a due cori.

Quoique Hændel soit, en art, un visuel, et que sa musique ait un pouvoir descriptif et évocateur, il ne fait qu’un usage restreint du coloris instrumental[1]. Cependant, il montre, à l’occasion, une curiosité raffinée dans l'emploi des timbres. Les deux oratorios écrits à Rome, quand il se trouvait dans la societé du cardinal Ottoboni et de ses grands virtuoses, le Trionfo del Tempo et la Resurrezione de 1708 sont d’une couleur fine et variée[2]. À Londres, il fut un des premiers à introduire les cors dans l’orchestre de l'Opéra[3]. Le premier, comme le dit M. Volbach, il dégage la personnalité expressive du violoncelle[4]. De l’alto, il sait tirer de curieux effets de demi-teintes indécises et troubles[5]. Il donne aux bassons un caractère lugubre et fantastique[6]. Il essaie d’instruments nouveaux : soit plus petits[7], soit plus grands[8]. Il emploie le tambour solo, d’une façon dramatique, pour le serment de Jupiter dans Semele. En certains cas, il demande aux timbres instrumentaux des effets, non seulement d’expression dramatique, mais d’exotisme et de couleur locale. Ainsi, dans les deux scènes des deux Cléopâtres, de Giulio Cesare (1724) et de Alexander Balus (1748)[9].

Mais quelque grand peintre que soit Hændel, ce n’est pas tant par l’éclat, la variété et la nouveauté du coloris, que par la beauté du dessin et les effets d’ombres et de lumières. Avec une palette volontairement restreinte, et en se satisfaisant de la grisaille des cordes, il arrive à produire des effets saisissants et nuancés. M. Volbach a montré[10] qu’il a moins recours à des instruments divers qu’à la division d’une même famille d’instruments en plusieurs groupes. Dans le morceau d’introduction de la seconde Esther (1732), les violons sont divisés en cinq groupes[11] ; dans la Resurrezione (1708), en quatre[12]. Les altos sont parfois divisés en deux, le deuxième étant renforcé par le troisième violon ou les violoncelles[13]. Et en revanche, Hændel, quand il le juge préférable, réduit ses forces instrumentales, supprime l'alto et le second violon, que remplace le clavecin. Tout son art de l'orchestre est dans le juste instinct d’équilibre et d’économie qui sait, avec des moyens très réduits, en ménageant certaines couleurs, obtenir des impressions aussi puissantes, quand ces couleurs apparaissent, que nos musiciens d’aujourd’hui, avec leur palette surchargée[14]. Rien n’est donc plus important, si l'on veut rendre exactement cette musique, que de ne point changer l'équilibre des proportions de l’orchestre, sous prétexte de l'enrichir et de le moderniser. Le pire défaut serait de lui enlever, par une surcharge inutile de couleurs, sa souplesse de nuances qui est son charme principal.

On s’imagine trop volontiers que la nuance est un privilège de l’art musical moderne, et que l’orchestre de Hændel ne connaissait que de grands effets d’opposition théâtrale entre la force et la douceur. Il n’en est rien. L’échelle des nuances de Hændel est extrêmement variée. On trouve chez lui le pianissimo, le piano, le mezzo piano, le mezzo forte, un poco più F., un poco F., forte, fortissimo. On ne voit pas marqués le crescendo et le decrescendo d’orchestre, qui n’apparaissent guère, expressément notés, qu’à partir de Jommelli[15], et de l'école de Mannheim. Mais il n’y a pas de doute que la pratique n’ait précédé depuis longtemps la notation[16]. Le président de Brosses écrivait en 1739, à Rome : « Les voix, ainsi que les violons, emploient ce clair-obscur, ce renflement insensible du son, qui augmente de force de note en note jusqu'au plus haut degré, puis revient à une nuance extrêmement douce et attendrissante. » Et les exemples abondent, chez Hændel, de vastes crescendi ou diminuendi, sans que cette expression se trouve marquée sur les partitions[17].

Un autre genre de crescendo et diminuendo sur une même note était très employé, au temps de Hændel ; et son ami Geminiani contribua à le mettre à la mode. M. Volbach, et, après lui, M. Hugo Riemann[18], ont montré que Geminiani emploie, dans les rééditions de ses premières sonates de violon, en 1739, et dans son école de violon, en 1751, les deux signes suivants :

Swelling the sound (enfler le son) [/].

Diminishing (falling) the sound (diminuer le son) [\].


\relative c'' {
\time 10/2
\override Staff.TimeSignature #'stencil = ##f
s1
\once \override TextScript #'extra-offset = #'(-1.5 . -2)
\grace e4^\markup \fontsize #8 {´}
s2
\once \override TextScript #'extra-offset = #'(-0.5 . -2.7)
d2^\markup \fontsize #8 {`}  
s1
\once \override TextScript #'extra-offset = #'(-1.5 . -1)
\grace a'4^\markup \fontsize #8 {´} 
s2
\once \override TextScript #'extra-offset = #'(-0.5 . -1.7)
g2^\markup \fontsize #8  {`} 
}

Comme l’explique Geminiani, « le son doit commencer doucement et s’enfler, d’une façon égale, jusqu’à moitié, puis de la décroître jusqu’à la fin. Le jeu de l’archet doit couler sans interruption. »

Il arrive même que, par un raffinement d’expression, qui deviendra un maniérisme de l’école de Mannheim, mais qui sera aussi la source des puissants contrastes beethoveniens, le swelling s’arrête court et fasse place à un piano subit, comme dans l’exemple suivant des sonates en trio de Geminiani :


\relative c'' {
\time 4/4
\key d \major
\partial 4*2
fis8( e) d\trill\( cis16 b\) | \stemDown a4.(^\markup \fontsize #8 \lower #3 {´} b8^\p) \stemNeutral d,4
}

Il est plus que probable que les virtuoses de l’orchestre de Hændel employaient aussi ces moyens d’expression[19], — sans que je croie pourtant que Hændel en ait usé aussi abondamment que Geminiani, ou que les symphonistes de Mannheim, dont le goût lui eût paru sans doute un peu mièvre et forcé. Mais ce qui est certain, c’est que pour lui, comme pour Geminiani, comme pour tous les grands artistes de son temps, surtout pour les Italiens et italianisants, la musique était un discours, et devait présenter des inflexions aussi libres et aussi variées que la parole même[20].

Comment cette souplesse d’élocution pouvait-elle être réalisée par l’orchestre ? — Il faut, pour le comprendre, se représenter la disposition d’un orchestre d’alors. Il n’était pas, comme aujourd’hui, centralisé dans la main d’un seul chef. Ainsi que le dit M. Seiffert[21], au temps de Hændel, c’était le principe de la décentralisation qui régnait. Les chœurs avaient leurs chefs, qui s’entendaient avec l’orgue, dont ils pouvaient suivre les signes, et qui soutenait les voix. L’orchestre était divisé en trois, à l’italienne : 1o le Concertino, comprenant un premier et un second violons et un violoncelle soli ; 2o le Concerto grosso, comprenant le chœur des instruments ; 3o les Ripienistes, fortifiant le grosso[22].

Un tableau, qui est au British Museum, et qui représente, dit-on, Hændel au milieu de ses musiciens[23], nous montre le compositeur assis au clavecin (un cembalo à deux claviers, dont le couvercle est enlevé). Il est encadré par le violoncelliste, placé à côté de lui à droite, deux violons et deux flûtes qui se tiennent devant lui, sous son regard. Les chanteurs solistes sont aussi auprès de lui, à sa gauche, debout près du clavecin. Le reste des instrumentistes est derrière lui : il ne les voit pas. Ainsi, ses ordres et ses clins d’œil gouvernaient le Concertino, qui transmettait à son tour la volonté du chef au Concerto grosso, et celui-ci aux Ripienistes. Au lieu de la discipline quasi militaire des orchestres modernes manœuvrant sous le bâton de mesure du chef, les divers rouages de l’orchestre hændelien se gouvernaient les uns les autres, avec élasticité ; et la rythmique incisive du petit cembalo mettait en branle la masse entière. Un tel système évitait la raideur mécanique de nos exécutions ; le danger eût été plutôt un certain flottement, sans la volonté puissante et contagieuse du chef, quand ce chef se nommait Hændel, et sans la sympathie de pensée qui s’établissait entre lui et ses intelligents sous-chefs du Concertino et du Grosso.

C’est cette élasticité qu’il faut tâcher de rendre aux œuvres instrumentales de Hændel, quand on les exécute aujourd’hui[24].

Et en premier lieu, à ses Concerti grossi[25]. Nulles œuvres de lui, qui soient plus célèbres et moins comprises. Hændel y attachait un prix particulier : car il les publia lui-même, par souscription, — moyen qui était usuel, à son époque, mais auquel il ne recourut que d’une façon exceptionnelle.

