Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/Convention nationale

Administration du grand dictionnaire universel (5, part. 1p. 34-42).

Convention nationale. Le 10 août 1792, quelques instants après la victoire du peuple de Paris, l’Assemblée législative, en présence de Louis XVI, réfugié avec sa famille dans une loge de journalistes, décréta la suspension provisoire du chef du pouvoir exécutif et la convocation d’une Convention nationale, c’est-à-dire une assemblée extraordinaire investie par le peuple de pleins pouvoirs pour constituer le gouvernement et le pays.

Le sens du mot Convention était bien fixé, d’abord par les souvenirs de la révolution anglaise de 1688 et de l’établissement de la constitution des États-Unis, enfin par toutes les discussions qui avaient eu lieu depuis 1789. « Une Convention, avait dit l’abbé Maury, l’orateur des royalistes, c’est une assemblée représentant une nation entière qui, n’ayant pas de gouvernement, veut s’en donner un. »

C’est ainsi que le principe était universellement compris. La France, librement et régulièrement convoquée, savait qu’elle déléguait tous les pouvoirs à ses représentants pour sauver la patrie. Il n’y eut ni surprise ni usurpation, et, en réalité, la grande Assemblée révolutionnaire fut le gouvernement le plus légitime que le pays eût encore eu.

Pour les élections conventionnelles, le système des deux degrés fut provisoirement maintenu, à cause de l’urgence ; mais la distinction entre les citoyens actifs et passifs, déjà supprimée par quelques sections de Paris, le fut définitivement par décret de l’Assemblée législative. Tous les Français majeurs et domiciliés eurent le droit de délibérer et de voter dans les assemblées primaires, qui furent convoquées pour le dimanche 26 août ; les assemblées électorales le furent pour le dimanche 2 septembre et jours suivants. Les assemblées primaires, comme on le sait, nommaient les électeurs (à raison de 1 électeur par 100 citoyens), lesquels se réunissaient en assemblées pour discuter les candidatures et nommer les représentants.

Le nombre des députés à la Convention avait été fixé à sept cent quarante-neuf.

Les élections furent, à la presque unanimité, antimonarchiques ; jamais une nation ne s’était prononcée avec un tel ensemble. Quelques assemblées primaires (15 ou 16 sur plus de 40, 000) s’étant montrées favorables au maintien de la monarchie et à la constitution de 1791, les assemblées électorales rejetèrent de leur sein les électeurs nommés par ces assemblées. Dans quelques départements, on étendit cette espèce d’ostracisme jusqu’aux signataires des protestations contre la journée du 20 juin. Dans la Corrèze, la Drôme, le Gers, l’Hérault, l’Oise, les Hautes-Pyrénées, les Bouches-du-Rhône, le Lot, la Seine-et-Marne et ailleurs, les électeurs s’astreignirent spontanément au vote à haute voix. À Paris, outre le vote à haute voix, on fit approuver les choix du corps électif par les sections. Ces choix étaient de nature à satisfaire le parti révolutionnaire ; la députation de la capitale se composait de vingt-quatre membres, parmi lesquels on comptait : Robespierre, Danton, Collot-d’Herbois, Manuel, Billaud-Varenne, Camille Desmoulins, Marat, Lavicomterie, Legendre, Panis, Sergent, Fréron, Fabre d’Églantine, David, Philippe-Égalité, etc. Dans les départements, le parti girondin obtint un assez grand nombre de nominations.

Parmi les députés élus à la Convention nationale, 77 avaient siégé à la Constituante et 181 à l’Assemblée législative. C’étaient donc 491 membres nouveaux, mais dont la plupart d’ailleurs avaient été recrutés dans les administrations départementales et étaient préparés à la politique active par la pratique.

16 évêques, 8 grands vicaires épiscopaux, 18 curés ou prêtres, 7 ministres protestants, firent partie de la grande Assemblée dès le commencement de la session. On comptait en outre un prince du sang (Égalité), des avocats et hommes de loi, des officiers de l’ancienne armée, d’anciens parlementaires, des nobles, des propriétaires, des médecins, des savants, des hommes de lettres, quelques poètes, peintres et artistes dramatiques, peu de négociants et d’industriels, et, à ce que nous croyons, un seul ouvrier, le cardeur de laine Armonville.

Le 20 septembre, les nouveaux représentants du peuple tinrent une séance préparatoire dans la salle des Cent-Suisses, aux Tuileries, sous la présidence de Faure, doyen d’âge, et constituèrent leur bureau, avec Pétion pour président, Brissot, Camus, Rabaut-Saint-Étienne, La Source, Vergniaud et Condorcet comme secrétaires. C’était le triomphe des girondins.

Le 21, nouvelle réunion aux Tuileries. La Convention fait notifier son existence officielle à l’Assemblée législative, qui dépose à l’instant ses pouvoirs et installe solennellement les nouveaux élus du peuple dans la salle du Manège, où elle-même, ainsi que la Constituante, avait siégé. (Par suite de travaux d’appropriation, la Convention ne prit possession des Tuileries que le 10 mai 1793.)

Le moment où la formidable Assemblée prit séance est une heure à jamais célèbre dans l’histoire du monde. Ici, nous entrons dans la région des tempêtes, et jamais le soleil n’avait éclairé de spectacle plus tragique et plus grandiose. Parmi ces hommes au cœur indomptable qui viennent de s’asseoir sur leur banc en face des rois de l’Europe, beaucoup ne reverront jamais la maison natale ; mais telle était la grandeur de ce temps que la conservation de la vie ne paraissait à personne le but réel de la vie. Nourris la plupart dans les travaux paisibles, ils se précipitent avec un sombre enthousiasme dans un combat sans trêve ni merci. Le léger, le joyeux Desmoulins, le mobile artiste qui a tant de raisons pour adorer la vie, écrit à son père :

« La contemplation de cette belle Révolution m’est si douce, que ces dangers mêmes, dont vous me parlez, ne sauraient me distraire Quand on me parle des dangers que je cours et qu’il m’arrive d’y réfléchir, je regarde ce que nous étions et ce que nous sommes, et je me dis à cette vue :

 « À présent, de la mort l’amertume est passée !

« Tant de gens vendent leur vie aux rois pour 5 sous ! Ne ferais-je rien pour l’amour de ma patrie, de la vérité, de la justice ? Je m’adresse ce vers qu’Achille dit à un soldat, dans Homère :

 « Et Patrocle est bien mort, qui parlait mieux que
moi. »

L’ennemi était à 30 lieues de Paris, la France était enveloppée, assiégée comme une place forte, et l’Europe monarchique se croyait assurée de sa proie. En présence de ces suprêmes périls, la Convention n’eut pas une minute de défaillance ni de doute, et elle ouvrit fièrement sa session par un acte solennel qui ne lui laissait plus que la ressource de vaincre. On connaît cette scène imposante ; Grégoire, l’évêque de Blois, est à la tribune : « Les rois, dit-il, sont dans l’ordre moral ce que sont les monstres dans l’ordre physique….. L’histoire des rois est le martyrologe des nations….. »

Et, au milieu des acclamations, l’Assemblée décrète à l’unanimité :

La royauté est abolie en France.

Puis elle commence le cours de ses glorieux travaux, vote le renouvellement des corps administratifs et judiciaires (22 sept.), avec cette clause que les juges pourraient être élus parmi tous les citoyens, et nomme une commission pour élaborer un règlement et un projet d’organisation des comités. Sans entrer dans des détails qui pourraient fatiguer nos lecteurs, nous dirons cependant un mot de son organisation ; on comprendra mieux les miracles de travail de cette puissante machine législative et gouvernementale, qui agit toujours et qui crée sans cesse, au milieu de la guerre étrangère, des déchirements intérieurs et de ses propres divisions.

Le règlement de la Convention reproduisait la plupart des dispositions de ceux de la Législative et de la Constituante, et ces dispositions, plus ou moins modifiées, ont reparu en grande partie dans tous les règlements parlementaires jusqu’à nos jours. Nous n’indiquerons donc que quelques articles spéciaux à l’Assemblée conventionnelle. Le bureau se composait d’un président et de six secrétaires. Le président était élu par appel nominal, à la majorité absolue ; ses fonctions duraient quinze jours ; il n’était rééligible qu’après l’intervalle d’une quinzaine. Quand il se trouvait empêché ou qu’il voulait parler à la tribune, il était remplacé par le dernier des ex-présidents. Il n’y avait point de vice-présidents. Les secrétaires étaient renouvelés par moitié tous les quinze jours, à la pluralité relative des voix. Les séances devaient durer au moins six heures. Nous voyons par les procès-verbaux qu’elles commençaient ordinairement à dix heures du matin et qu’elles se prolongeaient sans interruption jusqu’à cinq heures du soir. Les séances extraordinaires du soir étaient fréquentes, et se prolongeaient souvent fort avant dans la nuit. Contraste saisissant ! il arrivait que ces législateurs souverains, qui faisaient trembler les rois de l’Europe, quittaient le palais des Tuileries, dans les nuits d’hiver, après avoir agité les destinées du monde en d’orageux débats, et regagnaient à pied leur humble logis, fouettés par la neige ou le vent à travers les rues désertes.

Le président pouvait toujours, si les circonstances l’exigeaient, faire des convocations extraordinaires. En outre, douze membres devaient être nommés chaque jour pour ouvrir les dépêches, dans l’intervalle d’une séance à l’autre, et convoquer l’Assemblée si cela était nécessaire. Parfois, c’était la générale ou le tocsin qui appelait les représentants à leur poste, et l’opinion même aurait flétri celui qui ne se serait point hâté de venir siéger lorsque des troubles éclataient ou qu’il survenait un événement quelconque. En sorte que l’on pourrait dire en quelque sorte que la Convention était permanente et qu’elle siégeait toujours. Elle ne connaissait ni dimanches, ni fêtes, ni décadi quand le calendrier républicain fut institué.

La séance ne pouvait être ouverte que si deux cents membres étaient présents. Jusqu’à midi elle était remplie par la lecture du procès-verbal, des lettres des commissaires aux armées, des généraux, etc. ; par les communications particulières, les motions incidentes, etc. On suivait ensuite l’ordre du jour indiqué la veille, et qui ne pouvait être interrompu que pour des objets d’un intérêt majeur et par décret de l’Assemblée. La séance du dimanche était plus particulièrement consacrée à entendre les députations et les pétitions à la barre. La barre appartenait au peuple. Tout citoyen avait le droit de s’y présenter, après avoir communiqué l’objet de sa réclamation au président, qui l’inscrivait à son tour, et lui indiquait le jour et l’heure où la Convention pourrait l’entendre. C’était également là que se présentaient les députations des sociétés, des sections et de la Commune, les envoyés des départements ou des armées, qui venaient apporter des pétitions, ou des félicitations, ou des dons patriotiques, ou des drapeaux conquis sur l’ennemi, etc., ainsi que les fonctionnaires publics que l’Assemblée faisait comparaître devant elle pour les interroger. Il en était ainsi dans les assemblées précédentes, mais la Convention fut en communication plus directe encore et plus fréquente avec le peuple, et l’on vit jusqu’à des citoyens se présenter à la barre presque uniquement pour chanter une chanson patriotique sur la reprise de Toulon ou tout autre événement heureux pour la République. C’était là, bien évidemment, un abus d’une chose excellente en soi ; mais la grande Assemblée avait un tel respect pour toutes les manifestations de l’opinion publique, qu’elle tolérait même l’abus. D’un autre côté, les citoyens étaient tellement habitués à considérer les représentants comme les pères du peuple, qu’ils éprouvaient le besoin puéril et touchant de leur confier toutes leurs impressions, comme l’enfant à sa mère. Des volontaires, après une route de 200 lieues, marchaient avec plus d’ardeur à la frontière quand ils avaient obtenu de défiler dans la Convention.

Les tribunes publiques étaient ouvertes indistinctement à tous les citoyens ; quelques-unes seulement étaient réservées aux citoyens des départements, aux étrangers, aux députés suppléants, etc. Malgré le règlement, ces tribunes manifestaient parfois leurs impressions d’une manière un peu bruyante. Jusqu’au 9 thermidor, les révolutionnaires y dominaient ; à partir de cette époque, elles commencèrent à être envahies par la jeunesse dorée et les royalistes.

Outre les prescriptions habituelles pour assurer l’ordre des délibérations, le règlement de la Convention portait qu’un représentant, après le rappel à l’ordre, l’inscription au procès-verbal et la censure, pouvait être, s’il continuait à troubler l’Assemblée, exclu de la séance, mis aux arrêts, et même emprisonné ; d’où les cris : À l’Abbaye ! qu’on entendait souvent dans les séances orageuses.

La première formation des comités avait eu lieu de la manière suivante. Des boîtes avaient été placées dans la salle ; chaque député y déposa un billet contenant son nom et la désignation du comité auquel il se pensait propre. Cette liste préparatoire servit de base pour l’élection. L’organisation primitive, décrétée le 2 octobre 1792, comprenait vingt et un comités, savoir :

Comité de constitution, dont les 9 membres étaient : Sieyès, Thomas Payne, Brissot, Pétion, Vergniaud, Barère, Danton, Condorcet, Gensonné.

Comité diplomatique, 9 membres : Grégoire, Anacharsis Cloots, Brissot, Rewbell, Ch. Villette, Guadet, Guyton-Morveau, Kersaint, Carnot.

Comité militaire, 24 membres, dont les principaux étaient : Lacroix, Letourneur (de la Manche), Dubois-Crancé, Gasparin, Lacombe Saint-Michel, Merlin (de Douai), Carnot, Sillery, Fabre d’Églantine, Albitte, etc.

Comité de surveillance et de sûreté générale, 30 membres, dont les principaux étaient : Hérault-Séchelles, Basire, Fauchet, Chabot, Lavicomterie, Manuel, Cavaignac, Tallien, Bernard (de Saintes), Drouet, etc.

Comité de législation civile et criminelle, 48 membres, dont les principaux étaient : Garran-Coulon, Guadet, Couthon, Lanjuinais, Louvet, Thuriot, Barère, Osselin, Lepelletier Saint-Fargeau, Robespierre, Cambacérès, Vadier, etc.

Comité d’instruction publique, 24 membres, dont les principaux étaient : David, Dusaulx, Chénier, Romme, Mercier, Durand-Maillane, Léonard Bourdon, Fouché, Buzot.

7o Comité des finances, 42 membres, dont les principaux étaient : Cambon, Camus, Defermont, Treilhard, Fouché, Mallarmé, Ramel, Jacob Dupont, Cussy, Mazuyer, etc.

Tels étaient les plus importants comités de la première organisation. Venaient ensuite les comités : des décrets, 9 membres ; des pétitions et de la correspondance, 24 membres ; des inspecteurs de la salle, du secrétariat et de l’imprimerie, 18 membres-, des procès-verbaux, des renvois et des expéditions, 6 membres ; des secours publics, 24 membres ; enfin d’agriculture, du commerce, des domaines, de liquidation, de l’examen des comptes, de la marine, etc.

En outre, il y avait la commission centrale, composée d’un membre de chaque comité, et chargée de présenter chaque jour un tableau du travail de l’Assemblée, c’est-à-dire de dresser l’ordre du jour.

Cette organisation comprenait 418 membres, c’est-à-dire un peu plus de la moitié de la Convention.

Le 25 octobre, l’Assemblée décréta que les comités seraient renouvelés par moitié deux mois après le jour de leur formation. Enfin, par décret du 6 novembre, chaque comité fut autorisé à faire imprimer et distribuer les projets de décrets qu’il aurait résolu de soumettre aux délibérations de l’Assemblée.

Cette organisation fut plusieurs fois modifiée ; mais les indications qui précèdent suffisent pour montrer avec quel soin les affaires étaient étudiées et préparées dans la Convention, et combien d’hommes de premier ordre y prenaient part. Nous ne rappellerons aussi que pour mémoire les grands comités de Salut public et de Sûreté générale, dont l’importance ne date que de 1793, et auxquels nous avons consacré des articles spéciaux (v. comité). Le premier surtout, le comité de Salut public, joua un rôle éclatant, et devint un véritable gouvernement, le pouvoir exécutif de l’Assemblée.

L’histoire de la Convention peut se diviser en trois périodes : 1o depuis l’ouverture de l’Assemblée (21 sept. 1792) jusqu’à la chute des girondins (31 mai-2 juin 1793) ; 2o depuis cette époque jusqu’à la chute de Robespierre (9 thermidor an II-27 juillet 1794) ; 3o enfin, depuis cette révolution jusqu’à la fin de la session conventionnelle (4 brumaire an IV-26 octobre 1795).

Dès la première séance, il se produisit un fait significatif : tous les députés de ce parti qu’on a nommé la Gironde, et qui composaient le côté gauche de la Législative, allèrent se placer, avec leurs adhérents, à la droite, sur les sièges mêmes où, la veille encore, étaient assis les derniers feuillants, abandonnant la gauche à la députation de Paris et aux représentants qui en partageaient les ardeurs révolutionnaires. Ce côté devint la Montagne. Au centre, sur les bancs les moins élevés, siégeaient une masse considérable de députés qui, soit qu’ils fussent moins exclusifs, soit qu’ils eussent des idées moins arrêtées, flottèrent d’un parti à l’autre et déplacèrent la majorité au hasard des événements et de leurs propres impressions. On nomma cette région la Plaine, ou encore le Marais, par opposition à la Montagne. Effacés par les grandes personnalités politiques, les membres de ce côté, du moins le plus grand nombre, ne manifestaient le plus souvent leurs opinions que par des rumeurs confuses qui leur firent donner par leurs adversaires le surnom de crapauds du Marais. On sait que les hommes de ce temps, dans leurs passions ardentes, ne se ménageaient point les épithètes injurieuses. Tous ces groupes, d’ailleurs, voulaient énergiquement la République. Il n’y avait pas en réalité de parti royaliste à la Convention.

Le parti girondin, on l’a vu par l’élection du bureau, fut d’abord en possession de la majorité. Composé de personnalités brillantes, parmi lesquelles il faut citer surtout Vergniaud, Brissot, Guadet, Gensonné, le ministre de l’intérieur Roland, Isnard, Barbaroux ; Fauchet, Buzot, Rabaut Saint-Étienne, Ducos, Lasource, Dulaure, Louvet, etc. ; ce parti manquait d’ailleurs de cohésion et de discipline, on l’a souvent répété, et très-justement. Après avoir joué un rôle prépondérant, il se sentait maintenant dépassé, de la même manière qu’il avait lui-même effacé le parti constitutionnel, c’est-à-dire en vertu du mouvement ascendant de la Révolution. Il lui fallait de toute nécessité ou faire un pas en avant, ou se résigner à descendre au second rang, ou tout au moins renoncer à cette guerre d’âcres personnalités dont ses membres donnèrent le triste spectacle dès les premiers jours de la Convention. Dans un certain nombre de départements, ils avaient exercé une grande influence sur les élections, par leur renommée, par leurs relations, beaucoup aussi par leurs nombreux journaux, répandus partout, grâce aux fonds du ministère de l’intérieur. Mais à Paris tous leurs candidats avaient échoué. De là d’aigres rancunes contre Paris, sa députation, sa commune, ses clubs, et dans lesquels on ne peut méconnaître les ressentiments de l’orgueil froissé, au moins autant que les préoccupations d’intérêt public. Les deux partis d’ailleurs se méconnaissaient avec un aveuglement égal, et les accusations dont ils se poursuivaient n’étaient guère mieux fondées les unes que les autres. La guerre était commencée depuis longtemps déjà entre les opinions ; elle allait se poursuivre avec acharnement entre les personnes, dans le champ clos de la Convention, où les ennemis se rencontraient face à face, et finalement se résoudre en tragédies. Lutte de passions et d’idées qui fut le malheur de la Révolution, mais qui, dans l’état des choses, était peut-être inévitable ! Une observation que la destinée funeste des girondins ne doit pas empêcher de faire, c’est que, suivant la tradition constante des partis qui prétendent au monopole de la modération, ce furent eux qui donnèrent l’exemple des violences implacables ! En présence de la grandeur de la tâche à accomplir, de l’imminence des périls publics, beaucoup de montagnards étaient arrivés avec des idées de concorde et d’apaisement, et un certain nombre avaient même pris place indistinctement dans les diverses parties de la salle. Il fallut les attaques incessantes de leurs adversaires pour les décider à se grouper en masse compacte et résolue. Danton, le terrible Danton, ne cessait de prêcher l’union du grand parti de la Révolution. Robespierre lui-même montra d’abord beaucoup de modération dans ses Lettres à ses commettants, tandis qu’à la même époque les feuilles girondines étaient pleines de provocations et de calomnies. Garat, plus clairvoyant et plus modéré que ses amis de la Gironde, rapporte dans ses mémoires qu’il fit lui-même les plus grands efforts pour calmer leurs passions haineuses, leurs aveugles préventions, pour les disposer à une réconciliation sincère dans l’intérêt de la République. Tout fut inutile. À des ouvertures de rapprochement, le véhément Barbaroux avait fait cette réponse orgueilleusement absurde : « Il n’est pas possible que le vice marche jamais d’accord avec la vertu. » La vertu, naturellement, c’était lui et ses amis ; le vice, c’était le côté gauche, la Montagne. Dans de pareilles dispositions, qui étaient celles de la majorité du parti, il n’y avait de possible que la guerre.

