Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/attaché, ée part. pass.

Administration du grand dictionnaire universel (1, part. 3p. 881).

ATTACHÉ, ÉE (a-ta-ché) part. pass. du V. Attacher. Lie, retenu par un lien quelconque : Des mains attachées derrière le dos. Des chevaux attachés à une voiture. Elle fut attachée à la queue d’un cheval. (Acad.) Je l’avais vu attaché sur son lit, se débattant dans ses liens et poussant d’horribles cris. (De Barante.) Mes chevaux étaient attachés çà et là autour de ma tente. (Lamart.) Ces bateaux pêcheurs sont munis de deux votles latines attachées en sens inverse à deux mâts di/férents. (V. Hugo.)

Au pied du plus haut mât Colomb est attaché. Le collier dont je suis attaché

De ce que vous voyeï est peut-être la cause.

LA FONTAIHE.

Il Fixé avec un objet destiné à cet usage : épingle, un clou} un bouton. moins profondément : Une

 ; flancs d’un animal. Le taon ... du noble coursier le rend bientôt indocile, emporté, furieux. (Fr. Soulié.)

— Par anal. Adhérent, en parlant d’un muscle, d’un tendon ou de quelque partie du corps : Plusieurs muscles sont attaches au globe de l’œil. Après le cou viennent les épaules, où les bras sont attachés. (Boss.) Sa couronne de diamants ne fatiguait pas d’un poids abrutissant sa tète fine et admirablement attachés. (G. Sand.)

— Par ext. Fixé, tourné fixement, en parlant du regard : Tenir ses yeux attachés sur quelqu’un, sur quelque chose. Les personnes nées dans l’élévation deviennent comme un spectacle public, sur lequel tous les regards sont attachés. (Mass.) Idoménée avait les yeux attachés.sur lui. (Fén.) Je restai à genoux, les yeux attachés sur la pierre. (Chateaub.) Les yeux attachés au ciel, où le croissant de la lune errait dans les nuages, je réfléchissais sur ma destinée. (Chateaub.)

Aux hasarda de ces nuits ne livrons pas nos voiles, Sur le phare immortel veillons l’œil attaché.

ATT

881

Il Enfoncé plus

flèche attachée c

attaché

Mes regards i

r ses yeux languissants,

du trouble de mes sens.

C. Délavions.

11 Appuyé sur ou contre : Nos pieds sont ataches au sol. Et je verrais leurs fronts •attachés à la terre.

Voltaire.

Lorsque d’un saint respect tous les Persans touch N’osent lever leurs fronts à la terre attachés.

il Retenu : Un navi

les vents contraires.

Elle veut fuir, et ses pas sur la rive Sont attachés par un trouble imprévu.

— Condamné, astreint à vivre sur ou dans : Je ne suis pas attaché à ce logement. L’homme est attaché à la terre. Je me trouve attaché à cette vaste étendue, sans savoir pourquoi. (Pasc.) Un être faible et mortel, attaché à ta terre, a osé se transporter sur un élément inconnu et terrible. (Thomas.) u Retenu dans un lieu :

e attache au rivage par

Turc

près de m

in zèle si

non père.

Attachés c

— Qui fait partie de qui dépend de : Être attaché à telle administration, à tel ministère. Il est attaché au service d’un prince étranger. Il y avait là deux Allemands attachés au prince. (J.-J. Rouss.) Pitt commença par être attaché au barreau. (Villem.) x du Dieu vivant pontifes et soldats,

autels, exercés aux combats,

la parole et vengent son injure.

La Harpe.

Il Condamné, astreint : Être attaché à de pénibles devoirs. Quand on est attaché aux affaires, on ne peut plus rompre ses liens. Heureux qui, satisfait de son humble fortune, Libre du joug suptrbe où je suis attaché. Vit dans le rang obscur où les dieux l’ont caché.

Il Dont on ne peut se débarrasser, qui est fatalement uni à : La Pologne est une révolution vivante attachée à la Russie, et que celleci traîne comme son boulet de punition. (StMarc-Gir.)

