Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/Langue française (ORIGINE ET FORMATION DE LA), par Chevallet

Administration du grand dictionnaire universel (10, part. 1p. 161).

Langue française (ORIGINE ET FORMATION de la), par Chevallet (Paris, 1850, 2 vol. in-8o), ouvrage couronné par l’Institut en 1850 et en 1858. Chevallet s’est proposé de restituer les titres originaires de la langue française, et de montrer, par l’étude approfondie des monuments, dans quelle proportion le latin, le celte, le tudesque et les autres idiomes dont la trace subsiste ont contribué à constituer cette langue. La première partie de son ouvrage traite des éléments primitifs dont s’est formé l’idiome ; la deuxième partie est consacrée à l’examen des modifications que ces éléments ont subies pour produire un nouveau langage. Un aperçu historique sur les langues qui ont été parlées successivement entre le Rhin et la Loire sert d’introduction ; on y trouve des considération générales sur la nature, la proportion et la fusion des éléments constitutifs de notre idiome. L’auteur, adoptant à ce sujet l’opinion actuelle des philologues, pense que la langue française, née du latin rustique, modifiée par une assez forte proportion de mots tudesques et une autre beaucoup moindre de mots celtiques, mêlée de quelques termes ibères, grecs, arabes, italiens, etc., est de formation relativement moderne.

Afin d’établir la proportion respective des éléments constitutifs de la langue française, l’auteur étudie et décompose les trois plus anciens textes, tous les trois antérieurs au XIIIe siècle ; ce sont les serments de Louis le Germanique et de Charles le Chauve, la cantilène de sainte Eulalie, les lois de Guillaume le Conquérant. Cette statistique est toute à l’avantage de l’influence latine ; mais le celtique a laissé des traces bien plus nombreuses que ne le suppose Chevallet : on lui doit beaucoup de noms propres et presque tous les noms de lieu. L’auteur donne quelquefois des étymologies contestables ; toutes les autorités qu’il allègue ne sont pas d’égale valeur. Mais s’il n’a pas épuisé la matière, il a donné une exposition méthodique et une critique savante du sujet ; il a éclairé des lumières de l’histoire les recherches philologiques.