Germinal (Pouget)
GERMINAL
Germinal ! Rien que le nom vous ragaillardit, nom d’une pipe ! Il semble qu’on entend les nouvelles pousses crever leur coque et sortir leur nez vert hors de terre.
Ce chouette mois nous amènera le printemps, — et l’espoir des beaux jours. Rien que l’espoir, hélas !… Faudra pas trop se presser de faire la nique à l’hiver. En Germinal, y a le premier avril, et gare au poisson, foutre ! Les bons amis chercheront à nous monter le job, et le frio pourra bien s’aviser de nous geler le pif et de semer du grésil où il y a que faire.
Des croquants, assez finauds pour se mordre les oreilles, chausseront des lunettes bleues pour foutre en déroute la lune rousse : malgré cette riche précaution, qu’ils ne s’épatent pas trop, si leurs bourgeons sont fricassés.
Pour se rattraper, ceux-là sèmeront des citrouilles. Comme s’il n’y en avait déjà pas assez d’espèces, depuis les actionnaires du Panama, jusqu’aux abouleurs des emprunts Russes.
Les vaches s’en iront aux prés, et quoique bouffant de la verdure, elle continueront à fienter noir.
Des vaches qui, pour n’avoir que deux pattes, mériteront rudement qu’on les envoie paître, ce sont les proprios. En Germinal, de même qu’à chaque renouvellement de saison, leur fête tombera sur la gueule des parigots.
Qué tristesse, cette maudite fête !
Certes, les déménageurs à la cloche de bois ne chômeront pas, et les bouifles auront un turbin du diable pour rapetasser les bouts des grolons, usés à botter le cul des vautours.
Ça ne ronflera pourtant pas suffisamment. À preuve, que beaucoup de désespérés ne trouveront pas d’autre moyen de se dépêtrer de leur vampire qu’en allumant un réchaud de charbon.
Et Germinal mentira à son nom : au lieu de faire pousser la vie, il aura fait germer la mort !