Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/atoll ou attoll s. m. (supplément 2)

Administration du grand dictionnaire universel (17, part. 1p. 391-392).
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  • ATOLL ou ATTOLL 3. m. (du mot maldive

atoll).Qèog. Ile corallienne formant un anneau continu autour d’un lac.


— Encycl. La forme des atolls est éminemment variable, soit qu’ils se présentent en anneau régulièrement arrondi, plus ou moins allongé, triangulaire, soit que par une solution de continuité il n’existe plus que deux des côtés du triangle. Dans ce dernier cas, les profondeurs de l’ouverture sont très variables et parcourues généralement par des courants rapides se dirigeant vers la mer.

Généralement, les atolls se présentent sous l’aspect d’une plate - forme émergée, couverte de végétation et entourée d une plage déclive, inclinée souvent sous un angle de 30» à. 35°, qui s’élève elle-même de 2 ou 3 mètres au-dessus de la plage ou plate-forme littorale située au niveau de la basse mer. Cette plate-forme peut avoir de 3o à 100 mètres de large, et son bord extérieur, incrusté de nullipores, est souvent surélevé ; dans ses anfractuosités vit toute une population d’animaux marins échinodermes, mollusques et crustacés.

Après cette plate-forme littorale, on trouve un bas-fond s’étendant a une distance de 30 à 200 mètres du rivage. À ce bas-fond succède, sans transition, une mer très profonde, tandis que la couche d’eau recouvrant le bas-fond n’était pas supérieure à 15 mètres. La plage est composée de débris de coraux et de coquilles brisées, de cailloux calcaires, dépôts sans cesse augmentés de sable calcaire et de coraux brisés ; et, à son pied, viennent s’entasser des blocs, souvent

Ïdus gros qu’un pavé, jetés là par les fortes araes qui les ont détachés : « De loin, dit Dana, son extrême blancheur et sa régularité lui donnent l’aspect d’un quai ou d’une fortification élevée autour d’un massif de verdure. >

Les parties de la plate-forme émergée, qui sont à peu près au même niveau que la mer, ne sont pas couvertes de végétation, mais présentent, au contraire, l’aspect d’un amas de décombres : «Des blocs de roche corallienne, dont quelques-uns ont de 2 à 3 mètres cubes, gisent entassés les uns sur les autres, complètement noircis par l’exposition à l’air ou par les lichens et rendant un son métallique sous le choc du marteau. Il y a de ces blocs qui ne sont que des fragments de coraux ; d’autres ont la structure conglomérée du récif lui-même, auquel ils ont été arrachés par les vagues de tempête. • (De Lapparent.) A mesure que la plate-forme émerge, les amas de blocs se recouvrent d’un sable corallin coloré sur une épaisseur de om,10 à om,13 par des matières organiques ; en même temps la végétation commence à paraître et devient de plus en plus épaisse à mesure qu’on avance dans 1 intérieur, où elle finit par devenir luxuriante.

Au milieu de chaque atoll existe une lagune dont la profondeur varie avec l’importance de l’îlot ; souvent, lorsque celui-ci est très petit, il arrive que cette lagune est à sec, son fond restant chargé d’incrustations salines. Au contraire, la lagune des grands atolls peut atteindre jusqu à 100 mètres de

Frofomleur. Si les pluies sont abondantes, eau douce finit par prédominer dans les lagunes des petits atolls ; il n’en est pas de même dans les grands. Il est de règle générale que le bord du récjf « qui est tourné vers la lagune est ordinairement en pente douce et prolongé par une plate-forme analogue à celle qui règne à l’extérieur et où naissent parfois des coraux, quoique, le plus souvent, le fond soit uniformément de sable sans coraux vivants ». On remarque que, dans beaucoup de petits atolls, la plage de la lagune se compose d’une vase plastique brune ou blanche produite par la trituration des coraux.