On sait que le genre du Concerto grosso, qui consiste essentiellement en un dialogue entre un groupe de solistes (le Concertino) et le chœur des instruments (Concerto grosso), auxquels se joint le cembalo[26], fut sinon inventé, du moins porté à sa perfection et rendu classique par Corelli[27]. Les œuvres et les disciples de Corelli l’avaient propagé en Europe. Geminiani l’introduisit en Angleterre[28]. Et sans doute Hændel n’a-t-il pas été sans profiter de l’exemple de Geminiani, qui était son ami[29]. Mais il est beaucoup plus naturel de penser qu’il prit le Concerto grosso à sa source, à Rome, auprès de Corelli, pendant son séjour de 1708. Plusieurs de ses Concertos de l'op. 3[30] datent de 1710, 1716, 1722. Il en est même qui semblent remonter jusqu’au temps de son apprentissage à Hambourg : auquel cas il aurait pu avoir déjà connaissance de la manière de Corelli, grâce à la propagande de George Muffat, qui répandit de très bonne heure ce style en Allemagne[31]. Depuis Corelli, Locatelli[32], et surtout Vivaldi[33], avaient singulièrement transformé le Concerto grosso, en lui donnant volontiers un caractère de musique à programme[34], et en l'acheminant résolument vers la forme de la sonate en trois parties. Mais bien qu’on jouât du Vivaldi à Londres, des 1723, et que ses œuvres qui soulevèrent un enthousiasme général fussent certainement connues de Hændel, c’est toujours à Corelli qu’il se rattache de préférence ; et même il est, à certains égards, plus conservateur que lui. La forme de ses Concerti, dont le nombre des mouvements varie de quatre à six, oscille entre la suite, la sonate, voire même la Sinfonia (ouverture). C’est ce dont le blâmeront les théoriciens. Et c’est ce dont je le louerai. Car il n’a pas cherché à imposer un cadre uniforme à sa pensée ; mais il a laissé celle-ci se façonner le cadre dont elle avait besoin ; et ce cadre varie, comme elle, suivant les passions et les jours.

La spontanéité de cette pensée, qui nous est déjà révélée par l’extrême rapidité avec laquelle ces Concerti ont été composés, — chacun en un seul jour, d’un seul trait, et plusieurs par semaine[35], — fait le charme de ces œuvres. Ce sont, suivant le mot de M. Kretzschmar, de grands Stimmungsbilder (des peintures d’impressions), traduits en une forme précise et souple, où le moindre changement d’émotion peut se faire sentir. Certes, elles ne sont pas toutes d’égale valeur ; le fait même qu’elles sont sorties de l'inspiration d'un moment est cause de leur extrême inégalité. Il faut bien reconnaître que le 7e Concerto par exemple (en si majeur), et les trois derniers, sont d’un intérêt médiocre[36]. Ce ne sont pas d’ailleurs ceux qu’on joue le moins. Mais si l'on veut être juste, il faut aller droit aux chefs-d’œuvre, et avant tout, au second Concerto en fa majeur, que je nommerai le Concerto Beethovenien : car on y trouve un peu de l'âme du maître de Bonn. Pour M. Kretzschmar, l'ensemble évoque une belle journée d’automne, — le matin, où le soleil lutte encore contre quelques nuages, — l’après-midi, la joyeuse promenade, le repos dans la forêt, — enfin le retour heureux et attendri. Il est difficile, en effet, de ne pas avoir, en l'écoutant, des impressions de nature. Le premier andante larghetto, qui fait songer par moments à la Symphonie Pastorale, est la rêverie d’un beau jour ; l'âme se laisse bercer par les murmures des choses, s’engourdit, et s’endort. La tonalité flotte de fa majeur à si ♭ majeur et à sol mineur. Pour bien rendre ce morceau, il faut prendre tout son temps, ralentir souvent, suivre sans hâte la rêverie en son mol abandon.

{
\language "italiano"
\relative do'' {
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    <<
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      \tempo "Andante larghetto" 4 = 76
      \key fa \major
      
      \partial 8 fa8 \mf |
      mi fa re \( mi16 fa32 sol \) do,4. sib8 \( |
      sib \) la16 \( sib \) sol8 la16.\trill \( sib32\f \) la4 r8\mf fa'
      \break
      mi fa16 \( mi \) re8 sol do,4. la'16 \( sol \) |
      fa8 mi16 \( re \) re8.\trill do16 \f << {do8 sol'\p la,( si)\trill_( } {s4 s8.\grace {la16 si)}} >>
      \break
      do2( do8) sol' re( << {mi\trill)_(} {s16 \grace {re mi)}} >> |
      fa8( << { sol\trill)_( } {s16 \grace {fa sol)}} >>
      la8 << { si\trill)_( } {s16 \grace {la si)}} >> do4. do8
      \break
      si do la si16( do32 re) sol,4
    }
    \new Staff {
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      \key fa \major
      \partial 8 la,8 |
      sol do fa, sib( sib) la16( sol) fa8 sib |
      do,8 fa4 mi 8 fa4 r8 la8
      \break
      sol do fa, sib( sib) la16( sol) la8. la16 |
      si8 do4 si8 do4 r4
      \break
      r8 sol' la,( << { si\trill)_( } {s16 \grace {la si)}} >> do2( |
      do2)( do8) sol' fa( << { mi\trill)_( } {s16 \grace {re mi)}} >>
      \break
      re8 sol do, fa( fa) mi16 re do4
    }
    \new Staff {
      \set Staff.midiInstrument = #"cello"
      \key fa \major
      \clef "bass"
      \partial 8 fa,,8\mf | 
      do' la sib sol la do, re  sol |
      mi fa si, do fa,4\f r8\mf fa'	
      \break
      do' la sib sol la mi fa do |
      re mi16( fa) sol8 sol, do16\f( do')\p mi,( do') fa,( do') sol( do)
      \break
      sib( do) mi,( do') fa,( do') sol( do) la( do) mi,( do') fa,( do') sol( do) |
      sib( do) mi,( do') fa,( do') sol( do) la( do) mi,( do') re,( do') do,( do')
      \break
      sol8 mi fa re mi4
      
    }
    >>
  }
}
}

\layout {
  ragged-last = ##t
}

L’allegro en ré mineur qui suit, est un jeu allègre et fin, un dialogue bondissant entre les deux violons soli du Concertino, puis entre le Concertino et le Grosso. Là encore, certains passages des basses, robustes et rustiques, rappellent la Pastorale.


\language "italiano"

\score {
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            \key fa \major
            s1 \break
            r16 fa, fa32 _( mi fa16 ) do fa do fa sol sol sol32 _( fa sol16 ) do, sol' do, sol' |
            \break
            r16 do do32 _( si do16 ) fa, do' sol do16 re re re32 _( do re16 ) si re sol, re' |
            mi4
          }
        }
        \new Voice {
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            \voiceTwo
            s1 | s1 |
            la4 s8
            \once \override NoteColumn.force-hshift = #1.0
            sol8 la s8 sol4
          }
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      >>
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          \clef "bass"
          fa16-. \mp fa-. fa32 ( mi fa16 ) do-. fa-. do-. fa-. sol-. sol-. sol32 ( fa sol16 ) do,-. sol'-. do,-. sol'-. |
          \break
          la8 do la do re4 mi 
          \break
          fa8 fa, la mi fa fa, sol sol' |
          \set stemLeftBeamCount = #0
          do, []
        }
      }
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          \clef "bass"
          fa8. fa16  do-. fa-. do-. fa-. sol8. sol16-. do,-. sol'-. do,-. sol'-.
          \break
          la4 r8 la sib sib, do do' 
          \break
          fa, fa la mi fa fa, sol sol' |
          \set stemLeftBeamCount = #0
          do, []
        }
      }
   >>
  }

\layout {
  \context {
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      \Score
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\header { tagline = ##f}

Le troisième morceau, un largo en si ♭ majeur, est une des pages instrumentales où Hændel a mis le plus de lui-même. Après sept mesures de largo, dans lesquelles le Concertino alterne rêveusement avec le tutti,

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  \language "italiano"
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          fa8. [ sol16 fa8. sol16 ] fa4 |
          re'8. \trill ^[ ( do16 ) re8. ( do16 ) ] fa4^! |
          sol,8. ^[  lab16 sol8. lab16 ] sol4 |
          sol'8. \trill ^[ ( fa16 ) sol8. ( mib16 ) ] sib'4^! |
        }
      }
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          \clef "treble" \key fa \major \time 3/4 |
          re8. \f _[ mib16 re8. mib16 ] re4 |
          sib'8. _\trill \mf _[ ( la16 ) sib8. ( fa16 ) ] re'4 |
          mib,8. \f _[ fa16 mib8. fa16 ] mib4 |
          mib'8. _\trill _[ ( re16 ) mib8. ( sib16 ) ] sol'4 |
        }
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    >> \new Staff <<
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        \relative do' {
          \clef "treble" \key fa \major \time 3/4 |
          fa8. [ sol16 fa8. sol16 ] fa4 |
          R2. |
          sol8. ^[  lab16 sol8. lab16 ] sol4 |
          R2. |
        }
      }
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          \clef "treble" \key fa \major \time 3/4 |
          re8. _[ mib16 re8. mib16 ] re4 |
          s2. |
          mib8. _[ fa16 mib8. fa16 ] mib4 |
          s2. |
        }
      }
    >> \new Staff {
      \set Staff.midiInstrument = #"cello"
      \relative la, {
        \clef "bass" \key fa \major \time 3/4
        sib4-! sib-! sib-! |
        R2. |
        sib4-! sib-! sib-! |
        R2. |
      }
    }
  >>
}

deux mesures adagio, langoureusement élargies, font tomber cette rêverie dans une sorte d’extase.

