Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/Ornano

1874 (Tome 11, part. 4, pp. 1488–1489).
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  1. Village
  2. Rivière
  3. Famille d’Ornano :
    1. Sampiero
    2. Alphonse
    3. Jean-Baptiste
    4. Marquis Henri-François
    5. Comte Joseph-Charles
    6. Comte Jean-Baptiste
    7. Cuneo François-Antoine
    8. Comte Philippe-Antoine
    9. Comte Rodolphe-Auguste

ORNANO, village de Corse, arrond. et à 13 kilom. S.-E. d Ajaccio ; a donné son nom à la famille d’Ornano.

ORNANO, nom d’une rivière de l’île de Corse, en latin Ornanes fluvius, et plus anciennement Pitanus. Elle prend sa source près du lieu appelé Casa-di-San-Pietro et se décharge dans le golfe de Talabo, du côté du nord.

ORNANO, famille corse, l’une des branches des Colonna, dont le chef, Ugo Colonna, fut nommé comte de Corse par le pape Léon III au commencement du ixe siècle. Cette famille, alliée avec les plus grandes maisons de l’Europe, a produit un grand nombre d’hommes de guerre distingués, dont les principaux sont les suivants :

ORNANO (Sampiero d’), général corse, plus connu sous le nom de Sampiero. V. Sampiero.

ORNANO (Alphonse d’), maréchal de France, fils de Sampiero, né à Ajaccio (Corse) en 1548, mort à Paris en 1610. Il faillit, tout jeune encore, être livré aux Génois avec son frère Antoine, par l’imprudente confiance de leur mère. Antoine de Saint-Florent, l’ami de leur père, atteignit heureusement en pleine mer le navire qui les portait et les ramena en France. Admis peu après parmi les enfants d’honneur de François II, il alla, dès l’âge de dix-sept ans, rejoindre son père qui allait combattre pour la liberté de son pays. Cette guerre héroïque, commencée en 1565, laissa par la mort de son père, assassiné en 1567, Alphonse seul chef des patriotes. Pendant deux ans, il lutta énergiquement contre les Génois, réchauffant le zèle de ses compatriotes ; mais, abandonné par beaucoup de ses partisans, il dut enfin déposer les armes. En 1568, il conclut avec André Doria un traité honorable et quitta la Corse, emmenant les plus fidèles patriotes. Il fut bien accueilli à la cour de France, où sa réputation de courage l’avait précédé, et où l’on n’avait pas oublié les services rendus par son père. Le 21 janvier 1569, il leva un régiment corse et, le 26 novembre, il fut nommé par Charles IX colonel général de toutes les troupes corses. En 1570, il se rendit en Languedoc à la tête de son régiment. Fidèle au parti de la cour, il quitta le maréchal de Damville, qui s’était déclaré pour les calvinistes, et alla rejoindre le duc d’Uzès, qui avait embrassé la cause royale (1575). Il obtint, à la suite de cette campagne, le titre de colonel général de toutes les troupes italiennes, reçut des lettres de naturalisation et fut nommé gouverneur de Valence. Le premier usage qu’il fit de la bienveillance royale fut d’obtenir la mise en liberté de ses partisans, prisonniers de la république. Nommé en 1586 gouverneur de la ville de Pont-Saint-Esprit, il la défendit vaillamment contre deux attaques du duc de Montmorency, puis il s’empara, malgré Châtillon, de Collias, Marguerites et Remoulins, conclut une trêve pour les diocèses de Nîmes et d’Uzès, et, le 16 août de la même année, uni à La Valette, il mit en fuite, à la tête de 1,200 arquebusiers, 4,000 Suisses et 400 calvinistes, en Dauphiné, sur les bords du Drac. D’Ornano fut nommé ensuite conseiller d’Etat et lieutenant du roi en Dauphiné. Créé maréchal de camp en 1588, il commanda l’armée du Dauphiné, conclut une trêve avec Lesdiguières et fut un des premiers à reconnaître Henri IV en 1589. Fait prisonnier en 1590, il recouvra la liberté l’année suivante, se rendit en Dauphiné où il battit les ligueurs, et fut nommé lieutenant général en Languedoc ; de là, il passa dans le Lyonnais, où il vainquit successivement le duc de Nemours et le connétable Jean Velazquez de Castille. S’étant jeté dans Lyon pour faire reconnaître le roi, il en chassa les échevins et devint provisoirement gouverneur de la ville et de toute la province. Il maintint, en outre, dans l’obéissance Grenoble et Valence. En 1595, il se démit de la lieutenance du Languedoc et alla joindre ses troupes à celles de Lesdiguières, qu’attaquait en Provence le duc d’Epernon. Celui-ci fut battu et se soumit. Henri IV nomma alors d’Ornano chevalier de ses ordres, maréchal de France (1597) et l’autorisa à céder à son fils le titre de colonel général des Corses. Appelé, à la mort de Matignon, au poste de lieutenant général de la Guyenne, il donna pendant une peste l’exemple du plus courageux dévouement, fonda des hôpitaux et assainit Bordeaux en faisant dessécher les marais qui l’entouraient. En 1609, il se rendit à Paris, se fit opérer de la taille et mourut des suites de cette opération.