— Qui résulte de qui est la conséquence ou l’accompagnement de : Leur existence, leur fortune y est attachée. Je voudrais toucher les émoluments attachés à cet emploi. Que de

sont attachées. (Acad.) Le bonheur n’est pu, attaché à l’éclat du rang et des titres ; il n’est attaché qu’à l’innocence de la vie. (Mass.) Non, mes chers frères, la vertu de la parole de la croix n’est pas attachée à celle du ministre qui l’annonce. (Mass.) L’abus est un vice attaché à toutes les lois, à toutes les institutions des hommes. (Volt.) Ces désagréments attachés aux arts de l’esprit n’affaibliront pas l’amour que j’ai pour eux. (La Harpe.) Il a épuisé toutes les calamités attachées à toutes les conditions de la vie. (Barthél.) Le bonheur de chaque homme est attaché au bonheur du genre humain. (B. de SVP.) La crédulité est une faiblesse attachée à notre nature. (De Ségur.) Au baptême est attachée la grâce de nous purifier du péché originel. (De Cressé.) Notre honneur et notre intérêt sont attachés au salut de la Pologne. (L. Jourdan.)

Le calme e

Mille et mille douceurs y semblent attachées Corneille.

Hélas ! que de dégoûts

Attachés à ce rang qui fait tant de jaloux !

C. Delavigne.

il Inhérent à :

L’on me dit : Je vous aime ; et je crus, comme un sot, Qu’il était quelque idée attachée à ce mot.

Voltaire.

— Fig. Uni, lié par affection ou par un lien moral quelconque : Être attache à ses parents, à sa femme, à ses enfants. C’est un homme qui m’est frès-ATTACHÉ. Il est attaché

parti de la noblesse. Ce prince était très-

taché aux Français. Cassien, quoique très- attaché aux Grecs, leur préfère saint Jérôme. (Boss.) Le roi qui, dès son enfance, l’avait vu toujours attentif au bien de l’État, et tendrement attaché à sa personne sacrée. (Boss.) Nos esprits attachés à la terre entendrontils ce concert céleste ? (Boss.) Par combien d’imperceptibles liens sommes-nous attachés au monde ! (Boss.) Je me suis fort attachée à sa personne. (Mme de Sév.) Le duc et la duchesse de Choiseul m’accablent de bontés ; je leur suis attaché à la fureur. (Volt.) Les peuplas en apparence les plus malheureux sont ceux qui se montrent le plus attachés au sol de la patrie. (Alibert.) Dante sortait d’une famille attachée au parti des Guelfes. (Villem.) On proposait à Amyot d’écrire l’histoire de France. Il répondit : Je suis trop ATTACHÉ aux rois pour me charger d’écrire leur vie. (***),

A ton maître toujours sois attaché, Adèle.

Étienne.

L’un à l’autre attachés depuis notre naissance. Voltaire.

Il Qui tient à : Être attaché à la vie. Être trop attaché à ses intérêts, à l’argent. Il est frés-ATTACHÉ à ses idées, à ses opinions. Pour être honnête homme, il faut être attaché à tous ses devoirs. Il rSétait point attaché aux richesses. (Fén.) L’Égypte était extrêmement attachée aux anciennes coutumes. (Boss.) Les Grecs, plus attachés à la métempsycose, eurent beaucoup de résurrections. (Volt.) Quiconque est plus attaché à sa vie qu’à son devoir ne saurait être solidement vertueux. (J.-J. Rouss.) Le genre humain est inviolabtement attaché à certaines vérités bonheur. (Frayss.) L’ignoran la routine, et ennemie de tout perfectionnement. (J.-B. Say.) À mesure que l’homme se développe, il devient plus attaché à ce qu’il possède. (Thiers.) Il Obstinément et constamment appliqué à : Être attaché aux pas, à la poursuite de quelqu’un,

.., Vous m’avei vue attachée & vous nuire. Racine.

Et j’ai vu sa valeur & me plaire attachée.

Ce n’est plus une ardeur dans mes veines cachée. C’est Vénus tout entière à sa proie attachée.

Racine.

Et mon âme, attachée au serment qui me lie, Lui doit encor sa foi quand il m’ôte la vie.

Voltairb.

— Absol. Distrait, préoccupé, absorbé dans une occupation :

... Il avait a ses pieds maint volume, Et ne vit presque pas son ami s’avancer,

Attaché selon sa coutume. La Fontaine.

ché, ni moins sensuel... (Mass.) On manque quelquefois sa fortune pour être trop attaché, comme on se ruine en faisant trop de dépense. (Girard.) Ce sens a vieilli.

— Substantiv. Personne unie à une autre par des liens d’affection : Il faut finir ses jours comme on les a commencés ; il y a tantôt quarante-cinq ans

attachés. (Volt.)