{
  \language "italiano"

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    \omit StaffGroup.SystemStartBracket
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      \set Score.tempoHideNote = ##t
      \tempo Adagio 4 = 70
      \relative do'' {
        \clef "treble" \key fa \major \time 3/4 |
        do16 \mf ( do'16 la16 fa16 mib16 ^[ do16 la16 fa16 ] ) mib8. (
        _\trill re32 mib32 )  |
        re2 \p r4
      }
    } \new Staff {
      \set Staff.midiInstrument = #"violin"
      \relative mib' {
        \clef "treble" \key fa \major \time 3/4 mib8 [ \mf ( do'8 la8 fa8 ] ) do8.
        ( _\trill sib32 do32 ) |
        sib2 \p r4
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    } \new Staff {
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      \relative la, {
        \clef "bass" \key fa \major \time 3/4 la2. \p |
        sib2 r4
      }
    }
  >>
}

Puis, un larghetto andante e piano égrène un chant mélancolique et tendre.

{
  \language "italiano"
  \new StaffGroup <<
    \omit StaffGroup.SystemStartBracket
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        \clef "treble" \key fa \major \time 3/4
        sib8-. \p ( sib-. sib-. sib-. sib-. sib-. ) |
        sib-. _[( sib-. ) la-. ( la-. la-. la-. )] |
        fa'-. ( fa-. fa-. fa-. fa-. fa-. ) |
      }
    }
    \new Staff {
      \omit Staff.TimeSignature
      \set Staff.midiInstrument = #"violin"
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        s2. |
        mib8-. ( mib-. mib-. mib-. mib-. mib-. ) |
        mib-. ( mib-. re-. do-. sib-. lab-. ) |
      }
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      \set Staff.midiInstrument = #"cello"
      \relative la {
        \clef "bass" \key fa \major \time 3/4
        sib8-. ( la-. sol-. fa-. mib-. re-. ) |
        do4 fa fa, |
        sib8-. ( fa'-. ) sib-. ( do-. ) re-. ( sib-. ) |
      }
    }
  >>
}

{
  \language "italiano"
  \new StaffGroup <<
    \omit StaffGroup.SystemStartBracket
    \new Staff {
      \set Staff.midiInstrument = #"violin"
      \omit Staff.TimeSignature
      \set Score.tempoHideNote = ##t
      \tempo 4 = 120
      \relative do'' {
        \clef "treble" \key fa \major \time 3/4
        fa8(-. fa-. mib-. re-. do-. sib)-. |
        la4 r8 re( do \trill) re( |
        do4) \trill r8 re( do \trill) re( |
        do) fa mi4. \trill fa8 |
        fa2.
      }
    } \new Staff {
      \set Staff.midiInstrument = #"violin"
      \omit Staff.TimeSignature
      \relative do'' {
        \clef "treble" \key fa \major \time 3/4
        sol8(-. sol-. sol-. fa-. mib-. re)-. |
        do4 r8 sib'( la \trill) sib( |
        la4) r8 sib( la \trill) sib( |
        la4) sib4. \trill la8 |
        la2.
      }
    } \new Staff {
      \set Staff.midiInstrument = #"cello"
      \omit Staff.TimeSignature
      \relative do {
        \clef "bass" \key fa \major \time 3/4
        mib8(-. re)-. do(-. re)-. mib(-. do)-. |
        fa(-. fa-. fa-. fa-. fa-. fa)-. |
        fa(-. fa-. fa-. fa-. fa-. fa)-. |
        fa4 sol4. \trill fa8 |
        fa2. |
      }
    }
  >>
}

Et le largo reprend. Il y a dans ce petit poème une mélancolie qui semble faire revivre des souvenirs personnels. — L’allegro ma non troppo qui termine, est au contraire d’une bonhomie joviale, toute beethovenienne encore ; il semble être chanté, comme en marchant, sur un rythme pizzicato en 3/4 très marqué.


{
  \language "italiano"
  \new StaffGroup <<
    \omit Score.BarNumber
    \omit StaffGroup.SystemStartBracket
    \new Staff {
      \set Staff.midiInstrument = #"violin"
      \set Score.tempoHideNote = ##t
      \tempo "Allegro ma non troppo" 4 = 130
      \relative do'' {
        \voiceOne
        \clef "treble" \key fa \major \time 3/4
        do4_! \mf la_! fa_! |
        re_! sib'_! sol_! |
        mi8 do do' sib la sol |
        la do, re mi fa sol |
        \break
        \voiceTwo
        la si do re mi do |
        fa mi re do si la |
        sol4 si re |
        sol8 mi fa re mi si |
        do mi fa4 la
      }
    } \new Staff {
      \set Staff.midiInstrument = #"cello"
      \relative do {
        \clef "bass" \key fa \major \time 3/4
        R2. |
        R2. |
        R2. |
        R2. |

        \voiceTwo
        \ottava #1
        \set Staff.ottavation = #"8"
        fa'4^! mi^! do^! |
        la^! fa'^! re^! |
        \voiceOne
        si8 sol sol' fa mi re |
        mi sol, la si do re |

        \ottava #0
        \voiceTwo
        do4^! la^! fa^! |
      }
    }
  >>
}
Au milieu de cette marche, s’élève une phrase des deux violons du Concertino qui est comme un hymne de gratitude pieuse et tendre.
{
\language "italiano"
\omit Score.BarNumber
\relative do'' {
  \time 3/4
  \new StaffGroup {
    \omit StaffGroup.SystemStartBracket
    <<
    \new Staff {
      \omit Staff.TimeSignature
      \set Staff.midiInstrument = #"violin"
      \key fa \major
      mi2.\mp \( | << fa^\trill { s2 s8 \grace { mi16 fa }} >> | sol2. | do,\) 
      \break
      la' \( | << sib^\trill { s2 s8 \grace { la16 sib }} >> | do2. | fa,\) 
    }
    \new Staff {
      \omit Staff.TimeSignature
      \set Staff.midiInstrument = #"violin"
      \key fa \major
      << { do4( do do) } \\ {  sol( sol sol) } >> |
      << { do( sib sib) } \\ { fa( fa fa) } >> |
      << { sib( sib sib) } \\ { do,( do do) } >> |
      << { sib'( la la) } \\ { do,( do do) } >>
      \break
      << { fa( fa fa) } \\ {  do( do do) } >> |
      << { fa( mib mib) } \\ { sib( sib sib) } >> |
      << { mib( mib' mib) } \\ { la,,( fa' fa) } >> |
      << { mib'( re re) } \\ { fa,( fa fa) } >>
    }
    \new Staff {
      \omit Staff.TimeSignature
      \set Staff.midiInstrument = #"cello"
      \key fa \major
      \clef "bass"
      do4 do do | re re re | mi, mi mi | fa fa fa
      \break
      fa fa fa | sol sol sol | la la la | sib sib sib
    }
    >>
  }
}
}

Le quatrième Concerto en la mineur n’est pas beaucoup moins intime, avec son larghetto affettuoso, qui doit être joué avec des rubato, des rallentando, des demi-pauses, — son allegro fugué, qui tranche et écrase tout sous sa marche puissante, — et, après un largo d’une gravité archaïque, l’allegro 3/4 qui termine, véritable dernier morceau de sonate beethovenienne, romantique, capricieux, emporté, et de plus en

plus vers la fin qu’il faut jouer dans un mouvement très libre, accelerando, presque prestissimo, enivré[37].

{
  \language "italiano"
  \new Staff {
    \set Staff.midiInstrument = #"violin"
    \omit Score.BarNumber
    \set Score.tempoHideNote = ##t
    \tempo Allegro 4 = 135
    \relative do'' {
      \clef "treble" \time 3/4 |
      r4 r8 do ^. si \mf ( la ) |
      sold16 ( la si8 ) r re ^. do ( si ) |
      \stemUp la16 ( si do8 ) r \stemNeutral mi ^. re ( do )
      \break |
      si16 ( do re mi ) fa8 do ^. si ( la ) |
      sold4 r8 mi' ^. fa \mp ( mi ) |
      sol! ^. mi r mi ^. la ( dod, )
      \break |
      re16 ( mi ) fa8 r re ^. mi ( re ) |
      fa-! re r re sol ( si, ) |
      do16 ( re mi8 ) r la, sib ( la )
      \break |
      do-! la r la sib ( la ) |
      mi'-! la, r la sib( la ) |
      fa'-! mi r do' mi, ( red
      \break |
      mi16 fad ) sold ( la ) si8
      re,!  do ( si ) |
      la16 ( si do re ) mi8 \ff
      re, do si
      |
      la4
    }
  }
}

Mais on doit lire surtout le sixième Concerto en sol mineur, le plus célébre de tous, à cause de sa magnifique musette. Il débute par un beau larghetto, plein de cette mélancolie, qui est un des sentiments dominants de Hændel, et des moins remarqués : Mélancolie, au sens de la Malinconia de Dürer ou de Beethoven, — moins trouble, mais aussi profonde. Nous l’avons déjà rencontrée dans le second, dans le troisième, dans le quatrième Concerto. Ici, elle s’exprime en un monologue élégiaque, que coupent des points d’orgue,


