Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/MONTMORENCY (Matthieu-Félicité DE MONTMORENCY-LAVAL, vicomte, puis duc DE), homme politique français, petit-fils du précédent

Administration du grand dictionnaire universel (11, part. 2p. 521).

MONTMORENCY (Matthieu-Félicité DE Montmorency-Laval, vicomte, puis duc DE), homme politique français, petit-fils du précédent, né à Paris en 1767, mort en 1826. Il avait pris part avec La Fayette à l’expédition d’Amérique et s’était fait remarquer par ses idées libérales lorsqu’il fut nommé, en 1789, membre des états généraux par le bailliage de Montfort-l’Amaury. Il fut un des premiers de son ordre qui se réunirent au tiers état, prêta, le cinquième, le fameux serment du Jeu de paume et proposa, dans la séance du 4 août 1789, l’abolition des droits féodaux et des privilèges, décrétée immédiatement au milieu de l’enthousiasme. Il se prononça ensuite contre le système des deux Chambres, appuya le décret d’abolition de la noblesse (17 juin 1790), fut l’un des quinze membres chargés d’assister à la translation des restes de Voltaire au Panthéon, et fit adopter la proposition de rendre les mêmes honneurs à J.-J. Rousseau. Aide de camp du maréchal Luckner après la session, il émigra bientôt pour aller rejoindre à Coppet, en Suisse, Mme de Staël, à qui il témoigna une constante amitié dans la mauvaise comme dans la bonne fortune. Rentré en France en 1795, il ne s’occupa, jusqu’à la fin de l’Empire, que d’œuvres de bienfaisance. À partir de 1814, Matthieu de Montmorency, suspect de libéralisme à cause de son ancienne attitude à la Constituante, que son émigration même n’avait pu racheter, s’attacha à faire oublier, par l’exaltation de son royalisme, sa ferveur libérale d’autrefois. Il fut l’un des plus ardents ultras, soit comme aide de camp du comte d’Artois, soit comme pair de France. Il défendit les jésuites avec chaleur, s’affilia à leur congrégation, prit le portefeuille des affaires étrangères et la présidence du ministère de réaction après la mort du duc de Berry (1821), détermina la guerre d’Espagne dans le congrès de Vérone, reçut en 1822 le titre de duc, céda cette même année son portefeuille ministériel à Chateaubriand, fut nommé ministre d’État, membre du conseil privé, gouverneur du duc de Bordeaux, et mourut subitement dans l’église de Saint-Thomas d’Aquin, le vendredi saint, au moment où il faisait ses dévotions. Le duc de Montmorency fut un des fondateurs des sociétés des bonnes lettres et des bonnes études et un des premiers propagateurs de l’enseignement mutuel en France. Bien qu’il n’eût jamais écrit que quelques articles dans un journal ultramontain, le Mémorial catholique, il n’en fut pas moins élu membre de l’Académie française en 1825, ce qui donna lieu à de nombreuses épigrammes. Comme homme politique, il ne joua qu’un rôle fort secondaire. Son parti lui-même le regardait comme un esprit peu pratique, incapable de ménager les susceptibilités de son temps et embarrassant les ministres eux-mêmes. Comme homme privé, il fit preuve de vertus réelles et se montra d’une inépuisable bienfaisance. Il fut un des fervents adorateurs de Mme Récamier, à laquelle il ne cessa de témoigner une tendre et grave affection.