Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/LACROIX (Jean-François DE), conventionnel français

Administration du grand dictionnaire universel (10, part. 1p. 39-40).

LACROIX (Jean-François DE), conventionnel français, né à Pont-Audemer en 1754, exécuté le 20 avril 1794. Avocat à Anet, près de Dreux, au commencement de la Révolution, il devint alors procureur général syndic du département, puis député d’Eure-et-Loir à la Législative. On le vit, pendant les derniers mois de 1791, attaquer avec force les ministres, à propos des colonies et des relations étrangères, provoquer des mesures de rigueur contre les émigrés, renouveler la proposition du licenciement de la garde du roi, et, en juin, défendre le duc d’Orléans, accusé par Ribbes d’être le chef d’une l’action opposée à la cour. Lors des événements du 20 juin, Lacroix demanda que le maire et la municipalité de Paris fussent appelés à la barre pour rendre compte de ce qui se passait ; mais, peu de jours après, il provoqua la levée de la suspension de Pétion, prononcée par le département. Le 7 janvier 1792, il fit porter un décret d’accusation contre les officiers du régiment de Cambrésis, qui furent, en conséquence, arrêtés à Perpignan, de là conduits à Orléans et massacrés en septembre à Versailles. Dans le même temps, il fit ôter au département la surveillance sur la nouvelle municipalité de Paris, et demanda que les bronzes des édifices nationaux et les statues des rois fussent convertis en canons. Le 5 février, il accusa Louis XVI d’être l’auteur de tous les troubles par son refus de sanctionner le décret contre les princes. Il demanda avec chaleur la mise à exécution du décret frappant de la déportation les prêtres insermentés, défendit ensuite une adresse envoyée de Marseille contre Louis XVI, attaqua La Fayette avec acharnement à raison de la lettre écrite par ce général sur les attentats commis le 20 juin contre la personne du roi, accusa enfin les ministres et les généraux de perfidie, demandant que, puisque l’Assemblée avait déclaré la patrie en danger, elle concentrât en elle-même tous les pouvoirs. Lacroix se signala en août par de nouvelles attaques, notamment à la séance du 10, dans laquelle on acheva de détruire la monarchie. Il y fit décréter l’envoi de commissaires aux différentes armées, pour y annoncer la déchéance du roi, et ensuite la création d’une cour martiale pour juger, sans désemparer, les Suisses faits prisonniers à l’attaque du château. Le 19 du même mois, il fut nommé président de l’Assemblée. Prudhomme, Mercier et autres l’accusent d’avoir été, en septembre, un des complices des massacres des prisons, ce qui n’est nullement démontré. Réélu à la Convention, il en devint président le 4 octobre. Il vota la mort de Louis XVI. Depuis le mois de décembre 1792 jusqu’au mois d’avril 1793, il se rendit trois fois en Belgique, avec son ami Danton, et, d’après le témoignage suspect de Prudhomme, ce fut Robespierre lui-même qui, méditant déjà leur perte, les aida à obtenir cette mission, en leur faisant entrevoir la possibilité d’y faire fortune. Lacroix, dit-on, pressura en effet les Belges, et s’enrichit, surtout aux dépens des églises et de l’armée française. En mars, il aida à l’établissement du tribunal révolutionnaire et devint, en avril, membre du comité de Salut public. Les girondins l’accusèrent violemment pour sa conduite en Belgique et ses liaisons avec Dumouriez. Mais tout le parti de la Montagne, uni alors contre les girondins, le soutint fortement. À son retour, il rendit compte de sa mission, s’éleva contre la trahison de Dumouriez, fit décréter que les membres de la famille des Bourbons serviraient d’otages pour garantir la vie des commissaires de la Convention livrés aux Autrichiens, et qu’aucun noble ne serait admis dans la camp sous Paris. Il se prononça, à cette même époque, contre les girondins, qu’il poursuivit avec acharnement. Au 27 mai, il prit la défense de Robespierre, de Danton, de Marat, et fit casser la commission des douze. Il fut arrêté avec Danton, le 31 mai, et condamné à mort le 5 avril, comme ayant conspiré contre la République et voulu établir le gouvernement monarchique. Lorsqu’il fut enfermé au Luxembourg, un prisonnier lui ayant demandé, quand on lui apporta son acte d’accusation : « Eh bien ! qu’en dis-tu ? — Que je vais me couper les cheveux, afin que Sanson n’y touche pas. » Parole de coquetterie. Lacroix était très-bel homme et trouvait, à l’annonce de son dernier moment, assez de calme d’esprit pour s’en souvenir.