Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/famille s. f.

Administration du grand dictionnaire universel (8, part. 1p. 72-75).

FAMILLE s. f. (fa-mi-lle ; Il mil. — v. l’étym. À la partie encycl.). Association de personnes issues du même sang, et vivant ensemble sous le même toit : Nombreuse famille. Esprit de famille. Être de la famille. On ne peut bien gouverner sa famille qu’en lui donnant l’exemple. (Confucius.) Une famille vertueuse est un vaisseau tenu dans la tempête par deux ancres, la religion et-Jes mœurs, (Montesq.) Les torts qu un homme peut avoir dans l’intérieur de sa famille ne regardent que sa famille. (Volt.) On a pudétroner le patriarche, on a pu réduire bien au delà du juste l’autorité paternelle, muis on ne détruira jamais la famille. (Lamart.) Pour les femmes, il n’y a de bonheur que dans la vie ■de famille. (M m" E. de Gir.) Le irait distinctif de la propriété, c’est la constitution de la famille. (Proudh.) Ce qui fuit la famille, c’est le sentiment d’obéissance pur lequel une femme et des enfants agissent sous la direction d’un père et d’un mari. (H. Taine.)

Vivez dans la famille, et, s’il faut chaque jour Au sein des ateliers passer votre jeunesse. Rapportez & vos seuils votre fleur de tendresse. M’i" BE Poliont.

— Progéniture, enfants du même père ou de la même mère : Être chargé de famille. Il a de la peine à élever sa nombreuse famille. Les familles sont généralement plus nombreuses dans le peuple que dans les autres conditions. (Buff.)

Le ciel bénit toujours les nombreuses familles. C. d’Harleville.

— Par ext. Ensemble des parents à un degré quelconque : Aimer sa famille. Être renié par sa famille. 21 est fort mal avec sa famille. Un repas, une fête de famille.

J’ai tu trancher les jours de ma famille entière.

Racine.

Va, "tu seras un jour l’honneur de ta famille.

Racine.

— Race, rejetons issus d’une même souche pendant une série d’années ou de siècles : Il appartient à une ancienne famille noble de la Normandie. Qu’est-ce qu’on appelle le lustre des anciennes familles ? La trace luisante que les limaces laissent derrière elles en rampant. (Lamenn.) L’égolsme et la rivalité des familles contribuent souvent à la ruine des États. (Bautain.)

— Par ext. Association de personnes ayant la même origine ou les mêmes intérêts : Le genre humain est la famille d’un grand homme. (Chateaub.) Le genre humain forme une grande famille, dans laquelle les aines tendent la main aùxplusjeunespour les élever à eux. (Lamenn.) Le droit civil est la constitution naturelle de la famille humaine. (Laurentie.) Un régiment est une famille, et le rôle de colonel, conçu dans son véritable esprit, est l’un des plus beaux à remplir. (Ste-Beuve.) La communauté est la famille de ceux qui n’ont pas de famille. (J. Simon.)

L’innombrable troupeau de la famille humaine Se disperse à travers le globe révolté.

—A. Barbier.

Il Catégorie de personnes ou de choses : La famille des sots est fort nombreuse. C’est une belle chose que la tranquillité ; oui, mais l’ennui est de sa connaissance et de sa famille. (Volt.) Le bon sens et le génie sont de la même famille ; l’esprit n’est qu’un collatéral. (De Bonald.) Les arts sont, de la même famille qi.e la poésie. (Ampère.)

Sainte famille, Joseph, la Vierge et l’enfant Jésus ; tableau qui représente ces personnages : Les Saintes familles de Raphaël, de Alurillo.

Père, mire de famille, Personne mariée qui a des enfants : Le père de famille est plus âpre au gain, plus impitoyable, plus insociable que te célibataire. (Proudh.) Il Chef de famille, Le père ou le plus âgé des mâles de la famille ; le plus âgé de la ligne directe, lorsqu’il y a des branches collatérales : Le travail est le premier devoir de l’homme comme chef de famille. (P. Janet.) Il Soutien de famille, Fils qui soutient la famille à laquelle il appartient : litre exempté du service militaire comme soutien de famille, h Fils, enfant de famillé, Fils d’une famille riche, considérée.

Conseil de famille, Conseil de parents légalement institué pour veiller aux intérêts d’un mineur ou d’un interdit.

Air de famille, Type particulier, ressemblance qu’on remarque souvent entre les membres d’une même famille, l ! Par ext. Ressemblance marquée : Toutes les colonies an ■ glaises avaient entre elles, à l’époque de leur naissance, un grand air de famille. (De Tocqueville.)

— Antiq. Ensemble des esclaves appartenant à un seul maître. Se dit encore en Italie des personnes attachées au service d’un grand : La famille d’un cardinal. Il Au moyen âge, Ensemble des vassaux d’un suzerain. Il Famille publique, Ensemble des esclaves romains attachés à un service public : Chaque région de Home possédait une famille publique. Il Famille de gladiateurs, Troupe de gladiateurs exploités par un même laniste.

— Hist. Familles secrètes, Familles patriciennes de Zurich entre les mains desquelles ie pouvoir se trouve concentré. Il Famille régnante, Famille dont un membre gouverne

. actuellement l’État, et chez laquelle la couronne est héréditaire. [| l’acte de famille, Traité conclu en 1761 entre Louis XV et Charles II, roi d’Espagne, il Société de famille, Société secrète fondée en France en 1834.

— Hist. nat. Réunion de genres qui se ressemblent par leurs caractères les plus essentiels : Famille d’animaux. Famille de plantes. Famille de végétaux. La famille des plantigrades. La famille des curculio.nides. La famille des cicadées. La famille des corbeaux est une des plus cosmopolites de l’Europe. (A. Maury.) Un arbre de la famille des conifères est le dernier représentant de la végétation arborescente. (Martins.)

— Épithètes. Belle, nombreuse, féconde, florissante, prospère, heureuse, chère, chérie, douce, aimable, gracieuse, charmante, intéressante, innocente, vertueuse, illustre, brillante, glorieuse, célèbre, fameuse, éclatante, immortelle, élevée, noble, ancienne, antique, considérable, considérée, riche, opulente, puissante, auguste, princière, royale, impériale, joyeuse, rieuse, gaie, insouciante, unie, désunie, malheureuse, infortunée, triste, affligée, désolée, inconsolable, délaissée, abandonnée, déplorable, dégénérée, déchue, ruinée, éteinte, funeste, dangereuse, redoutable, coupable, criminelle, maudite, paisible, ruatique, robuste, sauvage.

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"— Syn. Famille, lignée, maison, rnee. La

famille ùst]a. réunion des personnes unies par les liens de la parenté ; une famille est nombreuse, heureuse, honnête ; on la voit telle qu’elle est sans remonter a sa source, à son premier fondateur. Lignée est aujourd’hui d’un emploi assez rare ; il désigne proprement la descendance, les enfants qui sont comme la ligne, la trace qu’un homme laissera après lui. Maison, pris ici dans un sens figuré, désigne la famille dans ce qu’elle a de plus noble, dans ce qui attire et fixe les regards, dans ce qui en fait comme un grand édifice durable. Race se dit des animaux comme des hommes ; au propre, il suppose une communauté d’origine réelle : par le mariage une femme entre dans la famille, elle n’entre pas dans la race, bien que ses enfants en doivent faire partie. Par extension, race s’applique à ceux qui montrent les mêmes qualités ou les mêmes défauts naturels.