{
  \language "italiano"
  \new StaffGroup <<
    \omit StaffGroup.SystemStartBracket
    \new Staff {
      \set Staff.midiInstrument = #"violin"
      \tempo "Largo affetuoso" 4 = 60
      \set Score.tempoHideNote = ##t
      \override Stem.neutral-direction = #up
      \relative do'' {
        \clef "treble" \key sol \minor \time 3/2
        r2 sol \p sib 4.( la8) |
        la1 re2~ |
        re do2.( \f re4) |
        sib2 la \p r2 |
      }
    } \new Staff {
      \set Staff.midiInstrument = #"violin"
      \override Stem.neutral-direction = #up
      \relative do' {
        \clef "treble" \key sol \minor \time 3/2
        r2 << sib re >> << re sol >> |
        re( la') sib |
        sol1 sol2 |
        sol fad r |
      }
    } \new Staff {
      \set Staff.midiInstrument = #"cello"
      \relative do {
        \clef "bass" \key sol \minor \time 3/2
        sol1 \p sol'2~ ( |
        sol2 fa) re |
        mib1. \f |
        \override Stem.neutral-direction = #up
        re2 re, \p r |
      }
    }
  >>
}

puis en des dialogues du Concertino et du tutti, se répondant comme des groupes de chœurs antiques. L’Allegro ma non troppo, fugué, qui suit, sur un thème chromatique et tourmenté, est dans la même couleur sombre ; mais la marche volontaire de la fugue discipline les ombres fantasques.



{
  \language "italiano"
  \new StaffGroup <<
    \omit StaffGroup.SystemStartBracket
    \omit Score.BarNumber
    \new Staff {
      \set Staff.midiInstrument = #"violin"
      \accidentalStyle neo-modern
      \tempo "Allegro ma non troppo" 4 = 130
      \set Score.tempoHideNote = ##t
      \relative do'' {
        \clef "treble" \key sol \minor \time 4/4
        fa2-! \mf fad4-! fa-! |
        sib,-! si-! do-! re-! |
        mib4. re16 do re8 sol, sol'4 ~|
        \break % suite page suivante

        sol8 fa fa sol la la, la'4~ |
        la8 mib re do sib sol'4( fad8)	 |
        sol re re mi fa4. sol8 |
        mib4.( re8) re2 |
        \break
        r8 sib' la sol la la, re mib |
        fa lab sol fa mi4 re |
        r8 sol sol lab sib sib, sib do16 sib
      }
    } \new Staff {
      \set Staff.midiInstrument = #"violin"
      \override Stem.neutral-direction = #up
      \relative do'' {
        \clef "treble" \key sol \minor \time 4/4
        R1 | R1 | R1 | % suite page suivante
        
        re2-! \mf dod4-! do-! |
        fa,-! fad-! sol-! la-! |
        sib4.-! la16 sol la8 re, re'4~ |
        re8 sol, do4~ do8 do sib la |
        si4 mib2 re4~ |
        re re, sol8 do4( si8) |
        do4. mib8 re re re mi |
      }
    } \new Staff {
      \set Staff.midiInstrument = #"cello"
      \relative do {
        \clef "bass" \key sol \minor \time 4/4
        R1 | R1 | R1 | % suite page suivante
        
        R1 | R1 | R1 | R1 |
        sol'2-! \mf fad4-! fa-! |
        sib,-! si-! do-! re-! |
        \override Stem.default-direction = #up
        mib4.-! re16 do re8 sol,
        \override Stem.default-direction = #down
        sol'4 |
      }
    }
  >>
}

Et c’est alors ce larghetto 3/4 en mi ♭ majeur, que Hændel appelait Musette, et qui est une des plus lumineuses visions de bonheur pastoral[38]. Toute une journée aux épisodes poétiques et capricieux se déroule sans hâte sur le beau

refrain bourdonnant :

{
  \language "italiano"
  \new StaffGroup <<
    \omit StaffGroup.SystemStartBracket
    \omit Score.BarNumber
    \new Staff {
      \set Staff.midiInstrument = #"violin"
      \accidentalStyle neo-modern
      \set Score.tempoHideNote = ##t
      \tempo Larghetto 4 = 64
      \relative do' {
        \clef "treble" \key mib \major \time 3/4
        r4 \mf sol( lab) |
        sib4.( do8 sib4) |
        do16( re mib8~) mib2 |
        \break
        re16 do sib8~ sib2 |
        sol'4( fa) mib8.( fa16) |
        re4. do8 sib lab |
        sol4
      }
    } \new Staff {
      \set Staff.midiInstrument = #"cello"
      \relative do {
        \clef "bass" \key mib \major \time 3/4
        mib2( fa4) |
        sol( mib2) |
        mib,2.~ |
        mib2. |
        sol'4 do( lab) |
        fa2. |
        fa4
      }
    } \new Staff {
      \set Staff.midiInstrument = #"cello"
      \override Stem.neutral-direction = #up
      \relative do, {
        \clef "bass" \key mib \major \time 3/4
        mib2.~ |
        mib2.~ |
        mib2.~ |
        mib2.~ |
        mib4 lab( fa) |
        sib( do) re |
        mib mib,2
      }
    }
  >>
}

Tantôt le mouvement se ralentit, s’endort presque ; tantôt il devient pressant ; et c’est un fort et joyeux rythme, la marche en dansant de robustes jeunes hommes au beau corps.


{
  \language "italiano"
  \new StaffGroup <<
    \omit StaffGroup.SystemStartBracket
    \omit Score.BarNumber
    \new Staff {
      \set Staff.midiInstrument = #"violin"
      \accidentalStyle neo-modern
      \set Score.tempoHideNote = ##t
      \tempo 4 = 64
      \omit Staff.TimeSignature
      \relative do' {
        \clef "treble" \key mib \major \time 3/4
        r4 mib8( \mp fa) sol( mib) |
        lab16([ sib8.) lab16( sol8.) lab16( fa8.)]
      }
    } \new Staff {
      \set Staff.midiInstrument = #"violin"
      \omit Staff.TimeSignature
      \relative do'' {
        \clef "treble" \key mib \major \time 3/4
        r4 sol-.( sol-.) |
        sol fa8 mib fa4 |
      }
    } \new Staff {
      \set Staff.midiInstrument = #"cello"
      \omit Staff.TimeSignature
      \stemUp
      \relative do {
        \override Script.script-priority = #-100
        \clef "bass" \key mib \major \time 3/4
        r4 mib-.( mib-.) |
        do re sib |
      }
    }
  >>
}

{
  \language "italiano"
  \new StaffGroup <<
    \omit StaffGroup.SystemStartBracket
    \omit Score.BarNumber
    \new Staff {
      \set Staff.midiInstrument = #"violin"
      \set Score.tempoHideNote = ##t
      \tempo 4 = 64
      \omit Staff.TimeSignature
      \relative do'' {
        \clef "treble" \key mib \major \time 3/4
        sol16([ lab8.) sol16( fa8.) sol16( mib8.)] |
        fa16([ mib8.) re16( do8.) re16( sib8.)] |
        mib4 sol~ sol |
        \break
        sol fa8( mib) fa4~ |
        fa sib, mib |
        do sib-.( sib-.) |
        mib
      }
    } \new Staff {
      \set Staff.midiInstrument = #"violin"
      \omit Staff.TimeSignature
      \relative do' {
        \clef "treble" \key mib \major \time 3/4
        fa4 sib, mib |
        do sib sib |
        sib16[ re8. mib16 fa8. sol16 mib8.] |
        lab16[ sib8. lab16 sol8. lab16 fa8.] |
        sol16[ lab8. sol16 fa8. sol16 mib8.] |
        fa16[ mib8. re16 do8. re16 sib8.] |
        mib	4
      }
    } \new Staff {
      \set Staff.midiInstrument = #"cello"
      \omit Staff.TimeSignature
      \stemUp
      \relative do {
        \clef "bass" \key mib \major \time 3/4
        mib4-.( mib-.) do |
        lab sib-.( sib-.) |
        sol mib mib' |
        do re sib |
        mib-.( mib-.) do |
        lab sib-.( sib-.) |
        sol
      }
    }
  >>
}

Au milieu de cette peinture, s’introduit un épisode en ut mineur, agreste et bondissant.