Elle éclata dès les premières séances, cette lamentable guerre, avec la fureur aveugle de toutes les luttes fratricides. Affectant de considérer Paris comme un repaire de brigands, les girondins débutèrent par réclamer des lois répressives contre l’anarchie. « À mon arrivée ici, dit Lanjuinais, j’ai frémi… » Paroles doublement ridicules, car alors Paris était dans la plus profonde tranquillité, et, d’autre part, Lanjuinais était un homme d’une indomptable énergie, et qui ne frémissait guère. Tout à coup, démasquant la pensée du parti, Buzot, après un discours violent, demanda que la Convention s’entourât d’une troupe soldée prise dans les 83 départements. Une commission fut nommée pour préparer un projet dans le sens des diverses propositions girondines. Première victoire. Le lendemain, 25 septembre, nouveau combat. Lasource déclama contre le despotisme de Paris. « Il faut, dit-il, que Paris soit réduit à un quatre-vingt-troisième d’influence comme chacun des autres départements. » Puis il affirme qu’il existe dans la Convention des hommes qui aspirent à la dictature, à la tyrannie. Rébecqui et Barbaroux désignent Robespierre, sans donner d’ailleurs aucune preuve. C’était là un commérage qui avait traîné dans les feuilles girondines, et suivant lequel Danton, Robespierre et Marat devaient usurper le pouvoir et former un triumvirat. À force de la ressasser, les girondins avaient fini par croire à ce roman. Danton, dans un discours mesuré qui contrastait avec les emportements de l’autre parti, fait appel à la concorde, demande qu’on n’étende point à tous les députés de Paris la responsabilité des exagérations de Marat ou d’autres, et, pour couper court aux accusations mutuelles, propose de décréter la peine de mort contre quiconque parlerait soit de dictature, soit de détruire l’unité de la République. On sait que, de leur côté, les girondins étaient accusés de nourrir des projets de fédéralisme. Robespierre, à son tour, se disculpa dans une longue improvisation et conclut de la même manière que Danton. Enfin Marat parut à la tribune, et, malgré les clameurs d’une partie de l’Assemblée, exposa ses idées particulières. Il déclara fièrement que c’était lui seul qui avait demandé un dictateur. Et en effet, il l’avait fait hautement, publiquement ; c’était une des mille idées souvent extravagantes qu’il lançait chaque jour, et qui, venant de lui, l’engageaient seul et ne pouvaient avoir un caractère bien sérieux aux yeux des gens sensés. De nouvelles tempêtes éclatèrent encore dans cette séance. Vergniaud, Boileau, Brissot, attaquèrent la Commune et rappelèrent les tristes journées de septembre. Un des thèmes favoris des girondins, c’était de rendre tous leurs adversaires en masse solidaires des massacres. Cependant il était avéré qu’eux-mêmes n’avaient rien fait pour les empêcher, et que même ils étaient loin alors de témoigner pour ces terribles événements l’horreur dont ils firent parade depuis. Cependant, le pouvoir était alors entre leurs mains (sauf la justice, où était Danton). Roland et Pétion avaient atténué, excusé les exécutions, et Gorsas les avait qualifiées de justice nécessaire. V. septembre (Massacres de).

De guerre lasse, ils se rejetèrent sur Marat, qui ne leur donnait que trop de prise, mais qu’ils tentèrent en vain de faire décréter d’accusation, donnant ainsi l’exemple de vouer leurs collègues à la proscription. C’est à la suite de ce nouvel orage que Marat s’appliqua un pistolet sur le front. Cette longue et déplorable lutte se termina sans aucun résultat pour ceux qui l’avaient provoquée. L’Assemblée passa à l’ordre du jour sur les accusations et décréta l’unité et l’indivisibilité de la République.

Mais le combat n’était que suspendu. Il reprit bientôt avec une nouvelle force, mêlant sa furie à toutes les questions que débattait l’Assemblée. Se croyant assurée de la majorité, toute-puissante dans les ministères, disposant de nombreux journaux, appuyée par les autorités départementales, la Gironde tomba dans le vice éternel des partis triomphants et des pouvoirs forts : elle ne sut ni se contenir, ni supporter autour d’elle aucun dissident, rien qui échappât à son action. Tout en se prétendant le parti de la modération, elle étonna les plus violents par son ardeur agressive et par ses emportements. Bien avant ses adversaires, dans les premiers jours de la Convention, elle avait eu la pensée d’une épuration de l’Assemblée. Garat l’avoue. Ce projet fut abandonné comme impraticable, mais on tenta du moins de le réaliser en détail, par la mise en accusation des principaux montagnards. Ces tentatives insensées, les déclamations continuelles contre la Commune populaire du 10 août, contre Paris et sa députation, n’eurent d’autre résultat que d’exciter de plus en plus les patriotes ardents contre les brissotins, comme on disait alors, et de détacher de leur cause un certain nombre de conventionnels qui avaient voté quelque temps avec eux. Bientôt la puissante Société des jacobins leur échappa entièrement. Garat, leur ami, devenu ministre de la justice, les défendit autant qu’il le put, mais ne voulut point les suivre dans la violence. Pache, présenté au ministère de la guerre par Roland, se sépara résolument d’eux quelque temps après. Bientôt enfin leur intolérance et leur exclusivisme tournèrent décidément contre eux la capitale entière, avec ses sections, ses sociétés populaires et toutes ses autorités constituées. Mais, avant même que cette opposition unanime de la grande ville fût complètement formée, ils ne songeaient qu’à la contenir et à la comprimer ; d’où leur projet de s’envelopper d’une garde départementale, dont Buzot vint présenter le plan définitif le 8 octobre. Dans son rapport, il tient exactement le même langage que les émigrés de Coblentz. Il faut voir avec quelle violence emphatique le pâle avocat d’Évreux parle de cette ville sacrée qui, en assurant le triomphe de la Révolution, a consommé l’affranchissement de la France et préparé l’émancipation du monde. Ses adversaires politiques sont naturellement, des factieux, des reptiles, des hommes « qui ont besoin de l’anarchie pour dominer, du crime pour jouir ; des hommes que l’humanité surveille et que la loi doit enfin écraser, etc. » Le rapport concluait à ce que chaque département envoyât autant de fois quatre fantassins et deux cavaliers qu’il avait de députés ; au total 4,470 hommes. La nomination du commandant était réservée à l’Assemblée.

Cette idée de donner une sorte de maison militaire à la Convention, venant précisément du parti qui avait provoqué la dissolution de la garde constitutionnelle du roi, parut à beaucoup de personnes se rattacher à des projets de domination. L’Assemblée ajourna prudemment la discussion. Paris sentit vivement l’injure de cette proposition. Les sections envoyèrent leurs députés à la barre. Il y eut beaucoup de protestations et de débats ; mais, en résumé, la mesure ne fut jamais appliquée. Seulement on vit arriver à Paris une troupe de huit cents Marseillais, appelés par Barbaroux pour défendre la Convention, que personne n’attaquait, et pour écraser l’anarchie. Ces ardents Méridionaux, fort étonnés d’être reçus en frères par les prétendus anarchistes, furent bientôt gagnés en partie à la Révolution.

Cependant les girondins préparaient une attaque en règle contre Robespierre. Chose étrange et qui montre bien la légèreté et l’impuissance de ce malheureux parti, c’est que le champion qui fut choisi pour abattre un tel ennemi, un homme aussi austère et si fortement assis dans sa popularité, ce champion ne fut autre qu’une espèce de femmelette lascive, un polisson littéraire de l’ancien régime, Louvet, l’auteur du roman obscène de Faublas, devenu l’un des enfants perdus, l’un des énergumènes de la Gironde. Le 29 octobre, à la suite d’un rapport envoyé par Roland et rempli des déclamations habituelles, le maigre tribun, transfuge des boudoirs, s’élance à la tribune, et, dans un discours écrit, préparé de longue main, il vocifère : « Robespierre, je t’accuse !… » Pendant une heure il ressasse tous les absurdes commérages dont se nourrissait la crédulité de son parti. En résumé, il accusait Robespierre de marcher au suprême pouvoir, et il concluait à l’examen de sa conduite par un comité et à la mise en accusation immédiate de Marat. Danton, cette fois, était épargné. On avait sans doute compté emporter l’affaire par un coup de majorité, au milieu des clameurs accoutumées ; la machine était montée pour cela. Robespierre sentit le piège. Il demanda un délai de quelques jours pour examiner cette extravagante philippique et la réfuter, ce qu’on ne pouvait lui refuser sans impudeur, En attendant, Roland prit sur lui d’expédier dans les départements, aux frais du trésor, quinze mille exemplaires du factum de Louvet-Faublas. On sait d’ailleurs qu’il inondait la France des pamphlets girondins. C’est ainsi qu’il interprétait le décret qui l’autorisait à répandre les bons ouvrages aux frais de l’État. Le lendemain de cette fameuse séance, l’infatigable Barbaroux remonta à la tribune pour reprendre la thèse de Louvet ; mais il fut interrompu par les marques d’impatience de l’assemblée.

Ces accusations continuelles, ces luttes funestes produisaient au dehors une grande agitation ; elles augmentaient l’impopularité des girondins et grandissaient leurs adversaires. Attaquée sans relâche, et souvent avec la plus insigne mauvaise foi, la Commune était en lutte ouverte avec la Convention. Des bandes armées, appelées du fond des provinces, continuaient à affluer dans la capitale. On accusait hautement le côté droit de provoquer des troubles pour avoir un prétexte à l’institution d’une garde et même au transfèrement de la Convention. Marat tonnait dans son journal avec sa violence habituelle, égalée d’ailleurs, sinon dépassée, par les journaux de la Gironde. Le 3 novembre, deux jours avant le jour fixé pour la défense deRobespierre, des dragons et quelques centaines de ces fédérés que les girondins, de leur autorité privée, faisaient venir à Paris pour maintenir officieusement l’ordre qu’eux seuls troublaient, parcoururent les rues le sabre nu en vociférant : Vive Roland ! À la guillotine Marat, Robespierre et Danton ! Enfin, le 5, Robespierre présenta sa justification dans un discours qui contenait son apologie, sans doute, mais qui en définitive était une réfutation magistrale du réquisitoire acrimonieux de Louvet. Cette belle défense fit une profonde impression sur la Convention, qui, à une immense majorité, en décréta l’impression et l’envoi aux 83 départements. Puis, malgré l’acharnement de Louvet, de Barbaroux et de quelques autres, l’assemblée passa à l’ordre du jour sur l’accusation. La Gironde n’avait obtenu d’autre résultat que de préparer un triomphe éclatant à l’un de ses principaux ennemis. Déjà, dans la séance du 29, il s’était passé un fait caractéristique. Pendant que Louvet déclamait sa diatribe, un député quitta les bancs de la droite avec indignation et monta s’asseoir au sommet de la Montagne, au milieu de la députation de Paris. C’était Anacharsis Cloots, le philosophe de la République universelle, l’orateur du genre humain.

Nous ne pouvons, on le comprend, entrer dans tous les détails de ce duel formidable qui eut l’échafaud pour dénoûment, et qui eut un autre résultat non moins funeste, celui d’assombrir les âmes, de les exalter dans la haine et de donner aux passions un caractère inexorable. Nous ne croyons pas nécessaire non plus de rappeler les accusations banales et absurdes dont se poursuivaient mutuellement les deux partis. Les uns, les vaincus, par le dernier cri sorti du fond de leur cœur, en face de l’échafaud ; les autres, par leurs travaux, par leur lutte gigantesque contre l’Europe des rois, ont suffisamment prouvé combien ces accusations, ces soupçons étaient peu fondés.

Cependant l’inauguration de la République avait été fêtée par de brillants succès militaires. La canonnade de Valmy retentissait encore au moment où la Convention se rassemblait. Au milieu même des combats dont elle était déchirée, elle avait rendu des décrets d’intérêt général, envoyé des commissaires aux frontières et aux armées, et activé le travail de ses comités. Bientôt Montesquieu entrait en Savoie, Anselme dans le comté de Nice ; Lille, bombardée, incendiée, soutenait héroïquement un siège comparable à ceux de Carthage et de Numance ; Custine s’emparait de Spire, de Worms et de Mayence, Houchard de Francfort ; conquêtes faciles, car les peuples enthousiasmés se précipitaient au-devant du drapeau de la République, dans les plis duquel rayonnait la grande devise : Guerre aux despotes ! Paix et liberté aux peuples ! Enfin, les Prussiens en retraite filaient à travers la Champagne, et Dumouriez préparait l’invasion de la Belgique. La guerre des principes servait d’auxiliaire à la guerre de défense ; la France n’envahissait pas pour conquérir, mais pour délivrer, et, partout où elle déployait son drapeau, elle proclamait l’indépendance des nations et la souveraineté du peuple : ses soldats étaient des missionnaires, les croisés de la liberté. Telle était la doctrine de la Convention. Aussi les idées républicaines germaient-elles sous les pas de nos volontaires, qui étaient accueillis avec un enthousiasme inexprimable à Chambéry, à Nice, dans le Palatinat, en Belgique, etc., et qui ne rencontraient guère pour ennemis que les formidables armées des rois. À cette grande époque, les nations, a dit le poète,

Ceignaient de fleurs le front de nos soldats.

La Belgique, la Savoie, le comté de Nice, qui avaient arboré le drapeau tricolore et planté l’arbre de la liberté, demandèrent leur réunion à la République, avant d’être entièrement délivrés des armées de la coalition. Le comité diplomatique et l’Assemblée examinaient toutes ces demandes avec la plus scrupuleuse attention ; et, chose qui frappait d’étonnement l’Europe monarchique et féodale, ce qui préoccupait surtout nos législateurs révolutionnaires, c’était la crainte de violer à leur insu les principes, et de prendre pour une opinion nationale ce qui pouvait n’être que le vœu d’une minorité mécontente. « Nous avons pour principe, disait Carnot à la tribune, que tout peuple, quelle que soit l’exiguïté du pays qu’il habite, est absolument maître chez lui ; qu’il est égal en droit au plus grand, et que nul autre ne peut légitimement attenter à son indépendance. »

Tels étaient les nobles principes de la démocratie révolutionnaire. Aussi toute réunion n’était-elle prononcée qu’après un sévère examen. Un décret du 15 décembre 1792 ordonnait aux généraux en pays étranger d’abolir le régime féodal et de convoquer partout les assemblées primaires pour établir une forme de gouvernement libre. Tout vœu de réunion à la République devait être exprimé librement et régulièrement.

Au milieu de ses grands travaux, la Convention eut à lutter contre un ennemi plus terrible que les hordes de la coalition, la faim, La récolte de 1792 avait été suffisante ; mais la crainte des invasions, l’avidité et la malveillance faisaient cacher les blés. L’accaparement, comme la fabrication des faux assignats, était une des manœuvres de guerre des royalistes et de l’étranger. Dès 1789, le parti du passé avait eu recours à cette vieille machine de guerre, s’imaginant qu’il prendrait la Révolution par la famine, comme une ville assiégée. La tactique, malgré l’insuccès, ne fut pas abandonnée, et le personnage sinistre de l’accapareur, nullement légendaire, comme quelques écrivains de parti ont affecté de le croire, continua ses opérations homicides à travers tous les événements. Il faut ajouter la cupidité de certains agriculteurs, la nécessité de mesures extraordinaires pour l’approvisionnement des armées qui défendaient pied à pied le territoire, les manœuvres du clergé réfractaire, et d’autres causes que nous n’avons pas à énumérer ici, et qui avaient contribué à entraver le jeu de cette machine délicate des transactions et du crédit. Dans la Seine-et-Oise, l’Aisne, le Loir-et-Cher, la Sarthe, l’Eure-et-Loir, des troubles éclatèrent à propos de la circulation des blés, que les populations empêchaient à main armée. L’Assemblée envoie partout des commissaires, discute sans relâche la question des subsistances, ordonne des achats considérables de grains à l’étranger, adopte diverses mesures commandées par les circonstances, mais se prononce en définitive pour la libre circulation des grains.

Bientôt, la grande question du procès de Louis XVI fut mise à l’ordre du jour. Depuis l’ouverture de la Convention, la mise en accusation du monarque déchu, sa mort même, étaient impérieusement réclamées par des adresses envoyées de tous les points de la France. Le 6 novembre, le girondin Valazé, au nom de la commission chargée d’examiner les papiers déposés au comité de surveillance, présenta son rapport, et le lendemain, Mailhe, au nom du comité de législation, vint faire l’exposé des questions relatives au jugement, en concluant : 1o que Louis XVI devait être jugé ; 2o qu’il devait l’être par la Convention nationale. L’Assemblée décrète que ce rapport sera traduit dans toutes les langues et envoyé aux départements, aux communes et aux armées. Malgré ses divisions profondes, elle était unanime sur la nécessité de punir les trahisons de l’ex-roi. Cette question tragique allait se résoudre, suivant toutes les apparences, avec une netteté terrible. Cela se nommait simplement l’affaire Capet.

Le jour même où Mailhe déposait son rapport, Dumouriez gagnait la bataille de Jemmapes. Cette victoire nous donnait la Belgique.

Le 13 novembre s’ouvrirent les débats sur le jugement, et quelques jours plus tard la découverte de l’armoire de fer vint augmenter les charges qui pesaient sur le malheureux captif. Enfin, après de longues et solennelles discussions, souvent interrompues par les grandes affaires journalières, la Convention décréta que Louis Capet serait jugé par elle, et arrêta la série de questions qui seraient posées au ci-devant roi. Le 11 décembre, Louis fut amené à la barre et interrogé au nom des représentants de la nation. Il nia à peu près tout, jusqu’aux faits les mieux démontrés, jusqu’à sa propre écriture, duplicité puérile qui ne pouvait qu’affaiblir l’intérêt que son infortune avait droit d’inspirer. L’Assemblée demeura jusqu’à la fin silencieuse et grave.

Nous n’entrerons pas ici dans les détails de ce procès mémorable. On les trouvera résumés, avec les appels nominaux, les votes de chacun des représentants et les principaux votes motivés, à la suite de l’article Louis XVI.

Rappelons seulement que les débats qui eurent lieu à ce sujet, jusqu’au terme fatal, furent, comme la plupart des questions d’ailleurs, l’occasion de nouveaux combats entre la Gironde et la Montagne. Les girondins, tout en proclamant le roi coupable de trahison et de complot contre la sûreté de l’État et la liberté publique, étaient secrètement animés du désir de lui épargner l’échafaud, mus par un sentiment de compassion généreuse et peut-être aussi parce que leurs adversaires concluaient à la mort, comme pour un criminel ordinaire. Ils imaginèrent le système de l’appel au peuple, qui fut repoussé après de vives discussions. Puis, avec leur inconséquence habituelle, ils votèrent pour la mort, du moins un grand nombre d’entre eux.