— Encycl. Linguist. Le mot famille vient du latin familia, que certains étymologistes rattachent à l’osque faama, maison. Faama serait le même que le sanscrit dhâman, maison, du radical d/iâ, poser, et avoir, posséder. Comparez : ancien irlandais domun monde, irlandais-erse domhan, proprement demeure ; ancien allemand tuom, maison, conservé dans les composés modernes eigenthum, heiligthum, etc., avec le sens plus primitif de condition, état, possession, etc., comme l’anglosaxon dom et le Scandinave domr. Pictet propose pour ce mdt une autre explication qui nous semble aussi naturelle et qui, d’ailleurs, est également indiquée par Kuhn et Benfey. Il croit que familia se rapporte tout simplement a famulus, serviteur. Famulus, pour fagmulus, se rattacherait lui-même à la racine sanscrite bhag, servir, honorer. Si les conjectures de Pictet sont fondées, comme nous le croyons pour notre part, le latin familia, pour fagmilia, de famulus pour fagmulus, serviteur, désignerait tout simplement l’ensemble du service. Bien que l’existence de la famille dès les temps les plus reculés nous paraisse évidente par elle-même, ses conditions et son degré de valeur ont dû varier considérablement suivant le caractère des races,

comme l’observe Pictet. Il y a là un problème qui se dérobe à toute investigation historique et qui ne devient accessible que par le secours de la linguistique, jusqu’à un certain point du moins, car les termes qui désignent les divers membres de la famille sont en général au nombre des plus anciens et des plus obscurs. Quelques-uns, comme les noms du père et de la mère, dérivent ordinairement des premiers bégaiements de l’enfant et n’ont jamais eu d’autre sens étymologique ; d’autres ont perdu leur signification primitive, qui aurait pu nous éclairer sur les idées que l’on y associait. Pour la race aryenne, toutefois, nous sommes placés dans des circonstances plus favorables. Les anciens termes de cet ordre se sont maintenus avec un ensemble remarquable et la plupart expriment encore, avec une certitude suffisante,1 le caractère ou le rôle attribué aux membres de la famille. On peut arriver ainsi à se faire une idée assez complète des rapports et des sentiments qui les reliaient entre eux. L’étude de ces termes a donc une importance particulière pour l’histoire morale et sociale des anciens Aryas, et Pictet, qui les soumet à un examen détaillé et approfondi, arrive à des résultats curieux et importants à l’aide desquels il reconstitue souvent d’une façon heureuse les mœurs et les habitudes de la famille chez nos ancêtres.

— Mor. et»polit. Au sein de toutes les sociétés on trouve toujours la famille : c’est la première assise de l’édifice social. Considérée au point de vue de la perpétuation de l’espèce, c’est le premier anneau de la grande chaîne de l’humanité. Elle se rattache enfin aux établissements politiques, dont souvent elle détermine la forme. La famille doit donc être envisagée tout à la fois commé étant d’ordre naturel, d’ordre social et d’ordre politique. Sous les variations qu’amène l’esprit du temps et des lieux, il reste un fait immuable que nous allons dégager tout d’abord.

La famille dérive d’un principe naturel, général et nécessaire : la conservation des espèces. En semant les germes a profusion, la nature atteste qu’elle se préoccupe plus des espèces que des individus ; mais les êtres nouveaux qu’elle produit sans cesse périraient en fleur ou dans leur éclosion s’ils étaient abandonnés. Sa sollicitude maternelle, si l’on peut s’exprimer ainsi, s’étend à tous les règnes. À ce point de vue, l’homme n’a rien qui lui soit particulier et qui ne s’applique à toutes les races animales. L’instinct parle même moins haut au cœur de l’homme que chez les êtres inférieurs de la création : les animaux n’abandonnent jamais leurs petits avant que ceux-ci aient acquis assez de force pour se suffire à eux-mêmes, et le dévouement (nous ne saurions trouver une expression plus juste) ne s’arrête pas à levu)famille naturelle. Les gallinacées, entre autres, étendent leurs soins jaloux jusqu’à la progéniture étrangère dont ils n’ont que favorisé l’éclosion. Belle leçon pour l’homme, qui en a encore beaucoup d’autres à recevoir des animaux ! Loin de suivre, en effet, la douce loi de l’instinct, l’homme ne la viole que trop souvent, soit pour obéir à des règles politiques nées de son caprice, soit par un égoïsme

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féroce qui lui fait tout immoler à sa propre conservation. De nos jours encore, au dire des voyageurs, dans la Polynésie la famille n’existe que de nom ; entre les parents et les enfants il ne se crée aucun lien solide et durable. Telle peuplade, comme dans la Nouvelle-Zélande, craint d’avoir une surabondance

de femmes inutiles et se débarrasse à leur naissance de toutes les filles premièresnées ; ailleurs, on exécute périodiquement, tous les cinq ou six ans, tous les enfants nés dans l’année. Ces boucheries odieuses, commandées par la rareté des subsistances et par la crainte d’en manquer, s’accomplissent de sang-froid, sans regrets comme sans remords. Emigre-t-on en masse d’une contrée à une autre, on abandonne à la fureur de l’ennemi ou des bêtes féroces et aux angoisses certaines de la faim toute, la partie des populations trop jeune et trop faible pour supporter les fatigues du voyage. Les hirondelles sont plus humaines : lorsque le premier souffle des vents d’hiver les chasse vers les contrées méridionales, elles attendent, au risque de compromettre le succès du voyage, que les dernières couvées aient acquis assez de force pour suivre le gros de l’armée, puis elles s’arrêtent en route pour attendre les traînards. Mais, on l’a remarqué cent fois, en dehors de la civilisation, l’homme est au-dessous de la brute, et si le développement graduel de ses sentiments de sociabilité ne venait suppléer à l’insuffisance de l’instinct naturel, la famille humaine serait, de toutes les familles animales, la plus exposée aux mauvaises chances de la fortune et du hasard.

"Le sauvage a-t-il une famille ? Assurément non : il n’en connaît ni les charges ni les devoirs. La famille, telle que nous la comprenons aujourd’hui, était-elle connue des peu-Eles primitifs ? Pas davantage. Quand les ommes se multiplièrent, le premier groupe social de quelque importance qui se forma fut ce qu’il est resté dans une grande partie de l’Orient : la tribu, conséquence nécessaire de la polygamie qui y règne encore. Or rien ne ressemelé moins a la famille que la tribu. Qu’est-ce tpue la tribu ? La réunion sous l’autorité d’un seul et même chef, patriarche ou émir, de tous les enfants ou petits-enfants nés sous son toit ou sous sa tente, de mères quelconques. À ces descendances directes s’adjoignent les descendances collatérales qui, en se prolongeant -à un degré indéfini, étendent fort loin les limites de la tribu. LàJ nous voyons partout le père et l’enfant, mais la mère n’apparaît nulle part, et, sans la mère, la famille n’existe pas. Chez les peuplades de l’Inde, du golfe Persique et de l’Arabie ne régnait sans doute ni la promiscuité ni même la communauté restreinte que nous montrent, dans diverses contrées, notamment en Ethiopie, Hérodote et Diodore de Sicile ; mais, tout en tenant compte de la puissance des sentiments naturels qui s’affaiblissent rapidement dans des sociétés où la femme ne compte pas, on peut dire que l’enfant n’avait pas de mère proprement dite, n’avait pas d’état. La femme était ce qu’elle est encore dans l’esclavage, une machine à produire des enfants qui ne lui appartiennent pas. C’était là le côté le plus-défectueux des sociétés primitives : on sait, en effet, que la tendresse maternelle est l’agent le plus puissant de l’adotfcissement des mœurs, et nous ne ferons que répéter une vérité passée à l’état d’évidence en affirmant que l’on peut juger d’une civilisation par la condition de la femme et par l’étendue des droits maternels.