ORNANO (Jean-Baptiste d’), comte de Montlaur, maréchal de France, fils du précédent, né à Sisteron en 1581, mort au château de Vincennes en 1626. Élevé à la cour de France, il débuta par le grade de capitaine de chevau-légers en 1596, dans le corps d’armée de son père, et se distingua aux sièges de La Fera et d’Amiens. Il fut nommé, en 1597, colonel général des Corses, suivit le roi en Savoie pendant les années 1600 et 1601, fut lieutenant général en Guyenne pendant l’absence de son père, gouverneur du château Trompette en 1610, et se démit de son titre de colonel en faveur de son frère cadet. Ce fut lui qui, en 1617, fut chargé d’annoncer au parlement la mort du maréchal d’Ancre. En 1618, d’Ornano fut pourvu de la lieutenance générale de Normandie et du gouvernement particulier de Pont-de-l’Arche. Après avoir été gouverneur de Honfleur et de Quillebœuf, il passa en Provence où il reçut le gouvernement de Pont-Saint-Esprit et de Saint-André d’Avignon. Très-bien reçu à la cour, il obtint la faveur de la reine Marie de Médicis, qui le nomma, en 1619, maréchal de camp. À la mort du comte de Lude, d’Ornano devint gouverneur de Monsieur, Gaston d’Orléans, premier gentilhomme de la chambre de ce prince, surintendant de sa maison et de ses finances et lieutenant de sa compagnie de 200 hommes d’armes (1619). La position exceptionnelle que les services de sa famille et ses charges à la cour faisaient à d’Ornano éveillèrent la jalousie des courtisans, qui obtinrent son renvoi de la cour. D’Ornano refusa de s’éloigner et se constitua lui-même prisonnier à la Bastille. Cette fière conduite plut à Louis XIII, qui rendit au maréchal de camp sa confiance et l’éleva à la dignité de maréchal de Franco (1626). Peu après, ayant représenté au roi que son frère était d’âge à prendre part aux affaires de l’État, Richelieu, dont il s’était fait un ennemi, l’accusa d’avoir déterminé Monsieur à contracter un mariage qui contrariait Sa Majesté, et d’avoir pris part à la conspiration de Chalais. Il fut enfermé alors au fort de Vincennes, où il mourut ; selon quelques-uns, il avait été empoisonné.

ORNANO (Henri-François, marquis d’), frère du précédent, né à Aix en 1587, mort en 1652. Nommé en 1610, après la démission de son frère, colonel général des Corses, il succéda à Jean-Baptiste dans la faveur si dangereuse de Gaston d’Orléans. En 1626, lors de la suppression des troupes corses, il fut nommé gouverneur de Tarascon, de Pont-Saint-Esprit et de Saint-André-lez-Avignon, toutes places dans lesquelles il succédait à son frère aîné. Gaston d’Orléans le nomma son premier écuyer. Fidèlement attaché à la personne de ce prince, il fit avec lui les guerres de 1627 et 1628 en Languedoc, contre les réformés, et mourut à Paris.