{
  \language "italiano"
  \new StaffGroup <<
    \omit StaffGroup.SystemStartBracket
    \omit Score.BarNumber
    \new Staff {
      \set Staff.midiInstrument = #"violin"
      \set Score.tempoHideNote = ##t
      \tempo "Un poco più allegro" 4 = 70
      \omit Staff.TimeSignature
      \relative do'' {
        \clef "treble" \key mib \major \time 3/4
        do8 \f sol' mib fa16 sol do,8 sol' |
        si, do16 re sol,8 sol' re fa |
        mib16 sol fa sol mib sol fa sol do,8 sol'
      }
    } \new Staff {
      \set Staff.midiInstrument = #"violin"
      \omit Staff.TimeSignature
      \relative do' {
        \clef "treble" \key mib \major \time 3/4
        mib4 sol8 sol' mib16 fa sol8 |
        \stemDown
        re 4 re,8 re' si16 do re8 |
        \stemNeutral
        mib4 do sol |
      }
    } \new Staff {
      \set Staff.midiInstrument = #"cello"
      \omit Staff.TimeSignature
      \stemUp
      \relative do'{
        \clef "bass" \key mib \major \time 3/4
        \stemDown
        do4 do, mib |
        sol si sol |
        do4. re8 mib4 |
      }
    }
  >>
}

{
  \language "italiano"
  \new StaffGroup <<
    \omit StaffGroup.SystemStartBracket
    \omit Score.BarNumber
    \new Staff {
      \set Staff.midiInstrument = #"violin"
      \set Score.tempoHideNote = ##t
      \tempo "" 4 = 70
      \omit Staff.TimeSignature
      \relative do'' {
        \clef "treble" \key mib \major \time 3/4
        do16 lab' sol lab do, lab' sol lab fa sol mib fa |
        re fa mib fa re fa mib fa sib, fa' mib fa |
        \break
        sib, sol' fa sol sib, sol' fa sol mib fa re mib |
        do mib do mib re mib do mib re mib do mib |
        \break
        fa lab  sol lab fa sol mib fa re mib do re |
        si re do re si re do re sol, sol' fa sol |
        \break
        mib sol fa sol re sol fa sol do, sol' fa sol |
        si, sol' fa sol re sol fa sol mib8 sol |
        lab8( fa) mib4( re8.) do16 |
        do4
      }
    } \new Staff {
      \set Staff.midiInstrument = #"violin"
      \omit Staff.TimeSignature
      \override Stem.neutral-direction = #up
      \relative do' {
        \clef "treble" \key mib \major \time 3/4
        fa4 r8 do' lab fa |
        sib4 fa r |

        mib4 r8 sib' sol mib |
        lab4 mib r |

        lab r8 lab fa re |
        sol4 re r8 re' |

      \override Stem.neutral-direction = #down
        sol,4 sol' fa, |
        re' sol, r8 mib' |
        do4 do( si) |
        do
      }
    } \new Staff {
      \set Staff.midiInstrument = #"cello"
      \accidentalStyle neo-modern
      \omit Staff.TimeSignature
      \stemUp
      \relative do'{
        \clef "bass" \key mib \major \time 3/4
        \stemDown
        lab4 fa' r |
        sib,4. do8 re4 |

        sol, mib' r |
        lab,4. sib8 do4 |

        fa, re' r |
        sol,4. la8 si4 |
        do sib lab |
        sol si do |
        fa, sol( \stemUp sol,) do
      }
    }
  >>
}

Puis le large motif du début reprend, avec son refrain de joie sereine, sourire de la nature[39].

De telles œuvres sont bien des peintures en musique. Pour les comprendre, il ne suffit pas de bonnes oreilles, il faut des yeux pour voir,

et un cœur pour sentir[40].

Les Sinfonie (ouvertures) d’opéras et d’oratorios de Hændel sont extrêmement variées, bien que la forme lullyste y prédomine[41]. Cette forme consiste, comme on sait, en un premier mouvement lent, grave, pompeux, suivi d’un second mouvement rapide, saccadé, et d’ordinaire fugué, avec retour du premier mouvement grave pour finir. Elle apparaît dès l’Almira de 1705 ; et Hændel, qui l’emploie, avec quelques variantes, dans ses plus célèbres œuvres de la maturité, comme le Messie et Judas Macchabée, y a encore recours dans son dernier ouvrage, le Triumph of Time de 1757. Mais il ne s’astreint pas à cette forme unique. La Sinfonia de Rodrigo (1707) ajoute à l’ouverture lullyste un Balletto à l’italienne, véritable Suite de danses : gigue, sarabande, « matelot », menuet, bourrée, menuet, grande passacaille. L’ouverture du Trionfo del Tempo de 1708 est un brillant concert où le Concertino et le Grosso dialoguent de la façon la plus vive et la plus gracieuse. L’ouverture du Pastor fido (1712) est une Suite en huit parties. Celle de Teseo (1713) comprend deux largos suivis chacun d'un badinage en style d’imitation. Celle de la Passion nach Brockes (1716) consiste en un seul allegro fugué[42], qui s’enchaîne au premier chœur par l’intermédiaire d’un solo déclamé du hautbois[43]. L’ouverture d’Acis et Galatée (1720) est aussi en un seul morceau. L’ouverture de Giulio Cesare (1724) s’enchaîne au premier chœur, qui en forme le troisième morceau, le menuet. L’ouverture d’Atalanta (1736), d’une allégresse admirable, semble une suite instrumentale de fête, comme la Fireworkmusic, dont je parlerai plus loin. L’ouverture de Saul (1738) est un vrai concerto pour orgue et orchestre ; et la forme sonate s’annonce dans le premier mouvement. — Il y a donc effort très marque chez Hændel, surtout dans sa jeunesse, pour varier, d’une œuvre à l’autre, les formes de l’ouverture.

Même lorsqu’il emploie le type de l’ouverture lullyste — (et il semble s’y décider de plus en plus, dans sa maturité), — il la transforme par l’esprit. Il ne lui laisse pas son caractère purement décoratif ; il y introduit des intentions expressives et dramatiques[44]. Si l’on ne peut dire que la splendide ouverture d’Agrippina (1709) soit déjà une ouverture à programme, combien elle est dramatique ! Le second morceau bouillonne de vie ; ce n’est plus un divertissement érudit, un jeu étranger à l’action ; il a un caractère tragique, et la réponse de la fugue est apparentée au motif sévère et un peu inquiet du premier morceau. Pour la conclusion, le mouvement lent est ramené par un solo de hautbois qui déclame d’une façon pathétique, comme certains récitatifs de J.-S. Bach.


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On a voulu voir dans les trois morceaux[45] de l’ouverture d’Esther (1720) tout un programme, que Chrysander détaille ainsi : 1° la méchanceté de Haman ; 2° les plaintes d’Israël ; 3° la délivrance. Je me contenterai de dire que l’ensemble de la Sinfonia est dans la couleur et l’esprit de la tragédie. — Mais il n’est plus possible de douter, pour l’ouverture de Debora, ou pour celle de Belsazar, que Hændel n’ait voulu y traduire un programme. Car sur les quatre morceaux de l’ouverture de Debora, le second est repris plus loin comme chœur des Israélites, le quatrième comme chœur des prêtres de Baal. Ainsi, dès les premières pages, est nettement posée dans l’ouverture la dualité des peuples, dont l’antagonisme fait le sujet du drame[46]. Il semble bien aussi que l’ouverture de Belsazar veuille peindre l’orgie de la fête de Sesach et l’apparition de la main divine qui écrit les mots de feu. En tout cas, les intentions dramatiques sont évidentes : à trois reprises, le flot désordonné de l’orchestre est coupé par des accords piqués, piano ; et dans le silence soudain s’élèvent trois mesures graves et piano, comme un chant religieux[47].


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Enfin, il est une dernière catégorie d’œuvres instrumentales, auxquelles il ne semble pas que les historiens prêtent assez d’attention, et où Hændel se montre pourtant un précurseur et un modèle : c’est la musique de plein air.

Elle tenait une grande place dans la vie anglaise. Aux portes de Londres, abondaient les jardins, où, comme disait déjà Pepys, les concerts de voix et d’instruments se mariaient au concert des oiseaux. À Vauxhall, au Sud de Lambeth Palace, sur la Tamise, — à Ranelagh, près de Chelsea, à deux milles de la ville, — à Marybone (ou Mary-le-Bone) Garden, on donnait des concerts ; et Hændel y fut toujours goûté. Dès 1738, le propriétaire de Vauxhall, Jonathan Tyers, faisait élever dans ses jardins la statue de Hændel ; et, à peine parus, les Concerti grossi furent des morceaux préférés, aux concerts de Marybone, de Vauxhall et de Ranelagh. Burney les y entendit souvent jouer par de nombreux orchestres. Hændel écrivait des morceaux spécialement destinés à ces concerts dans les jardins. Il y attachait peu d’importance, en général : c’étaient de petites Sinfonie ou des danses sans prétention, comme la Hornpipe, composed for the concert at Vauxhall, 1740[48]. Une anecdote, rapportée par Pohl et par Chrysander, montre Hændel plaisantant lui-même sur cette musique qui ne lui avait pas coûté grand’peine.

Mais il composa, dans ce genre, des œuvres de plus vaste envergure : dès 1715 ou 1717, la fameuse Water Music, écrite pour une promenade du Roi sur la Tamise[49], — et la Firework Music, faite pour illustrer, si l’on peut dire, le feu d’artifice tiré à Green Park, le 27 avril 1749, en l’honneur de la paix d’Aix-la-Chapelle[50].