Le patriarcat, dent la Bible célèbre les merveilles, était le gouvernement despotique par excellence. Autorité illimitée, droit de vie et de mort, liberté absente, garanties nulles. Sur la foi d’une hallucination, Abraham sacrifie son fils unique sans sourciller. Voilà l’idée qu’il se fait de la famille et de ses droits. Que la force, la conquête ou le libre consentement parviennent à réunir sous un même gouvernement quelques tribus voisines pour en faire un embryon de nation, le pouvoir suprême, concentré dans les mains d’un seul roi, juge, mage ou prophète, n’atteindra directement que les chefs de tribus et leur laissera toute l’autorité dont ils jouissaient auparavant sur les individus. On était bien loin alors de voir dans le gouvernement d’une société une sorte de juridiction morale, protectrice des faibles et servant de frein à la puissance des forts. Tout chef de groupe, famille on tribu, subissait la loi du chef de 1Etat, mais il restait souverain absolu dans son domaine, et telle a été, pendant plus de quarante siècles, la situation générale de l’humanité. Comment la famille aurait-elle pu se constituer dans de pareilles conditions ?

Si nous étudions la famille dans la Grèce antique, la femme nous apparaît comme la compagne et l’égale de l’homme ; elle est libre dans sa maison ainsi qu’au dehors, et, à cet égard même, mieux traitée dans ces temps barbares qu’elle ne le sera plus tard aux beaux jours de la civilisation grecque. La manière fort peu respectueuse et parfaitement familière dont Clytemnestre parle à son mari Agamemnon, le roi des rois, dans Homère, met hors de conteste ce point de mœurs. La polygamie est interdite, mais ce n’est pas à dire que les hommes gardent bien sévèrement la foi promise. S’ils n’ont pas deux femmes, ils ont de belles esclaves

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qui les distraient de leurs épouses légitimes et leur donnent parfois des enfants. Sur ce point, le degré de licence du mari dépend du caractère de sa femme, de son plus ou moins d’énergie. Laërte achète Euryclée au prix de vingt bœufs ; ■ mais, dit Homère, il n en fait point sa compagne de lit, parce qu’il craint son épouse. > Au reste, si la foi conjugale est, comme toujours, plus sévèrement exigée des femmes, il ne parait pas cependant qu’on punisse avec cruauté, comme en tant d autres pays, leurs manquements à cette foi. La femme adultère était seulement notée d’infamie. A Athènes, elle ne pouvait porter certaines parures ni assister aux sacrifices publics, sous peine de se voir arracher, déchirer ses vêtements ; il était permis de frapper une femme dans ce cas-là. non cependant jusqu’à la blesser. Il ne paraît pas d’ailleurs que la jalousie ait jamais été une passion bien violente chez les Grecs et qu’elle ait donné lieu à beaucoup d’actions tragiques. À la distance où nous sommes, il est certainement impossible de savoir si le nombre des femmes fidèles l’emportait sur le nombre des autres ; tout ce qu’on peut-dire, c’est que l’histoire et l’art nous offrent des types également accomplis dans les deux genres. Pénélope se place en face de Phèdre etAlceste fait vis-à-vis à Hélène.

Sur la constitution de la famille au temps de Platon, sur les mœurs domestiques de cette époque, nous avons plus de lumières. Le droit naturel qu’a le citoyen de se choisir une épouse à son gré recevait du droit civil de fâcheuses restrictions : par exemple, on ne pouvait pas prendre femme hors de la cité. Tout citoyen était obligé de se marier s’il ne voulait être en butte aux sévérités de la loi, à’certaines amendes plus ou moins con=sidérables. Chose plus grave encore, on pouvait être contraint à se marier avec une personne déterminée, avec une de ses parentes, par exemple, quand le père de celle-ci venait a mourir ne laissant que des filles ; sinon il fallait la doter. Au bout de dix ans, un mariage stérile était dissous de droit et le divorce prononcé. On sent partout dans" ces dispositions que l’intérêt public domine toutes les libertés particulières, et que le peuple croit avoir intérêt à ce que les citoyens donnent à la patrie le plus d’enfants possible. C’était-par cette raison encore que la femme veuve, le mari veuf, restés sans postérité, étaient tenus à un second mariage. Le divorce était permis pour incompatibilité d’humeur ; mais le père n’avait plus la faculté légale de vendre, fie tuer ni d’exposer ses enfants, droit qui existait et était incontestablement pratiqué dans les temps héroïques ; il lui était permis seulement de les renoncer. Cet acte de renonciation retranchait l’enfant de fa famille, brisait tous les liens entre lui et ses parents et le privait de leur héritage ; mais la renonciation n’était pas laissée au seul pouvoir du père. Il devait soumettre sa résolution à l’approbation d’un tribunal, qui entendait la défense de l’enfant menacé dans son état civil. Hors ce cas, la-loi mettait des bornes à la liberté du père relativement à la disposition de ses biens par testament. Elle lui permettait de favoriser un de ses enfants de quelque partie de sa fortune, non d’en déshériter aucun. Dans les successions ab intestat, la loi partageait également les biens entre tous les enfants. À défaut d’enfants, le testateur avait une liberté entière ; mais, s’il mourait sans en avoir usé, sans avoir fait de testament, la loi appelait à lui succéder ses frères d’abord, puis les fils et les petits-fils de ceux-ci ; à défaut des frères du père, les oncles, et, après ceux-ci, les frères de la mère du défunt. Un point important à noter, c’est qu’en suivant cet ordre on ne s’arrêtait pas aux femmes, on allait chercher même dans un degré plus éloigné le premier parent du sexe masculin, ce qui témoigne évidemment d’une certaine infériorité attribuée au sexe ’ féminin dans l’opinion publique. Rien n’indique, dans’ les lois grecques, que la fille majeure ou la veuve dussent rester sous la tutelle de leurs enfanta ou d’un étranger, comme cela eut lieu à Rome. A quarante ans, la veuve exerçait elle-même ses actions.

Voilà le droit, qui aurait pu être plus rigoureux assurément, vu l’époque : en fait, la condition de la mère de famille, dans ces temps si beaux à d’autres égards, s’était.singulièrement aggravée. Cela tint presque uniquement à la grande, à l’immense part que le Grec fit a la politique dans son existence. Revêtu pour une part de l’autorité souveraine, chaque citoyen, par son vote, influait directement sur le gouvernement de la cité, sur la direction des affaires extérieures, et les relations extérieures de ces petites républiques étaient généralement tendues. Le temps matériel que lui coûtait l’exercice de la souveraineté n était peut-être pas considérable, mais il demandait toute son application, tout son intérêt ; il ne lui en restait plus pour le ménage. Au- reste, dans ces pays, si bien dotés à regard du climat, on avait fhabitude, on l’a encore, de vivre toute la-journée dehors. Pour quelle raison le Grec serait-il demeuré chez lui ? pour quoi faire ?Tout travail manuel était servile, indigne d’un homme libre ; l’esclave seul travaillait. Le Grec promenait donc tout le jour son oisiveté ou ses préoccupations politiques, artistiques, du gymnase à 1 Agora, de l’Agora au Pyrée ou à l’Académie.