L’Ile d’Anegada, dans les Indes occidentales, renferme, d’après Schomburgh, des dunes formées par le sable corallien hautes de plus de 12 mètres. On en remarque de semblables dans l’Ile d’Oahu qui atteignent du côté du vent 13 et 14 mètres. (Elles sont formées par des couches successives de sable corallien de om. Ol d’épaisseur, dépourvues de débris coquilllers, que le vent s’est montré impuissant à déplacer. »

Les savants qui ont observé les atolls ont tous remarqué qu’à l’extérieur de ces Iles coralliennes la profondeur de la mer va en augmentant avec rapidité ; il en est de même au large des barrières de récifs. Ainsi, «tout près de l’angle de l’île de Metra (Talti), une sonde de 300 mètres ne rencontre pas le fond ; pour l’atteindre à 1,600 mètres au large, il faut descendre jusqu’à 1.100 mètres». Jusqu’à 500 mètres du rivage, la pente est doucement déclive, puis elle devient beaucoup plus accentuée, atteignant une inclinaison de 40° à 500, et l’on a toutes raisons de croire qu’à de grandes, profondeurs les parois deviennent verticales ou même en surplomb. Les atolls ne contiennent que très peu de

terre habitable, — dans les Iles Paumautou 24

et dans l’archipel des Iles Gilbert ; la proportion est encore plus faible dans les Carolines et n’est plus que de 1 pour 100 dans les lies

Marshall et de - pour 100 dans les lies des

3 Pêcheurs, « encore cette superficie de terre habitable est-elle placée dans des conditions très précaires ». Les pluies si fréquentas eo-is

ATOL

l’équateur et la nature du sol, formé de sable corallien blanc réfléchissant la chaleur sans l’absorber, font que l’eau douce ne manque jamais, et il est facile de se la procurer en forant des puits d’une profondeur de 2 à 3 mètres ; l’évaporation est en effet très faible. • Mais cette ressource n’en demeure pas moins précaire et ne peut suffire qu’aux seuls usages domestiques. •

La végétation des atolls est peu variée ; les arbres et les plantes qu’on y rencontre tirent leur origine de graines déposées là par les oiseaux, charriées pnr la mer ou apportées par les vents. Aussi n’en compte-t-on qu’un petit nombre d’espèces. De Lapparent nous apprend que la flore des Paumautou ne compte qu’une trentaine d’espèces ; « de ce nombre sa trouve le cocotier, si précieux à tint d’égards et susceptible d’être utilisé à la fois pour l’alimentation, le vêtement et le logement des insulaires». Quanta la civilisation, « on se figure aisément ce qu’elle peut être dans un milieu où toute agriculture est impossible et où les seules matières minérales, en dehors du carbonate de chaux, sont des fragments de pierre ponce flottés par l’Océan ou des morceaux de roches dures qui sont venus s’échouer sur la plage avec des souches d’arbres auxquelles ils étaient restés adhérents ».

Ainsi, lorsque Wilkes et son expédition atterrirent à l’Ile Bowditch, avant 1840, grande fut la stupéfaction des indigènes, qui, paralt-il, ne se figuraient pus qu’il pût exister, en dehors d’eux, des créatures humaines dans ce bas monde, et peut-être l’univers se réduisait-il pour eux au groupe d’atolls dont cette lie fait partie.

Il est important de signaler la grande influence que les atolls exercent sur les courants d’air. On peut considérer chacun d’entre eux comme un foyer de chaleur due à leur température élevée et constante ; chacun de ces foyers représente une colonne d’air chaud dont la base est égale à l’atoll lui-même et la hauteur toujours considérable, et cette colonne suffit, si petit que soit l’Ilot, pour résister au passage des vents. ■ Ainsi, d’après Dana, Hague a souvent observé, sur l’île Jerwis et deux Ilots voisins, le remarquable phénomène d’une rafale de pluie coupée en deux, dès la rencontre de l’Ile, par le courant vertical d’air chaud établi au-dessus : du sable corallien, •

Il est utile de signaler certain groupe d’atolls des Maldives, celui de Malhos Mahdoo, « dont l’ensemble dessine un grand relief annulaire discontinu, et qui, par sa forme, mérite proprement le nom d’atoll ; or, non seulement les Ilots boisés qui en constituent le bord extérieur, mais encore les Ilots qui surgissent dans la lagune, sont tous individuellement constitués à l’état d’atolls, c’est-à-dire d’anneaux enfermant chacun un lac intérieur. Plusieurs de ces atolls secondaires ont de 5 à 6 kilom. de diamètre, et les lagunes y sont profondes de 3 à 6 mètres >.

Darwin a observé que les petits atolls extérieurs de ce groupe ont leurs grands axes alignés généralement suivant la courbe moyenne du récif général qui les comprend tous, et a encore remarqué que les atolls secondaires ne se rencontrent qu’au voisinage de canaux largement ouverts, < qui découpent le récif principal et donnent à la mer un libre accès dans 1 intérieur >.