ORNANO (Joseph-Charles, comte d’), frère du précédent, né à Aix en 1594, mort à Paris en 1670. Il fut d’abord nommé abbé de Montmajour-lez-Arles, puis il succéda à son frère dans la faveur de Gaston d’Orléans, qui, à la mort de Henri, lui fit donner la charge de colonel général des Corses. C’était une charge simplement honorifique, car, outre que ces troupes n’existaient pas, le comte d’Ornano ne servit jamais dans l’armée. En lui s’éteignit la branche dite des maréchaux d’Ornano ; il ne s’était jamais marié, et son héritière, la fille de Jean-Baptiste, porta les biens de la famille dans une autre maison.

ORNANO (Jean-Baptiste, comte d’), général corse au service de la France, d’une branche de la famille des précédents, né en 1742, mort en 1794. Successivement colonel, brigadier et maréchal de camp sous Louis XV, il se signala par sa bravoure dans ces divers gracies, devint gouverneur de Bayonne sous Louis XVI et reçut, avec Louis de Caro, la mission de tracer la ligne de démarcation des frontières entre la France et l’Espagne. Le comte d’Ornano eut pour pupille Mlle Cabarrus, qui devait être célèbre sous le nom de Mme Tallien. Pendant la Révolution, il porta sa tête sur l’échafaud.

ORNANO (François-Antoine Cuneo d’), officier français, parent du précédent, né à Ajaccio (Corse) en 1756, mort à Rome en 1840. En 1777, il entra, comme sous-lieutenant, dans le régiment Royal-Corse, et fit les campagnes des côtes de Bretagne de 1780 à 1785. Lieutenant en 1785, il passa aux armées du Rhin et des Alpes, où il se distingua en deux circonstances difficiles. Chargé de défendre le poste de Fischbach, il tint bon contre l’armée autrichienne, qui lui donna trois assauts consécutifs et dut se retirer sans opérer sa jonction avec les divisions qui devaient attaquer le camp de Rothwiller. Quand la retraite des lignes de Wittembourg fut, décidée, Cuneo d’Ornano fut placé à la tête de l’arrière-garde. Avec 1,800 hommes, il tint constamment en échec les colonnes autrichiennes, et les rapports de la campagne lui attribuèrent tout l’honneur de cette retraite. Nommé, le 15 nivôse an III, chef de bataillon, il fit les campagnes de l’an III et de l’an IV à l’armée de Sambre-et-Meuse, celle de l’an V à l’armée du Rhin. Appelé, le 5 brumaire an VI, au commandement de la place de Landau et, le 1er fructidor an VII, nommé chef de brigade, il vit sa carrière si brillamment commencée arrêtée, l’an IX, par la mesure générale de réformes du 1er vendémiaire. Ses nombreuses blessures lui firent accepter cette inaction, et le commandement de la place d’Amibes lui fut confié. Il demanda sa retraite en 1815 et se retira à Rome, où il s’occupa de mettre en ordre les notes nombreuses prises par lui dans ses longues campagnes. Malheureusement, ces notes ont été dispersées après sa mort.

ORNANO (Philippe-Antoine, comte d’), maréchal de France, né à Ajaccio en 1784, mort en 1863. Entré dans l’armée en 1800 comme sous-lieutenant, il fit d’abord la campagne d’Italie, suivit ensuite, en qualité d’aide de camp, Leclerc à Saint-Domingue, devint, à son retour en France, capitaine d’état-major et assista, comme commandant des chasseurs corses, à la bataille d’Austerlitz (1805), où il prit plusieurs pièces de canon. La bravoure qu’il déploya à Iéna (1806) et à Lubeck lui valut le grade de colonel de dragons. À la tête de son régiment, il continua à se distinguer en Prusse, en Pologne, en Espagne, en Portugal et devint général de brigade en récompense de sa brillante conduite à Fuentes de Oñoro (1811). Rappelé à la grande armée (1812), d’Ornano fit la campagne de Russie, se signala au passage du Niémen, à Mohilaw, reçut le grade de général de division peu de jours avant la bataille de la Moskova, où il rejeta les 10,000 Cosaques de Platow au delà de la Kologha, et contribua puissamment au gain de la bataille. Il donna encore des preuves de sa valeur à Malo-Jaroslavetz et, pendant toute la déplorable retraite de Russie, durant laquelle il combattit à l’arrière-garde. Laissé pour mort sur le champ de bataille de Krasnaoi, il ne dut de revoir la France qu’à la sollicitude de Napoléon qui lui donna une place dans la seule voiture qui lui restait. En 1813, d’Ornano, nommé commandant des dragons de l’impératrice, fit à leur tête la campagne de Saxe, fut mis à la tête de la cavalerie de la garde à la mort de Bessières, prit part aux batailles de Dresde, de Bautzen, de Lutzen, de Leipzig, d’Hanau, et concourut, au commencement de 1814, à la défense de Paris.

