George Sand, son œuvre — sa vie littéraire

La Normandie littéraireannée 15, tomes 7-8, numéros 1 à 11 (p. 10-20).

George SAND

SON ŒUVRE — SA VIE LITTÉRAIRE


I

George Sand donna la célébrité à un nom dans lequel tout était faux et sous lequel se masquaient son nom véritable et son sexe. Étrange nature que la sienne où se heurtaient tant d’aspirations ! On eût dit je ne sais quel ressouvenir de son ascendance à la fois royale et vulgaire.

Elle avait, pour aïeul, Frédéric-Auguste, l’électeur de Saxe, roi de Pologne, et pour arrière grand’mère la belle comtesse Aurore de Kœnigsmark, femme hautaine et passionnée, la mère de Maurice de Saxe. De cette illustre ascendance, G. Sand tenait peut-être les côtés aristocratiques de sa nature. Ceux qui l’ont vue beaucoup rapportent qu’elle avait dans le maintien, dans l’attache fine de ses pieds et de ses mains petites à l’excès, ce qui fait la race. De ces grands seigneurs, elle avait la généreuse prodigalité de nature, le mépris de l’argent, une sorte de dignité qui la fit toujours respecter à Nohant, où, malgré ses originalités, on la considérait comme la dame du pays.

Le bouillant Maréchal de Saxe et Marie Rinteau, une actrice plus connue sous le nom de demoiselle de Verrières (d’autres ancêtres de G. Sand aussi) eurent une fille, Marie-Aurore de Saxe, comtesse de Horn d’abord, devenue plus tard Mme Dupin de Francueil. Comme nous retrouverons chez G. Sand le côté factice, théâtral, faux où se devine la petite fille de la comédienne ! Quelle facilité chez elle au débraillé, quelle absence de tenue, quelles exagérations !

Mme Dupin de Francueil, la fille du héros de Fontenoy, la grand’mère et l’éducatrice de G. Sand, à la fois égalitaire et grande dame, irreligieuse, philosophe, artiste, était une châtelaine distinguée, « aux grands airs pleins d’aisance et de bonté protectrice. » De son mari, un ancien fermier général, le type du vieillard galant, enjoué et parfumé, elle eut un fils, Maurice Dupin.

Celui-ci, bon soldat, nommé lieutenant sur le champ de bataille de Marengo, était un jeune homme artiste et guerrier. Il pensait un peu à la manière d’Alfred de Vigny, et comme lui vénérait la grandeur et respectait la servitude du métier des armes, car ils ont senti vraiment l’âme de la Patrie, ceux qui ont vu et vécu l’épopée impériale. Maurice Dupin était d’un esprit mal pondéré, mais très sensible aux délicatesses de l’art. Il adorait sa mère, croyait la respecter infiniment, et cependant ne répugnait pas à lui écrire ses aventures galantes. Il fit connaissance, à Milan, d’une petite bourgeoise, presque d’une ouvrière de Paris, Sophie-Victoire-Antoinette Delaborde qu’il épousa. G. Sand, venue au monde juste à temps pour être enfant légitime (situation assez rare dans sa famille, jusqu’alors) n’était pas sans ressembler à sa mère, femme ardente, faible, jalouse, naïve, pleine de contrastes, enfant du peuple, enfant du vieux pavé de Paris.

Amantine-Lucile-Aurore Dupin naquit en 1804 ; très jeune, elle suivit à l’armée son père et sa mère qui accompagnaient Murat en Espagne ; elle y séjourna quelque temps, et revint en France, à Nohant, auprès de sa grand-mère qu’elle quitta peu désormais. De ses premières années d’enfance passées dans un intérieur souvent troublé, toujours triste, il lui resta quelque chose « d’accablé ». « Les circonstances, a-t-elle dit, lui avaient trop souvent fait oublier qu’elle était une enfant ».

Elle a noté dans des pages ravissantes ses émotions, ses impressions d’enfant ; elle redit ses plus lointains souvenirs : elle rappelle ses jeux, sa joie en voyant pour la première fois un fil de la Vierge, sa première émotion musicale en écoutant au loin les sons d’un flageolet, ses terreurs de petite fille, l’effet que lui fit la chanson :

    Nous n’irons plus aux bois
    Les lauriers sont coupés.

De suite, elle évoquait ce bois qu’elle avait rêvé merveilleux, comme un pays enchanteur et qui, tout d’un coup, lui apparaissait, jonché des lauriers dont il était dépouillé. Et à cet âge, elle ne connaissait, dit-elle, ni les bois, ni les lauriers.

Elle parlait encore du sentiment de la solitude qu’elle avait compris et aimé pour la première fois dans le vaste palais de Madrid où siégeait Murat, pendant qu’elle s’amusait dans les grands salons déserts avec les joujoux délaissés des Infants. Elle arrivait ainsi à exalter en elle une sensibilité qui deviendrait plus tard un défaut et une qualité de sa vie, puisque l’homme vaut surtout par sa puissance de souffrir et de sentir. Toute enfant, elle récitait ses prières sans nulle attention, sans rien comprendre que ces seuls mots : Mon Dieu ! je vous donne mon cœur ! Que de fois, depuis, elle donna ce pauvre cœur à d’autres qu’à Dieu.

Chez Aurore, enfant, les jeux étaient de vraies hallucinations : elle incarnait les histoires qu’elle se plaisait à imaginer : elle s’est délectée des contes de fée, des contes de Mme d’Aulnay et d’une vieille édition de Perrault ; la poésie de la mythologie la charmait. Elle détestait Berquin et appréciait Mme de Genlis, « cette bonne dame qu’on a trop oubliée ». Elle a prétendu un jour qu’elle devait peut-être ses premiers instincts socialistes à Mme de Genlis dont le roman des Battuécas l’avait impressionnée. L’institutrice et l’amie de Louis-Philippe eût été surprise et confuse d’un tel aveu. George Sand se comprit mieux le jour où elle reconnut que tous ses instincts lui étaient venus de sa naissance « à cheval » entre deux classes, des contrastes de sa vie d’enfant, de son éducation tourmentée entre sa grand’mère, la vieille femme aux préjugés de noblesse imbue de philosophie, grande dame, et sa mère, la femme du siècle nouveau, presque femme du peuple. Toutefois, elle sut gré à sa mère de « n’avoir jamais démoli l’édifice enchanté de son imagination », et de lui avoir donné les premières notions de la vie « conformes aux besoins intellectuels que lui avait créés la nature[1] ».

Sa grand’mère lui inculqua un goût esthétique très raffiné. Elle passait de longues heures aux pieds de la vieille madame Dupin, qui d’une pauvre voix cassée lui lisait à la dérobée les anciens opéras du XVIIIe siècle. « C’était, disait-elle, de la belle musique, admirablement comprise et sentie[2] ».