1U Pendant ce temps que faisait sa compagne ? Elle restait à la maison, et même dans une partie déterminée de la maison, partie réléguée sur la cour intérieure, au premier ou au second étage, sans autre communication parfois avec le reste du logis que par une échelle qu’on retirait ou remettait d’en bas selon les ordres du mari ; c’était là ce qu’on appelait le gynécée : demi-clôture, demi-emprisonnement. Comment la liberté primitive des temps héroïques s’était-elle perdue ? On ne’saurait en dire la vraie cause ; mais évidemment ce fut l’absence prolongée du mari hors du domicile conjugal qui amena ce changement. Ces précautions eurent pour fin de lui assurer toute la liberté d’esprit nécessaire à la politique et aux beaux-arts. La femme restait donc à moitié prisonnière dans le gynécée ; mais qu’y faisait-elle ? Pour elle, pas plu* que pour 1 homme, on n’admettait que le travail bienséant. L’épimélide, la matrone, comme on dira plus tard à Rome, filait de la laine et rien de plus ; puis, sans doute, elle tracassait les esclaves, commérait avec elles. Quant à lire, il n’en pouvait pas être question dans ces temps-là. D’autre part, le soin de la maison ne devait pas être grand’chose, le mobilier n’existant pas encore. La surveillance de la cuisine n’était rien forcément ; les hommes, extraordinairement sobres, vivaient de fruits ; quelques olives, une demidouzaine de figues et une ceinture qu’on serrait après le dîner faisaient toute l’affaire. Le soin, l’éducation "des enfants ? La mère, tout.à fait ignorante, ne pouvait rien enseigner ; les soins matériels incombaient à la nourrice, aux femmes esclaves ; et puis l’enfant du sexe masculin était de bonne heure libéré, sinon de. l’autorité maternelle, au moins du séjour à la maison. On l’envoyait à l’école, et, entre les classes, il jouait, vagabondait dehors ; c’est encore l’usage dans tous les pays méridionaux. L’existence de la femme était donc ^presque absolument vide. On n’a pas besoin de témoignages, de pièces, »ni de documents pour savoir ce qui en résultait ; car les conséquences d’un pareil état de choses sont forcées. La femme, sans idées, sans préoccupations élevées, sans instruction, devait être assez méprisée par son mari, traitée sans beaucoup de respect par ses enfants ; curieuse à l’excès, babil-Iarde, importune, capable par ennui de tomber dans des désordres les plus grands, si la barrière du gynécée n’eut préservé sa vertu toute matérielle. S’il faut en croire Aristophane, les femmes athéniennes auraient été fort adonnées au vin, ce qui n’a rien d’invraisemblable. Comme compensation à tout cela, il y avait une certaine douceur de mœurs, quelque chose de modéré et d humain qui tenait à l’excellence de la race. Ce oui est plus considérable encore, c’est que l’idéal des écrivains, des philosophes du moins, ne s’était jamais abaissé jusqu’à cette réalité si défectueuse. Socrate notamment, et après lui Platon et Xénophon, protestent éloquemment par leurs doctrines sur le mariage. Il y a dans Y Economique de Xénophon telle leçon qui ne laisse rien à désirer, même à la délicatesse moderne, sur l’égalité obligatoire de la femme dans le ménage, la nécessité des attentions et des soins mutuels, le partage de tous les travaux, de toutes les joies, de tous les soucis, et même de tous les intérêts moraux de l’existence. L’école stoïcienne continua, en l’élargissant, la diffusion de ces principes rénovateurs ; elle eut la plus heureuse influence sur les mœurs. D’autre part, la perte de la liberté, de la vie publique, si regrettable à tant d’égards, eut au moins cette conséquehee de ramener le mari au foyer ; c’était désormais le seul intérêt de sa vie, la seule activité d’esprit et de cœur qui lui restât permise. Sans doute la femme et l’homme, si longtemps séparés, se reconnurent alors pour compagnons, et, avec l’égalité, les vertus domestiques qui la suivent.commencèrent à fleurir. C’est à cette

époque-là que se rapportent les Préceptes sur le mariage de Plutarque. Ce livre témoigne, non sans doute que les mœurs domestiques étaient généralement bonnes, — un livre ne peut pas prouver cela, — mais il établit que les esprits élevés de cette époque avaient conçu sur le mariage un idéal net et précis, auquel le christianisme ne pouvait rien ajouter, et auquel il n’ajouta rien, en effet, comme nous le verrons tout à l’heure.

La famille romaine est marquée d’un caractère très-particulier qui la distingue profondément : c’est le pouvoir, presque illimité à l’origine, du mari sur sa femme et du père sur ses enfants. Il faut exposer sommairement le droit romain dans ses dispositions premières et dans ses modifications successives relativement aux rapports du mari et du père avec sa famille. Tout d’abord le père, propriétaire de ses fils comme de ses esclaves, a sur eux un droit de vie et de mort. 11 peut les vendre, les exposer, les abandonner en réparation d’un dommage causé par eux, les punir, les condamner à mort, comme juge domestique. Tout ce que l’enfant acquiert par son travail, par son industrie, accroît la fortune du père. Ce droit farouche se conserva, dans presque toute sa rigueur, pendant toute la durée de la république. Il est douteux que l’exercice de ce pouvoir absolu fût propre à rendre le cœur des pères romains bien tendre et bien affectueux, ’ car l’homme néglige rarement d’abuser de la ty FAMI

rannie quand elle lui est permise, et la tyrannie, quelle qu’elle soit, corrompt le caractère ; mais, en tout cas, il est sur que la dépendance absolue des enfants devait leur

inspirer pour leur maître naturel une crainte contraire à toute affection. Le Romain devait attendre trop souvent la mort de son père comme l’heure de sa délivrance ; d’autre part, le jour où il cessait d’être esclave, il devenait maître de ses enfants et même de sa mère ; ce passage si subit exerçait sur son caractère les effets les plus funestes. L’obéissance absolue est une mauvaise préparation au commandement. Tout le monde