Le jour même de la condamnation du roi, le représentant Lepelletier Saint-Fargeau, qui avait voté la mort, fut assassiné, presque au sortir de la séance, par un ex-garde du corps nommé Pâris ou Deparis. La Convention décréta pour lui les honneurs du Panthéon et assista en corps à ses funérailles (24janv.). Cet événement produisit d’ailleurs une sensation plus profonde que le supplice de l’ex-roi. L’Assemblée reprit le cours de ses travaux, renouvela son comité de sûreté générale, où cette fois entrèrent beaucoup de montagnards, supprima le bureau d’esprit public institué par Roland, qui n’était en réalité qu’une officine de calomnies et de diatribes, et ordonna que ce ministre rendrait compte de sa gestion. C’était un premier coup porté aux girondins. Roland donna sa démission, qui fut acceptée purement et simplement.

Le 1er février, poussée à bout par les provocations et les intrigues du cabinet britannique, la Convention déclara la guerre au gouvernement anglais, qui venait de chasser notre ambassadeur Chauvelin, sous le prétexte du jugement de Louis XVI. En fait, la guerre existait déjà, et il était avéré que le cabinet de Londres était un des centres de la coalition européenne. Burke avait trahi la pensée de son pays sur la France, quand il avait osé écrire qu’il fallait la rayer du tableau du monde. Par sa Révolution, par les principes nouveaux qu’elle apportait dans le monde, non moins que par l’anéantissement de sa noblesse et l’audacieuse exécution de son monarque, la France se trouvait en guerre avec tous les rois. Environnée de périls et déchirée à l’intérieur par les complots et les factions, elle entra cependant résolument en campagne contre l’Europe entière, confiante dans la justice de sa cause et l’héroïsme de ses enfants. C’était le temps où Carnot s’écriait : « Qu’y a-t-il d’impossible à vingt-cinq millions d’hommes libres qui ont juré de ne plus redevenir esclaves ? »

La Convention décréta une levée de trois cent mille hommes, et envoya dans les départements quarante et une commissions de deux députés pour stimuler l’enthousiasme des citoyens et présider au recrutement. On ne saura jamais tous les services qui ont été rendus, soit aux armées, soit à l’intérieur, par ces vaillants commissaires conventionnels, que le parti militaire s’est attaché à dénigrer depuis, et qui ont tant contribué à sauver la patrie par leur énergie, leur constance et leur prodigieuse activité.

Cependant l’attitude prise depuis quelque temps par Dumouriez inspirait à la Convention de sérieuses alarmes. L’évacuation de Bruxelles, la défaite de Nerwinde redoublèrent contre lui les défiances. Mandé à la barre, il arrêta les commissaires de l’Assemblée, les livra aux Autrichiens, avec lesquels il était d’intelligence, comme on l’en avait justement soupçonné, essaya vainement d’entraîner son armée pour marcher sur Paris, et enfin, abandonné de tous, poursuivi, passa à l’ennemi, emportant à l’étranger le secret de nos moyens de défense (5 avril). Cette trahison coïncide avec d’autres événements malheureux, l’insurrection de la Vendée, les troubles de Corse, la défaite de Custine, la crise des subsistances, etc. Les périls, un moment conjurés, renaissaient plus menaçants encore qu’en septembre 1792. La France sembla un moment comme éperdue.

Les trahisons d’un certain nombre d’officiers, les revers de nos armées, les complots incessants des royalistes, des ex-nobles et des prêtres réfractaires, le massacre des patriotes dans l’Ouest et dans le Midi, le danger suprême dans lequel se trouvait alors la France, appelaient évidemment les mesures les plus promptes et les plus énergiques. Déjà, le 10 mars, l’Assemblée, à une immense majorité, avait institué le tribunal révolutionnaire (v. ce mot), pour juger sans appel les contre-révolutionnaires et les conspirateurs. À des périls excessifs la Révolution opposait des moyens de défense excessifs. Nous n’avons pas ici à nous occuper du terrible tribunal. Cependant, tout en déplorant des violences à jamais funestes, il serait injuste de ne pas faire la part des circonstances. Nous citerons à ce sujet les paroles d’un royaliste dont l’appréciation ne saurait être suspecte : « Séparez une institution politique des temps qui l’ont vue naître, et vous ne pouvez plus en porter un jugement ni sain ni équitable. » (Lally-Tollendal.)

En outre, les royalistes avaient donné l’exemple de ces répressions implacables. Après avoir inauguré dans l’Ouest leurs premiers triomphes par d’épouvantables tueries, ils avaient institué, suivant l’expression de M. Michelet, « un comité d’honnêtes gens qui fit périr en six semaines 542 patriotes. »

Que ceux qui déclament sans cesse contre les « excès de la Révolution » veuillent bien se souvenir qu’à la même époque les sauvages de la Vendée, poussés à la frénésie par les ministres du Dieu de paix, égorgeaient, fusillaient, brûlaient vifs, enterraient vivants tous les patriotes qui tombaient entre leurs mains. Le curé constitutionnel de Machecoul avait été déchiré par les femmes. Joubert, président du district, avait eu les poings sciés avant d’être égorgé, etc.

À ce moment terrible fut rendu le décret de mort contre les émigrés qui rentreraient sur le territoire français ; ils étaient en outre frappés de mort civile, et la République entrait en possession de leurs biens. On créa des comités de surveillance, lesquels deviendront, sous la terreur, les fameux comités révolutionnaires et se multiplieront dans toutes les communes. Ces mesures de guerre furent complétées par la création du comité de Salut public, destiné à donner au pouvoir exécutif plus de force et plus d’action, et surtout à établir entre lui et la Convention des rapports plus directs et plus intimes. Enfin on décréta l’arrestation de tous les membres de la famille des Bourbons qui se trouvaient encore en France. Égalité fut envoyé prisonnier à Marseille. Les montagnards, au milieu desquels il siégeait, l’avaient longtemps défendu contre les girondins ; mais son fils ayant suivi Dumouriez, ils finirent par l’abandonner. Cependant les discordes continuaient au sein de l’Assemblée. Les éternelles et irritantes questions de la garde départementale, des prétendus projets de dictature, etc., revenaient périodiquement passionner les débats. Les deux partis se renvoyaient l’accusation injuste et fausse de complicité avec Dumouriez. Nous avons dit que Danton avait à plusieurs reprises tenté une conciliation. Repoussé avec dédain par le côté droit, journellement diffamé, le véhément tribun éclata enfin dans la séance du 1er avril, à la suite de longues attaques des girondins, et d’accusations calomnieuses sur sa mission en Belgique et sur ses rapports avec Dumouriez. Sa colère, longtemps contenue, déborda avec une puissance terrible en un discours qui fut un véritable cri de guerre et qui remua l’Assemblée jusque dans ses entrailles. « Il n’est plus de trêve, disait-il, entre la Montagne, entre les patriotes qui ont voulu la mort du tyran et les lâches qui, voulant le sauver, nous ont calomniés devant la France….. Les projets criminels qu’on m’impute, les épithètes de scélérats, tout a été prodigué contre nous ; et l’on espère maintenant nous effrayer ! Oh ! non !… Ralliez-vous, criait-il à la Montagne, serrez-vous ; appelez le peuple à se réunir contre l’ennemi du dehors et à écraser l’ennemi du dedans. Confondez, par la vigueur et l’immobilité de votre caractère, tous les scélérats, tous les aristocrates, tous les modérés, tous ceux qui vous ont calomniés dans les départements ! (Et il désignait la droite.) Plus de composition avec eux ! Vous n’avez jamais su tirer de votre position populaire tout l’avantage qu’elle pouvait vous donner. Qu’enfin justice vous soit rendue… » Et de sa voix tonnante il parla ainsi pendant une heure. La Gironde était pétrifiée par cette explosion qu’elle avait provoquée. Les montagnards, debout, criaient dans un transport inexprimable : « Nous sauverons la patrie  »

La salle croulait sous les acclamations des tribunes publiques. Enthousiasme tragique qui ne faisait que trop pressentir la catastrophe prochaine !

Quelques jours après, la Gironde obtint cependant encore un triomphe, la mise en accusation de Marat, qu’elle poursuivait depuis si longtemps, et qui avait signé une adresse des jacobins où il était dit que la Convention renfermait la contre-révolution dans son sein. L’absence d’un grand nombre de montagnards, qui étaient en mission, lui permit d’enlever ce vote. Danton, un peu calmé, avait jeté inutilement ce cri désespéré : « N’entamez pas la Convention ! » Comme cela était prévu, Marat, acquitté à l’unanimité par le tribunal révolutionnaire, fut ramené en triomphe dans la Convention, sur les bras de cent mille hommes (28 avril).

Le lendemain même du jour où l’Assemblée avait rendu le décret d’accusation (15 avril), une députation des sections, ayant à sa tête Pache, maire de Paris, vint présenter une adresse approuvée par la Commune et concluant à l’expulsion de 22 des principaux girondins. C’était un avertissement à ceux qui avaient entamé la Convention, et qui si souvent avaient demandé la proscription de leurs collègues ; c’était le prélude d’un coup d’État populaire, d’une révolution.

Pendant tout le mois de mai, le funèbre combat continua sans relâche. Des deux côtés d’ailleurs on poursuivait une solution violente. Le 18, Guadet demanda la cassation des autorités de Paris et la réunion des suppléants de la Convention à Bourges. Au milieu de l’agitation produite par cette proposition, la Gironde obtient la formation de cette fameuse commission des douze, chargée d’examiner les actes de la Commune, et dont les mesures arbitraires soulevèrent l’indignation de toute la ville. Le 24, cette commission lança divers mandats d’amener et fit emprisonner à l’Abbaye le substitut du procureur de la Commune, Hébert, le fameux Père Duchesne. Le lendemain, une députation de la Commune était à la barre, réclamant la liberté ou au moins le prompt jugement du magistrat municipal. On connaît la réponse insensée d’Isnard, qui présidait : « Si jamais la Convention était avilie je vous le déclare au nom de la France, Paris serait anéanti… Bientôt on chercherait sur les rives de la Seine si Paris a existé. » Ces hyperboles ridicules, applaudies par la droite, étaient, en un tel moment, une véritable provocation. Elles mirent tout Paris en combustion.

Enfin, le 31, toute la ville était debout ; au bruit du tocsin, de la générale et du canon d’alarme, les sections, la garde nationale, le conseil de la Commune, toutes les autorités constituées réclamèrent par des députations la mise en accusation des douze et la suspension des vingt-deux. Après d’orageux débats, la Convention prononça seulement la suppression de la fameuse commission et la saisie de ses papiers. Le soir Paris fut illuminé. Ce résultat était un grave échec pour la Gironde, mais qui ne suffisait plus pour conjurer tes périls de la situation. Cependant la séance du 1er juin fut assez calme ; mais le soir, l’agitation reprit, le tocsin sonna de nouveau et une députation de la Commune parut à la barre ; le chimiste Hassenfratz lut, au nom des sections, une adresse plus impérieuse et présenta encore une fois la liste des députés dont le peuple demandait la suspension. Le lendemain, la séance s’ouvrit par des nouvelles funèbres : désastres en Vendée, massacres des patriotes dans la Lozère ; à Lyon, le parti girondin avait saisi le pouvoir, égorgé huit cents patriotes, et tenait la ville sous la terreur. C’est sous l’impression de ces nouvelles tragiques que les débats commencèrent. Bientôt la Convention est investie par les sections armées placées sous le commandement d’Hanriot. Sous cette pression formidable de cent mille hommes armés et d’un peuple immense, l’Assemblée, épuisée, obsédée d’ailleurs par tant de luttes, finit par rendre un décret en vertu duquel Guadet, Gensonné, Brissot, Gorsas, Pétion, Vergniaud, Salles, Barbaroux, Chambon, Buzot, Biroteau, Lidon, Rabaut Saint-Étienne, Lasource, Lanjuinais, Grangeneuve, Lehardy, Lesage, Louvet, Valazé, Kervélégan, Gardien, Boileau, Bertrand, Vigée, Mollevaut, Larivière, Gomaire, Bergoing, ainsi que les ministres Clavière et Lebrun, étaient mis en arrestation chez eux, sous la sauvegarde du peuple français, de la Convention nationale et de la loyauté des citoyens de Paris. Comme on le voit, il n’y avait pas de décret d’accusation. Les députés suspendus, gardés chez eux, eurent la faculté de circuler dans Paris, accompagnés d’un gendarme, et on leur continua l’indemnité de 18 francs par jour allouée à chaque membre de la Convention. Toutefois, aucune illusion n’était plus possible, le parti de la Gironde était à jamais brisé.

Pour les détails, v. mai (journées du 31) {et des 1er et 2 juin 1793. V. aussi girondins.

Cette révolution n’avait pas coûté une goutte de sang. La presque unanimité de Paris avait entraîné même la plupart des fédérés que les girondins avaient illégalement appelés pour écraser leurs adversaires. Circonstance caractéristique, il n’y eut pas de combat, pas l’ombre d’une résistance. Quelque tristesse qu’on éprouve en voyant la représentation nationale ainsi violée et mutilée, on est forcé de reconnaître et l’impuissance politique de ce parti de brillants parleurs, et l’impérieuse nécessité de mettre un terme à une situation aussi violente. Les historiens mêmes qui ont glorifié les girondins ont été amenés à cette conclusion. C’est M. de Lamartine qui déclare qu’entre les mains de ces hommes de parole la France, reconquise par la contre-révolution et dévorée par l’anarchie, eût bientôt cessé d’exister, et comme République et comme nation. C’est M. Thiers qui avoue que par eux la Révolution, la liberté et la France ont été compromises. Enfin, M. Michelet, après les avoir traités avec une grande indulgence, vaincu par l’étude des faits, finit par s’écrier : « Nous aurions voté contre eux… La politique girondine, aux premiers mois de 1793, était impuissante, aveugle, elle eût perdu la France. »

Quant à leurs idées fédéralistes, les accusations sur ce point n’étaient pas aussi vaines qu’on s’est plu à le répéter. S’il n’y eut point de projets arrêtés, il y eut au moins des tendances bien marquées. Mais c’est une question que nous examinerons à l’article girondins. Disons seulement ici que ces infortunés patriotes étaient malheureusement aveuglés par ce vieil esprit provincial que la Révolution avait répudié dès la première heure, et que la question de l’unité et de l’indivisibilité, qui passionnait alors la France, était une question suprême de salut public, une question de vie ou de mort, comme pour l’Italie de nos jours, et bien plus encore.

Un grand apaisement s’était opéré. Les députés captifs avaient Paris pour prison et étaient traités avec bienveillance. Couthon offrait de se rendre à Bordeaux en qualité d’otage. Marat fit plus : par un mouvement qui ne manquait pas de grandeur, lui que les girondins avaient si implacablement poursuivi, lui qui avait été un des instruments les plus actifs de leur chute, il se suspendit volontairement de ses fonctions de législateur jusqu’à leur jugement définitif. Mais ces hommes ardents n’acceptèrent point leur défaite, et, malgré la situation effrayante où se trouvait la France, ils ne songèrent qu’à la vengeance, quand il eût été si noble et si beau de sacrifier les ressentiments personnels au salut du pays. Soulever les départements contre Paris, mettre la France en feu, telle était leur unique préoccupation. Un certain nombre s’évadèrent et, suivis de quelques-uns de leurs collègues non suspendus, allèrent organiser la guerre civile sur divers points : Buzot, Gorsas, Barbaroux, dans le Calvados ; Meilhan et Duchâtel, en Bretagne ; Chasset à Lyon ; Rabaut Saint-Étienne à Nîmes ; Brissot à Moulins, etc.

Les mouvements fédéralistes, appuyés, et même ouvertement dirigés, en certains endroits, par le royalisme, concurremment avec des députés fugitifs, furent désorganisés dans leur centre principal par la déroute des insurgés du Calvados et successivement comprimés. Mais cet appui, que les girondins avaient trouvé dans l’élément royaliste, augmenta l’irritation contre eux ; cette rencontre dans la guerre civile, cette promiscuité dans la révolte (punition des fédéralisés) parut une complicité réelle et justifia toutes les accusations. Le meurtre de Marat par une virago fanatique accourue d’un centre girondin acheva de porter au comble l’exaspération populaire. « Elle nous tue, dit à ce sujet Vergniaud ; mais elle nous apprend à mourir. »

La plupart des malheureux girondins étaient, en effet, destinés à être sacrifiés, les uns comme fauteurs de la guerre civile, les autres comme complices.

En outre, soixante-treize représentants, signataires d’une protestation contre le mouvement des 31 mai-2 juin, furent emprisonnés par décret et ne rentrèrent dans la Convention qu’après le 9 thermidor.

La Gironde était à peine vaincue, que la Convention, pour répondre à l’impatience du pays, se hâta de reprendre le travail de la constitution. Le projet primitif préparé sous l’inspiration de Condorcet fut en partie abandonné, et une nouvelle commission, dont Hérault-Séchelles fut le rapporteur, reçut la mission de rédiger et de coordonner un nouveau projet de pacte social. Cette œuvre, en quelque sorte improvisée, fut discutée, votée avec une rapidité extrême et soumise à l’acceptation du peuple (v. constitution de 1793). Soumise aux délibérations le 10 juin, elle fut achevée le 23. Ce résultat ne contribua pas peu à faire accepter aux dissidents la victoire. de la Montagne et à montrer que l’Assemblée, délivrée enfin de ses discordes, allait maintenant marcher d’un pas rapide et sûr.

Cependant la guerre de la Vendée continuait toujours ; mêlée de succès et de revers ; Lyon était en pleine révolte et se préparait à donner la main aux Piémontais ; tout le Midi était embrasé ; des insurrections fédéralistes éclataient de toutes parts ; nos frontières étaient de nouveau profondément entamées ; Mayence capitulait ; Condé, Valenciennes tombaient au pouvoir de l’ennemi, qui bientôt allait pouvoir faire jonction avec les révoltés de l’Ouest ; la route de Paris était ouverte ; au Nord, sur le Rhin, aux Alpes, aux Pyrénées, nous étions enveloppés, assaillis par les armées de la coalition. Une fois encore, la France paraissait perdue.

Pendant que son comité de Salut public organise la défense, la Convention prend coup sur coup des décrets terribles contre la Vendée, contre les accapareurs, les déprédateurs des assignats ; ordonne que la reine sera jugée, que les tombeaux des rois seront détruits, interdit le placement des fonds sur les banques étrangères, et par le décret d’accusation contre Custine montre aux généraux qu’elle saura briser leurs résistances, réprimer leur ambition et punir leur trahison ou leur impéritie. En même temps Carteaux reçoit l’ordre de réduire Marseille, et Dubois-Crancé Lyon. Bientôt les envoyés des assemblées primaires arrivent à Paris apporter le vœu de la France pour l’acceptation de la constitution ; réunis le 10 août au peuple de Paris dans une fête grandiose, ils accueillent avec enthousiasme l’idée d’une mesure prodigieuse, la levée en masse. Quelques jours plus tard, elle est décrétée. Tous les Français sont déclarés en réquisition permanente pour le service de la patrie. Les jeunes gens iront au combat ; les hommes mariés forgeront des armes ; les femmes feront des tentes, des habits, les enfants de la charpie ; les vieillards se feront porter dans les places publiques pour exciter le courage des guerriers et prêcher la haine des rois et l’unité de la République. Des ateliers d’armes seront établis sur les places publiques, et le sol des caves sera lessivé pour fournir le salpêtre. Les bataillons rassemblés dans chaque district seront réunis sous une bannière portant cette devise ; Le peuple français debout contre les tyrans, etc. Le jour même de l’adoption de ces mesures (25 août) Carteaux domptait la contre-révolution à Marseille et prenait possession de la ville aux acclamations des patriotes. Bordeaux faisait sa soumission. Mais Toulon, dominé depuis quelque temps par les royalistes, était livré par eux aux Anglais (28 août).