Aurore fut mise au couvent, elle échappa ainsi au spectacle pénible des rapports, toujours très tendus, qui existaient entre sa mère et sa grand’mère. Elle oublia vite sa famille : exaltée par une religieuse d’Écosse, elle songea à prendre le voile. Elle annonça la grande nouvelle à cette charmante mère Alicia, sa maîtresse préférée, celle qu’elle aimait, et dont le pur regard l’impressionnait délicieusement et lui était comme une conscience. Mais la mère Alicia l’éclaira avec justesse et douceur et lui expliqua que les crises de dévotion écloses par les soirs de printemps, quand on a quinze ans, ne sont pas des signes infaillibles de vocation. Elle la renvoya aux conseils pleins de sagesse de son vieux confesseur, le saint abbé de Prémord, qui rassurait de son mieux les inquiétudes et les tourments de cette âme déjà tumultueuse. Comme la vie allait changer l’enfant mystique du couvent des Anglaises ?

Comment reconnaître la compagne de sœur Hélène[3] dans la femme de 1863, qui se vante d’avoir laissé son fils se marier civilement, et qui avance sur Jésus et la religion catholique des affirmations haineuses. Quelle inconséquence, quand, en 1872, elle félicitera l’ex-père Hyacinthe d’avoir rompu avec l’Église ! Elle reprochait au catholicisme ses doctrines anti-sociales, mais elle oubliait que le Jésus, dont elle feint alors d’ignorer l’évangile, eut le premier pitié des foules malheureuses et qu’il prêcha la divine charité inconnue avant lui. Elle était plus juste, le jour où elle écrivait, sous forme de boutade, que le chef d’État rêvé devrait avoir le génie de Napoléon et le cœur de Jésus.

Elle était cependant croyante à sa façon et s’était forgé une religion personnelle. Elle n’acceptait d’ailleurs rien de ce qui l’effrayait ou la gênait. Ce qu’elle appelle « la fiction de l’enfer » la révoltait. Elle préférait de beaucoup le dogme de la Rédemption et trouvait une douceur immense à cette idée que tous les hommes étaient frères et se trouvaient sauvés par la force et l’efficacité d’un même amour divin. Elle écrivait dans la seconde moitié de sa vie « La doctrine éternelle des croyants, le Dieu bon, l’âme immortelle et les espérances de l’autre vie, voilà ce qui en moi a résisté à tout examen, à toute discussion et même à des intervalles de doute désespéré[4] ».

Si elle a porté sur l’avenir des regards plus avides que ne le permettait l’Église, elle n’a pas abjuré, dit-elle, la plus belle partie des vérités évangéliques.

On a soutenu qu’elle fut « une catholique inconsciente » malgré ses déclamations injustes et sa haine irraisonnée contre la Papauté. Oui, mais quel triste exemple fut le sien. Elle ne pardonnait pas à Lamartine d’avoir conservé ses croyances intactes. Elle a écrit au prince Napoléon ou au pasteur de Strasbourg telles ou telles lettres qu’on aimerait à retrancher de sa Correspondance. Elle ne craint pas, ce qui est indigne d’elle, d’accumuler, dans beaucoup de ses livres, les railleries souvent équivoques sur les moines paresseux, sur les chapelains gourmands, sur tout ce personnel usé, voué d’avance au ridicule, et qui maintenant n’égaie même plus les imbroglios d’opérettes. Alors elle n’est plus elle-même. On la préfère, quand malgré tout, au souvenir de je ne sais quel passé, au son lointain de je ne sais quelles cloches de Pâques qui viennent tinter à son cœur, elle jette un de ces cris de foi souvent mystique, quand elle se retourne vers Dieu, « auquel j’ai « toujours cru, dit-elle, même dans le temps où je ne l’aimais plus, que j’aime aujourd’hui qu’il m’apparaît sous l’idée de bonté infinie, Dieu dans le sein duquel je veux retourner pour qu’il me fasse renaître meilleure. »

On est alors tenté de redire le mot de la mère Alicia mourante à laquelle on racontait tous les écarts de conduite et de plume de son ancienne élève : « Bah ! Bah ! je suis bien sûre qu’elle aime Dieu ! »

Il faut se rappeler qu’elle a souffert et qu’ici-bas les âmes opprimées ont droit à l’indulgence. Elle eut des heures de foi et de regret. L’Église la bénit après sa mort et elle repose en terre consacrée. Pourquoi donc la juger trop sévèrement et pourquoi ne serait-elle pas, comme elle l’espérait, passée « pardonnée sous la grande herse du jugement dernier. »[5]

Lorsqu’elle fut sortie du couvent, encore très jeune et très ignorante, Aurore s’en revint à Nohant, auprès de sa grand’mère qu’elle se mit à aimer et à soigner. Mais les journées étaient longues dans le fond du Berry, et pour les occuper elle vécut de la vie des champs, approvisionnant ainsi tout un trésor de sensations champêtres qu’elle traduirait plus tard dans les plus jolis de ses romans. Elle travaillait aussi beaucoup, passant une partie de ses nuits à lire, et elle lisait sans ordre, sans distinction, avec une avidité dangereuse. Elle portait en elle déjà, le « trouble des âmes généreuses inassouvies » ; elle était un « être de pur sentiment et de pure imagination », comme le lui disait plus tard, en la raillant doucement, son ami Michel de Bourges. Elle s’éprit de la nature et l’aima d’instinct, « autant pour ses modesties adorables que pour ses grandeurs terrifiantes. » [6] Son imagination s’élançait dans le monde infini des visions. Elle aimait à regarder au loin les brumes qui tremblent et qu’elle peuplait des créations de son rêve. Elle allait par les chemins, au lever ou au déclin du jour, et dans la clarté indécise des brouillards elle se créait un univers elle se perdait dans l’horizon, « cette patrie des âmes inquiètes ». Dans toutes ses œuvres, elle a mêlé les hommes à la nature partout, elle a cherché d’abord la poésie il lui en fallut toujours, « de celle qu’on boit dans l’enfance et sans savoir quel nom on lui donne. »

Personne, autour d’elle, ne se doutait à cette époque, pendant les longs mois de solitude passés à Nohant, du ferment poétique qui germait dans son esprit. On la croyait un peu niaise. Et puis, elle se faisait si patiente et si câline avec la pauvre aïeule qui s’en allait lentement ! On ne lui supposait vraiment aucune autre préoccupation.

La mort de sa grand’mère lui fut une douleur profonde qu’elle supporta en apparence simplement mais dans cette circonstance, elle s’exalta cependant d’une manière étrange, de complicité avec un vieil ami de sa famille, l’ancien précepteur de son frère, Deschartes. Elle se rendit avec lui, pendant la nuit de Noël, jusqu’au cimetière contigu du parc : elle descendit dans la fosse entr’ouverte où le lendemain sa grand’mère allait être étendue, où reposait son père, et soulevant le cercueil disjoint déjà par le temps, elle déposa un baiser sur la tête refroidie de ce père mort trop jeune et dont la vision adorée l’avait hantée si souvent !

Après ce deuil ressenti cruellement, elle dut suivre sa mère à Paris, mais elle vécut dans un milieu qui la fit souffrir, et quand les propositions de mariage arrivèrent, elle se décida sans réflexion.