Théorie de la formation des atolls. En 1842, Darwin, et plus tard Dana, le grand

féologue américain, émirent cette idée graniose que • chaque atoll est, en quelque sorte, un monument funéraire qui marque la place d’une lie engloutie et qui atteste, en même temps, les efforts faits par le monde organique pour soustraire à la destruction une partie du domaine terrestre ». Selon ces auteurs, l’émersion de l’atoll et le développement de la végétation à sa surface n’impliquent pas nécessairement l’arrêt du mouvement de descente, mais seulement un ralentissement qui permette aux vagues « d’entasser sur la plateforme corallienne les débris qui s’élèveront au-dessus du niveau de l’Océan «.Dès 1851, Louis Agassiz montrait que cette théorie ne s’appliquait pas aux récifs de la Floride, et, en 1863, Seroper faisait une remarque analogue pour les lies Pelew et la renouvelait en 1869. Presque en même temps (1870), Rein observait que les Bermudes ne présentaient pas de signes d’affaissement et en concluait que ces lies pouvaient tirer leur origine de quelque protubérance sous-marine ayant servi de base à des colonies de polypiers et autres animaux marins sédentaires dont l’accumulation avait fini par élever l’édifice jusqu’à la hauteur de la zone où les coraux sont susceptibles de vivre.

Tel était l’état de la question lorsque, en 1880, J. Murray publia le résultat de ses observations au courant de la campagne scientifique du « Challenger », et l’on doit reconnaître, avec Geickie et de Lapparent, que les travaux de Murray ont enlevé toute base positive à la brillante et ingénieuse conception de Darwin. Du même coup s’écroulaient, d’après de Lapparent, les spéculations du savant anglais sur la grande durée de l’époque actuelle : « car il n’est plus permis de compter à son actif autre chose que le couronnement vraiment corallien des plates-formes. Et, dût-on admettre aue la vitesse d’accroissement des récifs n a pas varié, il y a loin


de ce maximum de 20 brasses aux épaisseurs de 300 mètres et plus qu’admettait Darwin quand il attribuait au corps même de la constitution corallienne le calcaire du talus des blocs éboulés. >

On doit tenir pour acquis que, dans une plate-forme corallienne, c est toujours le bord extérieur qui doit s’augmenter davantage, pat cela même qu’il est plus directement ex Ïiosé à l’action des lames, quel que soit d’aileurs son mode de constitution. Si l’on fait aussi entrer en compte que le développement des polypiers, loin d’être favorisé par les sédiments descendus des plans déclives de l’Ile, est, au contraire, entravé par eux, la forme la plus ordinaire des barrières s’élevant autour des lies émergées doit être la forme annulaire.

On avait été frappé de bonne heure par la forme annulaire de la grande majorité des atolls. Les uns • se contentaient d’admirer les sages lois de la nature », et le « merveilleux instinct des coraux, qui leur faisait choisir la disposition la mieux appropriée pour résister aux attaques de l’Océan » ; les autres crurent pouvoir avancer que cette forme annulaire provenait de celle de la base et que les colonies de coraux s’étaient développées sur les bords du cratère d’un volcan éteint. Il faut reconn»ître, avec de Lapparent, que « la nature volcanique de presque toutes les lies du Pacifique prêtait d’ailleurs à cette hypothèse un certain caractère de vraisemblance ». Mais cette dernière manière de voir fut loin de satisfaire tout le monde, et les plus graves objections ne tardèrent pas à s’élever. Pouvait-on admettre, en effet, que tous les cratères sur lesquels s étaient établis les coraux auteurs de la fondation des atolls se fussent enfoncés dans la mer après la formation de ces Ilots de colonies en pleine prospérité ? Une autre objection venait s’ajouter, et d’une importance non moins grande : fallait-il que le fond de l’Océan < fût tapissé de cratères » ? On compte, en effet, jusqu’à soixante-dix atolls dans un seul archipel ; et comme les coraux cessent de se développer à une profondeur moindre de 40 mètres, ces cratères devaient tous avoir la même hauteur, « fait sans exemple dans les régions volcaniques connues ». Et encore eût - il été de toute nécessité que certains de ces cratères mesurassent 93 kilom. au moins de diamètre, et que leur grande majorité eût mesuré entre 37 et 50 kilom., dimensions que les volcans actuels sont loin de présenter. Enfin, • pour justifier une telle abondance de montagnes cratériformes, aujourd’hui noyées, il faudrait au moins, dans les lies volcaniques du Pacifique, qu’il y eût un nombre considérable de cratères au-dessus du niveau de l’Océan ». La réalité est loin de donner raison à cette supposition, si l’on observe notamment les Marquises, les Gambier nu les lies de la Société, archipels tous trois les plus voisins des Paumautou et exceptionnellement riches en récifs coralliens.