Nous entrons ici dans la période terrible que Grégoire a nommée les jours caniculaires de la Révolution, et à laquelle l’histoire a conservé le nom de Terreur. Enveloppé d’un cercle de feu, poussé au dernier degré de l’exaltation par la grandeur des périls, par les trahisons et les complots ; affamé par l’insaisissable accapareur, qui se riait de tous les décrets, le peuple éclate en réclamations formidables. Il entraîne dans son mouvement les jacobins et la Commune. Le 5 septembre, Pache, maire de Paris, et Chaumette, procureur général de la Commune, à la tête d’un cortège immense, se présentent à la barre pour exprimer le vœu des sections et des autorités. Il y eut là une de ces scènes indescriptibles qui se produisirent si souvent dans la vie orageuse de la Convention. Peuple, municipaux et représentants, s’exaltant mutuellement, précipitent la République dans les mesures de plus en plus extrêmes. Billaud-Varennes, Drouet, Basire, Danton, Thuriot, Moïse Bayle, Léonard Bourdon, convertissent en motions les vœux des pétitionnaires. Barère, avec sa prodigieuse facilité, élucide et résume le tout dans un rapport improvisé, et s’écrie, après les jacobins et la Commune : « Plaçons la terreur à l’ordre du jour ! » Enfin les mesures suivantes sont adoptées : Création d’une armée révolutionnaire composée de 6,000 hommes, pour comprimer les ennemis de la Révolution, surveiller les accapareurs et protéger la circulation et l’arrivage des subsistances. Prohibition de vente ou d’achat ailleurs que sur les marchés publics ; inventaire des greniers et fixation d’un taux uniforme, d’un maximum. L’agiotage sur les assignats puni de mort. Le tribunal révolutionnaire divisé en quatre sections, comme moyen d’accélérer les jugements. Brissot, Gensonné, Clavière et Lebrun, renvoyés devant ce tribunal. Épuration des comités révolutionnaires, dans lesquels, en beaucoup d’endroits, les royalistes s’étaient glissés. On sait que ces comités étaient chargés de surveiller et d’arrêter au besoin les contre-révolutionnaires. Ils étaient nommés par les localités ou par les représentants en mission. Chacun de leurs membres recevait une indemnité de 3 livres par jour. Le nombre des séances dans les sections fut fixé à deux par semaine, et, pour que l’élément populaire n’en fût pas écarté, une indemnité de 2 livres fut mise à la disposition des citoyens qui n’auraient d’autre ressource que le travail journalier de leurs mains. La France était pleine d’agents étrangers : un décret d’arrestation frappa tout étranger qui n’obtiendrait pas des municipalités un certificat d’hospitalité.

Le 17, adoption de la fameuse loi des suspects, rendue, chose assez remarquable, sur le rapport du jurisconsulte Merlin (de Douai), au nom du comité de législation, présidé par Cambacérès. V. suspects.

On ne saurait avoir l’idée de justifier les mesures par lesquelles la Convention inaugura le régime de la Terreur, et généralement tous les actes violents de cette grande et terrible époque ; mais il ne faut pas cesser de le répéter : (a Révolution fut une grande bataille livrée contre l’ancien régime, et les révolutionnaires étaient des soldats constamment sur la brèche. Avant de maudire aveuglément, il est donc équitable de tenir compte de cet état de guerre qui surexcitait naturellement les passions, et de mille autres circonstances qu’on ne peut omettre sans dénaturer la physionomie des événements. Écoutons un publiciste bien connu par l’extrême modération de ses idées, M. de Tocqueville : « J’oserai dire, parce que je tiens les faits dans ma main, qu’un grand nombre des procédés employés par le gouvernement révolutionnaire ont eu des précédents et des exemples dans les mesures prises à l’égard du bas peuple pendant les deux derniers siècles de la monarchie. » (L’Ancien régime et la Révolution.) Ici l’illustre écrivain ne dit même pas assez, et si l’on voulait se placer à ce point de vue, les « excès » de la Révolution seraient trop faciles à expliquer ; car si le peuple avait voulu solder les représailles du passé, se venger de tout ce qu’il avait souffert, il est clair que l’immolation de plusieurs générations n’eût pas suffi à établir l’équilibre. Mais tout en écartant cet argument, qui blesse d’ailleurs la magnanimité des principes démocratiques, un fait historique demeure, celui d’une grande colère nationale contre les castes privilégiées, dont la domination et les excès paraissaient d’autant plus odieux, qu’on avait goûté les premiers bienfaits de la liberté. Toutefois, il fallut les complots sans cesse renaissants de la faction, son opposition implacable aux réformes les plus modérées, ses trahisons, ses complicités avec l’étranger, les sanglantes réactions dont elle fut l’âme, les périls suprêmes qu’elle fit courir à la France, pour raviver cette colère presque éteinte et faire oublier la grande effusion de 1789, où toutes les classes avaient fraternisé dans l’élan d’une joie immense et d’un espoir infini.

A-t-on compté toutes les blessures reçues par le puissant athlète avant qu’il tirât le glaive à son tour contre des ennemis dont le ressentiment était implacable et dont les prétentions insolentes étaient un outrage aux droits de la nation, à l’émancipation légitime des citoyens, à l’affranchissement de l’humanité ? Et comment pense-t-on que les royalistes eussent traité les patriotes s’ils avaient été vainqueurs ? Les faits répondent suffisamment. Partout où le royalisme a momentanément triomphé, dans le Midi, en Vendée, à Lyon (où il avait rapidement débordé le girondinisme), à Marseille, à Toulon, le sang a coulé à flots et les vaincus ont été immolés avec un effroyable luxe de barbarie.

Le terrorisme, triste héritage de la vieille monarchie, était la doctrine naturelle des hommes du passé. Dès le début de la Révolution, elle est professée avec une sauvage naïveté par cet intraitable parti. C’est toujours par la force, par les supplices, par les coups d’autorité qu’il veut ramener la nation aux carrières de l’ancien régime. Avant Marat, en mai 1789, la pieuse, la sainte Madame Élisabeth demande qu’on coupe des têtes (v. sa correspondance, dans l’ouvrage de M. de Beaucourt, Étude sur Madame Élisabeth, p. 22). Bien avant le tribunal révolutionnaire, le bon Cazotte conseillait à Louis XVI d’établir, dès qu’il aurait recouvré son autorité, « un tribunal de justice composé de cinq membres, chargé de poursuivre et d’exécuter brièvement les criminels révoltés contre la monarchie. » À la veille du 14 juillet, Breteuil, l’homme de la reine, avait dit : « S’il faut brûler Paris, on la brûlera et l’on décimera ses habitants : aux grands maux les grands remèdes ! » Le complot de la cour, que la victoire du peuple fit avorter, était alors de dissoudre l’Assemblée et de livrer au bourreau les principaux coupables, députés, journalistes, etc. L’extermination des patriotes était d’ailleurs la théorie officielle du parti, qui la mit en pratique partout où il obtint un moment l’avantage. Ouvrez tous les journaux royalistes, de 1789 au 10 août, il n’y est question que de pendre, de fusiller, de rouer, de faire mourir sous le fouet tous ceux qui ont participé à la Révolution. Le manifeste de Brunswick, rédigé par des émigrés, témoigne suffisamment de la mansuétude de la contre-révolution ; et le bombardement de Verdun montre bien que ce manifeste de sang n’était pas purement comminatoire.

Qu’on remarque aussi, pour nous en tenir à la Convention, que les mesures les plus terribles décrétées par la grande Assemblée pour faire face à une situation sans exemple ne furent que des représailles immédiates de la guerre sauvage qui était faite à la France, à l’intérieur comme aux frontières.

À l’article terreur, nous entrerons dans quelques développements à ce sujet. Ici nous devons nous borner à cette observation que la Terreur ne fut pas un système, une préméditation, mais un entraînement de colère, un expédient de combat ; c’était la fureur de la défense opposée à la fureur de l’attaque. Qu’on réprouve ces excès de la guerre, rien de mieux ; mais qu’on ne les isole pas des circonstances qui les firent naître.

Cependant, suivant les ordres de la Convention, le représentant Dubois-Crancé avait commencé le siège de Lyon, mais avec des forces insuffisantes. Trois autres commissaires de l’Assemblée, Couthon, Châteauneuf-Randon et Maignet, avaient été envoyés en Auvergne pour entraîner les patriotes contre la ville rebelle, où commandait le royaliste Précy et qui était pleine d’émigrés et de prêtres réfractaires. Dans ces temps extraordinaires, nul ne s’étonnait qu’on eût choisi pour une semblable mission, toute de mouvement et d’action, un homme comme Couthon, paralysé des deux jambes. Les rudes montagnards du Puy-de-Dôme furent électrisés, soulevés, et le paralytique amena 30,000 hommes devant Lyon. Ce fut lui qui acheva le siège et qui reçut la capitulation de la ville (9 octobre). La Convention, dans ses formidables colères, avait rendu un décret terrible, en vertu duquel il ne devait rester debout que les habitations des pauvres, celles des patriotes égorgés ou proscrits, les édifices industriels et les monuments consacrés à l’humanité et à l’instruction publique. La réunion des maisons conservées recevrait le nom de Ville affranchie. Une colonne serait élevée, avec cette inscription : Lyon fit la guerre à la liberté ; Lyon n’est plus ! Couthon, porté dans un fauteuil, se contenta de frapper d’un petit marteau l’un des édifices de la place Bellecour, en disant : « La loi te frappe. » Puis il se fit rappeler par le comité de Salut public, et fut remplacé dans sa mission par Collot d’Herbois et Fouché.

L’ennemi, cependant, malgré l’état désespéré où était la France, avait hésité à marcher sur Paris et s’attardait à des entreprises de détail, telles que le siège de Dunkerque et du Quesnoy. Mettant à profit ces lenteurs, le comité de Salut public, sous la direction de Carnot, organisait les forces de la grande levée et préparait cette lutte inouïe à laquelle rien n’est comparable dans l’histoire militaire des nations, et qui eut pour résultat définitif de rendre la grande République arbitre des destinées de l’Europe.

Mais les conditions de cette lutte étaient nécessairement l’unité de direction, la concentration du pouvoir ; pour faire manœuvrer avec ensemble tant de corps lancés à de grandes distances les uns des autres, étouffer les rivalités des généraux, faire concourir toutes les forces particulières à un plan général, la Convention avait son comité de Salut public, Carnot, l’organisateur de la victoire ; enfin les représentants du peuple en mission aux armées, et qui, investis d’une autorité supérieure à celle des généraux, réalisaient le phénomène d’un pouvoir central présent, à chaque heure du jour, sur tous les points où se déployait le drapeau national.

Faite pour un temps de paix, la constitution était inapplicable en des circonstances aussi critiques ; c’est ce qui était universellement compris. Aussi le 10 octobre, sur un rapport de Saint-Just, la Convention décréta que le gouvernement serait révolutionnaire jusqu’à la paix, ce qui revenait à suspendre momentanément la constitution.

Poursuivant ses travaux au bruit des combats, l’Assemblée venait de décréter l’établissement du calendrier républicain. Elle préparait l’unité de poids et de mesures, l’établissement de l’École polytechnique et de l’École normale, du télégraphe, du système décimal, du code civil ; instituait le grand livre, s’occupait du développement des sciences et des arts, jetait les bases d’un plan d’éducation nationale et cherchait les moyens d’universaliser dans toute la République l’usage de la langue française par l’extinction des patois locaux.

Ce mois d’octobre 1793 est encore mémorable par la victoire de Wattignies, par le déblocus de Maubeuge, par la grande défaite des Vendéens à Cholet, enfin par le jugement et l’exécution de Marie-Antoinette et des vingt et un girondins détenus. Dans cette terrible période, la tragédie est constamment mêlée à l’épopée. Logique implacable des temps de lutte et de colère : les révoltes fédéralistes et le meurtre de Marat avaient tué les girondins ; la Vendée, les complots royalistes, la trahison de Toulon et la coalition des rois avaient tué la coupable, mais infortunée femme de Louis XVI. Bientôt de nouvelles victimes vont monter les degrés de l’échafaud, Mme Roland, Philippe-Égalité, Bailly, Madame Élisabeth, Barnave, et tant d’autres dont le sang fut loin de consolider l’édifice républicain. Mais le char de la Terreur était lancé, et les premiers qui tentèrent d’arrêter, sa course effrayante tombèrent eux-mêmes victimes de leur généreux effort.

Les représentants du peuple envoyés en mission aux armées ou dans les départements étaient investis, comme nous l’avons dit, d’un pouvoir presque dictatorial, ce qui leur a fait donner par certains historiens le surnom de proconsuls. Ils devaient d’ailleurs s’appuyer sur les sociétés populaires, et par une correspondance active rendre compte de tous leurs actes à la Convention, dont ils représentaient le pouvoir, ou au comité de Salut public. Ils portaient un costume qui avait été prescrit par décret du 4 avril 1793 : l’habit bleu à revers rouges, le chapeau rond orné de trois plumes flottantes aux couleurs nationales, une écharpe tricolore en ceinture, un sabre nu pendu à un baudrier de cuir noir.

Ces ardents missionnaires rendirent d’immenses services, soit aux armées où ils stimulaient les généraux et enflammaient l’ardeur des soldats en les guidant souvent au feu, soit dans les départements, où ils activaient les enrôlement et les réquisitions, contenaient les royalistes, et organisèrent, au milieu de difficultés inouïes, d’immenses services, approvisionnements, subsistances, munitions, convois, etc.

Malheureusement, un petit nombre d’entre eux se souillèrent de crimes, Collot et Fouché à Lyon, Carrier à Nantes, Lebon à Arras, Fréron à Toulon, Tallien à Bordeaux, etc. ; et ces souvenirs terribles ont presque fait oublier les belles missions de Carnot, de Lamarque, de Levasseur, de Bourbotte, de Merlin (de Thionville), de Saint-Just et Lebas, de Baudot, de Lakanal, de Soubrany, de Grégoire, de Dubois-Crancé, de Jean-Bon Saint-André, de Cavaignac, de Lacombe Saint-Michel, de Duquesnoy, et de deux cents autres, dont plusieurs trouvèrent une mort héroïque, comme Fabre (de l’Hérault) à la défense de Port-Vendres. « Nous pouvons, écrit M. Michelet, dire hardiment que trente représentants ont mérité, pour leurs missions seules, d’être mis au Panthéon. »

Le 3 nivôse an II (23 décembre 1793), la grande armée vendéenne était anéantie par Marceau à Savenay. Six jours auparavant, le 29 frimaire, les soldats de la République reprenaient possession de Toulon. Le 6 nivôse, Hoche, par le déblocus de Landau et l’occupation des lignes de Weissembourg, rend l’Alsace à la France et rejette l’ennemi au delà du Rhin. La campagne de 1793 s’achevait, le long des frontières, au milieu des triomphes.

À l’intérieur, le régime révolutionnaire avait été définitivement constitué par le décret du 14 frimaire (4 décembre), qui créait en même temps le Bulletin des lois. Les ministres avaient été supprimés et remplacés par douze commissions placées sous l’autorité du comité de Salut public. L’action de la Convention s’étendait partout ; elle gouvernait directement par ses décrets, par ses commissaires, par ses deux grands comités, stimulée elle-même, poussée à l’action par les sections et la Commune de Paris, par tous les grands foyers révolutionnaires.

Cependant, au moment où la République luttait avec une indomptable énergie contre tant d’ennemis, elle était déchirée de nouveau par les partis.

« La Révolution, dit M. Louis Blanc, parcourait ses phases inévitables ; sortie des flancs du XVIIIe siècle, elle en traduisait en actes les pensées, et mettait aux prises les deux grandes écoles dont nous avons décrit la lutte intellectuelle. »

Ces deux grandes écoles, l’illustre historien les retrouve partout, dans Voltaire et Rousseau, dans la Gironde et la Montagne ; enfin le dualisme, se poursuit dans la Montagne même. Pour qui connaît les préoccupations constantes de M. Louis Blanc, il serait inutile d’ajouter qu’il s’agit ici des doctrines de l’individualisme et de la solidarité.

Il est certain que Robespierre était le disciple exclusif de Rousseau. Mais n’est-ce point tomber dans le système, dans la fantaisie pure, que de diviser les révolutionnaires en catégories tranchées, de les parquer comme un bétail philosophique dans des théories absolues ? On ne saurait nier les tendances de tel ou tel personnage ; mais en général il régnait une assez grande incertitude dans les esprits. Les hommes de ce temps étaient pénétrés plus ou moins profondément, et même avec quelque confusion, des doctrines générales du siècle, mais sans qu’on puisse toujours distinguer bien nettement ce qui prédominait en eux. Il y avait des disciples de Rousseau parmi les girondins ; il y avait des disciples de Voltaire parmi les montagnards ; et ainsi de tous les groupes et de toutes les doctrines. Tous cherchaient dans les voies les plus diverses la solution du grand problème de l’affranchissement populaire, et leurs tâtonnements, leurs contradictions, font, après tout, l’éloge de leur sincérité. Robespierre et Saint-Just, malgré leur roideur dogmatique, ont flotté comme les autres et sur bien des questions, chose très-explicable par l’invasion soudaine d’une foule d’idées nouvelles qui n’avaient pas eu le temps de mûrir.

Quoi qu’il en soit, qu’ils se rattachassent ou non aux grandes écoles en question, les révolutionnaires étaient divisés en partis, et la Montagne en comptait trois bien distincts, auxquels nous conserverons leurs noms consacrés : les dantonistes, qui songeaient à enrayer, la Terreur ; les robespierristes, qui prétendaient se tenir à égale distance du modérantisme et de l’exagération ; enfin les hébertistes, auxquels leurs adversaires ont imposé le nom du journaliste du Père Duchêne, et qui seraient mieux nommés le parti de la Montagne. La crête de la Montagne était avec eux : c’étaient les ultra. Quelques-uns d’ailleurs connaissaient à peine Hébert, et notamment le montagnard Anacharsis Cloots. Les deux premiers de ces partis renfermaient, pour employer une expression de M. Michelet, les classiques de la Révolution. Les autres en étaient les romantiques, les échevelés. Cette comparaison pittoresque ne manque pas de justesse. D’ailleurs, comme les écoles philosophiques de l’antiquité, chacune de ces fractions avait son originalité propre et représentait une des faces du problème de la Révolution : les dantonistes, le noble désir de mettre un terme aux mesures violentes, aux terribles représailles de guerre, ainsi qu’une certaine lassitude de l’action ; les robespierristes, l’impérieuse nécessité de vaincre avant de désarmer, en même temps qu’une tendance à la domination qu’il serait puéril de nier ; les hébertistes, toutes les audaces révolutionnaires et philosophiques, toutes les ardeurs de la grande Commune, ainsi que l’intuition confuse des problèmes sociaux agités de nos jours. Quand des partis sont en présence, ils ne se tiennent pas dans la sphère des idées pures ; ils se combattent, ils cherchent à s’éliminer, parce qu’aux différences d’opinions viennent s’ajouter des questions personnelles, et souvent des compétitions de pouvoir. C’est l’histoire éternelle des époques de lutte. Unis contre les girondins, contre les royalistes et l’étranger, ces éléments du parti montagnard commencèrent à se diviser lorsque le terrain fut un peu déblayé.

Autour de Danton, athlète un peu énervé, se groupaient l’étincelant Camille Desmoulins, Hérault-Séchelles, Lacroix, Legendre, Tallien, Fréron, Philippeaux, Lecointre, Thuriot, Merlin (de Thionville), Fabre d’Églantine, Westermann, d’anciens cordeliers, etc.

Robespierre formait au comité de Salut public, avec Saint-Just et Couthon, un triumvirat d’amitié {et d’ambition, suivant leurs adversaires) qui s’appuyait sur la puissante société des jacobins et pesait d’un grand poids dans la direction des affaires. On les nommait dans le comité gens de la haute main. Autorisés à organiser un bureau de police, espèce de ministère qui empiéta sur les attributions du comité de Sûreté générale, ils étaient en outre chargés de préparer les exposés législatifs. À tort ou à raison, quelques-uns voyaient en eux les régulateurs, les maîtres de l’avenir.