II

Elle épousa le baron Dudevant et alla vivre avec lui à Nohant. Elle accepta d’abord sans résistance les allures autoritaires de son mari. Mais son orgueil silencieux et indomptable devait la conduire vite à la révolte en présence des froissements forcés qui accompagnent l’existence de deux êtres rivés ensemble lorsqu’ils ne se comprennent ni ne s’aiment. « J’étais, dit-elle, une liane voyageuse des grandes mers, et on m’a mise sous une cloche de jardin ». Comment enlacer en effet, et retenir par des liens forcés, la plante indépendante et fugace venue on ne sait de quelles profondeurs, et qui, plus capricieuse que les vagues, se ploie à leurs moindres mouvements ? Elle pensa exclusivement au début de son mariage aux deux maternités successives qui l’occupèrent pendant quelques années. Cependant, malgré son désir sincère et sincèrement exprimé de vivre en bonne intelligence avec son mari, l’entente ne parvint jamais à s’établir entre leurs deux natures trop dissemblables. En pareille occurence le devoir était simple pourtant : patienter jusqu’au jour où, la vie commune étant devenue intolérable, il faudrait prendre le grave parti de la séparation. Vivre ensuite dans la retraite.

Mais la passion d’écrire lui était déjà venue. Lasse des dégoûts éprouvés dans son intérieur, elle a résolu de suivre la carrière littéraire.

Qui sait même si déjà certaines influences ne se faisaient pas sentir ? Bref, elle commet la grosse faute de sa vie elle quitte le baron Dudevant et va vivre sans lui à Paris.

À quoi tiennent les destinées, et que serait devenue la sienne si son mari l’avait comprise, l’avait dirigée sans violence et avait laissé un peu de liberté et de plein air à son libre tempérament. Elle se serait contentée, peut-être, de beaucoup monter à cheval, de beaucoup chasser et de beaucoup tricoter. Elle commença, en 1831, sa vie de gamin, entrecoupée, paraît-il, de certains retours de dévotion : elle quitta son nom et se baptisa elle-même non sans audace ; elle courut les théâtres, fréquenta le quartier latin, vêtue en homme, la cigarette aux lèvres. Le parfum romantique qui grisait toutes les têtes acheva de la perdre : elle vécut dans le faux, oublieuse de ses devoirs oublieuse des convenances. Elle se lia avec les artistes et les écrivains de son temps et devint peu à peu la commensale et l’amie de Delacroix, Delatouche, Balzac, Buloz, de Sainte-Beuve « la chère et précieuse lumière de sa vie[7]. »,

Entre temps, ce qui devait arriver, arriva. Elle resta toujours une mère très aimante, très attachée à ses enfants, mais elle cessa d’être une honnête femme. Elle se lia avec Jules Sandeau, liaison d’étudiants pour ainsi dire dans laquelle l’auteur de Mariana apporta toute sa tendresse discrète, prévenante et passionnée à la fois, chaque jour un peu plus épris de son amour, car G. Sand était sinon fort belle, du moins extrêmement attachante avec son regard d’une beauté surprenante, si tendre et si terrible à la fois. Ceux qui en avaient été caressés ou repoussés ne l’oubliaient jamais. Henri Heine[8] a tracé d’elle un portrait physique très flatteur. Il paraît que sa taille mignonne, sa main d’une perfection achevée, ses épais cheveux noirs, ses grands yeux sombres et scrutateurs d’où s’échappait une flamme intérieure, dont tout son visage s’éclairait, lui donnaient un charme très rare et très personnel[9].

Dès cette époque, elle travaille beaucoup ; le jour, elle lisait, étudiait ; la nuit elle écrivait. Ses maîtres préférés furent Leibnitz, Lessing, Herder, Quinet, Reynaud. Elle se passionne pour Lamennais et subit d’une façon fâcheuse l’influence de Pierre Leroux. En général, M. d’Haussonville l’a bien fait remarquer[10], elle se laissa dominer par des intelligences qui ne valaient pas la sienne. Elle se perdit dans les dissertations les plus confuses et écrivit quelques livres de morale soi-disant sociale et humanitaire[11] qui resteront la part la moins lue et la moins intéressante de son œuvre. On a dit d’elle alors spirituellement « qu’elle se poudrait de rouge. »

Il faut reconnaître cependant qu’il y avait en elle un véritable amour des opprimés et des malheureux : elle avait la grande pitié de ceux qui souffrent : les inégalités sociales lui donnaient parfois des crises de découragement, et « les douleurs immémoriales » de la terre la trouvaient profondément compatissante.

George Sand fut gagnée par ce mal qui fit tant de victimes et dont elle fut une des plus illustres blessées la maladie du romantisme, la maladie byronienne. Ce fut son malheur. Elle personnifia pour un temps son héroïne Lélia, la femme désabusée, poétique et fausse. Elle voulut mettre en pratique les sentiments de la littérature de son temps. Elle clamait partout qu’elle cherchait le fantôme de la tendresse idéale, sans voir qu’elle se laissait aller surtout aux excès de la passion. Ce fut l’époque de sa liaison avec Musset, de ce court mais retentissant roman d’amour dont on a pu dire qu’il fut le plus grand du siècle. Cette liaison ne fut pas longue, en effet, d’août 1833 à avril 1834, de septembre 1834 à mars 1835. Mais elle affola Musset et fit de lui, on peut le dire, le chantre éploré des Nuits : elle fit cruellement souffrir G. Sand. À la suite d’une rencontre fortuite dans un dîner, ils comprirent qu’ils s’appartenaient déjà. Le doux Jules Sandeau fut éconduit et vite oublié. Certains contemporains nous ont représenté la G. Sand de cette époque comme une froide et adorable statue qui glaçait l’âme de ceux qui avaient osé l’aimer. Ils ont prétendu qu’elle notait avec calme les angoisses des autres ; ils l’ont dépeinte comme une femme dangereuse et dont il devient impossible de se dégager ? N’est-il pas plus vrai de penser qu’elle fut simplement une femme ardente et malheureuse, mais non pas la créature impassible, la Cybèle forte et invulnérable qui ne s’émeut d’aucune douleur ? Ils lui ont reproché à juste titre sa manie des phrases mystiques pour les faits naturels de l’amour, car son langage était souvent en contradiction complète avec ses actes : elle parle, avec une insistance qui étonne, de son dégoût des affections sensuelles, et se perd dans des digressions sans fin sur la dignité humaine : elle est sentencieuse, doctrinale même aux heures les plus équivoques. Quel fut le mobile de son départ avec Musset, quand abandonnant tout, elle s’enfuit vers les rives embaumées de l’Adriatique, sous le ciel de Venise, comme pour mieux protéger son amour ? Qui lui conseilla cette grande et suprême audace ? N’est-ce pas ce démon[12] que toute femme malheureuse a près d’elle et qui prend la forme d’un ange pour lui crier ces mots si doux au cœur de tous les êtres jeunes : l’Amour, le Bonheur, la Vie, la Jeunesse, autant de perspectives insaisissables, déjà disparues quand on croit les tenir, ou qui s’éloignent à l’infini, pareilles à ces mirages des grands déserts qui trompent et activent la fièvre des voyageurs. Que de victimes sur la route… ! Tous deux, G. Sand et Musset, tombèrent blessés sur le chemin de leur amour. Inquiets et jaloux, l’un et l’autre, ils passèrent leur temps à s’offenser et à se trahir. Ce n’étaient qu’insultes, ruptures d’un jour, désavouées le lendemain.

Remplis de crainte et assiégés de soupçons ils mélangeaient l’outrage à leurs plus chères caresses, et dans l’intervalle de scènes redoutables ils échangeaient une correspondance d’amants.