connaît l’histoire de Cassius, qui fit mourir ses fils dont l’éloquence agitait la république ;de Fulvius, qui condamna également le sien pour avoir participé à la conjuration de Catilina. On pourrait citer assez d’autres exemples du même fait. Sans doute les empereurs intervinrent pour empêcher les pères de faire mourir leurs enfants ou de leur infliger de mauvais traitements ; mais ce ne fut que très-tard, sous Constantin, que le meurtre du fils par son père fut positivement assimilé à celui du père par le fils. Jusque-là aussi le père conserva le droit d’exposer ses enfants. « Aussitôt que l’enfant est sorti du sein maternel, dit Charles Dézobry, on le dépose à terre aux pieds du père. S’il ordonne qu’on le relève, c’es, t qu’il le reconnaît et, veut qu’on le nourrisse. Au contraire, s’il le laisse a ses pieds, il déclare par là qu’il l’abandonne, et alors on va l’exposer sur une place publique, ordinairement dans le quartier du Vélabre où il meurt de misère, à moins que quelque passant n’en prenne pitié et ne l’emporte chez lui. » Le père décidait seul si cet enfant vivrait ou mourrait ; et la mère, qui venait de le mettre au monde au milieu des tourments, attendait en silence l’arrêt qui devait le lui ôter ou le lui laisser. Voilà une scène qui sûrement lui restait longtemps dans ia mémoire. On pense si l’arrêt, quand il était défavorable, était propre à nourrir dans le cœur de l’épouse l’amour de son mari. Cela seul était capable de la décourager à jamais de la maternité. Quoi d.’étonnant après cela, si, n’étant plus ni épouse ni mère, elle cherchait dans la parurent le libertinage l’intérêt et le motif de l’existence, car encore faut-il que tout être trouve quelque intérêt à vivre ? Ce ne fut que sous Constantin qu’il fut défendu au père d’exposer ses enfants. Il peut les vendre, il est vrai ; mais seulement à l’état de naissance (sanguinolentos) ; encore faut-il qu’il y soit contraint par la misère. S’il veut faire appliquer à ses enfants un châtiment grave, il faut qu’il soumette ses griefs à l’appréciation du magistrat, qui déférera à sa demande ou la rejettera.- La rouille de l’ancienne barbarie était, comme on voit, malaisée à détruire. A l’égard des biens, il fut permis aux enfants de posséder en propre ce qui leur était venu par certaine voie, ce qu’ils avaient gagné dans la profession militaire ou dans l’exercice de quelque fonction civile ou Teligieuse. Le droit romain, à cet égard, se continua pendant des siècles dans le midi de la France. Il ne serait pas exact d’attribuer à l’influence du christianisme les dernières modifications qui rapprochèrent le droit romain de la nature ; ces modifications furent îe dernier terme d’une évolution commencée dès la fin de la république. En second lieu, le christianisme ne paraît pas avoir débuté par exercer dans le monde du droit une influence favorable à la famille ; il commença par ne pas reconnaître le mariage, en haine de la loi civile. Pourvu que l’homme n’eût qu’une femme à la fois, et réciproquement, l’Église ne faisait pas grande différence entre le mariage et le concubinat. Ce qui aidait à cette confusion théorique, il faut le dire, c’est que l’Église regardait le mariage comme un état indigne, un peu moins peut-être que le concubinat, mais pas beaucoup moins ; la virginité était le seul état digne du chrétien ; c’est ce qui explique la toléran.ce du clergé envers les rois et les chefs francs, qui alla jusqu’à leur passer la polygamie, tolérance que la politique" toute seule n’explique pas suffisamment. La morale incertaine de l’Église sur les rapports des sexes, la barbarie, la férocité des nouvelles populations entrées par force dans le monde romain, férocité qui devint contagieuse pour la race plus cultivée des Gallo-Romains, l’instabilité des unions sexuelles, l’atisence de tout pouvoir qui constatât régulièrement les naissances, le défaut de nom patronymique (on ne portait encore que des surnoms), la difficulté des communications et leur danger, tout cela abaissa les mœurs domestiques, durant les premiers siècles du moyen âge, bien au-dessous de l’antiquité. Dans le monde ancien, le père et les enfants étaient peut-être trop étroitement liés ensemble. Ici, au contraire, il n’y a plus de fils ni de père, dès qu’ils se perdent de vue. Il suffit que l’enfant passe de son village dans un village voisin, pour que tous les Tiens soient rompus ; s’il veut se marier, l’Église ne lui demande pas lej consentement de ses parents ; s’il veut tester, la coutume ne lui prescrit de réserve que pour le seigneur. Au bout de quelques années, -la parenté même est impossible à établir. Quant au mari et à la femme, il n’y a pas le divorce, c’est vrai, mais l’Église offre vingt motifs de rompre leur mariage, aux époux qui en sont fatigués ; parenté physique, parenté spirituelle, que sais-je ? Ces abus se continuèrent

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fpendant toute la durée du moyen âge. Sur es procédés réciproques du mari et de la femme, les soties, les farces et les pièces de toute sorte qui nous sont parvenues concordent admirablement pour nous les montrer aussi détestables que possible. Le cocuaige est peut-être la moindre plaie du mariage, tel qu’ils nous le peignent. La femme hargneuse, le mari brutal, l’un et l’autre également haineux pour-son conjoint, rien n’est plus attristant que cette littérature. Nous ne pouvons pas ici marquer les nuances morales qui appartiennent à telle ou telle période particulière du moyen âge, ni les gradations qui conduisent de cette époque à l’époque moderne proprement dite. Passons donc sans transition au siècle si vanté de Louis XIV. Nous trouvons dans une phrase de Saint-Simon toute l’histoire de la famille dans ce temps-là.

> Le duc de Rohar) ne comptoit ses filles pour rien et ses cadets pour peu de chose ; en donnant aussi peu qu’il voulut (à sa fille aînée), il fut aisé à persuader. « Il consentit au mariage de sa fille avec le comte de Lamarck, ■ qui n’avoit quoique ce fût en France. » Le duc de Rohan n’est pas un père exceptionnel ; c’est le type du père au xvne siècle. L’amour paternel’a onsidérablement faibli. La vanité, l’orgueil de la race, de la maison, qui n’est pas 1 affection pour les enfants, tant s’en faut, bien qu’on prenne souvent l’un pour l’autre, tend à régner exclusivement dans les rapports des parents avec leurs enfants. On n’aime que son aîné ; et encore il n’est pas juste de dire qu’on l’aime. Non, on chérit, on choie en lui un représentant, un autre soi-même ; et chacun veut, puisqu’enfin il lui est impossible déjouer indéfiniment son rôle en personne, dans cette vie, que son représentant y fasse la plus belle figure possible. Pour cela, il faut rassembler sur sa tête tous les biens et tous les titres, les terres et les charges et exclure complètement les cadets et Tes filles. Les cadets iront au régiment ou au couvent, à leur choix ; les filles au couvent, sans choix, à moins qu’elles ne trouvent quelque gentilhomme pauvre, quelque cadet d une autre maison, qui consente à faire avec elles le mariage • de la faim et de la soif, » comme disait Saint-Simon. En effet, chassés par monsieur leur frète, les cadets sortent de la maison paternelle, qui avec une petite compagnie qu’on a bien voulu lui acheter, qui avec son justaucorps et son épée tout simplement. Habitués à. la fortune, à un grand ordinaire, orgueilleux d’ailleurs de leur nom et incapables de rougir d’autre chose que de la pauvreté, ces hommes-là commettront fièrement toutes sortes de turpitudes, et même des crimes. L’officier grossira son revenu aux dépens de la paye de ses soldats, et si ces insolents coquins réclament, il les bâtonnera. L’autre, sans grade, sera chevalier, mais d’industrie ; il vivra dans les tripots, les brelans, aux frais des dupes, ou sera entretenu par les femmes, ou trouvera sa subsistance chez un grand, chez’un fermier général, en qualité de flatteur, de factotum honorable, peut-être même de pourvoyeur non honorable.

Ceux d’entre les cadets que leur père avait destinés de bonne heure a, l’Église, sur des signes bien équivoques de vocation, tels qu’une certaine patience à l’étude, une certaine tranquillité de caractère, ceux-là n’étaient pas si malheureux. Ils avaient en partage les plantureuses abbayes, les riches prébendes, et, s’ils étaient de grande maison, les évêchés, les archevêchés. L’Église possédait le cinquième au moins de la fortune immobilière de la nation ; il y avait là de (quoi entretenir bien des cadets de la noblesse, et c’est en effet de quoi on en entretenait grassement une partie. Cet immense trésor de l’Église, que tous les siècles et toutes les classes avaient contribué à former pour les pauvres, était devenu, en résultat définitif, ’. comme un appoint énorme à la fortune déjà j si considérable de l’ordre des nobles. Les i filles, même très-nobles, ne trouvaient pas tout à fait les mêmes avantages dans la carrière ecclésiastique ; comme c’était leur seul débouché, il y avait trop de concurrence. Quand on connaît ces vices de la famille, sous l’ancien régime, vices qui avaient pour effet de remplir les couvents et les paroisses de prêtres et de nonnes involontaires, on ne s’étonne plus des mauvaises mœurs si communes autrefois parmi les nonnes et le clergé de tout rang. C’est ce que disait déjà Fléchier, l’illustre évêque de Nîmes, en parlant des religieuses qui jetaient le froc aux orties. ■ Je ne m’en étonne pas, disait-il ; on les contraint pour des intérêts domestiques ; on leur ôte par des menaces la liberté de refuser, et les mères les sacrifient avec tant d’autorité, qu’elles sont contraintes de souffrir le coup sans se plaindre. • Aussi les désordres les plus scandaleux, les débordements les plus effrontés étaient-ils en ce temps-là l’histoire de tous les jours ; et les peuples, corrompus par l’exemple de ceux qui étaient établis pour leur prêcher la morale et leur en faire leçon, suivaient dans le mauvais chemin leurs guides et leurs pasteurs. C’est ainsi que le relâchement des mœurs privées et domestiques avait pour résultat définitif de gâter les mœurs publiques. L’opinion qui regarde la famille.comme la pierre angulaire de la société peut trouver dans l’histoire de