Les hébertistes formaient un parti très-sérieux et très-puissant. Ils dominaient à la Commune de Paris, dont Chaumette était procureur général et Hébert substitut ; ils dominaient dans les bureaux de la guerre, où ils étaient entrés en masse sous Pache et sous Bouchotte. Ils avaient placé un des leurs, Ronsin, à la tête de l’armée révolutionnaire. Par le Père Duchêne, répandu à profusion dans les armées, ils avaient une grande influence parmi les soldats. Des commissaires de la Convention, des généraux correspondaient avec eux, entre autres Fouché, Jourdan, Hoche, Augereau, Rossignol. Ils avaient pied dans le tribunal révolutionnaire, dans le comité de Salut public, par Billaud-Varennes et Collot-d’Herbois ; dans le comité de Sûreté générale, par Vouland, Jagot et plusieurs autres. Le club des cordeliers était alors entièrement à eux ; et la majorité des sections de Paris les appuyait. Leur centre était le conseil de la Commune.

Ils remportèrent une première victoire par le renversement du culte catholique. Ce mouvement antireligieux était dans la nature des choses, et il eût été bien extraordinaire qu’il ne se produisît point parmi des générations nourries de la philosophie du XVIIIe siècle. Il fut d’ailleurs singulièrement activé par l’intolérance factieuse des prêtres réfractaires, par le sang qu’ils avaient fait couler dans les guerres civiles. Depuis longtemps déjà beaucoup de prêtres et d’évêques constitutionnels s’étaient mariés. Cela était alors considéré comme un acte de civisme, comme un gage donné à la Révolution. En outre, beaucoup de prêtres patriotes, laissant la théologie, ne prêchaient plus guère que la morale, la fraternité entre les hommes, le dévouement à la patrie et à la République. À Bourges, dans le diocèse de l’évêque Torné, tout le chapitre de la cathédrale était marié. La messe se célébrait là en bonnet rouge et en cocarde, à la grande édification des fidèles.

Dans le courant d’octobre 1793, après l’établissement du calendrier français, la réaction philosophique s’accentua davantage. En outre, après tant de sacrifices pour subvenir aux énormes dépenses de la guerre, le peuple songea tout à coup que les églises renfermaient des richesses appartenant à la nation et qui demeuraient improductives, fastueux ornements qui n’ajoutaient rien à la dignité du culte. Les défenseurs de la patrie manquent de pain et de souliers, disait-on ; c’est encore honorer Dieu que de sacrifier les magnificences de nos églises à soulager la détresse publique. Et les vases d’or et d’argent, les candélabres et autres riches ornements prenaient le chemin de la Monnaie. De jour en jour la Convention recevait de nouveaux envois. La Nièvre avait commencé, sous l’influence de Fouché, alors en mission ; les autres départements suivirent. Mais ce mouvement contenait autre chose qu’un retour à la simplicité primitive du culte. Il fut le signal, ou plutôt il coïncida avec une immense réaction contre le catholicisme et même contre toutes les religions. De tous côtés les églises se fermaient, et les prêtres abjuraient ce qu’ils nommaient eux-mêmes leurs erreurs. Bon nombre même s’accusaient de n’avoir été jusqu’alors que des charlatans. Nous n’apprécions pas, nous racontons ; ce sont là des faits bien connus. La langue en fut enrichie d’un mot : la déprêtrisation.

Cette fois, l’impulsion venait des départements. Paris, préparé et bien au delà, en reçut comme une secousse électrique. Les hébertistes prirent nécessairement la tête du mouvement. Un mot court les sections : plus de religion dominante ; que les communes soient libres de rejeter ou d’admettre le culte. Le 16 brumaire (6 novembre 1793), la Convention délibérait sur la réunion de plusieurs paroisses en une seule ; Thuriot (un dantoniste) demande que l’Assemblée n’ait plus à s’occuper des affaires du culte, que les citoyens et leurs administrations soient autorisés à statuer définitivement sur la réunion ou la suppression des cures. En adoptant cette motion, la Convention semblait bien autoriser toutes les initiatives. Le soir même, la Commune, les jacobins, les sections, les sociétés populaires et les principaux membres du comité d’instruction publique préparent une pétition pour la suppression du salaire des ministres du culte. Dans la nuit, Anacharsis Cloots, à la tête d’une députation, se présente chez Gobel, évêque de Paris, et l’engage à abdiquer ses fonctions épiscopales. Le prélat consulte son chapitre, qui, à la majorité de quatorze voix contre trois, se prononce pour la démission demandée. Le lendemain, Gobel, précédé du maire de Paris, Pache, de Chaumette et autres fonctionnaires, suivi de ses vicaires, coiffés comme lui du bonnet rouge, se présente à la barre de la Convention non pour abjurer sa foi, comme on l’a répété, mais pour abdiquer ses fonctions. Son clergé l’imite. Les ecclésiastiques de la Convention subissent l’entraînement. Coupé, curé de Sermaise ; Thomas Lindet, évêque de l’Eure ; Gay-Vernon, évêque de la Haute-Vienne ; l’évêque de la Meurthe, le curé Villars, Sieyes, Julien (de Toulouse), ministre protestant, déposent également leur démission ou leur renonciation. Et à chaque moment arrivaient de tous les points de la France des voitures d’ornements sacerdotaux, de reliquaires précieux, de saints d’or et d’argent, etc. Les prêtres abjuraient par milliers, librement, d’ailleurs, car aucune foi ne fut rendue à cet égard. Invité à imiter l’exemple de Gobel, à la fameuse séance, Grégoire, évêque de Blois, ardent montagnard et catholique sincère, refuse énergiquement. Et l’Assemblée, d’une voix unanime s’écrie : « Personne n’est contraint. »

En effet, dans l’esprit des plus ardents, la réforme se résumait ainsi : suppression du salaire ; pensions viagères aux déprêtrisés, pour parler le langage du temps ; faculté laissée aux communes d’affecter les églises, édifices nationaux, à tel usage public qui serait jugé convenable ; de supprimer ou de conserver le culte, à la charge, dans ce dernier cas, de pourvoir aux frais non par voie de contribution, mais par des souscriptions volontaires. Partout, d’ailleurs, quelles que fussent les décisions de la majorité, les citoyens conservaient le droit de s’associer et de louer des locaux pour exercer tel culte qu’il leur plairait de choisir (sauf, bien entendu, à ne point faire usage de prêtres réfractaires, non reconnus par la loi). V. constitution civile du clergé.

La suppression du salaire des prêtres, ministres, etc., avait été proposée déjà par Cambon le 16 novembre 1792. Mais Robespierre, Danton et la plupart des jacobins jugèrent alors cette réforme prématurée et impolitique, et la Convention ne l’avait point adoptée.

Cependant l’agitation contre le culte prenait au dehors des proportions formidables. Le lendemain de l’abdication de Gobel (17 brumaire), un registre était ouvert à la Commune pour recevoir les renonciations ou abjurations des prêtres et ministres. Enfin, sous la direction de la Commune, le 20 brumaire (10 novembre), Paris inaugura à Notre-Dame ces fêtes de la Raison qui se célébrèrent successivement dans toute la République. Les autorités constituées, les sociétés populaires, la Convention, assistèrent à cette solennité, et l’Assemblée consacra par décret la ci-devant cathédrale à la Raison et à la Liberté. Pour plus de détails, v. Raison (fête de la).

Les représentants en mission secondaient partout lélan populaire. De tous côtés les églises étaient converties en ateliers d’armes ou de salpêtre, en magasins, en lieux d’assemblée ; les cloches en canons ou en monnaie de billon, les objets précieux en pièces d’or ou d’argent. Les reliques sont jetées au vent, les images miraculeuses brûlées. Le 4 frimaire (24 novembre), sur le réquisitoire de Chaumette, la Commune décrète la fermeture de toutes les églises et temples de Paris. Déjà plusieurs sections avaient pris cette initiative. Un bal-restaurant était installé à Saint-Eustache. D’autres églises étaient converties en bazars, d’autres en ateliers.

La Convention d’ailleurs ne supprima point le traitement des ecclésiastiques (réduits la plupart à l’inaction), et, par son décret du 2 frimaire, elle accorda une pension aux évêques, aux curés et aux prêtres démissionnaires.

La majorité de l’Assemblée applaudissait à ce mouvement. Mais il était un homme qui ne le voyait qu’avec un profond sentiment de dépit : Robespierre. Disciple de Rousseau, déiste ardent, intolérant et dogmatique, il s’irrita de ce triomphe du panthéisme et de la philosophie naturaliste, et bien plus encore de l’importance du parti de la Commune, qui échappait à son action. Le jour même de l’abdication de Gobel, il avait accueilli Cloots par des paroles hautaines et dures. On pouvait pressentir déjà que l’arme à deux tranchants de la l’erreur allait se tourner contre les révolutionnaires. Et en effet nous allons voir bientôt ces formidables tribuns, ces vainqueurs des rois, engagés en des luttes meurtrières, s’éliminer successivement et

flasser tous en «’éteignant sous le souffle de a mort.

Voici Basire, Chabot, Julien (de Toulouse) et Delaunay (d’Angers) arrêtés sous l’inculpation de falsification d’un décret de finances et de manœuvres d’agiotage. Un peu plus tard, en janvier, Fabre d’Eglantine sera compris dans la même poursuite. Cependant, il est de toute évidence que lui et Basire étaient innocents ; mais la haine de Robespierre et de son parti les poussa vers l’échafaud.

Suivant des histoires écrites dans un esprit robespierriste étroit et déjà bien suranné, le chef du fameux triumvirat aurait eu le noble projet dé mettre fin au régime de la l’erreur aussitôt que les circonstances l’eussent permis. Mats il fallait auparavant écraser les intrigants, les conspirateurs, les ultra-révolutionnaires aussi bien que les hypocrites de modération. En d’autres termes, après avoir été le grand épurateur de la République, il se réservait d’être le régulateur suprême, le modérateur, le Jupiter Sauveur de la Révolution. Notre cadre ne nous permet pas de discuter ici cette thèse, à laquelle le talent de plusieurs écrivains adonné beaucoup d’éclat. À l’article Robespierre, nous en pourrons examiner la valeur. Nous nous bornerons pour le moment à faire remarquer qu’à cette époque et jusqu’à sa chute, ce Cal vin révolutionnaire, après a voir rendu d’incontestables services, a bien réellement joué le rôle de prescripteur, et nous ne pensons pas qu’il suffise pour l’en justifier de noircir systématiquement ses adversaires, comme il la fait lui-même en les frappant, comme tous les pamphlétaires royalistes l’ont fait après lui. Qu’il tendit à la dictature, ou tout au moins à une haute domination, à une influence prépondérante, c’est ce qui nous paraît de la dernière évidence. Sa puissance était déjà énorme. Sa vie austère, la gravité de son caractère et de ses moeurs, ses longues luttes, les attaques injustes dont il avait été l’objet, ses défauts mêmes, son esprit soupçonneux et porté aux accusations, son orgueil, ses continuelles homélies sur lui-même, ses élégies personnelles (à la Rousseau), tout avait contribué à augmenter sa popularité. Il régnait aux Jacobins. Par son bureau de police (qui donnait le droit redoutable de lancer des mandats d’arrestation), il avait la main un peu partout, au tribunal révolutionnaire et dans les administrations. Son parti, composé de sectaires graves et convaincus, comme Saint-Just, Couthon, Lebas, hommes de valeur et d’énergie, pesait, comme nous l’avons dit, d’un grand poids, dans les comités et à la Convention.

Il commença la guerre contre les hébertistes à sa manière accoutumée, c’est-à-dire par des allusions meurtrières dans ses discours, par des ricanements sinistres contre le philosophisme, par’ des accusations vagues dénuées de toute base. Ce qu’on peut dégager de son fatras solennel, c’est que ceux qui avaient contribué à la ruine du catholicisme étaient des émissaires des tyrans étrangers, des contre-révolutionnaires déguisés. L’habitude d’accuser sans preuves lui avait rendu familières toutes les énormités. Chose singulière, c’était au nom de la liberté des cultes qu’il plaidait la conservation d’une Église officielle. « Robespierre, dit M. Michelet, fut pris du mal des rois, la haine de l’idée. • Il taut

CONV

ajouter la haine des personnes, des renommées rivales de la sienne. En marquant ses ennemis de ce nom terrible : la faction de l’étranger, il avait ramené sous sa discipliné les jacobins,

Sui d’abord avaient applaudi au mouvement, lanton, qu’il ménageait encore, Danton, entatné d’ailleurs, dont la lassitude était notoire, et qui peut-être craignait pour lui-même, suivit misérablement Robespierre dans cette voie, malgré ses idées bien connues, et s’éleva contre les mascarades antireligieuses. Camille Desmoulins fut lancé contre la faction. Dans le deuxième numéro de son Vieux cordelier- (20 frimaire — 10 décembre), soumis à la censure préalable de Robespierre, il déchira, il traîna dans la boue les héoertistes et les municipaux. Quelques jours plus tard, une des victimes de ses cruautés satiriques, Anacharsis Cloots, fut soumis au scrutin épuratoire des jacobins, qui récemment l’avaient nommé président. Cette mesure avait été demandée par Robespierre. On sait combien elle était redoutée. Le généreux philosophe, le magnanime rêveur, qui avait sacrifié sa fortune et sa personne à la Révolution, fut exclu, après un discours aussi haineux qu’absurde de 1 impérieux triumvir. L’exclusion des Jacobins, c’était alors le chemin de l’échafaud, . Le 5 nivôse (25 décembre), dans un rapport sur les principes du gouvernement révolutionnaire, Robespierre lança de nouvelles attaques venimeuses contre Cloots, qui le lendemain fut exclu de la Convention comme étranger, lui qui avait été naturalisé par décret et nommé député par deux départements. Le 7, il était arrêté, en même temps que Thomas Paync, par ordre du comité de Sûreté générale. La Convention était en coupe réglée.

D’autres arrestations eurent lieu au dehors parmi les révolutionnaires ardents. Hoche et Jourdan, qui se rattachaient à ce parti, sont suspendus, malgré leurs victoires. Les hébertistes s’agitent ; au club des Cordeliers, ils voilent d un crêpe noir la Déclaration des droits ; enfin, le 14 ventôse an II (4 mars 1794), dans une séance orageuse, le mot à’insurrection est prononcé, mais désavoué ou du moins interprété dans un sens conditionnel quelques jours plus tard. L’agitation n’en continua pas moins. À ce moment un officier d’artillerie qui s’était distingué au siège de Toulon, Bonaparte, reçoit l’offre de remplacer dans le commandement des sections armées Hanriot, qui paraissait suivre le parti de la Commune, mais qui devint, comme on le sait, un ardent robespierriste. Le 23 ventôse (13 mars), Saint-Just vint lire à la tribune un rapport incohérent, plein de généralités sonores sur la vertu, le crime, l’ambition, etc., et qui se terminait par un projet de décret déclarant traître à la patrie tous ceux qui, de quelque manière que ce fût, auraient favorisé le plan de corruption des citoyens, de subversion des pouvoirs et de l’esprit public, etc. Rien de plus effroyablement vague et quintessencié. La Convention vota. Dans la nuit, Hanriot, à la tête d’une force imposante triée dans les sections, procéda à l’arrestation d’Hébert, de Vincent, de Ronsin, de Momoro et autres chefs du parti. On répandit le bruit d’une conspiration, d’un projet de massacre de la Convention, etc., et autres fables qui ne manquent jamais leur effet dans les temps de révolution. Chaumette et un grand nombre d’autres furent arrêtés les jours suivants. Livrés, ainsi que Cloots, au tribunal révolutionnaire, qui n’était déjà plus que le bras séculier de Robespierre et des comités, ils furent condamnés à mort et exécutés le 4 germinal (24 mars). Cette victoire sur la prétendue faction de l’étranger fut suivie du licenciement de l’armée révolutionnaire et de ('épuration complète de la Commune. Le procureur général syndic, magistrat élu par le peuple, fut remplacé par un simple agent national, fonctionnaire public. On donna ce poste à Payan, ami de Robespierre. Un autre robespierriste ardent, Fleuriot-Lescot, fut nommé maire de Paris, en remplacement de Pache, qu’on n’avait osé tuer.

Cependant, Camille Desmoulins, dans son Vieux cordelier, avait fait, sous le prétexte d’une traduction de Tacite, un tableau effrayant du régime de la l’erreur et demandé la création d’un comité de clémence. Les dantonistes croyaient avoir donné des gages suffisants au parti dominant en contribuant à l’immolation des exagérés : ils n’avaient fait qu’ouvrir la voie et creuser leur fosse. Dans la nuit du 9 au 10 germinal (29-30 mars), Danton, Camille, Lacroix et Philippeaux sont arrêtés comme indulgents.

Le 16 germinal (5 avril) ils montaient sur l’échafaud, amalgamés avec Hérault-Séchelles, Westermann, Basire et autres. Aux articles Danton, Robespierre, etc., nous examinerons la part qu’eut à cette nouvelle

proscription l’Incorruptible, qu’on a tenté bien vainement de disculper, et qui agit surtout par Saint-Just, dont il annota de sa main le meurtrier rupport (l’original existe aux Archives).

La Convention et les comités étaient dès lors dominés par une faction, dont la puissance grandissait tous les jours. La Commune et le tribunal révolutionnaire, par les remaniements qui avaient été opérés, n étaient plus que des agences robespierristes, comme les jacobins, tamisés par de sévères épurations. Par une conséquence en quelque sorte fatale, la Terreur moissonnait maintenant les pères de la Révolution. Mais les tragédies ne sont pas terminées encore.

Pendant ces terribles événements, la Repu- fcllque poursuivait le cours de ses triomphes militaires aux Pyrénées, aux Alpes et sur le Rhin, et la campagne de 1794 fut aussi glorieuse que celle de l’année précédente. Sauf des revers partiels, on sait que cette prodigieuse série de victoires allait se prolonger pendant vingt ans.

Cependant le comité de Salut public était profondément divisé ; mais ses membres, par un admirable sentiment de patriotisme, ensevelissaient ces divisions dans le silence, dans la crainte qu’elles ne profitassent aux ennemis de la République et que le faisceau du gouvernement n’en fût brisé. La Convention, qui les ignorait, votait presque toujours de confiance, souvent sans discussion, les mesures qui lui étaient présentées. Bans ce comité, comme nous l’avons expliqué à l’article spécial qui lui est consacré, le travail avait été divisé entre les membres, et chacun était à peu près maître daDs sa spécialité ; vu l’immensité des affaires (jusqu’à cinq cents par jour), les signatures se donnaient même souvent de confiance ; et, d’ailleurs, trois suffisaient pour la validité. C’était là un grand abus ; mais il y avait impossibilité physique à ce qu’il en fût autrement. Ceci explique comment Robespierre put faire beaucoupde choses dont ses collègues, accablés par leurs travaux, n’avaient une connaissance précise que quand elles étaient accomplies. Cependant il y avait parfois des orages, et même de très-violents, et les triumvirs furent positivement accusés, par Carnot, notamment, de tyrannie, de prétentions dictatoriales. Un jour il présenta une nouvelle liste de conventionnels dont il demandait la mise en accusation. Le comité, cette fois, refusa. Robespierre en fut vivement courroucé. À ce moment, son génie amer l’entraînait de plus en plus dans la naine et les noirs soupçons ; il se sentait enveloppé d’inimitiés et menacé par les débris des partis qu’il avait immolés ; il s’exagérait même et les dangers qu’il courait et le nombre de ses ennemis, et ne voyait partout que machinations et complots ; le maniement de la police ne faisait qu’aggraver cette maladie de l’effroi, qui est le commencement de la punition des tyrans.