— s. m. Celui qui est attaché à une ambassade, à une légation : Un attaché d’ambassade, ou simplem. : un attaché. Les sujets appartenant à ta classe des attachés d’ambassade ont la manie de dire des mots à ia Talleyrand. (Balz.) L’ébahissement fut grand parmi les secrétaires, attachés et scribes d’ambassade. (Ancelot.) C’était un simple attaché, très-flatté de rouler, aux frais de l’État, dans une belle chaise deposteneuve. (Gér. de Nerv.)

— Syn. Attaché, avare, inci-rcsc. L’homme avare ne dépense pas volontiers : L’avare n’amasse que pour amasser. (Mass.) L’homme attaché a la crainte de diminuer ce qu’il a : On manque quelquefois sa fortune pour être trop attache, comme on se ruine en faisant trop de dépense. (Girard.) L’homme intéressé est âpre au gain et avide de profit : Speusippe parut intéressé, ayant exigéunerécompense de ses disciples, contre la coutume et les principes de Platon. (Roll.)

— Syn. Attaché, adhérent, annexé. V. ADHÉRENT.

— Allus. littér. C’e.t Venu» tout entière a •n proie ntiacheo. Allusion à un vers de Racine (Phèdre, acte t«, scène m). Phèdre découvre à sa confidente l’amour insensé qu’elle a conçu pour Hippolyte, fils de son époux :

Pour bannir l’ennemi dont j’étais idolâtre. J’affectai les chagrins d’une injuste marâtre.

Vaines précautions ! cruelle destinée ! ’ Par mon époux lui-même h Trézène amenée, J’ai revu l’ennemi que j’avais éloigné ;

Ma blessure trop vive aussitôt a saigné.

Ce n’est plus une ardeur dans nies veines cachée :

C’est Vénus tout entière à sa proie attachée.

Ce vers se cite en parlant de ceux qui sont les victimes d’une passion implacable, et cette passion est presque toujours celle de l’amour : ■ Il se soustraira, dites-vous, à la bienveillance de Mme de Gabrial. Parbleu ! je l’en défie ; on n’échappe pas à la bienveillance do Mme de Gabrial, quand elle est en humeur de philanthropie :

C’est Vénus tout entière a sa proie attachée. Régnier aura beau s’en défendre, elle fera son bonheur, elle sera sa Béatrix. »

Ch. de Bernard.

« Les anciens, persuadés qu’une divinité courroucée où malfaisante en voulait à la vertu de leurs femmes, avaient imaginé de lui livrer des victimes volontaires, espérant ainsi que Vénus, tout entière à sa proie attachée, ne troublerait pas leurs unions légitimes ; semblable à un animal féroce auquel on jetterait un agneau pour le détourner d’un homme. »

J. de Maistre.

« Le coq de bruyère est probablement, de tous les oiseaux, celui dans l’existence duquel l’amour tient le plus de place. Et cette folie amoureuse est caractérisée par une succession d’extases, dont les accès se renouvellent périodiquement chaque matin et chaque soir. Pendant tout ce temps-là, la pauvre bête est si fort en proie à Vénus, qu’elle en perd le manger et le boire, et jusqu’à la faculté de voir et d’entendre le péril. L’expression poétique que je viens d’emprunter à Racine me fournit l’occasion de m’étonner que la reine de Cythère n’ait pas eu la fantaisie de se donner un attelage de coqs de bruyère. • Toussenel.

« Le beau Clinias s’est lancé, d’une si furieuse ardeur, dans les plaisirs, qu’il est vieux avant quarante ans. Ses dents branlent, ses cheveux sont tombés ; quand il parle, uti souffle de mort s’échappe de ses lèvres livides. Il marche chancelant et courbé ; l’art est impuissant, la maladie est sans espoir :

C’est Vénus tout entière a sa proie attachée. • Louis Veuillot.

« Hermione, Roxane, Phèdre, sont trois personnifications de l’amour sensuel. Toutes les trois sacrifient leur amant à leur passion ; deux s’y sacrifient elles-mêmes. Quoi de plus semblable au premier aspect ? Le poûte les fait passer par les mêmes alternatives. Elles ont une scène d’espérance, une de désespoir, une de fureur ; c’est le même amour, furieux,

C’est Vénus tout entière a sa proie attachée. Et cependant que de variété dans cette ressemblance ! qui diffère plus d’Hennione que Phèdira, de Phèdre que RoxaDeî» Nisabd.