Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/SHAFTESBURY (Anthony ASHLEY-COOPER, comte DE), homme politique et philanthrope anglais

Administration du grand dictionnaire universel (14, part. 2p. 657-661).

SHAFTESBURY (Anthony ASHLEY-COOPER, comte DE), homme politique et philanthrope anglais, né en 1801. Jusqu’à la mort de son père (1851), il fut connu sous le nom de lord Ashley. Il fit ses études à l’université d’Oxford, entra en 1826 a la Chambre des communes, comme représentant du bourg de Woodstock, et soutint le cabinet Liverpool et Canning, mais sans vouloir accepter aucune fonction publique. Sous Wellington cependant, il devint membre du Board of Control et, aux élections de 1831, l’emporta dans le comté de Dorset, après une lutte de quinze jours, sur lord Ponsonby, whig déclaré. Il fut nommé lord de l’amirauté pendant le court passage de Peel au ministère (1834-1835), et, après la mort de Sadler, se fit le défenseur du Bill des dix heures, qui avait pour objet de réduire la journée de travail des enfants employés dans les ateliers. L’acceptation de ce bill par le Parlement devint dès lors le but constant de ses efforts, et, comme Peel s’y était montré opposé, lord Ashley refusa d’accepter aucun emploi lors du retour de cet homme d’État au pouvoir en 1841. La persévérance qu’il mit à soutenir ce bill au sein du Parlement irrita à l’extrême contre lui les propriétaires de fabriques, mais lui valut l’estime de tous les philanthropes et l’attachement durable de la population ouvrière. En 1846, lord Ashley se décida à défendre la question du libre échange, mais il dut préalablement se retirer du Parlement ; car, bien qu’à l’époque de son élection il n’eût pris aucun engagement au sujet du maintien du système protectionniste, il se trouvait en désaccord avec la plupart de ses commettants. L’année suivante, il se porta comme candidat à Bath contre Roebuck et fut élu grâce à l’appui des sociétés religieuses. Depuis 1851, époque où il prit le titre de comte de Shaftesbury et entra à la Chambre haute, il est devenu le défenseur des intérêts du protestantisme, et l’on a retenu de lui deux discours remarquables, l’un à propos des persécutions religieuses en Toscane et l’autre, en 1854, sur la situation des sectes chrétiennes en Turquie. Complètement indépendant dans la vie publique, il a constamment tourné ses efforts vers l’amélioration des classes inférieures. C’est lui qui a provoqué la création de cités ouvrières et d’écoles à haillons (Rugged Schools) pour les enfants pauvres ; on lui doit aussi de nombreuses réformes opérées dans la police sanitaire. Il jouit d’une influence sans égale sur le parti évangélique de l’Église anglaise et le puseyisme n’a pas d’adversaire plus déclaré que lui. Cependant, comme il n’a en vue que le progrès de l’idée chrétienne, il s’associe volontiers, dans un but philanthropique et religieux, à des hommes d’une autre croyance religieuse que la sienne ; c’est ainsi qu’il est devenu président de l’Alliance protestante, de la Société des Bibles, de la Société pour la conversion des juifs, etc., dont les membres appartiennent à des confessions protestantes dissidentes. Quoique sa motion au sujet du travail des enfants rencontrât beaucoup d’opposition, il ne renonçait point à son projet, et, à chaque session, il présentait de nouveau le bill des dix heures, qui était en quelque sorte devenu son Delenda Carthago. On ne connaît de lui d’autres écrits que quelques articles, excellents du reste, sur des questions sociales et industrielles, qui ont été insérés dans la Quarterly Review. De son mariage avec la fille du comte Cooper, il a eu huit enfants, dont l’aîné est Antoine, baron ashley.