II est bon de ne pas oublier que beaucoup de protubérances d’origine volcanique se sont élevées par des dépôts de débris d’organismes calcaires, et que ces accumulations se sont produites dans les conditions particulièrement avantageuses que présentent les régions tropicales. Si l’on voit ces protubérances s’approchant maintenant assez de la surface pour servir d’assises aux colonies de coraux, on doit considérer qu’elles étaient loin d’atteindre, dés le début, les hauteurs auxquelles les organismes coralligènes peuvent commencer à vivre et à prospérer. Cet exhaussement est causé par l’action des vagues qui brisent les coraux, qu’elles réduisent en sable fin ou en vase. La réunion de ces deux derniers éléments forme une accumulation de calcaire compact, tandis qu’autour de l’atoll l’eau, sans cesse chargée de particules calcaires, affecte une apparence laiteuse pour redevenir claire après les tempêtes. Les particules tenues en suspension se déposent au fond et leur accumulation donne naissance à des calcaires compacts à grains impalpables, dont la formation est favorisée par la température élevée de l’eau de mer chargée, en outre, d’acide carbonique. Cet acide, dit de Lapparent, provient soit de l’atmosphère, soit de la respiration des organismes, soit enfin de la décomposition de tous les restes végétaux ou animaux qui sont épars sur le récif. Le gaz, ainsi mis en liberté précisément à l’endroit où sa présence est nécessaire, se charge du carbonate de chaux abondamment répandu dans les eaux superficielles et l’abandonne ensuite autour des fragments qui l’attirent. Ainsi se constitue un calcaire très compact, plus ou moins coquillier, suivant l’abondance des mollusques, des oursins ou des spongiaires qui vivaient sur le bord du récif ».

D’après Murray, sur les plates-formes immergées, le récif constituera une sorte de cuvette, épousant le contour originel de la plate-forme et dont les bords seuls arrivent en bourrelet jusqu’à sa surface. « Quand le travail des vagues y aura fait naître l’amoncellement de blocs rejetés par la tempête, on aura un atoll complet, sans qu’aucun mouvement du sol ait concouru à sa formation. » II faudrait donc rechercher, dans la forme de la protubérance servant de support, et aussi dans tes conditions plus ou moins avantageuses qu’ont rencontrées les coraux pour se développer et se nourrir, la cause des par particularités qui peuvent distinguer chaque atoll.

On peut rechercher l’origine des atolls des Maldives dans une longue chaîne de montagnes sous-marines à surface et à contours irréguliers et inégaux, tandis que les Laquedives, les Carolines et les Chagos sont des bas-fonds coralliens et non, ainsi que l’avançait Darwin, d’anciens récifs submergés, fonds coralliens trop récents pour avoir atteint la surface, ou encore trop profonds pour que les coraux aient pu s’y établir, Il résulte encore des observations de Murray que l’hypothèse de l’affaissement du fond, telle que la concevait Darwin, n’a pas à intervenir pour justifier l’énorme épaisseur de certains récifs ni la forme abrupte de leur profil ; le bord reste souvent vertical jusqu’à 60 ou 70 mètres de profondeur. On remarquera que, jusqu’à 300 mètres environ de profondeur et à 360 mètres environ de distance horizontale de la crête, représentant à peu près une inclinaison de 40°, il existe un talus de gros blocs coralliens arrachés par les vagues, détachés du bord du récif, « surtout dans les endroits où la compacité de la roche aurait pu être affaiblie par le travail des mollusques perforants », et qui sont venus rouler, puis s’arrêter à son pied. Au delà de ce talus, c’est une pente de sable corallien descendant sous un angle de 25° à 30° et à laquelle succède un fond, incliné de 6° seulement, couvert de débris volcaniques.