Pour compléter la réaction religieuse qu’il avait provoquée et qui fait de lui le précurseur du concordat, il vint lire à la Convention, le 18 floréal (8 mai), un manifeste religieux d’une beauté qu’il serait puéril de méconnaître,

que sorte le pontife, fut célébrée avec éclat, et, en le présentant à l’Europe comme le restaurateur de l’ordre moral, ne fit que coutirmer ses adversaires dans lg soupçon qu’il nourrissait des projets de dictature. Deux jours après, cet nomme, que quelques historiens systématiques nous représentent comme voulant mettre fin au régime de la terreur, faisait présenter par Couthon, à l’insu du comité, cette affreuse loi du 22 prairial, son œuvre spéciale, qui supprimait les défenseurs et les témoins flans la procédure du tribunal révolutionnaire (tout peuplé de robespierristes). Il y eut quelques orages ; mais la Convention, terrifiée, vota la loi. C’était évidemment tendre la gorge au couteau : car, on ne pouvait s’y méprendre, ceci était l’indice effrayant de nouvelles proscriptions. Un certain nombre de représentants ne pouvaient faire un pas sans être surveillés, obsédés par les espions de Robespierre ; les victimes étaient marquées, tout le monde les désignait.

La loi du 22 prairial porta ses fruits, et cette période est l’apogée de la l’erreur. Mais Robespierre fut abattu avant d’avoir pu faire dans l’Assemblée les nouvelles épurations qu’il avait si laborieusement préparées.

Après une suite de discordes intérieures dans le détail desquelles nous ne pouvons entrer, il arriva ce qui devait fatalement arriver : une ligue se forma contre Robespierre, composée de tous ceux qui se savaient proscrits, des amis de ceux qui l’avaient été, des républicains ardents qui voyaient s’élever une tyrannie, aussi bien que de ceux qui voulaient une réaction. Robespierre fut renversév. thermidor- (journée du 9)] et envoyé à l’échafaud, avec Saint-Just, Couthon, Lebas, Hanriot, Dumas, Payan, Fleuriot-Lescot, etc., et quatre-vingts membres de la Commune, qui s’était déclarée en insurrection ; tous avaient été, en masse, mis hors la loi comme traîtres et rebelles.

Une nouvelle période commence. Nous avons eu successivement le règne de la Gironde et celui de la Montagne. Bientôt la Plaine va régner à son tour. Sieyès et d’autres muets vont ressusciter. Des médiocrités comme Durand-Maillane, Boissy d’Anglas, etc., vont occuper la scène et précipiter la décadence de la République. La contrerévolution se réveille vivante et terrible, se Î(réparant à centupler ses efforts. Les révoutionnaires ardents qui avaient contribué à

la chute du tyran, et les thermidoriens eux-mêmes, furent rapidement débordés parle flot d’une réaction qui rencontra d’autant moins d’obstacles que le parti renversé avait dépeuplé la Montagne, et que les grandes et fortes personnalités avaient presque toutes disparu. Le funeste système de l’épuration avait porté ses fruits : la vie, la force, la substance, ce qui nourrissait la Révolution, était desséché, tari, enfoui dans la terre. La presse révolutionnaire et populaire avait été frappée avec Marat, Camille, Hébert ; la tri CONV

bune avec Danton, Hérault, Saint-Just’, Couthon, Robespierre ; la révolution philosophique avec Cloots ; la Commune et Paris avec Chaumette et les Cordeliers. Comment la réaction n’aurait-etle point débordé ? Robespierre et son parti avaient préparé les voies en émasculant la Révolution de toutes ses forces, de toutes ses originalités, et il est avéré qu’ils se préparaient à frapper encore. Les Jacobins, énervés de longue main par les épurations, par la discipline que leur imposait leur grand prêtre, vont végéter encore quelque temps d’une vie purement mécanique, pour disparaître à jamais.

Mais achevons l’énumération des faits.

11 était dans la nature des choses que la l’erreur officielle finît avec Robespierre, en qui l’opinion publique l’avait personnifiée, injustement d’ailleurs, car, nous l’avons dit, ce régime violent fut le produit des circonstances bien plus que l’œuvre des hommes, et il ne pouvait guère finir que par une crise. Seulement, cet événement, qui devait ouvrir à la France une ère de calme et d’union, donna le signal des vengeances judiciaires et des assassinats politiques. La l’erreur avait été simplement déplacée.

Les thermidoriens purs, Tallien, Fréron, Barras, Thuriot, Legendre, Merlin (de Thionville), Bourdon (de l’Oise), Lecointre, etc., exercèrent pendant quelque temps une certaine action sur l’Assemblée, tandis que les révolutionnaires comme Billaud - Varennes, Collot-d’Herbois et autres, et même l’équivoque et versatile Barère, tolérés d’abord, ne tardèrent pas à être l’objet des plus violentes attaques. L’Assemblée avait complété les comités de Salut public et de Sûreté générale, aboli la loi du 22 prairial, remanié le tribunal révolutionnaire, et. approuvé de nombreux élargissements de prisonniers. Bientôt Fouquier-Tinville fut décrété d’accusation, sur

ce cri de Fréron : « Je demande qu’il aille cuver dans les enfers le sang qu’il a versé I» Dans les départements, la l’erreur blanche commençait par la proscription et l’assassinat des patriotes, pendant que dans la capitale la jeunesse dorée préludait à ses exploits. Cependant la Convention, livrée à des entraînements contradictoires, entendait si peu faire les affaires de la contre-révolution, qu’elle décréta (26 fructidor an II—12 septembre 1794) la translation des restes de Marat au Panthéon, et l’expulsion des cendres de Mirabeau. Le 21 septembre elle assista en corps à cette cérémonie avec toutes les autorités constituées. Le char portant la dépouille de l’Ami du peuple était ombragé de quatorze drapeaux, destinés à être envoyés ensuite aux quatorze armées de la République.

Le 5 frimaire an III (25 novembre 1794), elle décrétait Carrier d’accusation. Le 18 du même mois (8 décembre), elle rappelait dans son sein les soixante-treize signataires de la protestation contre le 31 mai ; c’étaient les débris d’un temps antique, les survivants de la Gironde, mêlés de quelques royalistes masqués. La réaction suivait son cours naturel. Les jacobins, assiégés, assommés par la jeunesse dorée, avaient été récemment supprimés par décret comme société, en même temps que s’ouvrait le club de Clichy, centre thermidorien, qui devint peu à peu une officine royaliste.

Malgré nos déchirements intérieurs, la lutte contre l’Europe féodale et monarchique n’avait souffert aucune interruption, et la République armée poursuivait d’un irrésistible élan le cours de ses triomphes. La Convention, avec une fierté romaine, avait déclaré qu’elle ne traiterait avec aucun ennemi qui occuperait le territoire français ; et la victoire avait partout répondu à l’audacieuse énergie de ce langage. Sur tous les points la coalition était réduite à la défensive. La délivrance complète du territoire, la reprise de nos quatre F laces du Nord, la conquête de lu Hollande, enlèvement de Fontarabie, de Saiot-Sébastieu, de Figuières, de Roses, de Cologne, de Trêves et de toute la rive gauche du Rhin, etc., marquèrent cette étonnante campagne de 1794, qji arracha des cris d’admiration aux détracteurs les plus acharnés de la République,

En septembre 1793, l’Assemblée, pressée par les circonstances, avait fixé un maximum du prix des grains pour toute la République, système qui fut étendu peu après à tous les objets et denrées de première nécessité. Nous n’avons pas à juger ici cette mesure, à laquelle un article spécial sera consacré, et qui jusqu’à présent a été généralement appréciée à un point de vue trop exclusif, comme tous les grand expédients révolutionnaires. Ce qui est certain, c’est que le maximum soutenait l’assignat, qui pendant toute la l’erreur resta presque toujours au pair, en assurant une aisance relative, et que son abrogation subite, pendant la réaction thermidorienne (3 nivôse an III — 23 décembre 1794), causa une dépréciation énorme dans le papier national, une effroyable aggravation de la pénurie publique, et, en fin de compte, ne profita qu’aux agioteurs, aux tripoteurs de biens nationaux et autres sangsues. Les représentants du peuple mêmes ne pouvaient plus vivre avec leur indemnité, qui dut être portée de 18 à 36 livres par jour {23 nivôse — 12 janvier 1795). Une disette factice, au sein de l’abondance, fut savamment organisée par des nuées de spéculateurs, et l’Aisemblée dut nommer une

commission d’approvisionnement qui, sous la direction de l’inepte Boissy d’Anglas (qu’on

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surnomma Boissy-Famine), n’approvisionnait absolument rien., Le peuple n’avait gagné, au triomphe des honnêtes gens, que de mourir de faim, et il regrettait hautement cette maternelle Commune de 1793, dont la sollicitude le nourrissait, et qu’il avait laissé immoler.

Cependant il restait encore dans la Convention un noyau d’indomptables montagnards attaqués sans relâche par les proscripteurs. Les diatribes contre les membres des anciens comités étaient constamment à l’ordre du jour. Enfin, le 12 ventôse an III (2 mars 1795), à la suite d’un long rapport de Saladin, l’Assemblée décréta d’accusation Billaud, Collot, Vadier et Barère, vainement défendus par Robert Lindet et Carnot, et qui furent un peu plus tard condamnés à la déportation, pour les punir d’avoir contribué à sauver la France.

Époque étrange et pleine de contradictions : pendant que la République, en pleine décadence, proscrivait ses fondateurs et que la réaction avait trouvé, pour égorger les patriotes les plus purs, lheureuse épithète de terroriste ; pendant que Lyon et les villes du Midi étaient ensanglantées au nom de l’humanité et de la modération ; pendant que le peuple mourait de faim et était réduit à des distributions de deux onces de pain par jour,

l’ancienne société renaissait, avec ses prostituées, ses joueurs, ses élégants escrocs, ses agioteurs, etc., tout un monde éclos dans la boue de l’ancien régime, qui paradait aux balcons des théâtres et dans ces balfdes victimes où la luxure impudente roulait dans l’orgie son faux deuil. Les mœurs, si austères pendant la l’erreur, avaient subi la même rénovation. La renaissance de la bonne compagnie avait naturellement rouvert les cavernes de jeu, les tripots, les maisons de prostitution, les caprées à la Louis XV, toutes ces officines de corruption que 1793 avait fermées, et qui vont atteindre avec le Directoire a l’apogée de leur prospérité. Au milieu des saturnales de la réaction, on n’en célébrait pas moins solennellement l’anniversaire du supplice de Louis XVI. L’Institut national de musique exécuta à cette occasion, dans la Convention même, un morceau de Gossec, dont le ton plaintif et tendre frappa d’abord d’étonnement, puis d’indignation, même les plus violents réacteurs de l’Assemblée. Et tous, interpellant avec colère les musiciens, leur demandent s’ils pleurent la mort du tyran. Blessés d’un tel soupçon, les virtuoses, pour toute réponse, enlèvent d’enthousiasme l’air national du Ça ira, aux applaudissements des représentants ; et Gossec, non moins ému, explique que l’intention de sa musique était d’exprimer le bonheur d’être délivré d’un tyran. Telles étaient les bigarrures de ce temps, que c’était en invoquant l’ombre sacrée de Marat que le furieux Fréron, dans son Orateur du peuple, prêchait tous les jours l’extermination des anarchistes, et que les muscadins, la jeunesse dorée, abattaient les bonnets rouges, assommaient les patriotes, brisaient et traînaient ài’égout les bustes de l’Ami du peuple sur l’air de la Carmagnole et aux cris de vive la République. ■

Cependant, exaspéré par la marche de la contre-révolution et par l’effroyable misère qui l’accablait, le peuple de Paris envahit la Convention, le 12 germinal an III (1" avril 1795), en criant : Du pain et la constitution n’e1793.Cette foule était d’ailleurs inoffensivé et se dispersa après quelques heures de tumulte. Mais la majorité feignit d’y voir une conspiraiion de la Montagne et se hâta de décréter d’arrestation Duhem, Choudieu, Chasles, Muguet, Amar, Foussedoire, Ruamps, Léonard Bourdon, Moïse Bayle, etc. [V. qsrminal an III (journée du 12)]. En outre, l’Assemblée ordonna le désarmement des anarc/iisles, épithète élastique parfaitement comprise, et qui dans l’état des choses s’appliquait à tous les patriotes.

Le 1er prairial suivant (20 mai), nouvelle invasion de l’Assemblée. Cette fois le peuple était écumant et terrible. La Convention, rassemblée au bruit du tocsin, au moment où le flot populaire battait les portes, prête le serment de mourir à son poste. La devise de l’insurrection était la même : Du pain et la constitution de 17931 Au milieu de la famine, le peuple n’oubliait pas la grande religion de nos pères : la" loi. La mise en activité de la constitution était alors le mot d’ordre des républicains, car tout le poids du gouvernement révolutionnaire pesait maintenant sur eux. Le peuple demandait en outre la permanence des sections, le rétablissement de la Commune, la rentrée des représentants emprisonnés, la mise en liberté des patriotes, etc. La journée se passa au milieu des plus effroyables tempêtes, pendant que la cloche du pavillon de 1 Unité sonnait sans interruption le tocsin. Enfin le soir, quelques représentants, les débris de la Montagne, Romme, Goujon, Duquesnoy, Soubrany, pour sauver la Convention et le peuple, convertissent en motions les vœux des insurgés ; beaucoup de membres delà droite, malgré leur serment, n’étaient plus sur leurs sièges. Les motions furent votées dans le tumulte. Mais vers une heure du matin, les comités ayant rassemblé des forces, ce qui restait d’insurgés fut dispersé sans grande résistance. Les absents reparurent alors, altérés de vengeance, et l’Assemblée vota sans presque délibérer la mise en accusation des montagnards qui s’étaient compromis dans le mouvement. C’étaient Romme, le principal auteur du calendrier ; Soubrany, si brillant dans ses mis CONV

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sîons militaires ; le magnanime Goujon, Duroy, l’intrépide Bourbotte, Duquesnoy, Peyssard,

?ui échappa k l’arrêt de mort. Les autres

urent condamnés. Ces hommes d’airain se frappèrent tous successivement du même couteau et furent portés sanglants sur l’échafaud. Ils semblaient emporter avec eux ce qui restait des mâles vertus de la République,

Les mouvements insurrectionnels ne furent entièrement domptés que le 4, et la Convention compléta sa victoire par de nouvelles mesures de répression et par le désarmement de ce quartier Saint-Antoine, qu’on avait autrefois surnommé le faubourg de Liberté, ainsi que de diverses autres sections. V, prairial ’• an III (journées de).

Ces malheureux événements précipitèrent encore la réaction ; lo Convention, emportée par une sorte de vertige, décréta de nouvelles arrestations de représentants : Ricord, Escudier, Salicetti, Panis, Vouland, Ruhl, Jagot, Élie Lacoste, Lavicomterie, David, Jean-Bon Saint-André, Robert Lindet furent ■ jetés en prison. La faction osa même s’attaquer à Carnot, mais ses efforts se brisèrent aux pieds du grand citoyen.

Deux députés, Ruhl et Maure, désespérant de la République, se tuèrent, le premier en se

S longeant un poignard dans le cœur, l’autreun coup de pistolet.

Dans les départements, la réaction était plus violente encore. Des Dandes d’assassins, sous les noms de compagnies de Jéhu et du Soleil, égorgeaient impunément en plein jour. À Lyon, & Marseille, à Nîmes, à Arles, à Aix, à Avignon, etc., les massacres de prisonniers patriotes se succédaient sans interruption. Enfin cette époque sinistre, à laquelle la Terreur légale ne saurait être comparée, ne fut qu’un long deux septembre, suivant l’exprèssion d’un écrivain non suspect de jacobinisme, Ch. Nodier. Partout les royalistes conspiraient à visage découvert ; les émigrés rentraient en foule ; Louis XVIII avait une agence à Paris. La révolte de l’Ouest, plusieurs fois pacifiée, se perpétuait par les brigandages de la chouannerie, par le débarquement de Quiberon et par de nouvelles prises d’armes en Vendée.

Une chose cependant pouvait consoler les patriotes de "tant de malheurs, c’était l’héroïque attitude des armées républicaines en’ face de la coalition des rois.

Cependant les thermidoriens et les réacteurs qui avaient conservé, malgré leurs fureurs, des sentiments républicains, commençaient à se sentir débordés par le royalisme, qui, dans l’Assemblée même, comptait quelques partisans cachés ou quelques convertis ; menacés eux-mêmes et réduits à lutter contre le torrent, ils se rejetèrent dans ce système de bascule inauguré déjà par Robespierre, et qui bientôt allait devenir toute la politique du Directoire.

Aux demandes de mise en activité de la constitution de 1793, l’Assemblée avait répondu par la promesse de préparer les lois organiques de cette constitution. Une commission fut enfin nommée à cet effet, et commença ses travaux le 17 floréal an III (e mai 179S). Son premier soin fut d’écarter dédaigneusement l’acte de 1793, œuvre de la Montagne, repoussée d’ailleurs par la majorité. Elle prépara ensuite une constitution nouvelle avec la division du pouvoir législatif en deux chambres, et l’institution d’un pouvoir exécutif composé de cinq membres (v. Anciens, Cinq-Cents, Directoire et constitution de l’an III). L’exercice des droits politiques était subordonné au payement d’une contribution. Discuté pendant les mois de messidor et de thermidor, le projet de constitution fut adopté le 5 fructidor (22 août). Mais après de si’terribles ébranlements, au moment où la contre-révolution était armée de toutes parts, on jugea qu’un renouvellement intégral du pouvoir législatif présentait les plus grands dangers, et, pour ménager la transition, l’Assemblée décida, par ses décrets des 5 et 13 fructidor (22 et 30 août), que les deux tiers de la Convention entreraient dans la nouvelle législature. Le choix des membres était laissé aux assemblées électorales. Cette décision, commandée par des circonstances exceptionnelles et une nécessité impérieuse, provoqua une explosion parmi les royalistes, qui avaient espéré trouver dans le moment critique d’un changement de régime l’occasion d’un triomphe complet. Les patriotes étaient proscrits, le peuple abattu, ta bourgeoisie égarée par une presse royaliste forteroentorganisée, sous le masque républicain. Paris était rempli d’émigrés, de prêtres réfractaires et de chouans ; tes sections, après tant d’épura^-. lions et de proscriptions, étaient dominées entièrement par la faction qui agitait Paris et se préparait ouvertement a la révolte. La constitution et les décrets touchant les deux tiers conventionnels furent soumis au vote des assemblées primaires dans toute la France et adoptés à une grande majorité. Ce résultat augmenta la fureur Ses royalistes, qui, sa croyant maîtres de la capitale, prirent enfin les armes contre la Convention le 13 vendémiaire an IV (5 octobre 1795). On eut alors le curieux spectacle d’une sédition d’ex-nobles, de riches, de propriétaires, de muscadins, qui seuls composaient alors la garde nationale et les sections, et qui, réunis à leurs clients et aux citoyens qu’ils avaient égarés, formaient une masse considérable, a laquelle la Convention n’avait à opposer que quelques forces réunies à.la hâte, et’quinze ou dix-huit cents patriote* de 1789 qui, oubliant les persécutions qu’ils avaient subies, s’étaient généreusement offerts et qu’on avait armés. Les insurgés, marchant en colonnes sur la Convention, furent dispersés par l’artillerie de Bonaparte, que s’était adjoint le représentant Barras, chargé de la dér’ense. V. vendémiaire an IV (journée du 13).Les vaincus furent traités avec une grande indulgence ; il n’y eut que deux condamnations a mort de prononcées. Convaincus que la Convention avait peur de son propre triomphe, les royalistes se disposèrent à recommencer la lutte et continuèrent avec la même audace leur.s intrigues et leurs complots, qui vont se prolonger sous le régime nouveau.

Enfin, le 4 brumaire an IV (îS octobre 1795), la Convention nationale tint sadernière séance et se sépara aux cris prolongés de vive la République ! après avoir décrété une amnistie nour les délits révolutionnaires et prononcé l’abolition de la peine de mort, à dater du jour où la paix générale serait conclue. Son existence avait duré trois ans un mois et quatre jours. " Suivant l’écrivain royaliste Beaulieu, elle avait rendu dans cet espace de temps onze mille deux cent dix décrets.