On a beaucoup écrit sur cette liaison fameuse[13]. Les uns et les autres ont fait au public des confidences partiales et indiscrètes. Le souvenir des jours vécus ensemble né quitta jamais ceux qui s’étaient tant aimés et les rendit meilleurs peut-être. Plus d’une fois, G. Sand protesta éloquemment contre certaines assertions injustes ou blessantes des défenseurs de Musset[14].

III

Après la rupture définitive, G. Sand parla de mourir. Elle revint à Nohant dans la vieille maison familiale où tous les souvenirs d’antan la ressaisirent ; elle regarda ses enfants, et « l’instinct » la fit demeurer auprès d’eux. Au lendemain de cette grande crise, elle trouva l’apaisement dans le travail. Écrire était devenu pour elle un remède aux agitations et aux souffrances extérieures. Elle envisageait le labeur incessant et souvent funeste de son esprit, comme une moralisation de sa vie. Elle cherchait, sans y réussir, à réhabiliter ses sentiments par ses doctrines. Mais l’heure des égarements n’était pas encore passée : ce fut l’époque de sa longue intimité avec Chopin, de la camaraderie avec Litz et tant d’autres artistes du temps. Pour la définir durant cette période on pourrait lui appliquer ces mots que, dans une pièce curieuse de son théâtre, elle prête à Molière, se demandant : qu’est-ce que l’homme ? Elle nous apparaît, en effet, comme « un être qui s’étourdit et se lamente, sans jamais trouver le calme de son jugement ou le repos de son cœur. Toujours la douleur au fond de la gaieté, et le désespoir même dans l’ivresse. »

Au milieu de cette existence confuse, elle travaillait cependant. Elle menait de front le roman et le théâtre, les articles de journaux, de critique et d’art, les relations de voyage : elle étudiait, entre temps, l’histoire naturelle[15], et se dépensait dans des conceptions de tout genre. Classer des livres si divers serait bien difficile. L’auteur eût été fort embarrassé sans doute de faire une telle classification.

Il est une œuvre, d’abord, qu’il faut signaler à part : c’est Lélia. Mme Sand s’est dépeinte, dans Lélia, le type de la femme blessée de la réalité, vivant de désirs incessants, mais qui se détournerait de ses rêves si elle en voyait la réalisation. Elle parle alors avec révolte des inexorables préjugés du monde, elle qui les foulait si légèrement aux pieds. Il y a comme un déchaînement de romantisme dans cette œuvre touffue ; mais, à côté d’épisodes inextricables, il y a des passages grandioses qui classent G. Sand au rang des meilleurs écrivains de l’époque.

Elle se trouva rarement emportée par un tel souffle lyrique et se livra le plus souvent aux préoccupations personnelles, religieuses ou morales qui la troublaient sur le moment.

Que de fois, sous des formes différentes, n’a-t-elle pas traité le problème du mariage ? Et sa manière de traiter un tel sujet est l’un des plus sérieux griefs de beaucoup de critiques. Elle connaît peu les ménages heureux, et les jeunes qui puiseraient l’expérience de leur vie dans ses romans, risqueraient surtout d’y puiser un profond découragement ; en tous cas, ils garderaient d’une telle lecture une notion fausse de l’équilibre vrai qui doit maintenir nos sentiments.

Qui voyons-nous dans sa triste galerie conjugale ?

André, le caractère faible, bon et doux peut-être, mais qui, par horreur de la lutte, accepte tout et sacrifie sa femme.

Jacques, l’homme supérieur, doué d’une étrange faculté de souffrance, marié à une enfant qu’il adore, mais qu’il corrompt moralement par sa manie de l’analyse : il l’abandonne à ses penchants et la laisse seule un jour en se suicidant par lassitude.

Valvèdre, le philosophe à l’âme grande, le type de ces hommes chers à G. Sand, qui excusent les pires folies de leur femme et les leur expliquent avec une compassion toute apostolique, le mari hors nature, très malheureux, en résumé, et rendant sa femme plus malheureuse encore.

Comme il faut augurer tristement des mariages qu’elle conclut ! Césarine Diétrich est cynique, quand, la veille de son mariage avec un indifférent, elle va trouver l’homme qu’elle aime et s’offre à lui.

Valentine, la jeune fille de race, ose bien s’éprendre du neveu de son métayer. Elle aura sans doute le cœur soulevé au bout de peu de temps par les habitudes villageoises de son mari. Gageons qu’elle lui reprochera bientôt de sentir l’étable.

La jolie petite comtesse d’Estrelle, du roman d’Antonia, regrettera plus d’une fois aussi, avec son jeune peintre, Julien Thierry, sa grande existence d’autrefois[16].

Nous n’osons pas croire, non plus, que le ménage du chanteur Adriani et celui de Constance Verrier, soient unis très longtemps.

Et si tous ces intérieurs n’offrent pas l’exemple du bonheur stable, c’est qu’ils reposent sur des situations fausses. G. Sand voulait imposer cette idée peu pratique dans la réalité, de la possibilité du mariage entre personnes qui ne sont ni du même rang ni de la même caste.[17] M. Nisard allait jusqu’à dire que la ruine des maris, ou tout au moins leur impopularité, tel avait été le but des ouvrages de G. Sand. Elle a pour théorie, sans doute, que le cœur d’aucun homme ne cache le trésor et la puissance de l’amour, que les femmes seules croient à ce divin sentiment et le poursuivent. Elle a même, un jour, écrit ces mots, qui étaient comme un ressouvenir de sa vie, et comme un anathème jeté à un homicide qu’elle connait « Il y a toujours dans la vie d’une femme un homme qui remplit l’horrible mission de tuer l’amour dans son cœur. »

Une fois l’heure de la tourmente morale passée, on peut dire de ses romans qu’ils étaient surtout des exagérations de plume et des vengeances de femme regrettant une situation fausse. En réalité, elle ne voulait pas être si nuisible qu’on le lui a reproché « Je n’ai cherché à détruire que des choses menteuses et impies : le faux amour, la fausse piété, le faux mariage, la fausse vertu »[18].

Certes, elle était indulgente pour les unions libres et renouvelées à fréquente échéance. Elle s’indigne peu dans Horace du milieu de grisettes où elle nous conduit. Mais il lui est arrivé de parler éloquemment et avec un respect ému de l’amour dans le mariage : elle a constaté qu’il est possible de vivre heureux et unis, de s’aimer assez pour supporter la vie, malgré ses épreuves, sans ressentir jamais ni satiété ni ennui. Sa conclusion de Jean de la Roche est une apologie de la toute puissance et de la douceur qui résident dans l’union consacrée de deux âmes.

Elle écrit souvent dans le but de prêcher et d’exposer des idées qui la préoccupent : ainsi dans le Piccinindo, elle donne libre cours à ses théories sur la noblesse. Elle la combat, et cependant elle l’aime ; elle considère la noblesse privilégiée comme une injustice, mais les traditions et les souvenirs de famille ont à ses yeux beaucoup de force, de poésie et d’utilité. Elle hait la bourgeoisie et les enrichis ; elle dresse un autel au peuple, à ceux qu’elle dit investis de la « dignité » d’artisan.

