Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/alexandrin, ine s. et adj.

Administration du grand dictionnaire universel (1, part. 1p. 194-195).

ALEXANDRIN, INE s. et ad], (a-lék-san-drain, i-ne). Qui est né à Alexandrie ; qui a rapport à cette ville ou à ses habitants : Dans les magnifiques adonies alexandrines, on portait processionnellement l’effigie du dieu jusqu’à la mer, et on le précipitait dans les flots. (Val. Parisot.) || On dit aussi alexandrien et alexandrinien.

Appareil alexandrin, Espèce de mosaïque ou plutôt de marqueterie précieuse, composée de porphyre rouge et vert, de marbre et d’émail, à laquelle l’empereur Alexandre-Sévère, qui, selon Lampride, en fut l’inventeur, avait donné son nom. L’appareil alexandrin servit sous le Bas-Empire à faire des frises, à orner des panneaux, etc. ; il était fort à la mode en Italie et en Sicile au XIIe et au XIIIe siècle.

Dialecte alexandrin. Né de la confusion du dialecte macédonien avec ceux des différentes parties de la Grèce, ce dialecte contenait beaucoup de locutions empruntées à des langues étrangères. C'étaient surtout les Égyptiens, les Syriens, les Juifs, en un mot les populations semi-grecques, semi-orientales, qui en faisaient usage. On donnait le nom d’hellénistes aux écrivains de ces nations qui s’en servaient, d’où le nom d’hellénistique, sous lequel on désignait aussi le dialecte alexandrin. On le trouve bien caractérisé dans les livres de l’Ancien et du Nouveau Testament.

Manuscrit alexandrin (Codex alexandrinus), Nom d’un célèbre manuscrit grec de la bibliothèque du Musée britannique, contenant la Bible des Septante et le Nouveau Testament. L’Ancien Testament y est complet ; il y a quelques lacunes dans le Nouveau. Ce manuscrit forme 4 vol. in-folio ; il est écrit sur parchemin en lettres onciales, sans indication d’esprits ni d’accents, et paraît être de la seconde moitié du VIe siècle. Il fut envoyé à Charles Ier, roi d’Angleterre, par le patriarche de Constantinople Cyrille Lucaris.

Vers alexandrin, Vers français composé de douze syllabes quand la rime est masculine, et de treize quand elle est féminine. La césure doit être immédiatement après la sixième syllabe. Ce nom d’alexandrin vient, selon les uns, d’Alexandre, poète parisien, qui employa le premier ce vers ; selon d’autres, du poëme ou roman d’Alexandre le Grand, commencé au XIIe siècle par Lambert-li-Cors, et continué par le même Alexandre de Paris. || S’emploie substantiv. : La versification française, avec ses alexandrins qui vont deux à deux, a peu de mouvement. (Michelet.) || Absol. : L’alexandrin d’André Chénier est-il celui de Racine ? Évidemment non. (Ste-Beuve.)

— Encycl. On donne au vers alexandrin le nom d’héroïque, parce qu’il est particulièrement affecté à l’épopée et à la tragédie. Ce vers convient aux sujets sérieux et graves, et, sous ce rapport, il remplace l’hexamètre des Latins et des Grecs. Sa forme est celle de l’asclépiade, qui était, lui aussi, composé de 12 syllabes et divisé en 2 hémistiches. Le vers alexandrin est majestueux et solennel ; mais il a les défauts de ses qualités : « Il est beau, dit Voltaire, mais parfois ennuyeux. » Cette invariable césure, ces couples de rimes masculines et féminines se succédant régulièrement, cette symétrie pompeuse ont pour écueil la monotonie. M. Proudhon ne partage pas à cet égard l’opinion générale ; il admire le mécanisme de l’alexandrin classique. « Des couples redoublés, dit-il, deux hémistiches égaux pour le vers, deux vers couplés par la rime pour le distique, puis encore deux couples de sexe différent pour former le quatrain, voilà ce qui fait la magnificence et la force de la poésie française, la supériorité de notre versification sur celle des anciens. » Malgré l’autorité de M. Proudhon, on peut croire que le romantisme avait quelque raison de chercher à assouplir la raideur de notre vers héroïque, à mettre quelque variété dans cette phrase carrée, à rendre un peu plus vivante cette beauté géométrique. S’il était nécessaire de montrer par des exemples que l’alexandrin, en devenant plus libre dans ses mouvements, n’a rien perdu de sa beauté, nous n’aurions qu’à ouvrir au hasard un des ouvrages de notre grand romantique.

— Épithètes. Long, noble, nombreux, harmonieux, majestueux, épique, héroïque, grave, uniforme, monotone, ennuyeux, pédantesque.