Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/SCHÉRER (Barthélemy-Louis-Joseph), général et ministre français

Administration du grand dictionnaire universel (14, part. 1p. 346-347).

SCHÉRER (Barthélemy-Louis-Joseph), général et ministre français, né à Délie (Haut-Rhin) en 1747, mort en 1804. Il était fils d’un boucher et avait pour frère le maître d’hôtel du duc de Richelieu. Après avoir servi onze ans dans les troupes autrichiennes, il entra en 1780 dans l’armée française et obtint, grâce à l’entremise de son frère, le grade de capitaine dans le régiment d’artillerie de Strasbourg. Cinq ans plus tard, Schérer passa avec le grade de major dans une légion que formait le comte de Maillebois pour le service de la Hollande. En 1791, il quitta la Hollande pour revenir en France, entra comme capitaine dans un régiment d’infanterie, devint aide de camp des généraux Eikmeier, Després-Crassier et Beauharnais, et se signala par sa bravoure à Valmy et à Landau. Peu après, il devenait adjudant général, général de brigade et obtenait le grade de général de division pour avoir empêché les Autrichiens de passer le Rhin pendant l’hiver de 1793. Placé alors sous les ordres de Pichegru, Schérer, à la tête d’un corps d’armée, vainquit les Autrichiens à Mons et au Mont-Palisot, et en moins d’un mois, en 1794, il reprit nos places frontières de Condé, de Valenciennes, de Quesnoy et de Landrecies, qui étaient tombées au pouvoir de l’ennemi. Envoyé à l’armée de Jourdan, il contribua au succès du combat d’Aldenhoven (2 oct. 1794) en forçant le passage de la Roër et en accablant l’aile gauche des Autrichiens. La capacité militaire dont il avait fait preuve lui valut d’être nommé en 1795 commandant en chef de l’armée des Pyrénées-Orientales à la place de Pérignon. Schérer battit les Espagnols à la Thivia, puis se livra à quelques manœuvres insignifiantes auxquelles mit fin la paix de Bâle. À la fin de 1795, il reçut le commandement en chef de l’armée d’Italie et débuta brillamment en remportant sur l’armée austro-sarde la victoire de Loano, qui le rendit maître de tout le pays. Au lieu de poursuivre vigoureusement une campagne si heureusement commencée, il prit ses quartiers d’hiver et resta dans l’inaction. Remplacé par Bonaparte au commencement de 1796, Schérer revint à Paris, où, grâce à son ami le directeur Rewbell, il fut nommé ministre de la guerre (26 juillet 1797). Son administration fut vivement attaquée, et un membre du conseil des Cinq-Cents, Chabert, fit une motion d’ordre au sujet des déprédations qui se commettaient au ministère de la guerre et qui étaient le résultat de marchés clandestins. Le Directoire, soit pour le soustraire aux attaques dont il était l’objet, soit qu’il eût confiance dans ses talents militaires, donna de nouveau à Schérer le commandement en chef de l’armée d’Italie en février 1799. Les circonstances étaient critiques, car l’armée d’Italie allait avoir à combattre avec des forces tout k fait inférieures les armées de l’Autriche et de la Russie. Les Autrichiens, qui attendaient l’armée de Souvarow, gardèrent la défensive. Schérer reçut l’ordre de les attaquer immédiatement. Il parvint à enlever les positions de l’ennemi sur le lac de Garde, mais il ne poursuivit point cet avantage, concentra ses forces entre l’Adige et le Tartaro, fut battu par les Autrichiens à Magnano, se mit en retraite sur le Mincio, puis sur Roverbella, et, le 8 avril, fut rejeté en désordre derrière l’Oglio. Sur ces entrefaites, Souvarow, qui avait fait sa jonction avec les Autrichiens, marcha contre lui. Schérer abandonna rapidement Lodi et se replia sur Milan, d’où il envoya sa démission au Directoire. Moreau le remplaça et il fut nommé inspecteur général des troupes françaises en Hollande. Accusé à la fois d’incapacité comme général et de malversation comme ministre, Schérer revint à Paris et écrivit des mémoires pour se justifier. De telles clameurs s’élevèrent de toutes parts contre lui, les accusations de dilapidation dirigées contre son administration prirent un tel caractère de gravité, que le conseil des Cinq-Cents et le conseil des Anciens s’en émurent et le Directoire dut annoncer qu’on allait mettre Schérer en accusation. Le général avait déjà pris la fuite, lorsque le coup d’État du 18 brumaire vint détourner l’attention publique sur de plus graves sujets. Les poursuites contre Schérer furent alors abandonnées. Peu après il revint et se retira dans sa terre de Chauny, où il termina paisiblement sa vie. On a de Schérer deux mémoires justificatifs : Précis des opérations militaires du général Schérer en Italie (1798, in-8°) et Compte-rendu au Directoire exécutif sur l'administration de la guerre pendant les cinq premiers mois de l’an VII (Paris, an VII).