La Water Music est une grande sérénade en forme de Suite, comprenant plus de vingt morceaux. Elle débute par une ouverture pompeuse d’opéra ; puis commencent des dialogues en échos des cors et des trompettes, ou des cuivres et du reste de l’orchestre, qui font comme deux orchestres qui se répondent. Viennent ensuite des chants insouciants et confortables, des danses, une bourrée, une Hornpipe, des menuets, des airs populaires, qui alternent et contrastent avec les fanfares joyeuses et puissantes. L’orchestre est à peu près le même que celui d’une Sinfonia habituelle, à part l’importance considérable qu’y prennent les cuivres ; on trouve encore dans cette œuvre quelques morceaux écrits en style da camera ou en style de théâtre.

Avec la Firework Music, le caractère de musique de plein air s’affirme nettement, tant par le style large des morceaux que par l’instrumentation qui ne comprend que des instruments à vent[51]. La composition se divise en deux parties : une ouverture, qui devait être jouée avant le grand feu d’artifice, et une suite de petits morceaux qui étaient joués pendant la fête, et qui correspondaient à certains jeux d’artifice allégoriques. L’ouverture est une sorte de marche pompeuse, en ré majeur, qui n’est pas sans analogies avec l'ouverture du Ritterballet de Beethoven, et qui, comme elle, est joyeuse, chevaleresque et sonne bien. Les petits morceaux comprennent une bourrée, un largo alla Siciliana, intitule la Paix[52], d’une belle grâce héroïque, qui se berce et s’endort ; un allegro très gai, intitulé la Réjouissance ; et deux menuets, pour finir. — C’est là une œuvre curieuse à étudier pour nos organisateurs de fêtes populaires et de spectacles en plein air[53]. Si l'on remarque qu’après 1740, Hændel n’a guère écrit, en fait de musique instrumentale, que la Firework Music et les deux Concerti monumentaux a due cori, on aura le sentiment que la dernière évolution de sa pensée et de son style instrumental l’amenait à une musique conçue par grandes masses, pour de vastes espaces et de vastes publics.

Il y avait toujours eu en lui une veine populaire. Je rappelais tout à l’heure les inspirations populaires dont sa mémoire était remplie, et qui vivifient ses oratorios. Son art, qui se renouvelait perpétuellement à ces sources rustiques, eut, de son temps, une popularité étonnante ; certains airs d’Ottone, de Scipione, d’Arianna, de Berenice, et de tels autres opéras, étaient répandus et vulgarisés non seulement dans tout le pays anglais[54], mais à l’étranger, et même en France, si réfractaire aux influences du dehors[55].

Mais ce n’est pas seulement de cette popularité un peu banale que je veux parler, quoiqu’elle ne soit pas à négliger : — car il n’y a qu’un sot orgueil et un cœur rétréci qui dénient toute valeur d’art à l’art qui plaît aux humbles ; — ce que j’entends surtout par le caractère populaire de la musique de Hændel, c’est qu’elle est vraiment conçue pour tout un peuple, et non pour une élite de dilettantes, comme l’opéra français entre Lully et Gluck. Sans jamais se départir d’une forme souverainement belle, qui ne fait nulle concession à la foule, elle traduit, en un langage immédiatement accessible à tous, des sentiments que tous peuvent partager.

Ce génial improvisateur, astreint pendant toute une vie, — un demi-siècle de création, — à parler du haut de la scène à de grands publics mêlés, dont il fallait être sur-le-champ compris, était comme ces orateurs antiques, qui avaient le culte de la forme et l’instinct de l’effet immédiat et vivant. Notre époque a perdu le sens de ce type d’art et d’hommes : de purs artistes qui parlent au peuple et pour le peuple, non pour eux seuls et pour quelques confrères. Aujourd’hui, les purs artistes s’enferment chez eux ; et ceux qui parlent au peuple sont le plus souvent des bateleurs. La libre Angleterre du xviiie siècle était, dans une certaine mesure, parente de la République romaine ; et l’éloquence d’un Hændel n’est pas sans rapports avec celle des orateurs épiques, qui faisaient retentir de leurs périodes savantes et passionnées le Forum où s’écrasait la plèbe flâneuse et frémissante. Cette éloquence sut même, à l’occasion, se mêler à l’âme de la nation, comme aux jours de l’invasion jacobite, où Judas Macchabée incarna la patrie. Dès les premières exécutions d’Israël, certains des auditeurs avaient célébré la vertu héroïque de cette musique, qui peut soulever des peuples et mener les armées à la victoire.

Par cette puissance d’action populaire, comme par tant d’autres aspects de son génie, Hændel est de la robuste lignée de Cavalli et de Gluck. Mais il les dépasse. Seul, Beethoven a marché dans ses larges traces, et poursuivi la route qu’il avait ouverte.


  1. C’était l’esthétique de l’époque. Ainsi que le dit M. Mennicke, « la neutralité du coloris orchestral caractérise le temps de Bach-Hændel. L’instrumentation correspond à la registration de l’orgue ». L’orchestre symphonique est essentiellement constitué par les cordes. Les vents servent surtout en ripieno. Quand on use des bois obligés, c’est pour toute la durée d’un morceau, et non pour ajouter une touche de couleur çà et là.
  2. On trouve au milieu du Trionfo del Tempo une Sonata instrumentale pour 2 hautbois, 2 violons, viole, violoncelle, contrebasse et orgue. Dans l’air de la Madeleine de la Resurrezione, Hændel emploie 2 flûtes, 2 violons en sourdine, viola da gamba, et violoncelle ; le violoncelle fait au début un point d’orgue de 39 mesures, puis s’unit au clavecin ; au milieu de l’air, la viola da gamba et les flûtes concertent seules.
  3. Dans Radamisto (1720), air de Tiridate : Alzo al volo, et chœur final. — Dans Giulio Cesare, 4 cors.

    On a prétendu que Hændel fut un des premiers à faire usage des clarinettes dans l’orchestre; cela me paraît bien douteux. On s’appuie sur une copie de Tamerlano par Schmidt, où on lit : clar. e clarini (au lieu de cornetti, dans le manuscrit autographe). Mais il est à croire que, de même que pour les « clarinettes » employées par Rameau dans Acanthe et Céphise, il s’agissait de trompettes aiguës. — M. Streatfeild mentionne aussi un concerto pour deux « clarinettes » et corno di caccia, dont le manuscrit se trouve au Fitzwilliam Museum de Cambridge.

  4. Alcina, Semele, l’Allegro, la Fête d’Alexandre, la Petite Ode à sainte Cécile, etc. En général, il donne au violoncelle un caractère de désir amoureux, ou de consolation élégiaque.
  5. Ainsi, dans la fameuse scène qui ouvre le second acte de la Fête d’Alexandre, seconde partie de l’air, en sol mineur, évoquant la troupe des morts qui errent, la nuit, sans tombeau. Pas de violons, ni de cuivres : 3 bassons, 2 violes, violoncelle, contrebasses et orgue.
  6. Dans Saul, scène chez la sorcière, apparition de l’ombre de Samuel.
  7. Les violette marine (petites violes très douces), dans Orlando (1733).
  8. Les instruments monstrueux, essayés pour les exécutions colossales à Westminster. Le double basson de Stainsby, construit en 1727, pour les fêtes du couronnement. — Hændel emprunte au grand maître de l’artillerie les plus grosses timbales conservées à la Tour pour Saul et pour le Dettinger Te Deum. — Bien plus, comme Berlioz, il ne craint pas de faire usage, dans l’orchestre, des armes à feu. Mrs  Elisabeth Carter écrit : « Hændel a littéralement introduit des armes à feu dans Judas Macchabée ; et elles font bon effet. » (Carter Correspondence, p. 134.) Et Sheridan, dans une esquisse comique (Jupiter), représente un auteur qui ordonne de tirer un coup de pistolet derrière la scène, en disant : « Ceci, je l’emprunte à Hændel ».
  9. Pour la scène de l’apparition de Cléopâtre sur le Parnasse, au début de l’acte II de Giulio Cesare, Hændel a deux orchestres, l’un sur la scène : hautbois, 2 violons, viole, harpe, viola da gamba, théorbe, bassons, violoncelles ; l’autre dans la salle. — Le premier air de la Cléopâtre d’Alexander Balus est accompagné par 2 flûtes, 2 violons, viole, 2 violoncelles, harpe, mandoline, contrebasses, bassons et orgue.
  10. Fritz Volbach : Die Praxis der Hændel-Aufführung, 1899.
  11. Plus deux parties de flûtes, deux de hautbois, deux de bassons, violes, violoncelles et contrebasse, cembalo théorbe et harpe, orgue : en tout, quinze parties d’orchestre, pour accompagner la seule voix d’Esther.
  12. Pour le chant de l’ange.
  13. Dans Saul, « viola II per duoi violoncelli ripieni. » — Voir Volbach, ibid.
  14. Étudier, à ce point de vue, la progression des moyens instrumentaux, si simples, de la Fête d’Alexandre, où sont employés d’abord 2 hautbois avec les cordes, puis apparaissent successivement 2 bassons (air n° 6), 2 cors (air n° 9), 2 trompettes et timbales (2e  partie), et, pour finir, avec l'apparition éthérée de sainte Cécile, 2 flûtes.
  15. Le Dr  Hermann Abert a trouvé la première indication : crescendo il forte dans l’Artaserse de Jommelli, joué en 1749, à Rome. — Au xviiie siècle, l’abbé Vogler et Schubart avaient déjà attribué l’invention du crescendo à Jommelli.
  16. Voir Lucien Kamiénski : Mannheim und Italien (Sammelbände der I. M. G., janvier-mars 1909).
  17. M. Volbach note, dans l’ouverture de Die Wahl des Herakles, 2e  morceau : piano, mezzo forte, un poco più forte, forte, mezzo piano, piano, le tout en quatorze mesures. — Dans le chœur d’Acis et Galatée : « Klag’ und Wehgeschrei », on lit : forte, piano, pp. — L’introduction de Zadock le Prêtre présente un crescendo colossal ; le morceau d’introduction du chœur final de Debora, un grand diminuendo.
  18. H. Riemann : Zur Herkunft der dynamischen Schwellzeichen (I. M. G., février 1909).
  19. M. Carl Mennicke remarque justement le même signe du decrescendo (𝆓) sur une note longue, dans l’ouverture d’Acante et Céphise, de Rameau, en 1751.
  20. Geminiani dit du forte et du piano : « Ils sont absolument nécessaires pour rendre l’expression de la mélodie : car toute bonne musique devant être l’imitation d’un beau discours, ces deux ornements ont pour but de produire l’effet de la voix qui s’enfle et qui retombe en parlant. »