Pourquoi a-t-elle publié ce livre inquiétant de Mlle de la Quitinie. Ce n’est, certes, pas seulement pour dépeindre, de main d’ouvrier, les admirables paysages de la Savoie, le lac du Bourget, et ses bords sauvages. Elle a voulu réveiller surtout son vieux levain de haine contre le clergé, et faire une charge à fond sur « le joug du prêtre ». Elle avait cette utopie persistante d’une religion personnelle : elle nous l’expose dans un habile plaidoyer où le vrai et le faux se côtoient adroitement et laissent le lecteur comme incertain. Elle parle contre le célibat des prêtres, contre la confession, contre la croyance à l’enfer, et, trompée par l’exemple de Lamennais, elle développe dans de longues tirades ses théories sur les droits et les devoirs de la conscience. Mais ces discussions font péniblement sourire sur les lèvres de Mlle Quintinie, si pieuse, si mystique d’abord, qu’elle annonce son intention d’entrer au couvent, mais qui peu de semaines après se maria civilement.

G. Sand a disserté dans ses livres sur les instincts divers qui remuent le cœur de l’homme : l’amour, le doute, l’injustice des inégalités sociales, la philosophie, la passion, la politique : elle a discuté de nombreux problèmes psychologiques, mais en général la solution qu’elle leur donne n’est pas juste. Elle s’est bien définie, le jour où elle écrivait : « J’ai pressé mon imagination de produire sans m’inquiéter du concours de ma raison. Il se peut que j’aie le cœur fatigué, l’esprit abusé par une vie aventureuse et des idées fausses. »[19]

Elle manque aussi de sens critique il n’y a pas toujours d’unité dans l’ensemble de chaque œuvre : Quand elle commence le récit d’une intrigue, elle ignore elle-même où la conduiront ses personnages. « Je me rends peu compte de ce que je fais, dit-elle, et j’ai aujourd’hui, comme à quatre ans, un laisser-aller invincible dans ce genre de créations »[20]. Elle aime la « sinuosité » exagérée des événements. Ainsi, comment prévoir que Consuelo, la petite chanteuse des arcades de Venise, la mignonne amie d’Arzoleto, deviendra plus tard la Comtesse de Rudolstadt et traversera d’innombrables péripéties en Bohême, à Berlin ou à Vienne ?

Dans Christian Waldo, une œuvre qu’elle affectionnait (on a dit même que Christian Waldo était la personnification de son fils), nous lui reprocherons encore ce défaut d’unité qui l’amène à greffer plusieurs histoires ensemble, mais, malgré tout, on se laisse docilement et agréablement mener par elle[21].

Le tendre et mélancolique merle blanc du joli conte de Musset définissait ainsi sa passagère compagne[22] :

« Tandis que je composais mes poèmes, elle barbouillait des rames de papier… Elle pondait ses romans avec une facilité presque égale à la mienne, choisissant toujours les sujets les plus dramatiques : des parricides, des rapts, des meurtres et même jusqu’à des filouteries, ayant toujours soin en passant d’attaquer le gouvernement et de prêcher l’émancipation des merlettes. En un mot, aucun effort ne coûtait à son esprit, aucun tour de force à sa pudeur ; il ne lui arrivait jamais de rayer une ligne ni de faire un plan avant de se mettre à l’œuvre. »

G. Sand savait toutefois que son talent lui imposait une mission et un devoir : elle voulut être, et elle fut une vulgarisatrice de l’art et des sentiments ; elle parle souvent avec noblesse de la mission de l’artiste, de ses sensations, de ses joies, de ses souffrances. Elle pensait qu’en dépit des amertumes de la célébrité, il fallait se sacrifier aux autres et utiliser son expérience au profit de tous. Comment écrire sans rien mettre de son cœur dans son œuvre, sans même se donner tout entier ?[23] Son ambition était d’agir sur ses contemporains et de leur « faire partager son idéal de douceur et de poésie »[24]. Elle méprisait, en littérature, les caprices de la mode ; elle n’avait pas les tendances égoïstes de Flaubert, bien qu’au fond elle ne fût pas si éloignée de partager quelques-unes de ses convictions. Toutes ses préférences étaient pour l’idéal dont elle avait le culte, mais elle était réaliste, si par réalisme, il faut entendre que tout est du ressort de l’artiste. La théorie du roman, chez elle pourrait se résumer ainsi : Idéaliser le sentiment qui fait le sujet de l’œuvre, mais laisser à l’auteur toute latitude de placer ce sujet dans des conditions et dans un cadre de réalité qui le feront ressortir. En un mot, se laisser enseigner par la vie et bien retenir « qu’il n’y a qu’une vérité dans l’art, le beau ; qu’une vérité dans la morale, le bien ; qu’une vérité dans la politique, le juste. »[25]

G. Sand, on est unanime à le reconnaître, a atteint la perfection littéraire dans ses livres champêtres[26]. En cette matière, elle est vraiment grande et ne saurait être surpassée : ses descriptions de l’Auvergne, de la Suisse, de la Savoie, de l’Italie, du Berry, sont des chefs-d’œuvre. Certaines de ses pages sont comme une explication des plus belles toiles de Millet ou de Rosa Bonheur. D’après M. d’Haussonville[27], l’action de G. Sand paysagiste se serait fait sentir dans le domaine de la peinture, et Dupré, Rousseau, Breton, Daubigny lui devraient beaucoup ; il y a, en effet, dans son paysage, de l’abondance et de la simplicité, de la vérité et de l’éclat. Elle a très bien saisi cette vague intuition de poésie chez les gens de campagne ; il n’y a qu’à lire son adorable paysannerie de La Petite Fadette et dans La Mare aux Diables, ce récit d’une nuit dans la forêt, et le portrait du laboureur aux champs. Elle peint avec une science toute féminine l’éveil délicieux des idées d’amour qui remplissent subitement le cœur de Germain, le paysan de vingt-huit ans, veuf, pour la petite Marie, âgée de seize ans. Elle rend avec un art charmant ce qu’ont d’impérieux, de profond, d’absolu, ces sentiments, chez les simples de cœur, incapables de subtiliser leurs impressions, mais qui sentent vivement quand même.

Quelle grâce rustique dans sa Claudie une des plus jolies figure de son théâtre ! Quelle poésie champêtre émane de ce tableau de la Gerbaude ! Quelle habileté dans la manière de faire parler les paysans et de leur prêter ces vieux mots de terroir si remplis de saveur ! G. Sand n’a pas, toujours été aussi bien inspirée au théâtre. Elle avait trop d’expansion pour un genre où la concision et la netteté sont nécessaires. « Elle a fait de patients efforts, écrit-elle, pour introduire la pensée du spectateur dans un monde plus pur et mieux inspiré que le triste et dur courant de la vie terre à terre. » Mais la patience et l’effort se devinent trop.

Heureuse dans son Mariage de Victorine, comédie charmante, digne d’enrichir l’œuvre de Sedaine, elle avait besoin le plus souvent de collaborations amies pour triompher sur la scène. Mais son bagage n’est-il pas assez lourd. Sa grande renommée littéraire n’aura pas à souffrir des succès relatifs et très contestables de son théâtre[28].

