Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/Amphigouri (jeu de l')

Administration du grand dictionnaire universel (1, part. 1p. 299).

AMPHIGOURI (Jeu de l'>, petit jeu de société, qui devient très-amusant lorsqu’il se joue dans une réunion de personnes d éducation et de caractère différents, car le trait et les’naïvetés y provoquent également le rire. Mais il est essentiel qu’une de ces personnes, au moins, joigne a une grande facilité d’invention, a une imagination riche et vive, un talent réel de conteur, car c’est elle seule qui fait presque tous les frais de ce jeu d’esprit, et qui doit amener les incidents, les surprises comiques, par le tour habile de son récit. Les autres n’ont qu’à lui fournir des matériaux et a lui donner la réplique. Chaque joueur, à l’exception du coryphée, se choisit un état, un métier, une profession à sa convenance. Par exemple, l’un dit : Je suis pâtissier ; un second, soldat ; les autres, perruquier, chapelier, marchand de volailles, cordonnier, etc. ; une dame ou une demoiselle sera lingère, fruitière, etc. Le conteur fait alors appel à toute son imagination, et brode une histoire dans le goût de celle qui va suivre. — Chaque fois qu’il suspend sa phrase en regardant un des joueurs, celui-ci doit la compléter aussitôt par le nom d’une chose appartenant à sa profession. S’il hésite, ou s’il nomme deux fois le même objet, il doit donner un gage. — Le conteur commence : « Ce matin on frappe à ma porte ; je me hâte de mettre ma... (d regarde le perruquier, qui dit :) perruque pour aller ouvrir.’ C’était mon cousin et sa femme, deux provinciaux, deux... Cl regarde la fruitière) cornichons, qui arrivaient pour me voir. Mon cousin était abrité par un immense... Ce chapelier) bolivar ; ma cousine était coiffée d’un... Ce soldat) shako. J’étais tellement surpris, que je ne pouvais reprendre... Ce cordonnier) alêne. Mon Dieu ! ns-je, en joignant les... Ce marchand de volailles) abatis, que vous êtes d’aimables... (la fruitière) navets ! Nous nous sautons mutuellement au... Ce perruquier) toupet, et nous nous embrassons. Mon cousin était un drôle de... Ce soldat) pistolet, long et plat comme un... (lalingère) ruban, le nez •’en... Ce cordonnier) forme de... Ce pâtissier) brioche ; ma cousine avait la tournure.gracieuse d’une... (la fruitière) citrouille. Nous sortons. À peine dans la rue, un... Ce soldat) bancal me marche sur... (la fruitière)’oignon. La colère me rendit blanc comme une... (la fruitière) cerne, puis rouge comme de... Ce pâtissier) la farine. J’avais grande envie do lui envoyer un coup de... Ce perruquier) peigne ; mais ma cousine se trouve mal de peur, nous la portons dans un... Ce pâtissier) four pour la rafraîchir, et nous lui desserrons le... (le marchand de volailles) gésier pour qu’elle n’étouffe pas. Mon cousin était furieux ; il voulait se battre avec le maladroit à coups de... (la fruitière) pommes de terre, etc. » On comprend qu’une pareille histoire, au talent près, peut devenir le livre des Mille et une Nuits.