Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/LANGERON (ANDRAULT, comte DE), général français au service de la Russie

Administration du grand dictionnaire universel (10, part. 1p. 150).

LANGERON (Andrault, comte de), général français au service de la Russie, né k Paris en 1763, mort à Saint-Pétersbourg en 1831. À dix-neuf ans, il entra comme sous-lieutenant dans l’armée française, fit sous les ordres de Rochambeau la campagne d’Amérique, et fut promu, à son retour, au grade de colonel en second. Il émigra en 1790, et, après avoir essayé vainement d’obtenir du service dans l’armée autrichienne, se rendit en Russie, où Catherine II lui accorda un grade supérieur dans son armée. Il servit dans la guerre contre la Suède et dans celle contre les Turcs, passa ensuite comme volontaire sous les ordres du prince de Saxe-Teschen dans les Pays-Bas, et fit dans l’armée des princes la campagne de Champagne. En 1793 et 1794, il prit part dans l’armée autrichienne à la plupart des batailles livrées dans cet intervalle contre ses compatriotes et, de retour en Russie, fut nommé successivement major général en 1797, lieutenant général en 1799, puis inspecteur d’infanterie et comte. Ayant complètement oublié qu’il était Français, cet indigne personnage accepta le commandement d’une division russe à la bataille d’Austerlitz, et se vit ensuite accusé d’avoir été cause de la défaite. Sa disgrâce ne fut cependant pas de longue durée, car, en 1807, il fut envoyé à l’armée de Bessarabie et eut une part des plus actives à la nouvelle guerre contre les Turcs, qu’il battit en plusieurs rencontres.

Pendant la campagne de Russie, il commanda une colonne sous les ordres de Tchitchagoff, assista k plusieurs combats sur le Don, au passage de la Bérésina, et poursuivit ensuite l’armée française par Wilna jusqu’à la Vistule. En 1813, il s’empara de Thorn, marcha ensuite sur Bautzen, et se rendit maître du village de Kœnigswarta, en faisant 1,200 prisonniers. Il prit part aux combats de Lœvenberg, de Goldberg, de la Katzbach et de Leipzig, entra l’un des premiers dans cette ville et franchit le Rhin, le 1er janvier 1814. Pendant la campagne de France, il eut le triste courage de commander l’aile droite de l’armée de Blücher, assista à presque toutes les batailles qui furent livrées en Champagne, et, parvenu sous les murs de Paris, emporta d’assaut la position retranchée de Montmartre, succès qui le rendit maître des barrières du nord de la capitale et lui valut de nouvelles distinctions de la part du czar. Dans l’intervalle des deux Restaurations, il commanda l’armée de Volhynie, marcha de nouveau sur le Rhin en 1815, et, après Waterloo, fut chargé de diriger le retour de l’armée russe. Nommé ensuite gouverneur de Kherson, d’Ekaterinoslaw et de la Crimée, chef de la ville d’Odessa, des Cosaques de la mer Noire et de ceux du Don, il joignit encore à ces titres, en 1822, ceux de gouverneur général de la Nouvelle-Russie et de protecteur du commerce de la mer Noire et de la mer d’Azov ; mais il fut tout à coup destitué de ses emplois en 1823, sans qu’on ait pu connaître les motifs de cette disgrâce, qui dura jusqu’à l’avénement de Nicolas Ier. Il fut appelé par ce prince à Moscou, à l’époque du couronnement, et porta le manteau impérial dans cette cérémonie. En 1828, il suivit le czar dans la guerre contre les Turcs, et fut ensuite chargé de défendre les deux Valachies. Il fit essuyer aux Turcs plusieurs défaites successives, vint mettre le siège devant Silistrie et se serait emparé de cette place, s’il n’eût été forcé à la retraite par un violent ouragan, qui fit périr un grand nombre de ses soldats et anéantit la plus grande partie de son matériel de siège. En novembre 1828, il s’empara des forteresses de Kalé et de Tourno, et comme, au siège de cette dernière, on ne pouvait construire les batteries avec la terre gelée, il les fit élever avec de la neige durcie. Langeron, dans un moment de mécontentement, prit sa retraite en 1829 ; deux ans après, il mourait du choléra. Avant la Révolution, ce personnage s’était fait connaître par quelques travaux littéraires, notamment par une comédie en un acte et en prose, intitulée : le Duel supposé (Paris, 1789, in-8°).