IV

George Sand valait mieux que ses œuvres, trop souvent hardies et curieuses, et il est préférable de la juger, moins d’après ses romans ou ses pièces, que d’après certains livres tels que la Correspondance, l’Histoire de ma Vie, les Lettres d’un Voyageur ; dans ces œuvres plus intimes, on reconnaît non-seulement l’admirable écrivain, mais on devine souvent un grand esprit et un grand cœur.

Ses plus jolies lettres, adressées à Maurice et Solange enfants, sont remplies de mots d’une tendresse ravissante. Si prise de chagrin et d’angoisse soit-elle, Mme Sand reste gaie avec ses enfants, elle se reprocherait d’arrêter ou d’assombrir la chanson joyeuse de sa chère couvée. « La vie est une suite de coups dans le cœur. Mais le devoir est là : il faut marcher et faire sa tâche sans contrister ceux qui souffrent avec nous »[29].

Il faut la juger en particulier dans sa correspondance avec son fils : la lettre suivante doit lui faire pardonner beaucoup de lignes injustes ou inutiles.

« Travaille, sois fort, sois fier, sois indépendant ; méprise les petites vexations attribuées à ton âge. Réserve ta force de résistance pour des actes et contre des faits qui en vaudront la peine. Ces temps viendront. Si je n’y suis plus, pense à moi qui ai souffert et travaille gai

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ement. Nous nous ressemblons d’âme et de visage. Je sais dès aujourd’hui quelle sera ta vie intellectuelle. Je crains pour toi bien des douleurs profondes ; j’espère pour toi des joies bien pures. Garde en toi le trésor de la bonté. Sache donner sans hésitation, perdre sans regret, acquérir sans lâcheté. Sache mettre dans ton cœur le bonheur de ceux que tu aimes à la place de celui qui te manquera. Garde l’espérance d’une autre vie : c’est là que les mères retrouveront leurs fils. Aime toutes les créatures de Dieu. Pardonne à celles qui sont disgraciées, résiste à celles qui sont indignes, dévoue-toi à celles qui sont grandes par la vertu. Aime-moi. Je t’apprendrais bien des choses si nous vivions ensemble, si nous ne sommes pas appelés à ce bonheur (le plus grand qui puisse m’arriver, le seul qui me fasse désirer une longue vie), tu prieras Dieu pour moi, et, du sein de la mort, s’il reste dans l’univers quelque chose de moi, l’ombre de ta mère veillera sur toi ».[30]

Elle chérissait tendrement son fils, l’ami le plus sûr, et le meilleur appui moral de sa vie très isolée et très désolée. Elle pensait tout haut avec lui elle lui parlait de leurs travaux différents, discutant les sujets, lui racontant toute son existence. Elle vécut le plus possible à ses côtés, et l’héroïne amère de 1833 se transforma peu à peu en une bonne et simple grand’mère. Elle aima avec passion

ses petits-enfants et souffrit des disparitions qui dévastèrent son foyer. Au lendemain d’une mort cruelle, elle écrivait à ses enfants :[31]

» Combattez l’amertume, mes pauvres enfants. Ayez le malheur doux et n’accusez pas Dieu. Il vous a donné un an de bonheur et d’espoir. Il a repris dans son sein qui est l’amour universel, le bien qu’il vous avait donné il vous le rendra sous d’autre traits. »

Elle répétait toujours, et avec une poignante éloquence, qu’il fallait avoir la douleur bonne, et surtout qu’il ne fallait jamais accepter le désespoir comme un hôte à demeure. « Il faut toujours se relever, ramasser, rassembler les lambeaux de son cœur, accrochés à toutes les ronces du chemin et aller à Dieu avec ce sanglant trophée. »[32] Elle comprenait la douleur d’une façon très sereine et très haute et pensait que le malheur est fait surtout pour les cœurs d’élite. C’était une grande résignée. « Résignons-nous notre cause et notre but nous est inconnu, mais ils sont l’œuvre et le vouloir de Dieu. Ils ne peuvent donc être mauvais. » Elle avait de la force pour se reprendre à la vie et au dévouement ; elle savait que l’âme des morts aimés demeure éternelle et présente, et à chaque nouvelle épreuve elle se réfugie dans cette pensée « Se retrouver ailleurs est la récompense ; pour la mériter nous devons faire marcher ensemble le courage et le souvenir, le regret tendre et l’espérance vaillante. » [33]

Elle avait une délicatesse exquise pour plaindre les cœurs brisés quand la mort avait interrompu de chères et profondes affections : elle s’appliquait à garder vis-à-vis des autres une grande sérénité, et elle réalisa bien ce mot que lui dit un jour, quand elle était toute petite fille, Mme de Pardaillan, la vieille amie de sa grand’mère : « Soyez toujours bonne, ma pauvre enfant, car ce sera votre seul bonheur en ce monde. » Elle s’imposa de fort peu penser à elle et de plus songer aux douleurs d’autrui qu’aux siennes propres.

Elle avait de l’amitié un sentiment profond : elle en comprenait avec une rare minutie de tendresse les joies et les bonheurs. Elle l’envisageait si belle, la douce et sainte amitié, et les lignes écrites par elle sous l’empire d’idées semblables sont plus précieuses que tant de pages plus connues dans lesquelles, par exemple, elle discutera brillamment quelque problème littéraire avec Flaubert. Elle est supérieure lorsqu’elle oublie tout à fait son métier d’écrivain et laisse ingénûment parler son cœur.

Dans sa correspondance, George Sand compatit à toutes les souffrances humaines ; elle eût même, il faut le reconnaître, je ne sais quelle prescience des exigences sociales à la fin de son siècle, et longtemps d’avance elle entendit le cri de détresse, devenu presque menaçant aujourd’hui et qui viendrait remuer, bouleverser peut-être, l’ordre de choses établi. À lire les lettres de George Sand, on serait tenté de croire qu’elle fût sans orgueil, ce qui n’est pas. Mais elle fut bienveillante et ne tranchait jamais de sa supériorité. Elle acceptait toutes les tâches les plus modestes de la femme, et quand l’heure des égarements passionnés fut achevée, elle se trouva presque toujours présente devant les devoirs de la vie. Il y avait, en elle, un peu de la philosophie sereine du bonhomme Patience, son philosophe, sans le savoir, de Mauprat, cet être réfléchi, bon, simple, qui goûtait si fort « la pauvre liberté du bon Dieu, la nature, et le silence des nuits fleuries d’étoiles. » Elle n’eut de volonté qu’en une chose ne pas se laisser submerger par le chagrin et le désespoir de ce monde. Elle fut tendre, droite, généreuse. Elle n’eut ni amertume ni envie et restait étonnée de l’aversion des autres car elle croyait bien ne haïr personne.

Mme Sand répète beaucoup, avec une sorte d’ostentation : Je suis simple, je ne suis pas habile, je suis bourgeoise et niaise.[34] Et c’était vrai. On a bien dit du grand Corneille qu’il était simple et naïf. Elle fut amenée à faire des concessions au milieu artiste où elle vécut trop, mais au fond, elle était femme d’intérieur et tenait le goût du « home de son père et de sa mère, le petit ménage pauvre et si amoureux.