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cette époque une confirmation malheureusement trop évidente. Il ne faut pas croire, d^ailleurs, que la pécheresse des sentiments fût particulière à la noblesse. Celle-là, nous l’avons dit, donnait l’exemple de l’orgueil, cause de tout le mal, et les autres classes suivaient cet exemple. Dans la bourgeoisio comme chez les grands seigneurs, c’était à qui formerait une bonne maison en accumulant tous les biens sur la tète d’un seul fils. Les mœurs domestiques, dira-t-on, étaient du moins plus saines chez le peuple. D’abord, on n’en sait trop rien ; il est fort difficile do préciser au juste quels étaient les sentiments et Tes us intérieurs du peuple dans un temps où nul chroniqueur ne songeait à parler de lui ; en second lieu, il est peu probable que là se fussent réfugiées les bonnes mœurs chassées des hautes classes ; le penchant que les petits ont d’imiter les grands ne permet guère de le penser. Ce qui le permet encore moins, c’est l’excessive misère des classes laborieuses sous l’ancien régime ; la dureté constante du sort n’est pas propre, on le sait bien, à incliner l’homme à la douceur ni même à l’équité. Concluons donc, ce qui est certain pour les hautes classes et très-vraisemblable pour le peuple, que les mœurs

domestiques ont été mauvaises pendant toute la durée de l’ancienne monarchie, contrairement au préjugé trop répandu en faveur du bon vieux temps, et qu’elles ne se sont relevées chez nous qu’après la Révolution, et, grâce à elle. Nous n’entrerons pas dans 1 exposition de l’état actuel, que chacun peut juger en regardant autour de soi ; qu’il nous suffise de djre que, si l’homme et la femme ne sont pas encore sur un pied assez égal dans le ménage, aussi égal qu’il le sera plus tard, du moins l’égalité établie entre les enfants a rendu l’amitié, l’affection fraternelle possible. Le père et la mère, en devenant forcément plus équitables, sont devenus plus chers et plus vénérables à leurs fils. La source des jalousies, des haines de famille, les pires que l’on connaisse, a été ■ à peu près tarie ; et tout cela a été l’effet des justes dispositions que la Révolution a mises dans nos codes et qu’elle seule pouvait y mettre.

On peut disputer sur le plus ou moins d’étendue des prérogatives du père de famille et de ses obligations ; mais le principe ne varie pas. Le père est le tuteur naturel de ses enfants, et, à défaut du père, la mère, si elle survit ; mais l’État est leur cotuteur légal et permanent. À ce titre, la puissance publique doit intervenir, sur simple réquisition, pour prêter main-forte à la puissance paternelle en cas de désobéissance et de révolte ; mais, par contre, elle impose au père des devoirs, et le sanctuaire domestique n’est pas tellement fermé que la loi ne puisse y pénétrer pour s’assurer que les obligations naturelles qu’elle a confirmées de son sceau sont remplies. C’est en vertu de ce principe que la loi fixe la limite minimum de l’âge d’entrée des enfants dans les manufactures et qu’elle règle les heures de leur travail. En cas d’infraction, elle punit. Y a-t-il sévice, elle est plus sévère. L’infanticide, qui chez les anciens passait à peine pour une faute légère, est mis au rang des crimes et puni de mort. La loi enfin tient les parents en garde contre le caprice de ieurs affections ou de leurs préférences, et, par un compromis qui a suffi pour changer la face de la société, elle ne leur laisse plus la disposition entière de leurs biens. Nous voilà bien loin du despotisme romain et du moyen âge. Dans certaines classes de la société, il est de bon ton, nous le savons, de crier contre cotte tyrannie légale qui ne permet plus d’accumuler toutes les successions sur la tète de l’aîné de la famille en jetant les cadets dans la rue et les filles dans les couvents. Ces vieux échos du passé se réveillent parfois dans nos assemblées législatives, mais ils y meurent au milieu du silence universel. Pour nous, loin de trouver la loi tyrannique, nous la croyons trop douce encore, et nous estimons que, dans le partage de l’autorité, l’État aurait pu se réserver une part plus large. Mais, pour déterminer cette part, il faut dire en quoi consistent les obligations du père de famille, et comment, pour le contraindre à les remplir, l’État peut procéder par voie de coercition.

Le père peut-il se croire quitte envers ses enfants lorsqu’il a pourvu à leurs besoins matériels jusqu’à l’âge où ils peuvent se passer de son aide et de sa protection ? Non, les animaux en font autant, et les devoirs du père de famille sont plus étendus. Outre le pain du corps, il doit à son enfant le pain de l’âme, qui n’est pas moins nécessaire. La nature n’a fait que des enfants ; c’est à lui de former des hommes et de cultiver les précieux germes d’intelligence et de moralité qui sommeillent dans ces jeunes êtres. On nous dira que personne ne conteste cette obligation, c’est vrai ; mais les partisans du despotisme paternel n’en font qu’un devoir de conscience dont le père de famille ne serait comptable qu’à Dieu. Contrairement à cette opinion, nous soutenons, nous, que la loi de nature doit être corroborée ici par une sanction légale et positive. En quittant le foyer domestique, les enfants entreront un jonr dans cette grande famille qui s’appelle la patrie, et, au nom de celle-ci, la société a le droit d’exiger qu’on lui fournisse des hom-## famille s. f. ## mes et non des brutes. Les parents peuvent ■’donc être contraints, au besoin, par une pénalité modérée, soit par amende ou surcharge de contributions, soit par la privation de quelques droits politiques, à donner à leurs enfants un certain degré d’instruction élémentaire indispensable à tous les citoyens. C’est ainsi qu’on le comprend en Suisse et dans la-majeure partie de l’Allemagne, où l’instruction, rendue obligatoire depuis une trentaine d’années, a produit de si bons résultats. De quel droit enfin, ou plutôt de quel front, le père viendra-t-il, en. cas d’écarts de conduite ou de rébellion, réclamer rnain-forte des magistrats contre ses enfants révoltés si lui-même il les a privés d’une instruction moralisante et s’il ne leur a pas enseigné les premiers de leurs devoirs, 1 obéissance et le respect ? La question au surplus est pendante en France et ne tardera pas sans doute à recevoir une solution.