L’énumération de ses créations et de ses travaux au milieu de si violents orages et de tant de combats sera pour tous les siècles un sujet d’étonnement et d’admiration. Elle a institué le système décimal, l’uniformité des poids et mesures, le bureau des longitudes, le calendrier nouveau, le grand-livre, le Conservatoire des arts et métiers, le Conservatoire de musique, l’École polytechnique, l’Ecole normale, l’Institut, les écoles centrales et spéciales, les écoles primaires, les comités de santé, 1 institut des aveugles, celui des sourds-muets, des maisons pour les infirmes, des récompenses nationales pour les grandes découvertes, le musée du Louvre, etc. Elle a décrété la rédaction du code civil et en a préparé les articles les plus importants. Instruction publique, finances, guerre, fondations de charité, agriculture, arts, sciences, littérature, commerce, industrie, cultes, législation, économie politique, elle a tout abordé, tout étudié, avec cet esprit organisateur, cette audace de conception et cette vigueur pratique qui distinguent les hommes de cette génération. Et quand on songe aux circonstances au milieu desquelles tant d’œuvres furent accomplies, tant d’autres ébauchées, tant d’idées mises en œuvre ou magistralement élaborées, on oublie les misères intérieures de ta puissante Assemblée, ses divisions funestes, ses entraînements de violence ou de réaction ; et elle nous apparaît, prise dans son ensemble, comme la plus grande assemblée politique de l’histoire, bien plus imposante que le sénat de rois entrevu par Cinéas ; enfin, comme une assemblée d’hommes, dans toute l’antique énergie et la maie vertu de ce mot.

La forme politique si puissamment ébauchée par elle a été emportée par les événements ; mais on n’en a jamais détruit l’espérance et les souvenirs : les maîtres de la terre n’ont jamais cessé d’en redouter la résurrection ; et, sous ce rapport, on peut dire que du fond de leur tombeau les vaillants conventionnels font encore aujourd’hui trembler tous les rois, comme aux temps héroïques où sur leurs sièges d’airain ils défiaient toutes les tempêtes de l’univers.

Voici la liste, par ordre alphabétique, des députés à la Convention nationale. Albert aîné, homme de loi (Haut-Rhin).

Albitte (Antoine-Louis), Seine-Inférieure.

Albouys, juge au tribunal de Cuhors (Lot).

Allafort, vice-président du district de Nontron (Dordogne).

Allard (Haute-Garonne).

Alluswur (Cher).

Alquier, député aux états généraux (Seine-etOise).

Amar (Isère).

Amyon (de Poligny, Jura).

Andrei (Corse).

Anguis (Deux-Sèvres).

Anthoine (Moselle).

Anttboul, avocat à Saint-Tropez (Var).

Arbogast, professeur de mathématiques (BasRhin).

Anuomeilley (Marne).

Annonville (Marne).

Arrighi (Corse).

Artauld (Puy-de-Dôme).

Asselin, avocat (Somme).

Aubry (Gard).

Audouin (Pierre-Jean), Seine-et-Oise.

Audrein, vicaire épiscopal de l’évêque constitutionnel du Morbihan.

Auge (Oise).

Augier (Deux-Sèvres).

Ayral (Haute-Garonne).

Azéraa, homme de loi (Aude).

Babey (Jura).

Baiihe (Bouches-du-Rhin).

Baille (Bouches-du-Rhône).

Bailleul (Seine-Inférieure).

Bailly de J uilly (Seine-et-Marne), ex-oratorien.

Balivet (Haute-Saône).

Balia (Gard).

Balland (Vosges).

Balmuin (Mont-Blanc).

Bancal (Henri), notaire à Clermont-Ferrand

(Puy-de-Dôme). Bar, avocat à Thionville (Moselle).

CONV

Baraillon (Creuse).

Barbaroux (Bouches-du-Rhône).

Barbeau-Dubarran (Gers).

Barère de Vieuzac (Bertrand), Hautes-Pyrénées.

Barety (Hautes-Aines).

Barras (le vicomte), Var.

Barrot, juge au tribunal de Langogne (Lozère).

Barthélémy, avocat au Puy-en-Velay (HauteLoire).

Bassal, curé constitutionnel de Saint-Louis, à Versailles (Seine-et-Oise).

Batellier (Marne).

Bauchetou (Cher),

Baudin {Ardennes).

Baudot, médecin àCharolles (Saône-et-Loire).

Baudran (Isère).

Bayle (Moïse), Bouches-du-Rhône.

Bazire (Claude), avocat (Côte-d’Or).

Bazoche (Meuse).

Beauchamp (Allier).

Beaugeard (Ille-et-Vilaine).

Beauvais Saint-Sauveur ou de Préaux, médecin, Paris.

Becker, juge de paix (Moselle).

Beffroi (Aisne).

Belin, cultivateur à Guise (Aisne).

Bellegarde (Charente).

Benoiston (Seine-Inférieure).

Bentabole, avocat (Bas-Rhin).

Béraud (Marcellin), Rhône-et-Loire.

Bergoing", médecin à Bordeaux (Gironde).

Berner, avocat à Dijon (Côte-d’Or).

Bernard (Bouches-du-Rhône).

Bernard (de Saintes), député à la Législative (Charente-Inférieure).

Bernard des Sablons (Seine-et-Marne).

Bernard-Saint-Affrique (Aveyron).

Bernier (Seine-et-Marne).

Bertezène (Jean-Étienne), Gard.

Bertrand (Cantal).

Bertucat (Saône-et-Loire),

Besson (Doubs).

Bezard (Oise).

Bidault (Eure).

Billaud-Varennes, avocat, Paris.

Bion, avocat à Loudun (Vienne).

Biroteau (Pyrénées-Orientales).

Bissy. le jeune (Mayenne).

Blad (Finistère).

Blanc (Marne).

Blancval, marchand (Puy-de-Dôme).

Blaux (Moselle).

Blaviei ! (Lot).

Blondel (Ardennes).

Blutel, juge de paix à Rouen (Seine-Inférieure).

Bô (Aveyron).

Bodin, maire à Gournay (Indre-et-Loire).

Bohan (Finistère).

Boileau, juge de paix à Avallon (Yonne).

Boirou (Rhone-et-Loire).

Boisset (Drôme).

Boissier (Finistère).

Boissieùx, avocat à Saint-Marcellin (Isère).

Boissy d’Anglas, avocat (Ardèche).

Bollet, avocat (Pas-de-Calais).

Bolot (Haute-Saône).

Bonguyode (Jura).

Bounemain (Aube).

Bomiesœur (Manche).

Bonnet, avocat (Aude),

Bonnet (Calvados).

Bonnet (de Troiches), lieutenant de la sénéchaussée du Puy-en-Ve !ay (Haute-Loirel.

Bonneval (Germain), cultivateur (Meurthe).

Bonnier (d Areo), président de ta chambre des comptes de Montpellier (Hérault).

Bonygues (Lot).

Bordas, président du district de Saint-Vrieix (Haute-Vienne).

Borel (Hautes-Alpes).

Borie (Corrèze).

Boucher, Paris.

Bouchereau (Aisne).

Boudin (Indre).

Bouillerot (Eure).

Bouquier aîné (Dordogne).

Bourbotte (Yonne).

Bourdon, procureur au parlement de Paris (Oise).

Bouret (Basses-Alpes).

Bourgeois (Eure-et-Loir).

Bourgois, ancien lazariste (Seine-Inférieure).

Bourgouin, Paris.

Boursault-Malherbe, Paris.

Bousquet, médecin (Gers).

Boussion, médecin (Lot-et-Garonne).

Boutrole, notaire (Sarthe).

Boyaval (Nord).

Boyer-Fonfrède (Gironde).

Buzio (Corse).

Biéard (Charente-Inférieure).

Bresson (Vosges).

Bretel (Manche). Briez (Nord).

Brisson (Loir-et-Cher).

Brissot de Warville (Eure-et-Loir).

Brival (Corrèze).

Brun (dit Brin), subdélègué à Angoulême (Charente).

Brunel, maire à Béziers (Hérault).

Buzot (Léonard), Eure.

Cabarot (Lot-et-Garonne).

Cadroy (Landes).

Calés, avocat à Toulouse (Haute-Garonne).

Calon, ancien officier général (Oise).

Cambacérès (Hérault).

Cambon (Hérault).

Cambord (Dordogne).

Camboulas (Aveyron).

CONV

Campmas (Tarn).

Camus, avocat du clergé (Haute-Loire).

Cappin (Gers).

Carelli (Mont-Blanc).

Carnot, capitaine du génie (Pas-de-Calais).

Carpentier (Nord).

Carra, journaliste (Saône-et-Loire).

Carrier (Cantal).

Casa-Bianca (Corse).

Casenave (Basses-Pyrénées.)

Cassanyes (Pyrénées-Orientales).

Castainy (Orne).

Castilhon, négociant à Cette (Hérault).

Cavaignac (Lot).

Cavanelle (Pyrénées-Orientales).

Cayla (Lot).

Cazeneuve, évêque constitutionnel d’Embrun (Hautes-Alpes).

Chabanon (Cantal).

Chabot (Antoine), Hautes-Alpes.

Chabot, capucin (Loir-et-Cher).

Chaillon, avocat (Loire-Inférieure).

Châles (Eure-et-Loir).

Chambon, trésorier de France (Corrèze).

Chambon-Latour (Gard).

Chambord (Saône-et-Loire).

Champeaux-Palesne (Côtes-du-Nord).

Champigny (Clément), Indre-et-Loire.

Champmartin (Ariége).

Chanvier (Haute-Saone).

Charbonnier (Var).

Charlier (Charles), procureur (Marne).

Charrel (Isère).

Chasset, avocat à Villefranche (Rhône-etLoire).

Chastelain (Yonne).

Cbâteauneuf-Randon (Lozère).

Chaudron-Rousseau (Haute-Marne).

Chaumont (Ille-et-Vilaine).

Chauvin (Deux-Sèvres).

Chazal (Gard).

Chazaud (Charente).

Chedaneau, administrateur de l’hôpital de Ruffec (Charente).

Chénier (Marie-Joseph), poète (Seine-et-Oise).

Chevalier (Aliier).

Chevalier (Sarthe).

Chevrier (J.-C), ancien lieutenant général du bailliage de Neufchâteau, ex-constituant (Vosges).

Chiappe (Corse).

Choudieu (Maine-et-Loire).

Christiani, avocat à Strasbourg (Bas-Rhin).

Clauzel, maire (Ariége).

Claverie (Lot-et-Garonne).

Cledel, médecin (Lot).

Clootz (Jean- Baptiste - Anacharsis), baron prussien (Oise).

Cochet, membre du département du Nord.

Cochon (Charles), depuis comte de Lapparent (Deux-Sèvres).

Colaud de la Salcette (Drôme).

Collombël (Meurthe).

Collot d’Herbois, Paris.

Colombel (Orne).

Conard (Calvados).

Condorcet (Aisne).

Cont (Basses-Pyrénées).

CorbeIJuge au tribunal de Pontivy (Morbihan).

Cordier (Seine-et-Marne).

Coren-Fustier (Ardèche).

Cosard (Calvados).

Couhey (Vosges).

Coupurd (Côies-du-Nord).

Coupé, curé à Sermaise (Oise).

Coupé (Côtes-du-Nord).

Courtois (Aube).

Coustard, mousquetaire, lieutenant des maréchaux de France (Loire-Inférieure)^

Couthon, avocat à Clerniont (Puy-de-Dôme).

Coutisson-Dumas (Creuse).

Couturier, juge au tribunal de Bouzonville (Moselle).

Crassous (Martinique).

Creuzé-Latouche (Vienne).

Creuzé (Pascal), Vienne.

Crevelier (Charente).

Crèves (Var).

Curée (Hérault).

Cusset, marchand dû soieries à Lyon (Rhôneet-Loire).

Cussy (Calvados).

Dabiay (Alpes-Maritimes).

Damerond (Nièvre).

Dandenac aîné (Maine-et-Loire).

Dandenac jeune (Maine-et-Loire).

Dan j ou (Oise).

Danton, avocat au conseil (Paris).

D’Aoust (le marquis Jean-Marie), ex-constituant (Nord).

Dartigœyte (Landes).

Daubermenil (Tarn).

Daunou, ex-oratorien (Pas-de-Calais).

Dautriche (Charente-Inférieure).

David, peintre (Paris).

David (Aube).

Debourges (Creuse).

Debry (Jean), Aisne.

Dechezeaux (de la Flotte), Charente-Inférieure.

Defermont (des Chapelières), Ille-et-Vilaine.

Defrance (Seine-et-Marne).

Defrozières (Eure-et-Loir).

Dehoulières (Maine-et-Loire). •.

Delacroix (Eure-et-Loir).

Delacroix de Constant (Charles), Marne.

Delagueille (Loiret).

Deluhay es, procureur au bailliage de Caudebec (Seine-Intérieure).

Delamaire (Oise).

Deiauuay aîné, commissaire du roi près le tribunal d’Angers (Maine-et-Loire),

CONV

Delaunay jeune, homme de loi à Angers (Maine-et-Loire).

Delbrel (Lot).

Delcher, avocat à Brioude (Haute-Loire),

Deléage (Allier).

Deléasso (Pyrénées-Orientales).

Deleyre (Gironde).

Delleville (Philippe), Calvados.

Delmas (Haute-Garonne).

Deloeloy (Somme).

Dentzel, luthérien (Bas-Rhin).

Deperret (Bouches-du-Rhône).

Derazey (Indre).

Derbez-Latour (Basses-Alpes).

Desacy (Haute-Garonne).

Descainps (Gers).

Desgrouas (la Prise), Orne.

Desmoulius (Camille), Paris.

Despinassy, capitaine d’artillerie (Var).

Desrues, Paris.

Dettel (Tarn).

Devars (Charente).

Devérité, imprimeur - libraire & Abbevilie (Somme).

Devilie (Marne).

Deydier (Ain).

Dhiriar (Basses-Pyrénées).

Dizès, procureur-syndic du dép. (Landes).

Dopsens (Eure).

Dornier (Haute-Saône).

Doublet (Seine-Inférieure).

Douge (Aube).

Doulcet (de Pontécoulant), Calvados.

Drouet (Marne).

Drulhe, curé de Toulouse (Haute-Garonne).

Dubiguon (Ille-et-Vilaine).

DuboS, avocat (Orne).

Dubois (Haut-Rhin).

Dubois (Julien), Orne.

Dubois-Crancé (Ardennes).

Dubois - Dubais (Thibaut), ancien garde du corps (Calvados).

Duboucher, médecin à Montbrison (Rhône-etLoire),

Dubouloz (Mont-Blanc).

Dubraucq (Pas-de-Calais).

Dubreuil-Chambardel (Deux-Sèvres).

Dubusc (Eure).

Duchastel, cultivateur (Deux-Sèvres).

Ducos (Landes).

Ducos, négociant à Bordeaux (Gironde).

Dufestel (Somme). Dufriche-Valazé, avocat à Alençon (Orne).

Dugenne (Cher).

Dugué-Dassé (Orne).

Duhem, médecin (Nord).

Dulaure, ingénieur-géographe (Puy-de-Dôme).

Dumas (Mont-Blanc).

Dumont (Calvados).

Dumont (André), Somme.

Dupin (A.).

Dupin jeune (Aisne).

Duplantier (Ciroude).

Dupont (Indre-et-Loire).

Dupont de Bigorre (Hautes-Pyrénées).

Duport (Mont-Blanc).

Duprat (Jean), Bouches-du-Rhône.

Dupuch (Guadeloupe).

Dupuis, auteur de l’Origine des cultes (Seineet-Oise).

Dupuis, avocat et juge de paix à Moutbrisou (Rliône-et-Loire).

Duquesnoy, ex-moine (Pas-de-Caiais).

Durand de Maillane, avocat (Bouches-duRhône).

Durocher (Mayenne).

Duroy, juge au tribunal de Bernay (Eure).

Dussaulx, traducteur de Juvénal (Paris).

Dutrou-Bornier, conseiller du présidial de Montmorillon (Vienne).

Duval (Aube).

Duval, avocat a la Guerche (Ille-et-Vilaine).

Duval (Seine-Inférieure).

Édouard, marchand à Puligny (Côte-d’Or).

Ehgerran (Manche).

Ehnnann (Bas-Rhin).

Enjubaull de la Roche, juge du comté-pairie de Laval, e.t-constituant (Mayenne).

Enlart (Pas-de-Calais).

Erue (Morbihan).

Eschusseriaux aîné, avocat à Saintes (Charente-Inférieure).

Eschasseriaux jeune, médecin (Charente-Inférieure).

Escudier (Var).

Esnue-la-Vallée (Joachim), juge au tribunal de Craon (Mayenne).

Espert (Ariége).

Estadin (Haute-Garonne).

Euiard (Pas-de-Calais).

Eumerth (Gironde).

Ezraard (G.), Gironde.

Fabre (Hérault).

•Fabre, juge de paix à Vinca(Pyrénées-Orientales). Fabre d’Eglantine (Paris). Fauchet, prédicateur du roi (Calvados). Faure, ancien imprimeur (Seine-Inférieure). Faure (Creuse). Faure (H au te-Loire). Fauvre-Labrunerie (Cher). Fayau (Vendée). Faye (Haute-Vienne). Fayolle (Drôme). Féraud (Hautes-Pyrénées). Ferrand (Ain). Ferroux (de Salins), Jura. Ferry (Ardennes). Finot (Yonne). Fiquet aîné (Aisne).

Flageas (Haute-Loire).

Fleury (Côtes-du-Nord).

Fockedey (Nord).

Forest (Rhône-et-Loire).

Forestier (Allier).

Fouehé de Nantes (Loire-Inférieure).

Fouchet, homme de loi et notaire (Cber).

Fourcroy (Paris).

Fourmy (Orne).

Fournel (Lot-et-Garonne).

Fournier (Rhône-et-Loire).

Foussedoire (Loir-et-Cher).

Francastel (Eure).

François (Somme).

Fremenger (Eure-et-Loir).

Fréron, journaliste (Paris).

Fressine, président au tribunal du district de Saint-Aignan et Monlrichard (Loir-etCher).

Froger (Sarthe).

Gaillard (Loiret).

Gainon (Ardèche),

Gantois (Somme).

Gardien (Indre-et-Loire).

Garilhe (Privas), Ardèche,

Garnier (Aube).

Garnier, avocat (Charente-Inférieure).

Garnier (Antoine), Meuse.

Garos (Vendée).

Garran-Coulon (Loiret).

Gartaud, avocat (Gironde).

Gasparin, capitaine au régiment de Picardie

(Bouches-du-Rhône). Gaston (Ariége).

Gaudin, prêtre à Luçon (Vendée). Gauthier (des Orcières), Ain. Gautier jeune (Côtes-du-Nord). Gay-Vernon, évêque constitutionnel de Limoges (Haute-Vienne). Gelin, administrateur du district de Charolle3

(Saône-et-Loire). Genevois, président du tribunal criminel de

Grenoble (Isère). Genia (Mont-Blanc). Génissiou, avocat (Isère). Gensonné, avocat h Bordeaux (Gironde). Gentil, administrateur du département du

Loiret. Geoffroy jeune (Seine-et-Marne). Gérard de Rivières (Jacob), vice-président du

tribunal civil d’Alençon (Orne). Gerente (Olivier), Drôme. Germignac (Corrèze). Gertoux (Brice), Hautes-Pyrénées. Gibergues (Puy-de-Dôme). Giilet (Morbihan). Girard (Aude). Girard (Vendée). Giruud (Allier). Giraud (Charente-Inférieure). Girauit (Côtes-du-Nord).

Girot-Pouzol, ex-constituant (Puy-de-Dôme). Giroust (Eure-et-Loir).

Gleizal (Ardèche).

Godefroy (Aveyron).

Godefroy (Oise).

Gomaire (Finistère).

Gorsas (Seiue-et-Oise).

Gossuin (Nord).

Goudelin (Côtes-du-Nord).

Goujeon (Seine-et-Oise).

Goupilleau-Fontenay, avocat (Vendée).

Goupilleau-Montaigu, notaire (Vendée).

Gourdan, lieutenant criminel au bailliage de Gray (Haute-Saône).

Gouzy (Tarn).