Mais elle n’avait aucune idée des convenances et elle eut le tort de mépriser l’opinion. Le monde se vengea en blâmant, sans réserve, l’intérieur qu’elle se créa de 1840 à 1848, pendant les huit dernières années de la vie de retraite de Nohant, quand elle se fit la garde malade de Chopin. Le monde lui reprocha sans pitié Chopin et d’autres hôtes du même genre, accueillis à la légère devant ses enfants, et Châteaubriand, parlant d’elle, prétendait que l’insulte à la rectitude de la vie ne saurait aller plus loin. Elle a reconnu dans ses heures d’aveu que sa conduite fut pleine de fautes et qu’aucune philosophie n’en autorisait l’exemple.

Il reste bien difficile de porter un seul jugement sur G. Sand. D’un côté, nous voyons une femme qui déserte le domicile conjugal : elle va mener à Paris la vie d’étudiant, fait des confusions de mots et de sentiments choquantes dans des livres souvent dangereux, défie bruyamment l’opinion par une situation d’existence bruyamment fausse. Comment ne pas la blâmer ? Mais d’autre part, comment ne pas accorder sa sympathie à la femme apaisée qui écrivait l’Histoire de ma Vie, à l’aïeule oublieuse d’elle-même, à la grand-mère attentive, uniquement préoccupée des joies et des peines de sa famille, vivant désormais d’affection et de « dévouements formidables ». « Nul ne peut se dispenser d’un très grand courage pour accepter la mission d’aimer, de souffrir et de se dévouer sans relâche. »[35] M. Claretie avait donc raison d’écrire que chez Mme Sand l’admirable bonté de l’aïeule a doucement, comme avec un sourire, réfuté les tirades mêmes de la révoltée.

Pour bien comprendre G. Sand il faut songer à sa race, à son éducation heurtée et abandonnée, à ses secousses d’enfant, à ses épreuves de jeune fille et de jeune femme.

Une des plus curieuses parties de sa Correspondance[36] est consacrée à ses protégés, à ses enfants spirituels. Elle eut une influence certaine sur toute une génération d’âmes pensives et littéraires qui venaient à elle dans les circonstances troublantes. C’était une Directrice de conscience littéraire. On lui soumettait les cas embarrassants : on lui chuchotait une demande de conseils, et avec la condescendance et l’autorité bienveillantes du confesseur, elle répondait toujours. Pans un certain groupe, elle était investie d’une sorte d’infaillibilité morale. Elle connaissait le monde en effet, et se trouvait souvent à même de répondre. Elle savait que c’est une rude besogne, de prendre son cœur et de le faire obéir. Elle savait le prix dont toute joie s’achète : elle se rappelait que le plus sûr moyen d’arriver à la paix était d’abjurer tout bonheur personnel et d’accepter l’existence telle que Dieu l’a voulue pour chacun de nous. Il faut lire ses lettres au poëte Poncy, à Flaubert, à Madame Adam, dont l’intelligence ardente et séduisante l’avait charmée de suite, et à d’autres moins connus aussi, car elle ne rebutait personne. Dans une étrange manie de maternité, elle appelait tous ses interlocuteurs : mon cher enfant. Elle abuse toujours de ce mot unique. « Dans tous les sentiments, tous les amours de ma vie, il y a quelque chose de la passion maternelle, quelque chose de la passion protectrice qui nous fait croire que ceux qu’on aime nous appartiennent davantage. »[37]

Gambetta, très malmené par Mme Sand dans le Journal d’un Voyageur pendant la guerre, répliquait malicieusement « Si Mme Sand m’avait connu, je suis sûr que nous aurions été très vite bons amis ; nous étions faits pour nous entendre. Elle m’aurait bientôt appelé son fils.[38]

Elle prêche le travail et se donne en exemple « Pour faire un peu de miel, dit-elle imprudemment, il faut avoir sucré toutes les fleurs de la prairie. » Mais l’abeille qui va se griser au fond des calices fleuris, sait qu’il en est d’empoisonnés et les évite afin que son miel reste chose saine et savoureuse. Reprochons à G. Sand d’avoir goûté trop avidement à certains sucs empoisonnés qui ont souvent rendu son œuvre très dangereuse et très fausse.

Mme Sand fut poëte et femme, et ces deux qualités la résument. Elle était poëte déjà, quand petite enfant, elle regardait longuement les paysages, quand plus tard, au couvent, elle allait à la recherche d’extases se blottir à la chapelle, « émue des profonds silences du soir, » curieuse de voir les belles religieuses prosternées dans leurs stalles, ou, lorsque seule en cachette, elle se glissait dans le petit cimetière, ombragé de grands arbres et tout parfumé de roses et de jasmins. Poëte encore, quand jeune fille, elle rêvait de longues heures, laissant à son cheval la bride sur le cou pendant qu’elle parcourait les bois et les champs qui environnaient Nohant. Du poëte, elle avait ce don léger et brillant de la fantaisie, Traviata disait un joli mot de la Grèce, qui nous représente tout un monde de fictions ailées et vaporeuses comme devait en faire éclore, dans l’imagination, ce soleil tant aimé dont les rayons doraient les coteaux de l’Attique. Elle avait une tendance à sacrifier l’idée à la passion et à s’abandonner sans prudence aux caprices et aux hardiesses puissantes de son imagination. Elle avait le don de l’enthousiasme qui dégénéra trop souvent en utopies et en déclamations, mais qui lui inspira d’admirables mouvements d’éloquence. Elle avait une sympathie ardente pour la nature. Elle était artiste. Toute musique la faisait vibrer, que ce fussent les étincelantes improvisations de Litzt les mélancolies splendides de Chopin où les compositions rustiques des joueurs de cornemuse et des pâtres de la Vallée-Noire. Les belles œuvres de peinture et de sculpture la charmaient également et nous savons que les merveilles de Delacroix, ou les « délicatesses vaporeuses » de Corot « avec leurs airs vagues de rêve l’impressionnaient[39].

Elle était poëte enfin par l’invincible besoin du rêve qui la dominait et lui faisait envisager la vie sous un prisme trompeur. Dès l’enfance, elle avait contracté l’habitude de la rêverie. Personne n’a plus rêvé et moins agi qu’elle. Henri Heine[40] qui la nomme également « une belle amazône littéraire » la croit notre plus grande poëte en prose il la trouve supérieure à Victor-Hugo. On la rapprocherait mieux de Lamartine pour l’inépuisable facilité avec laquelle ils écrivaient l’un en prose et l’autre en vers, mais tous deux pour arriver au même résultat car si l’instrument différait, l’un et l’autre n’en produisaient pas moins des œuvres également musicales et harmonieuses. « Ils furent des artistes de nature : ils étaient nés grands écrivains : ils l’étaient dès la première page. » [41]

Et puis, Madame Sand était femme aussi et de la femme elle eut toutes les faiblesses. On lui reprocha d’avoir eu le cœur mouvant comme le sable des grèves de Venise tant foulées par elle, aux heures équivoques de sa vie, quand, par les nuits heureuses, elle allait écouter en rêvant les barcaroles des pêcheurs de l’Adriatique ou les roulades que se lançaient des balcons les rossignols apprivoisés. Shakespeare l’eût accusée d’avoir une âme « changeante comme l’opâle aux mille couleurs ».