    Telemann écrit : « Le chant est le fondement de la musique, en toutes choses. Qui joue des instruments doit être tout à fait au courant du chant. »

    Et M. Volbach montre que ces principes régnaient alors en Allemagne, chez des musiciens de tout ordre, entre autres le trompettiste Altenburg, dont l’école de trompette avait pour base ce principe que l’exécution instrumentale doit être pareille à la parole chantée.

  21. Max Seiffert : Die Verzierung der Sologesänge in Hændels Messias. (Sammelbände der I. M. G., juillet-septembre 1907.)
  22. M. Fritz Volbach compte, pour le Concerto grosso, 8 premiers violons, 8 seconds, 6 altos, 4 à 6 violoncelles, 4 contrebasses, — et pour les Ripienistes, 6 premiers violons, 6 seconds, 4 altos, 3 à 4 violoncelles, 3 contrebasses.

    Ces chiffres sont notablement supérieurs à ceux des exécutions ordinaires de Hændel. Les comptes d’une exécution du Messie au Foundling Hospital, le 3 mai 1759, peu après la mort de Hændel, donnent seulement 56 exécutants, dont 33 instrumentistes et 23 chanteurs. Les instrumentistes se divisent en 12 violons, 3 altos, 3 violoncelles, 2 contrebasses, 4 hautbois, 4 bassons, 2 trompettes, 2 cors, et des timbales. (Voir Musical Times, mai 1902.)

  23. Ce tableau est reproduit dans l’article cité de M. Seiffert. (Sammelbände der I. M. G., juillet-septembre 1907, p. 688).
  24. « Leichtigkeit der Bewegung und Beweglichkeit des Ausdrucks », comme dit M. Volbach, (souplesse du mouvement et fluidité d’expression) : ce sont deux qualités essentielles, que réclame l’exécution des œuvres de Hændel.
  25. 12 Grands Concertos pour instruments à cordes et clavier (t. XXX de la grande édition), écrits du 29 septembre au 20 octobre 1739, entre la petite Ode à sainte Cécile et l’Allegro e Penseroso. Ils parurent en avril 1740. — Un autre recueil, dont nous parlerons plus loin, est connu sous le nom de Concertos de hautbois, et comprend 6 Concerti grossi (t. XXI de la grande édition). — M. Max Seiffert a publié une bonne édition pratique des Concertos (Breitkopf).
  26. Le concertino consiste en un trio de 2 violons et basse soli, avec cembalo obligé. Les Allemands introduisirent les bois dans le concertino, accouplant ainsi avec un violon, un hautbois ou un basson. Les Italiens restèrent fidèles, en général, au groupement des seuls instruments à cordes.
  27. Les Concerti grossi, op, 6, de Corelli, parus en 1712, représentent l’expérience de toute sa vie. Des 1682, George Muffat, passant à Rome, apprenait à y connaître le genre des Concerti grossi par Corelli, qui déjà en écrivait pour des masses instrumentales considérables. Burney parle d’un concert de 150 instruments à cordes, dirigés par Corelli chez Christine de Suède, en 1680. — (Voir l’excellent petit livre de M. Arnold Schering : Geschichte des Instrumentalkonzerts, 1905, Breitkopf.)
  28. Geminiani fit paraître trois recueils de Concertos : op. 2 (1732), op. 3 (1735), op. 7 (1748).
  29. M. Schering a montré la parenté qui existe entre un thème de Geminiani et le Concerto grosso n° 4 de Hændel.
  30. Tome XXI de la grande édition.
  31. Dès 1682, Muffat publie à Salzbourg son Armonico tributo, sonates de chambre, où il mêle la façon du trio lullyste à la manière du Concertino italien. Et en 1701, à Passau, il publie des Concerti grossi à l'italienne, d’après l’exemple de Corelli.
  32. Concerti grossi, Amsterdam, 1721.
  33. Antonio Vivaldi, de Venise (1680-1743), maitre de chapelle à l’Ospedale della Pietà de Venise depuis 1714, commença à être connu en Allemagne entre 1710 et 1720. Les arrangements que J.-S. Bach fit de ses Concerti grossi datent du temps où il était à Weimar, c’est-à-dire entre 1708 et 1714.
  34. Locatelli et Vivaldi subissaient l’influence de l’opéra italien. Vivaldi écrivit lui-même 38 opéras. Un des Concerti de Locatelli (op. 7, 1741) se nomme Il pianto d’Arianna. Dans le Cimento dell’Armonia de Vivaldi, quatre concertos décrivent les quatre Saisons, un cinquième peint La Tempestà, un sixième Il Piacere. Dans l’op. 10 de Vivaldi, un concerto représente la Notte, un autre il Cardellino (le chardonneret). Et M. Schering note l’influence de Vivaldi en Allemagne sur Graupner de Darmstadt, et sur Jos.-Gregorius Werner, en Bohème.
  35. Voici quelques dates :

    29 septembre 1739, Concerto I en sol majeur ; — 4 octobre, Concerto II en fa majeur ; — 6 octobre, Concerto III en mi mineur ; — 8 octobre, Concerto IV en la mineur ; — 12 octobre, Concerto VII en si ♭ majeur ; — 15 octobre, Concerto VI en sol mineur ; — 18 octobre, Concerto VIII en ut mineur ; — 20 octobre, Concerto XII en si mineur ; — 22 octobre, Concerto X en ré mineur ; — 30 octobre, Concerto XI en la majeur (t. XXX de la grande édition).

  36. On y sent des influences françaises, particulièrement dans le dixième Concerto en ré mineur, qui a une Ouverture (grave à 4 temps, et fugué à 6/8), et dont l’ensemble garde un caractère abstrait et saccadé. Le dernier des six morceaux, un allegro moderato à variations, assez joli, semble un air pour boîte à musique.
  37. Voyez encore le troisième Concerto en mi mineur, si vivant, avec son larghetto 3/2 mélancolique et serein, son andante 12/8 fugué, au thème compliqué, au dessin tourmenté, qui donne l’impression du labyrinthe de l’âme capricieuse et sombre, son allegro à quatre temps, d’un humour un peu bouffon, sa pittoresque Polonaise sur une pédale bourdonnante, et son allegro ma non troppo final en 6/8, dont le rythme et les modulations imprévues font penser à certaines danses des derniers quatuors de Beethoven.

    Le cinquième Concerto en ré majeur peut être appelé le Concerto de sainte Cécile : car trois des six morceaux (les deux premiers et le beau menuet final) se retrouvent dans l’ouverture de la petite Ode à sainte Cécile.

  38. M. Arnold Schering croit que l’idée de cette musette a été donnée à Hændel par une ritournelle de la S. Elena al Calvario de Leonardo Leo.
  39. Les deux derniers allegri finissent un peu brusquement l’œuvre. L’ordre des morceaux étonne souvent chez Hændel. C’est qu’il suit son caprice du moment.
  40. Nous ne pouvons insister ici sur l’analyse des autres recueils de Concertos d’orchestre. Je me contente de les énumérer :

    Les 6 Concerti grossi con due violini e violoncello di concertino obligati e due altri violini viola e basso di concerto grosso, op. 3, connus sous le nom de Concertos de hautbois, bien que le hautbois n’y joue pas un rôle prépondérant, ont paru en 1734, et semblent avoir été exécutés d’abord aux noces du prince d’Orange avec la princesse Anna, en 1733. Mais, comme nous l’avons dit, leur composition est antérieure : car non seulement on trouve dans le troisième et le cinquième des répliques de fugues des Clavierstücke, mais le quatrième servit en 1716 de deuxième ouverture à Amadigi, et le premier morceau du cinquième fut joué, en 1722, dans l’opéra Ottone. La forme de ces Concertos, encore moins fixe que celle des Concerti grossi précédents, oscille de deux à cinq morceaux ; et leur orchestration comprend, avec les cordes, 2 hautbois auxquels viennent s’ajouter parfois 2 flûtes, 2 bassons, l’orgue et le clavecin. Ce n’est que par exception que le hautbois a rôle de soliste ; le plus souvent, il ne sert qu’à renforcer les violons.