Pendant la première Restauration, le comte d’Ornano conserva le commandement des dragons de la garde. Au retour de Napoléon, il s’empressa de se mettre à sa disposition, ce qui lui valut, à la seconde Restauration, d’être emprisonné, puis exilé en Belgique. En 1818, il put revenir en France, mais il vécut dans la retraite jusqu’en 1828. À cette époque, il devint inspecteur de cavalerie et président du jury d’admission pour Saint-Cyr. Après la révolution de Juillet, à laquelle il s’empressa de donner son adhésion, le comte d’Ornano fut nommé commandant de la 4e division militaire. Il étouffa, en 1832, l’insurrection des départements de l’Ouest et reçut, cette même année, un siège à la Chambre des pairs. La révolution de 1848 le fit rentrer dans la vie privée. Toutefois, dans une élection supplémentaire, les électeurs d’Indre-et-Loire l’envoyèrent siéger à la Constituante (janvier 1849), puis lui renouvelèrent son mandat à l’Assemblée législative. Membre de la majorité réactionnaire, il se montra un chaud partisan de la politique ambitieuse du président de la République, qui, après l’attentat de décembre 1851, le nomma successivement membre de la commission consultative, sénateur (1852), grand chancelier de la Légion d’honneur, quelques mois plus tard, président de la commission chargée de mettre à exécution le testament de Napoléon Ier et enfin maréchal de France (1861) le jour de la translation des cendres de l’empereur de la chapelle Saint-Jérôme dans la crypte des Invalides. De son mariage avec la comtesse Marie Laczynska, veuve du comte de Colonna Walewski, il eut un fils, dont nous donnons ci-dessous la biographie.

ORNANO (Rodolphe-Auguste, comte d’), administrateur français, fils du précédent, né à Liège en 1817, mort au château de la Branchoire, près de Tours, en 1865. En sortant de l’école préparatoire militaire de Saint-Cyr, il entra dans la diplomatie comme attaché de légation à Dresde, puis passa au même titre à Londres, où il entra en relations avec Louis-Napoléon Bonaparte. Ces relations éveillèrent les susceptibilités du gouvernement de Louis-Philippe et déterminèrent le comte à renoncer à la carrière diplomatique. De retour en France, il se retira en Touraine. Là il composa et publia des recueils de vers, les Tourangelles, les Napoléoniennes, les Echos d’Espagne, puis fit des voyages en Corse, en Italie et en Suisse. Après la révolution de 1848, le comte d’Ornano fut du nombre des plus chauds partisans de Louis-Napoléon, qui, après le sanglant coup d’État de décembre 1851, le nomma préfet de l’Yonne. Deux ans plus tard, il donna sa démission, devint chambellan, premier maître des cérémonies et fut nommé, comme candidat du gouvernement, député au Corps législatif dans la première circonscription de l’Yonne. Son mandat lui fut renouvelé au même titre en 1857, époque où il s’éleva au Corps législatif contre les scandales de l’agiotage, puis aux élections de 1803. Il était, en outre, vice-président du conseil général du même département. Outre les recueils précités, on lui doit : Histoire de l’ordre de Malle et Étude sur l’administration de l’Empire (1860). — Son cousin, Napoléon d’Ornano, né à Ajaccio en 1806, mort à Vic-sur-Aisne en 1859, devint officier de dragons, alla rejoindre Louis-Napoléon Bonaparte en Angleterre et prit part à l’échauffourée de Boulogne, Condamné pour ce motif à la détention par la Chambre des pairs, il fut enfermé à Doullens. Après l’établissement de l’Empire, il devint inspecteur des bâtiments impériaux.

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