Les prescriptions légales concernant l’état des familles sont nombreuses et bien ordonnées ; mais elles resteraient vaines si une saine et forte éducation n’en resserrait les liens. Les fondements de la société s’écrouleraient en poussière s’ils n’étaient cimentés par la tendresse et l’affection réciproques développées et ’maintenues pendant tout le

cours de l’existence. Nous entendons souvent, à ce propos, des moralistes chagrins se plaindre que-ia société se désagrège, que 1 esprit de famille disparaît, que l’homme s’isole et se désintéresse même de ses proches, et que, dans son égoîsme, il tend de plus en plus a se soustraire aux douces, mais lourdes charges qu’impose la création d’une famille, À ce tableau assombri, les pessimistes opposent ce qu’ils appellent le bon vieux temps, où, dans les familles de distinction surtout, se maintenaient une tradition et une solidarité d’honneur dont elles étaient justement fières. Nous avons vu plus haut ce qu’il- faut penser de l’état des familles avant notre glorieuse Révolution, et nous croyons fermement qu’un

gouvernement vraiment démocratique trouvera dans l’avenir des moyens qui, tout en respectant la liberté des parents, autant que le demande la justice, les dirigeront et les porteront à moraliser de plus en plus leurs enfants. Par là, les familles deviendront plu» upies, plus heureuses, et l’État, qui n’est que l’ensemble des familles, pourra développer rapidement toutes ses énergies matérielles etmorales sans avoir à craindre les folles entreprises des ambitieux ni les révoltes d’un peuple irrité par la misère.

Voici une anecdote qui montre combien les affections de famille sont gravées profondément dans le cœur de tous les hommes, de ceux mêmes qui appartiennent aux races les inoins avancées.

Un malheureux nègre de vingt-cinq ans, né sur les côtes du Sénégal, vint en France, amené par un entrepreneur, qui, après avoir bénéficié de son travail pendant trois mois, ’ partit sans lui remettre le salaire promis. Ce pauvre Africain suivit un autre entrepreneur dans une autre ville de province, puis dans une autre encore où il travailla à casser des pierres pour l’entretien des routes. Il entra un jour, enhardi par la faim, dans un château qui était situé sur le bord du chemin. Là, on le fit manger et, après l’avoir habillé (car il était déguenillé), on lui demanda s’il voulait rester comme domestique.

Il accepta, mais partit le lendemain pour aller toucher, disait-il, une somme qui lui était due pour son travail. On le perdit de vue pendant plus de deux mois qu’il passa, en partie, dans un hospice des environs.

À sa sortie de l’hôpital, il erra près de quinze jours dans les bois, se nourrissant de pommes et de châtaignes crues.

Après ce temps, il revint un matin au château, mais affamé et dans un état de nudité presque complet. On l’habilla immédiatement et on,1e fit manger. Le pauvre diable ne pouvait se rassassier. Pourtant il était d’une tristesse affreuse, et malgré son langage incorrect (car il parlait à peine le français), on pouvait comprendre que les noms de sa mère, de son frère, de sa petite fille, qu’il disait âgée de cinq ans, revenaient sans cesse sur ses lèvres.

Le lendemain on lui conseilla de patienter quelques jours, ajoutant qu’on lui fournirait les ressources nécessaires pour aller à Marseille et que là on ferait tous les efforts possibles pour obtenir son passage gratuit jusqu’à la côte du Sénégal. Là-dessus il regarda ses interlocuteurs avec ses gros yeux blancs pleins de larmes, et leur dit : « Vous bons, vous bien bons, mais moi, mourir de chagrin I » -

À midi il dîna assez gaiement à la cuisine ; mais, après le départ des domestiques, il demanda a la cuisinière un couteau pour couper du bois. Celui qu’on lui présenta ne lui ayant pas convenu, la cuisinière, sans défiance, lui donna celui dont elle se servait pour couper la viande.

Alors cet infortuné sortit armé de ce couteau, et, arrivé dans l’avenue, se scia littéralement la gorge. Le cou était presque

entièrement tranché.

— Jurispr. Conseil de famille. V. conseil.

l’acte de famille. Une alliance offensive et défensive entre, la France et l’Espagne (Louis XV et Charles III) fut conclue par le traité du 15 août roi ; elle avait été prépa FAMI

rée par le ministre français Choiseul, dans le but de mettre une digue à la suprématie croissante de l’Angleterre. Par cette union entre les branches de la maison de Bourbon, les deux puissances se garantissaient réciproquement, sans réserves ni exceptions,

leurs possessions continentales et leurs colonies, fit s’engageaient à se défendre mutuellement contre leurs ennemis respectifs. Sur la simple demande de l’une des deux nations, l’autre était tenue de fournir sous trois mois un secours déterminé en hommes et en vaisseaux de ligne. La paix ne devait être faite qu’en commun et toutes les alliances étrangères seraient concertées entre les deux parties contractantes. Le roi desDeux’-Siciles et le duc de Parme, issus des Bourbons d’Espagne, étaient admis dans cette association, dans laquelle, au reste, le premier refusa d’entrer, et qui ne produisit pas les grands résultats "qu’on s’en était promis. Toutefois, quoique tombé en désuétude, le pacte de famille fut invoqué à diverses reprises : il servit de prétexte à l’Espagne, en 1793, dans ses folles réclamations en faveur de Louis XVI et dans la guerre qu’elle fit à la République française ; et Louis XVIII l’invoqua également, en 1823, lorsqu’il intervint en faveur de Ferdinand VII contre les libertés espagnoles.

Société des familles. Après l’insurrection de la Société des droits de l’homme, en 1834, les républicains vaincus, mais non découragés, organisèrent la Société des familles, dont les principaux-chefs furent MM. Blanqui, Barbés et Martin Bernard. Ce fut, depuis 1830, la première société réellement secrète ; la réception était entourée d’une solennité et subordonnée à un interrogatoire et à un serment : « Je jure d’obéir aux lois de l’association, de poursuivre de ma haine et de ma vengeance les traîtres qui se glisseraient dans nos rangs, d’aimer et de servir mes frères, de sacrifier ma liberté et ma vie. » Chaque soldat de la société devait se fournir de poudre et de munitions, être prêt à suivre les ordres qui lui seraient donnés, garder une discrétion absolue et faire de la propagande. De temps en temps, il était convoqué aux réunions de la famille dont il était membre. Ces réunions étaient le seul acte par lequel l’association se reliait. Dans ces assemblées de famille, le chef se faisait rendre compte des démarches de ses hommes, tant.pour l’approvisionnement que pour la propagande ; il

recevait avis des demandes d’affiliations et prenait jour pour les réceptions. Le chiffre de chaque famille ne devait pas dépasser une douzaine d’hommes. Un certain nombre de familles recevaient la direction d’un chef appelé chef de section ; les chefs de section relevaient d’un commandant de quartier, lequel était sous les ordres d’un agent révolutionnaire qui devait communiquer avec le comité ; le comité devait rester inconnu jusqu’au jour de la bataille. Dans les premiers mois de 1836, les membres des familles s’élevaient au nombre d’un millier d’hommes que l’impatience d’agir dévorait. M. Luprestre-Dubocage, avec une douzaine de membres réunis chez lui, fut arrêté, et l’on trouva à son domicile de grandes quantités de munitions. Cependant les arrestations se bornèrent là. On décida d’organiser une fabrique de poudre. Un ancien commerçant, M. Beautour, loua sous son nom, rue de Loureine, n° 113, une maison isolée ; on y construisit un séchoir ; on se pourvut des instruments nécessaires ainsi que des matières premières, et l’on se mit à la besogne. Le soir, entre onze heures et minuit, M. Martin Bernard arrivait à la maison mystérieuse, avertissait de sa présence par une poignée de sable jetée aux carreaux, était introduit et revenait avec une charge de poudre qu’il transportait rue Dauphine, n° 22. C’est là qu’était le dépôt général ; .on y fabriquait des balles, des cartouches, que l’on remettait ensuite aux chefs de quartier. La conspiration fut découverte avant qu’on fût arrivé à un résultat. La maison de la rue de Loureine et celle de la rue Dauphine furent cernées, et les principaux chefs arrêtés. M. Blanqui avait sur lui la liste des membres de l’association ; on lui arracha son portefeuille ; mais à peine le commissaire l’avait-il entre les mains que M. Blanqui, par un mouvement rapide, le ressaisissait et trouvait le moyen d’y prendre les pièces compromettantes et de les avaler. Quarante-trois accusés comparurent en justice au mois d’août 1836. Six fuient condamnés à deux ans de prison et les autres à des peines moins fortes. La Société des familles se transforma et fournit les cadres de la fameuse Société des saisons.