Goyre-Laplanche, bénédictin, vicaire épiscopar constitutionnel (Nièvre).

Granet (Bouches-du-Rhône).

Grangeneuve, avocat à Bordeaux (Gironde). Grégoire (H.), évêque de Blois (Loir-et-Cher).

Greriot, avocat (Jura).

Grosse du Rocher, cultivateur (Mayenne).

Guadet, avocat à Bordeaux (Gironde).

Guohant (Hautes-Pyrénées).

Guérin (Loiret).

Guermeur, juge (Finistère).

Guezno, marchand (Finistère).

Guffroy, avocat (Pas-de-Calais).

Guillemardet (Saone-et-Loire).

Guillerault, avocat (Nièvre).

Guillermiii (Saône-et-Loire).

Guimbertau, juge au tribunal d’Angoulême (Charente).

Guitter (Pyrénées-Orientales).

Gumery (Mont-Blanc).

Guyardin (Haute-Marne).

Guyet-Laprade (Lot-et-Garonne).

Guyez, avocat à Aubusson (Creuse).

Guyomard, négociant à Guingamp (Côtes-duNord).

Guyot (Drôme).

Guyot (Florent), avocat à Semur(Côte-d’Or).

Guyton-Morveau, avocat général au parlement de Dijon (Côte-d’Or),

Hardy, médecin à Rouen (Seine-Inférieure).

Harmand (Meuse).

Haussmann, négociant à Versailles (Seine-et Oise). Havin (Manche). Hecquet (Seine-Inférieure). Henri Larivière, avocat (Calvados). Hentz (Moselle). Hérard (Yonne).

Hérault de Séchelles, avocat du roi au Châtelet (Seine-et-Oise).

Himbert (Seine-et-Marne).

llourier (Eloi)-, Somme.

Hubert (Michel), Manche.

Hugo (Vosges).

CONV

Huguet, évêque constitutionnel du’département de la Creuse. Humbert (Meuse).

Ichon, supérieur de la maison de l’Oratoire, à Condom (Gers).

Ingrand, avocat et administrateur du département de la Vienne.

Isnard, marchand parfumeur à Draguignan (Var).

Isoré (Oise).

Izoard (Hautes-Alpes).

Jae (Gard).

Jacob (Meurthe).

Jacomin (Drôme).

Jagot (Ain).

Jard-Panvilliers, médecin à Niort (Deux-Sèvres).

Jassy, agriculteur, près de Nantes (Loire-Inférieure).

Javoque (Rhône-et-Loire).

Jay de Sainte-Croix (Gironde).

Jean-Bon Saint-André, ministre protestant (Lot.)

Jeannet-Lanoue (Yonne).

Johannot (Haut-Rhin),

Jorrand, notaire (Creuse).

Joubert (Hérault).

Jouenue de Longchamps (Calvados).

Jourdan (Nièvre).

Julien (Drôme).

Julien de Toulouse (Haute-Garonne).

Kercher (Moselle).

Kersaint (le comte de), ancien administrateur du département de la Seine (Seine-et-Oise). Kervélégan, sénéchal (Finistère).

Laà (Basses-Pyrénées).

Labdissière, juge au tribunal deMoissac(Lot).

Lacaze, négociant à Bordeaux (Gironde).

Lacombe (Joseph), curé (Aveyron).

Lacombe Saint-Michel (Tarn).

Lacoste (Cantal).

Lacoste (Élie), médecin (Dordogne).

Lacrampe, avocat (Hautes-Pyrénées).

Lacroix (Haute-Vienne).

Lafon (Corrèze).

Laguire, juge de paix (Gers).

Lahosdinière (Orne).

Laignelot, homme de lettres (Paris).

Lakanal (Ariége).

Lalande, évêque constitutionnel (Meurthe).

Laloue (Puy-de-Dôme).

Laloy (Haute-Marne).

Lamarque, juge au tribunal de Périgueux

(Dordogne). Lambert de Bel-an, juge de paix (Côte-d’Or). Lanjuinais, avocat (llle-et-Vilaine). Lanot (Corrèze).

Lanthenas, médecin (Rhône-et-Loire), Laplaine, président du tribunal d’Audi (Gers). Laporté, avoué au tribunal de Belfort (HautRhin). Laroche (Lot-et-Garonne). Lasource, ministre protestant (Tarn). Laurence-Villedieu (Manche). Laurenceot (Jura). Laurent (Bouches-du-Rhône). Laurent (Lot-et-Garonne). Laurent, médecin (Bas-Rhin). Lavicomterie, homme de lettres (Paris). Lebas (Pas-de-Calais). Leblanc (de Serval), Bouches-du-Rhône.

Lebon, ex-oratorien (Pas-de-Calais).

Lebreton (llle-et-Vilaine).

Lecarlier (Aisne).

Lecarpentier (Manche).

Leclerc (Maine-et-Loire).

Leclerc, avocat et juge de paix à Villedieu (Loir-et-Cher),

Lecointe-Puyraveau, homme de loi à Saint-Maixent (Deux-Sèvres).

Lecointre, marchand de toiles à Versailles (Seine-et-Oise).

Lecomte, employé au tribunal de commerce de Rouen (Seine-Inférieure).

Lefebvre (Julien), Loire-Inférieure.

Lefebvre, propriétaire à Gamache, ex-constituant (Seine-Inférieure).

Letiot (Nièvre).

Lefranc (Landes).

Legendre, boucher (Paris).

Legendre, maître de forges (Nièvre).

Legot, avocat (Calvados).

Lenardy (Morbihan).

Lehault (Sarthe).

Lejeune (Indre).

Lejeune (René-François), Mayenne.

Lemaignant, lieutenant criminel à Baugé, ex-constituant (Maine-et-Loire).

Lemaillaud (Morbihan).

Lemoine (Calvados).

Lemoine (Haute-Loire).

Lemoine (Manche).

Léonard Bourdon, instituteur à Orléans (Loiret).

Lepage, médecin à Montargis (Loiret).

Lepelletier Saint-Fargeau, président à mortier au parlement de Paris (Yonne).

Lequinio, ancien maire de Rennes (Morbihan).

Lesage (Eure-et-Loir).

Lo Sage-Senault (Nord).

Lesterpt-Beauvais, avocat au Dorât, ex-constituant (Haute-Vienne).

Letourneur (Manche).

Letourneur (Sarthe).

Levasseur, procureur-syndic du district de

Toul (Meurthe). Levasseur, chirurgien (Sarthe). Leyris (Gard).

CONVN

Lhématm (Mont-Terrible), ,

Lidon (Corrèze).

Lindet (Jean-Baptiste-Robert), avocat(Eure),

Lindet (Robert-Thomas), évêque constitutionnel du département de l’Eure.

Lion (Guadeloupe).

Litté (Martinique).

Lobinhes, médecin (Aveyron).

Lofticial, ancien lieutenant général au bailliage de Vouvant, ex-constituant (Deux-Sèvres)

Loiseau, chirurgien (Eure-et-Loire).

Lombard Lachaux (Loiret).

Lomoat (Calvados).

Loncle (Côtes-du-Nord).

Longueue (Eure-et-Loir).

Louchet, professeur au collège de Rodez (Aveyron).

Louis, ancien commis de l’intendant d’Alsace (Bas-Rhin).

Louvet, avocat et homme de lettres (Loiret).

Louvet, avocat aux conseils (Somme).

Loysel (Aisne).

Lozeau, négociant (Charente-Inférieure).

Ludot (Aube).

Magniez, propriétaire cultivateur à Bertincourt (Pas-de-Calais). Maignen, administrateur du district de Châ taigneraye (Vendée). Maignet, prêtre (Puy-de-Dôme). Mailhe (Joseph), Cantal, Mailhe, avocat (Haute-Garonne). Mailly (Saône-ct-Loire). Mainvielle (Bouches-du-Rhône). Maisse (Basses-Alpes). Mallarmé, procureur-syndic de Poot-à-Mousson (Meurthe). Mallet (Nord).. Manuel (Paris). Maragon (Aude). Maras (Julien), Eure-et-Loir. Marat, né en Suisse (Paris). Marbos (Drôme). Marcoz (Mont-Blanc). Marec (Finistère).

Maréchal (le), ex-constituant (Eure). Marey jeune, négociant à Nuits (Côte-d’Or). Maribon-Montaut, ancien mousquetaire (Gers). Mariette, avocat à Rouen (Seine-Inférieure). Marin (Mont-Blanc).

Marquis, avocat à Saint-Mihiel, ex-constituant (Meuse). Martel (Allier). • Martin (Somme). Martineau (Vienne). Martinel (Drôme). Marvejoula (Tarn). Massa (Alpes-Maritimes). Massieu, curé de Sergy, ex-constituant, évéque constitutionnel de l’Oise. Masuyer, avocat, juge au tribunal du district

de Louhans (Saone-et-Loire). Mathieu (de Mirampol), Oise. Mauduit (Seine-et-Marne). Maulde-Loisellerie (Charente). Maure aîné, épicier it Auxerre (Yonne). Maurel (Ille-ot-Vilaine). Mazade (Haute-Garonne). Meaulle, président du tribunal civil de Châteuubriant (Loire-Inférieure).

Meillant, bourgeois de Bayonne (Basses-Pyrénées).

Méjaulac (Cantal).

Mellinet (Loire-Inférieure).

Mennesson (Ardennes).

Menuau, juge (Maine-et-Loire).

Mercier, auteur du Tableau de Paris (Seine « et-Oise).

Merlin de Douai, avocat (Nord).

Merlin de Thionville (Moselle).

Merlinot (Ain).

Meyer de Mazarme (Tarn).

Meynard (Dordogne).

Mezade (Haute-Uaronne).

Michaud, avocat (Doubs).

Michel (Meurthe).

Michel (Morbihan).

Michel (Rhône-et-Loire),

Milhaud (Cantal).

Millard (Saône-et-Loire).

Mirande (Cantal).

Mollet (Ain).

Mollevault, avocat à Nancy (Meurthe).,

Monestier, avocat (Lozère).

Monestier, curé de, Saint-Pierre de Clermont (Puy-de-Dôme).

Monnel, curé, ex-constituant (Haute-Marne).

Monnot, avocat (Doubs).

Montégut (Pyrénées-Orientales).

Mont-Gilbert (Saône-et-Loire).

Mont-Mayout (Lot),

Moreau, avocat à Bar (Meuse).

Moreau, ingéuieur à Chalon-sur-Saône (Saôneet-Loire).

Morin, avocat (Aude).

Morisson, avocat (Vendée).

Mottedo, chanoine (Corse).

Moulin (Rhône-et-Loire).

Moysset (Gers).

Musset, curé de Falleron (Vendée).

Neveux (Basses-Pyrénées).

Nioche, avocat à Loches, ex-constituant (Indre-et-Loire).

Niou, ingénieur de la marine à Rochefort (Charente-Inférieure),

Noailly (lîhône-et-Loire).

Noël, avocat (Vosges).

Noguer (Lot-et-Garonne).

Obelin (llle-et-Vilaine). Upoix (Seine-et-Marne).

CONV

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Orléans (le duc d’), dit Égalité (Paris), Osselin’(Paris).

Oudot, commissaire du roi au tribunal dé Beaune (Côte-d’Or).

Pagànel, curé de Noaillac (Lot-et-Garonne).

Panis, homme de lettres (Paris).

Patrin (Rhône-et-Loire).

Payne (Thomas), Pas-de-Calais.

Pelet (Lozère).

Pélissier, médecin (Bouches-du-Rhône).

Pelle (Loiret).

Pelletier (Cher).

l’émartin, avocat àOloron (Basses-Pyrénées).

Pénière (Corrèze).

Pépin (Indre),

Pérard (Maine-et-Loire).

Perducat (Saône-ct-Loire).

Pérès (Gers).

Pérès (Lagesse), av.oeat, ex-constituant (HauteGaronne).

Périès (Aude).

Périès jeune (Aude).

Perrin, négociant à Troyès.

Perrin (Vosges).

Personne (Pas-de-Calais).

Pétion (de Vilieneuve), avocat, ex-constituant (Eure-et-Loir).

Petit (Aisne).

Petit-Jean (Allier).

Peuvergue (Cantal).

Peyre (Basses-Alpes).

Peyssart, garde du corps (Dordogne).

Pfliéger, ex-constituant (Haut-Rhin).

Philippenux, avocat (Sarthe).

Picquè (Hautes-Pyrénées).

Pieri’et (Aube).

Piette (Ardennes).

Pilastre (de la Brardière), ex-constituant (Maine-et-Loire).

Pinel (Manche).

Pinet aîné, administrateur du district de Bergerac (Dordogne),

Piorry, prêtre (Vienne).

Plaichurd-Chottière, médecin (Mayenne).

Plat-Beaupré (Orne).

Plazanet (Corrèze).

Poeholle, professeur de rhétorique à Dieppe (Seine-Inférieure).

Pointe (Noël), Rhône-et-Loire.

Poisson (de Coudreville), Manche.

Pollv (Ile de France).

PomYne (André), Cayenne.

Pons de Verdun (Meuse).

Porcher (de Lissonnay), Indre.

Portier (Indre-et-Loire).

Portiez, avocat (Oise).

Poulain de Boutancourt, maître de forges, exconstituant (Marne).

Poulain-Grandprey, avocat à Nancy (Vosges).

Poultier, bénédictin (Nord).

Précy (Yonne).

Pressavin (Rhône-et-Loire).

Prieur, avocat à Chàlons (Marne).

Prieur-Duvernois (Côte-d’Or).

Primandière, avocat (Sarthe).

Projean (Haute-Garonne).

Prost (Jura).

Prunelle (de Lierre), Isère.

Queinec (Finistère). Quinette (Aisne). Quirot (Doubs).

Rabaud-Pommier (Gard).

Rabaut-Saint-Étienne, ministre de la religion réformée (Aube).

Raffron-Dutrouillet (Paris).

Rameau (Côte-d’Or).

Ramel-Nogaret, avocat du roi (Aude).

Real (Isère).

Rebecqui, membre du département (Bouchesdu-Rhône).

Reguis (Claude-Louis), Basses-Alpes.

Renauld (Manche).

Réveillère-Lepaux (Maine-et-Loire).

Revelle (L.), juge de paix à Veules (SeineInférieure).

Reverchôn, négociant (Saône-et-Loire).

Rewbell, avocat au conseil souverain d’Alsace, ex-constituant (Haut-Rhin).

Reynaud (Haute-Loire),

Riberault (Charente).

Ribet (Manche).

Richard, avocat k la Flèche (Sarthe).

Richaud (Seine-et-Oise).

Richoux (Eure).

Ricord, avocat (Var).

Ritter, juge au tribunal d’Àltkirch (HautRhin).

Rivaud (Haute-Vienne).

Rivery, négociant à Saint-Valéry (Somme).

Rivière (Corrèze).

Roberjot, curé de Mâcon (Saône-et-Loire).

Robert, épicier (Paris).

Robert (Ardennes).

Robespierre ulné (Paris),

Robespierre jeune (Paris).

Robin, cultivateur (Aube).

Rochegude (Tarn).

Rotnme, cultivateur et professeur de mathématiques (Puy-de-Dôme),

Rouault (Morbihan).

Roubaud (Var).

Rougemont (Mont-Terrible).

Rousseau (Paris).

Roussel (Meuse).

Roux (Aveyron).

Roux (Haute-Marne).

Roux-Fazillac (Dordogne/. Rouyer, maire de Béziers (Hérault).

Rouzet (Haute-Garonne).. ; Rovère, marquis de Fonvielle (Bouches-duRhône).

Roy (Seine-et-Oise).

Royer (Ain).

Ruamps, cultivateur (Charente-Inférieure).

Ruault, bénédictin, puis curé d’Yvetot (Seine-Inférieure).

Rudel, avocat (Puy-de-Dôme).

Ruelle (Indre-et-Loire).

Ruhl, administrateur du dép. du Bas-Rhin.

Saint-Just (Aisne).

Saint-Martin, avocat (Ardèche).

Saint-Martin Valogne (Aveyron).

Saint-Prix (Ardèche).

Saladin, avocat à Amiens (Somme).

Salicetti (Corse).

Sallengros, homme de loi à Maubeuge (Nord).

Sallèles, procureur à Cahors (Lot).

Salles, médecin à Vézelise (Meurthe).

Salmon de Mézières (Sarthe).

Saurine, abbé, ex-constituant (Landes).

Sautereau, homme de loi (Nièvre).

Sautaira de Montélimart (Drôme).

Sauvé (Gervais), marchand d’ardoises à Dôle (Manche).

Savary (Eure).

Savary (Orne).

Savornin (Marc-Antoine), Basses-Alpes.

Scellier, marchand de drap à Amiens (Somme).

Seconds, homme de lettres (Aveyron).

Seguin (Doubs).

Sénadon (Basses-Pyrénées).

Sergent, graveur en taille-douce (Paris).

Serres (Hautes-Alpes).

Serres (Île de France).

Serveau (Mayenne),

Servière (Lozère).

Servonat (Isère).

Sévestre (Achille), Ille-et-Vilaine.

Siblot, médecin (Haute-Saône).

Sieyès, chanoine et vicaire général de l’évêque de Chartres, ex-constituant (Sarthe).

Sillery (Alex. Brulard de Gondis), Somme.

Simon, vicaire général de l’évêque de Strasbourg (Bas-Rhin).

Soloniac, avocat (Tarn).

Soubrany, officier au régiment de Royal-Dragons (Puy-de-Dôme).

Souhait (Julien), Vosges.

Soulignac (Haute-Vienne).

Taillefer, médecin (Dordogne).

Tallien (Seine-et-Oise).

Talot (Maine-et-Loire).

Tavaud (Calvados).

Tavernel (Gard).

Tellier, avocat du roi à Melun, ex-constituant (Seine-et-Marne).

Terral (Tarn).

Texier-Mortegonte (Creuse).

Thabaud (Indre).

Thibaudeau, avocat à Poitiers (Vienne).

Thibault, curé, ex-constituant, évêque constitutionnel du Cantal.

Thirion (Moselle).

Thirriet (Ardennes).

Thomas (Orne).

Thomas (Paris).

Thuriot La Rosière, avocat (Marne).

Tocquot, cultivateur (Meuse).

Topsent (Eure).

Toulouse (Ardèche).

Tournier (Aude).

Tréhouart ([Ile-et-Vilaine).

Treilhard, avocat, ex-constituant (Seine-et-Oise).

Triboulai (Tarn).

Trullard, ingénieur (Côte-rd’Or).

Turreau-Linières (Yonne).

Vadier (Ariége).

Valdruche (Haute-Marne).

Vallée (Eure).

Vardon (Calvados).

Varlet, lieutenant-colonel du génie (Pas-de-Calais).

Vasseur (Somme)

Vaucher (Denis), Jura.

Veau (Indre-et-Loire).

Venaille (Loir-et-Cher).

Vénard (Seine-et-Oise).

Verdollin (Basses-Alpes).

Vergniaud, avocat à Bordeaux. (Gironde).

Vermon (Ardennes).

Vernery, avocat (Doubs).

Vernier, avocat à Lons-le-Saunier (Jura).

Vidal (Basses-Pyrénées).

Vidalin, imprimeur-libraire à Moulins (Allier).

Vidalot, avocat et juge à Valence (Lot-et-Garonne).

Viennet (Hérault).

Vigneron, procureur-syndic du département de la Haute-Saône.

Villars, év. constitutionnel de Laval (Mayenne).

Villers (Loire-Inférieure).

Villetard (Yonne).

Villette (Charles), poète (Oise).

Vincent (Seine-Inférieure).

Vinet (Charente-Inférieure).

Viquy (Seine-et-Marne).

Vitet, médecin (Rhône-et-Loire).

Voulland (Henri), avocat, ex-constituant (Gard).

Waudelincourt, principal au collège de Verdun (Haute-Marne).

Yger, avocat à Cany (Seine-Inférieure). Ysabeau, oratorien (Indre-et-Loire). Yzarn, dit Valady (Aveyron).

Zangiacomi fils (Meurthe).