Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/ARNAULT (Antoine-Vincent), poëte tragique et littérateur

Administration du grand dictionnaire universel (1, part. 2p. 674).

ARNAULT (Antoine-Vincent), poëte tragique et littérateur, né à Paris en 1760, mort en 1834. Déjà connu par quelques poésies, il débuta au théâtre, en 1791, par sa tragédie de Marius à Minturnes, qui eut un succès éclatant, et qui fut bientôt suivie de celle de Lucrèce, assez froidement reçue. Attaché dès sa jeunesse à la maison du comte de Provence, et dévoué à la monarchie, malgré les sentiments républicains exprimés dans ses tragédies, le jeune poète émigra, peut-être à regret, après les sanglantes journées de septembre ; mais il ne tarda pas à rentrer en France, s’attacha au général Bonaparte, qu’il accompagna en Italie, et qui le chargea d’organiser le gouvernement des Îles Ioniennes. À son retour, il fut nommé chef de la division d’instruction publique au ministère de l’intérieur, puis secrétaire général de l’Université. Exilé en 1816 par les Bourbons, pour avoir fait partie de la chambre des représentants pendant les Cent-Jours, et éliminé de l’Académie, où il avait été admis en 1799, Arnault obtint pourtant son rappel en 1819, rentra à l’Académie en 1829, et en devint le secrétaire perpétuel à la mort d’Andrieux.

Outre les deux tragédies citées plus haut, ce poëte en a donné quelques autres : les Vénitiens (1798), qui eurent un succès justifié par des situations dramatiques, des pensées fortes et un style d’une mâle simplicité ; Germanicus ; Don Pèdre ou le Roi et le Laboureur ; Scipion ; les Guelfes et les Gibelins, etc. On a aussi de lui un recueil de fables originales et spirituelles, dont il a inventé tous les sujets, et qui portent l’empreinte de son génie un peu satirique. C’est ce caractère que M. Villemain exprimait finement lorsqu’il disait : « En les lisant, on ne s’arrête pas à chaque page en disant : le bonhomme ! mais on dira toujours l’honnête homme ! » Le successeur d’Arnault à l’Académie, M. Scribe, faisait également allusion à cette causticité dans son discours : « C’est Juvénal fabuliste… On a reproché à Florian d’avoir mis dans ses bergeries trop de moutons ; peut-être dans les fables de M. Arnault y a-t-il trop de loups. » Un plaisant avait écrit au bas de son buste : « Passez vite, car il mord. » Parmi les autres écrits d’Arnault, il faut citer encore : Vie politique et militaire de Napoléon, travail fort remarquable ; Mon Portefeuille, ou Critiques philosophiques et littéraires ; Poésies et Mélanges ; une collaboration, peut-être plus nominale que réelle, à la Biographie nouvelle des contemporains (avec Jay, Jouy et Norvins) ; enfin des mémoires intéressants sous le titre de Souvenirs d’un sexagénaire, dont il a paru 4 vol. (Paris, 1833, in-8°), qui vont jusqu’au commencement de l’empire. La suite est demeurée inédite. Arnault a été porté sur le testament de Napoléon pour une somme de cent mille francs.