— Hist. natur. Le mot famille est un des termes les plus heureux que l’on ait introduits dans la classification des êtres organisés. Une famille naturelle renferme tous les genres qui se ressemblent entre eux par leurs caractères les plus essentiels. Ce groupe a moins d’importance pratique en zoologie qu’en botanique. Chez les animaux, en effet, les ordres sont assez nettement déterminés pour indiquer d’une manière exacte la place que doit occuper un être dans la série naturelle ; aussi, dans le langage usuel, se contente-t-on le plus souvent d’indiquer ces ordres. On dit, par exemple, que le chat est un carnassier ; l’alouette, un passereau ; la couleuvre, un ophidien ; le hanneton, un coléo PAMI

ptère, etc. En botanique, au contraire, il devient indispensable, pour atteindre le but, de dire le nom de la famille. C’est à Magnol que l’on doit l’introduction des familles dans la science des végétaux ; mais c’est Jussieu qui l’a consacrée, tandis que les zoologistes l’appliquaient.de leur côté au règne animal. « Les familles, dit Ad. de Jussieu, Sont comme les branches d’un grand arbre nées sur un tronc commun, dont chacune, dans son développement, en touche plusieurs autres à la fois et peut même les croiser, dont quelques-unes peuvent en dépasser d’autres, nées au-dessus d’elles ; mais, malgré cette divergence dans un sens et cette confusion apparente, elles convergent toutes vers le tronc et en partent l’une après l’autre sur une seule ligne déroulée de bas en haut... Il y a des familles par groupe, dont tous les genres, très-ressemblants entre eux, chacun touchant à plusieurs autres à la fois, s’agglomèrent dans une certaine confusion. Il y a des familles par enchaînement, dont les genres, liant chacun

celui qui le suit avec celui qui le précède, forment une véritable série dans laquelle le dernier ne se rattache au premier que par cette suite de chaînons intermédiaires et peut quelquefois lui ressembler assez peu. Les premières sont nécessairement plus naturelles que les secondes. » On désigne quelquefois les familles par quelque caractère général, tel que plantigrades, ombellifères, graminées, etc. ; mais, le plus souvent, c’est par le nom d’un genre pris pour type, auquel on ajoute une des désinances ien, ienne ; oïde ; idé, idée ; ace, acée, etc. C’est ainsi qu’on dit, en zoologie, la famille des féliens, des percoïdes, des carabiques, des mytilacés, etc. ; en botanique, la famille des renonculacées, des aroïdées, des iridées. V, pour plus de détails, les mots méthode et taxonomie.

— Bibliogr. : l» Ouvrages philosophiques sur la famille : Trattato del governo délia fatniglia, d’Agnolo Pandolfini (Firenze, 1734, in-4<>) ; Il padre di famiglia, dialogo di Torq. Tasso ; Lud. Septalii, De ratione mstituends et gubernands familis libri V (Mediol., 1826, in-8o) ; la Famille, par J.-M. Dargaud (Paris, Perrotin, 1853, in-8o) ; la Famille, par Paul Janet (Paris, Ladrange, 1857, in-12,20 édit.) ; Trattato del modo da tenere il libro doppio domestico..., composto dal padre Lod. Flori (Roma, 1677, 3 part, in-fol.) ; Kœnigswarter, Histoire de l’organisation de la famille en France (1851, in-8o) ; Conférences du P. Hyacinthe (Revue des cours littéraires, 40 année) ; Conférences de Jules Simon (Revue des cours littéraires, 60 année (1868-1869), pages 295-303, 359-364] ; Conférences de E. Renan (Rev. des cours littéraires (même année), p. 381J.

20 Journaux. Plusieurs journaux s’adressent spécialement aux familles. Voici les principaux : la Famille, organe ■politique et social, littéraire et scientifique des intérêts généraux (6 mai-17 juin 1848 ; elle avait paru sous le titre de la Famille, moniteur des associations mutuelles sur la vie, etc.) ; la Famille, journal de l’ordre social, recueil ancien "et complet, pittoresque et caricatural ; a pris plus tard le titre de Journal-Musée (avril 1849) ; la Famille, encyclopédie du foyer (Paris, 1865) gr. in-8o) ; la Famille, journal pour tous (Lausanne, 1865, in-go) ; le Père de famille, feuille périodique, par Singlin (an VI, in-8o) ; le Père de famille, journal des intérêts, des droits et des devoirs (Paris, 1831, in-8o ; publié par la Société d’instruction nationale et du bien public) ; Gazette des familles, journal de modes (1865, in-4o) ; Magasin des familles, guide des dames et demoiselles, modes, littérature, etc. (1849, in-8o) ; l’Ami chrétien des familles, ’pas Goguel (1859, gr. in-8o) ; la Sentinelle, journal des familles protestantes (Valence, 1844-1854) ; l’Ami de la jeunesse et des familles, publication protestante, paraissant depuis 1827 (in-4°) ; Y Ange de la famille, annales de l’œuvre de l’adoption depuis 1860 (in-8°) ; le Courrier des familles, santé et intérêts agricoles, depuis 1855 (in-4°) ; le Conseiller des familles, par d’Exauvilliers et l’abbé Glaize (1833-1837, journal religieux) ; le Cri des famille, ancienne Gazette de Sainte-Pélagie, journal philanthropique (janvier 1834), parut ensuite sous le titre d’Observateur cri des familles (juillet-septembre 1834). ; le Conseiller moral des familles (1865, gr. in-8o) ; le Correspondant des familles, revue catholique ; le Messager des familles, magasin complet du foyer domestique (1865, in-S») ; la Bibliothèque des familles (éduc. mor, et rel.), par P. Zaccone (Paris, 1852, in-8<>). Citons surtout : la Semaine des familles, revue mensuelle, sous la direction de M. Alfred Villemain (l^f octobre 1858), et le Musée des familles, rédacteur en chef, Pitre-Chevalier, qui se publie régulièrement depuis 1833 {gr. in-8», avec table générale des vingt premières années).

— Allus. litt. Où peut-on être mieux qu’au

sein de sa famille ? Vers de l’opéra de Lucile, paroles de Marmontel, musique de Grétcy.

Dans l’application, ce vers s’emploie tantôt au propre, et alors il revêt une acception sérieuse ; tantôt au figuré, et dans ce cas c’est toujours d’une manière ironique et plaisante. C’est ainsi qu’un âne ayant pénétré un jour dans la cour d’un collège, un rhétoricien se permit d’excuser le malencontreux, baudet en disant :

Oi peut-il être mieux...

M. Prudhomme désapprouvait complète FAMI

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ment ce vers, où il ne voyait qu’une lapalissade. Le bon bourgeois l’avait compris ainsi : Où peut-on naître mieux qu’au sein de ta famille ?