L’installation d’une grande colonie ou plantation de coraux sur le sommet d’un cône volcanique submergé peut suffire à expliquer la formation des plus puissants récifs dont la plate-forme sous-marine se prolonge sans cesse, dans la direction de la haute mer, par les blocs que l’action des vagues détache continuellement. C’est à ces phénomènes qu’est due l’apparence que présentent certains atolls ou récifs-barrières, possédant, sans qu’il se soit produit aucun affaissement, une portion abrupte d’une grande épaisseur, « alors que le couronnement seul est formé par des coraux en place ». Le reste se compose de débris de coraux, d’échinodermes et de coquilles brisées de mollusques. 11 faut ajouter, avec de Lapparent, que la nécessité d’une formation de talus de blocs ne s’impose pas pour une semblable formation ; cet effet peut, en effet, « se produire par la simple superposition d’un récif vivant à une plate-forme constituée par une accumulation préalable de coquilles calcaires ».

Il peut, du reste, arriver que dans les régions tropicales une plate-forme de ce genre puisse, sous l’influence du temps et sous l’action des infiltrations, perdre ses « caractères originaires et devenir très difficile à distinguer de la roche d’un récif proprement dit ». Cependant, en certains cas, il existe des différences rendant la distinction possible. Ainsi, d’après M. Guppy, on observe aux Iles Salomon d’anciens récifs, aujourd’hui soulevés de 30 jusqu’à 300 et même 600 mètres, où le couronnement corallien est relativement mince, le reste se composant d’un calcaire terreux impur où se trouvent en grande abondance les foraminifères et autres organismes pélagiques, tels que les mollusques ptéropodes.

« En résumé, dit de Lapparent, si les affaissements locaux ont pu parfois intervenir dans la formation de certains récifs particuliers, il ne semble pas que le phénomène corallien réclame, comme condition essentielle, une mobilité générale du lit de l’Océan ». Les organismes constructeurs réclament, avant tout, des plates-formes arrivant à moins de 20 brasses de la surface de la mer. Les déjections volcaniques, comme nous l’apprend le même savant, dont nous n’avons fait que suivre les idées dans cet article, ont pu suppléer en ce sens, et cela dans une certaine mesure, au manque de relief du fond et former ainsi un substratum que sont venus augmenter les débris organiques s’accumulant jusqu’à produire des protubérances d’une hauteur suffisante pour que les coraux pussent s’y établir et y prospérer. C’est alors qu’est intervenue l’action des eaux chargées de débris calcaires et de bicarbonate calcique, action qui a fait plus ou moins complètement disparaître « la différence de structure des deux espèces de calcaires superposés ». Le même auteur ajoute que si quelque mouvement du sol vient à déterminer l’émersion d’un récif de ce genre, on sera exposé à attribuer la totalité de son épaisseur à l’activité corallienne, qui pourtant n’est responsable que du seul couronnement. Allant plus loin, le savant géologue dit que les atolls du Pacifique étant toujours établis sur des cônes volcaniques, cette disposition semble propre à suggérer l’idée d’un soulèvement plutôt que celle d’un affaissement. La remarque, au reste, en a été faite par Darwin lui-même, et le grand naturaliste fut le premier à reconnaître que les lignes de volcans marquent toujours des vides en voie d’exhaussement. La masse des continents tend sans cesse à prendre plus d’importance aux dépens de l’Océan dont, par le système des compensations, la profondeur augmente d’autant. « Chaque continent, dit de Lapparent, est ainsi composé de compartiments successivement ajoutés les uns aux autres et dont les bords sont en général des chaînes de montagnes jalonnées par des manifestations volcaniques. » Les chaînes d’îles du Pacifique dessinent donc vraisemblablement les limites futures des portions « de cet océan destinées à s’adjoindre au continent asiatique ou australien ». Il faut considérer chacune de ces chaînes comme indiquant une ligne de dislocation, « encore plus ou moins profondément immergée, mais dont les fentes ont livré passage à des éjaculations volcaniques devenues autant de points d’appui pour les récifs de coraux ». On doit donc considérer qu’il se produit un exhaussement et non un affaissement continu le long de ces lignes ; l’abaissement du fond de la mer ne se fait remarquer qu’au large ; « mais dans ces parties en voie de dépression, l’écorce terrestre comprimée ne se fend pas et n’édifie point de cônes volcaniques ».