    À ce recueil, il faut ajouter un certain nombre d’autres concertos d’orchestre, parus à des époques différentes, et réunis dans le même volume des œuvres complètes (t. XXI) : — avant tout, le célèbre concerto de la Fête d’Alexandre, écrit en janvier 1736, dont le style participe à la carrure massive de l’oratorio, — et quatre petits concertos, dont deux ont cet intérêt d’être des œuvres de jeunesse, — de 1703 à 1710, suivant Chrysander.

  41. Ces ouvertures de Hændel étaient si goûtées que l’éditeur Walsh en fit un recueil pour clavier (65 ouvertures). — On trouvera un beau spécimen de ces transcriptions dans le tome xlviii de la grande édition.
  42. Les deux autres mouvements sont rudimentaires.
  43. Ce moyen est souvent employé par Hændel, pour servir de transition entre l’orchestre et le chant.
  44. Scheibe qui fut, avec Mattheson, le plus grand esthéticien musical de l’Alleraagne, pour l’époque de Hændel, dit que l’ouverture doit, dans ses deux premiers morceaux, « marquer le caractère principal de la pièce », et, dans le troisième morceau, préparer la première scène de la pièce. (Krit. Musikus, 1745.) — Scheibe lui-même composait, dès 1738, des Sinfonie, « qui exprimaient, en quelque sorte, le contenu des pièces » (Polyeuctes, Mithridates).
  45. Andante, larghetto, allegro fugué.
  46. Seulement, tandis qu’un compositeur moderne n’eût pas manqué d’exposer son programme d’une façon organique, en présentant tour à tour les deux thèmes rivaux, puis en les mettant aux prises, et enfin terminant par le triomphe du thème d’Israël, Hændel se contente d’exposer les deux thèmes, sans chercher à établir entre eux une progression. S’il termine l’ouverture par le thème de Baal, c’est que c’est un mouvement de gigue, et qu’une gigue est bien à sa place, pour finir ; au lieu que le chant d’Israël étant un choral adagio est mieux placé comme second morceau. Ce sont des raisons architecturales qui le guident, plutôt que des raisons dramatiques. Il en est de même pour presque tous les symphonistes du xviiie siècle. De la même façon, Beethoven encore, dans son Héroïque, fera mourir et enterrer son héros, au second morceau, et puis chantera ses jeux et ses triomphes, dans le troisième et le quatrième morceaux.
  47. Parmi les autres ouvertures, qui ont le caractère d’introductions à l’œuvre, je citerai l’ouverture d’Athalia, qui est en harmonie parfaite avec la tragédie, — celle d’Acis et Galatée, qui est une symphonie pastorale, évoquant la vie païenne de la nature, — celle de l’Occasional Oratorio, ouverture guerrière, avec deux marches, des appels de trompettes, une prière de détresse. — Il y a aussi l’ébauche d’un programme dans l’ouverture de Judas Macchabée dont le premier morceau se rapporte à la scène funèbre qui ouvre le premier acte, et dont le second morceau fugué est apparenté à un des chœurs belliqueux du premier acte.

    À l’ouverture de Riccardo I (1727), en deux morceaux, s’enchaîne une tempête en musique, peinte d’une façon puissante et romantique, qui ouvre le premier acte, à la façon de la tempête d’Iphigénie en Tauride, et sur les derniers grondements de laquelle commence un dialogue entre les héros.

    Enfin on trouve quelquefois, dans l’intérieur des pièces, d’autres Sinfonie qui ont un caractère dramatique. La plus frappante est celle qui ouvre le troisième acte d’Héraklès. Elle dépeint tour à tour la fureur d’Hercule et la grandeur triste du Destin qui s’appesantit sur l’âme.

  48. Tome xlviii des œuvres complètes.
  49. Voir plus haut, p. 86. — L’œuvre fut de bonne heure célèbre. Une première impression, très incorrecte et incomplète, parut vers 1720, à Londres, chez Walsh. On en fit aussi des réductions pour harpsicorde, avec variations par Geminiani. — La Watermusic, comme la Firework Music, est publiée dans le tome xlvii de la grande édition.
  50. On peut rattacher à ces musiques monumentales les Sinfonie diverse (p. 140-143 du vol. xlviii) et le Concerto en fa majeur, en forme d’ouverture et de suite (p. 68-100, ibid.), — mais surtout les 3 Concerti für grosses Orchester et les 2 Concerti a due cori du vol. xlvii (Instrumentalmusik für grosses Orchester). — Les Concerti für grosses Orchester ont été, pour ainsi dire, les cahiers d’esquisses de la Water Music et de la Firework Music. Le premier Concerto date d’environ 1715, et a fourni deux mouvements à la Water Music : il est écrit pour 2 cors, 2 hautbois, basson, deux violons, violes, basses. Le second Concerto, en fa majeur (pour 4 cors, 2 hautbois, bassons, 2 violons, viole, violoncelle, contrebasses et orgue), et le troisième Concerto en ré majeur (pour 2 trompettes, 4 cors, timbales, 2 hautbois, bassons, 2 violons, violes, violoncelle, orgue), contiennent déjà presque toute la Firework Music, avec un orchestre moins important, mais avec l’orgue en plus.

    Les deux Concerti a due cori sont faits avec de grands chœurs d’oratorios, transcrits pour double orchestre (dix parties d’orchestre pour le premier groupe, douze pour le second, 4 cors, 8 hautbois, bassons, etc.). Ainsi, l’apparition de Dieu dans Esther : « Jehovah, crown’d », et le chœur qui s’enchaîne : « He comes ». Il y a là des dialogues colossaux entre les deux orchestres.

  51. Le manuscrit autographe, publié dans le tome XLVII de la grande édition, comprend : 2 parties de trompettes, à 3 trompettes par partie : soit 6 trompettes ; 3 prinzipali (trompettes profondes) ; 3 timbales ; 3 parties de cors, à 3 par partie : soit 9 cors ; 3 parties de hautbois, à 12 pour la première partie, 8 pour la deuxième, 4 pour la troisième : soit 24 hautbois ; 2 parties de bassons, à 8 pour la première et 4 pour la seconde : soit 12 bassons. Au total : 70 instruments à vent. — Il y en eut 100, pour l'exécution du 27 avril 1749.

    Plus tard, Hændel reprit l’œuvre pour des concerts, en y ajoutant un orchestre à cordes.

  52. Écrit pour 9 cors en 3 parties, 24 hautbois en 2 parties, et 12 bassons.
  53. Il ne serait pas difficile d’y joindre d’autres œuvres analogues de Hændel et de Beethoven. Car il existe déjà un beau répertoire de musique classique populaire, pour des fêtes en plein air. Mais jusqu’ici, personne n’y a pris garde.
  54. L’air de la gavotte de l’ouverture d’Ottone fut joué dans toute l’Angleterre et sur tous les instruments, « depuis l’orgue jusqu’à la boëte au sel des bateleurs ». On le retrouve encore, à la fin du xviiie siècle, comme air d’une chanson-vaudeville française. (Voir l’Anthologie françoise ou Chansons choisies, éditées par Monnet, en 1765, t. i, p. 286). — La marche de Scipione, comme celle de Rinaldo, servit pendant un demi-siècle pour la parade de la garde royale. Les menuets des ouvertures d’Arianna et de Berenice resteront longtemps populaires. On voit dans les romans anglais du temps, et notamment dans le Tom Jones de Fielding, à quel point la musique de Hændel était répandue dans les campagnes anglaises, jusque chez des hobereaux aussi fermés à toute compréhension artistique que le légendaire squire Western.
  55. M. Paul-Marie Masson m’a signalé, dès la date de 1716, dans un Recueil d’airs sérieux et à boire (Bibl. Nat. Vm7 549), une Aria del Signor Inden (sic), « air ajouté au ballet de l’Europe Galante ». — Les Meslanges de musique latine, françoise et italienne, de Ballard, en 1728, contiennent, parmi les airs italiens, 2 Arie del signor Endel (p. 61). — Tous les airs de la Chasse du cerf de Séré de Rieux, en 1734, sont des airs de Hændel adaptés à des paroles françaises. — Un article de Michel Brenet : La librairie musicale en France de 1653 à 1790, d’après les registres de privilèges (Sammelbände de l’I. M. G. 1907) signale une série d’éditions françaises de Hændel aux dates de 1736, 1739, 1749, 1751, 1765. En 1736 et en 1743, on donna au Concert Spirituel quelques-uns de ses airs et de ses Concerti grossi. (Brenet : Les Concerts en France sous l’ancien régime, 1900.) Une quantité de ses airs furent arrangés pour flûte, par Blavet, dans ses trois Recueils de pièces, petits airs, brunettes, menuets, etc., accomodés pour les flûtes traversières, violons, etc., parus entre 1740 et 1750. — Hændel était assez populaire à Paris pour qu’on y vendît son portrait, en 1739. (Voir une annonce de marchand publiée par le Mercure de France, juin 1739, t. II, p. 1384.)