De la femme, elle eut la bonté, la compassion avec des nuances exquises de tendresse. Cette bonté et cette sensibilité ont été la cause de nombreuses erreurs pour elle, la cause de son adhésion aux théories humanitaires dont elle ne percevait pas le danger sous leur vernis d’humanité. Madame Sand fut bien femme encore en ce sens que, dans ses livres, elle avait peur du vrai sens des mots ; elle n’en connaissait pas toujours la valeur ; elle les maniait et les disposait à sa guise. Elle aimait à se mettre en scène et à se révolter contre la situation imposée par le monde aux épouses transfuges de leurs devoirs. Elle prétend que l’amour purifie tout. Mais beaucoup de ses paradoxes sur la religion, sur la société, sur le mariage sont des phrases de créature nerveuse, vexée, car au fond cette femme si trompée par la vie, et qui dissertait si faussement dans ses romans « concevait le mariage tel que l’a fait Jésus et tel que l’a expliqué saint Paul ». M. Nisard n’en avait pas moins raison de penser qu’il eût été peut-être « plus héroïque à qui n’avait pas eu le bon lot, de ne pas scandaliser le monde avec son malheur en faisant d’un cas privé une question sociale ».

Ses œuvres ont encore ces qualités toutes féminines : la grâce et l’élégance, la mobilité de pensée et de sentiment, la variété et l’exubérance dans le récit. Que de digressions délicieuses dans ses livres, inutiles souvent, mais charmantes ! Que de jolies pages sur les fleurs, sur les oiseaux, sur tous ces riens de la nature qui sont la poésie et le sourire des choses ! Arsène Houssaye prétend que, moralement, l’auteur d’Indiana fut un homme. Certes, G. Sand avait les goûts et l’intelligence virils, mais elle avait surtout le cœur et le tempérament féminins.

Ses livres, toujours impatiemment attendus, faisaient autrefois la terreur et la joie des âmes candides. Aussi, la jugera-t-on mieux maintenant qu’à l’heure où ses ouvrages paraissaient. On la jugera mieux, en comprenant que si elle se trompa et trompa beaucoup, elle était en réalité une de ces femmes que le cœur seul peut égarer. Et chacun conserve, pour ces égarements-là, je ne sais quelle secrète réserve d’indulgence. Et puis, les femmes que remue la passion d’écrire, pensent-elles le faire impunément ?

Certes, tout ne restera pas des œuvres de l’intarissable écrivain, et beaucoup de ses livres, si discutés à son époque, iront rejoindre tout cet amas d’œuvres qui dorment maintenant oubliées à jamais dans le passé. Mais une part demeurera la plus vivante, celle où Mme Sand a mis ce qu’il y avait de meilleur en elle, son admiration naïve, confiante, éperdue de la nature, celle enfin où elle s’est mise, elle, la femme enthousiaste, faite de sympathie, de dévouement, de courage fier. Quelques romans resteront aussi, plus justement fameux par la hardiesse des thèses, dans lesquels le grand écrivain aura plus largement dépensé la magie de son style, car la plus grande force, le plus grand attrait de G. Sand est ce style qu’il faut admirer et connaître pour l’honneur de notre langue, qui, sans être ni très ample ni très profond, est d’une souplesse et d’une limpidité merveilleuses.

Georges Maze-Sencier
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  1. Histoire de ma vie.
  2. G. Sand connaissait à fond la musique du xviiie siècle si oubliée maintenant ; elle a eu l’occasion d’en parler avec éloquence dans de longs passages de « Consuelo », de la « Comtesse de Rudolstadt, « d’Adriani ».
  3. Sœur converse du couvent, des Anglaises.
  4. Histoire de ma vie, t. VIII, p. 172.
  5. Lettres d’un voyageur, p. 310
  6. Lettres d’nn Voyageur, p. 6.
  7. Ex-dono de Valvèdre
  8. Lire Lutèce
  9. Lire Lui ! par Me Louise Colet.
  10. G. Sand, par M. d’Haussonville. Revue des deux Mondes 15 fév. et 15 mars 1878.
  11. Le compagnon du Tour de France, le Meunier d’Angibault, le Pêché de M. Antoine, Horace.
  12. Lire : Lettres d’un Voyageur
  13. Sur cette partie de la vie de G. Sand, consulter : Lettres d’un Voyageur, Elle et Lui, par G. Sand ; les Confessions d’un Enfant du Siècle, par A. de Musset ; Lui et Elle, par P. de Musset ; Musset par Arvède Barine. (1)
  14. Voir : Lettres d’un Voyageur, I p.22. Préface de J. de la Rocher, 1er octobre 1859.
  15. Elle étudie toute sa vie les sciences naturelles qu’elle connaissait à fond et dont elle jugeait la connaissance indispensable à qui veut écrire. Elle a longuement parlé de cette branche des sciences dans « Valvèdre, » l’ « Homme de Neige, » « Promenades autour d’un Village. »
  16. Il est à remarquer que les jeunes filles de G. Sand sont d’une hardiesse et d’une indépendance sans égales ; le plus souvent elles sont fantasques ou originales ; il en est peu d’aussi sympathique que Mlle de Saint-Genieix. (Marquis de Villemer.)
  17. Voir les théories du mariage dans La Confession d’une jeune fille… En général les situations les plus osées n’effraient ni ne froissent G. Sand (ainsi, François le Champi).
  18. Lettre au docteur Guépdin, 1840.
  19. Lettre d’un voyageur, L. IV, p. 101.
  20. Histoire de ma vie, T. IV, p. 90.
  21. On peut, à l’occasion de ce roman, faire remarquer que G. Sand a un vrai don d’évocation pour parler de pays et de milieux qu’elle ignore. Dans l’Homme de Neige, elle décrit le Dalécarlie comme une vraie Scandinave.
  22. Histoire d’un Merle Blanc. — Contes de Musset.
  23. Lettre à Flaubert, 8 décembre 1872.
  24. Histoire de ma vie.
  25. Lettre à Flaubert, 2 fév. 1863.
  26. M. Brunetière regarde comme une injustice cette admiration unanime qui s’attache avec éclat à un très petit nombre d’œuvres d’un genre spécial, et semble faire l’ombre sur tant de romans très remarquables, bien que moins vantés et moins connus.
  27. G. Sand, par M. d’Haussonville.
  28. Préface de Cosim, voir théâtre complet.
  29. Lettre à Flaubert, septembre 1875.
  30. Correspondance. Lettre du 18 juin 1833.
  31. Corresp. Lettre du 25 juillet 1864.
  32. Corresp. 15 janvier 1865. – Voir également : Ses Lettres à marie.
  33. Corresp. 27 février 1862.
  34. (1) La note spirituelle manque à G. Sand dans ses œuvres : elle ne sait pas plaisanter.
  35. Lettre du 30 juillet 1870.
  36. Barbey d’Aurevilly est très dur pour la Correspondance, à ce sujet il conteste à Mme Sand toute race et lui trouve l’esprit commun. Le grand gentilhomme ne pardonnait sans doute pas à une femme de son monde par certains côtés d’avoir fait si peu de cas des privilèges de naissance et de noblesse.
  37. ?? Lettre citée dans Mes Souvenirs par Henri Amic.
  38. Rapporté dans les Souvenirs par Henri Amic.
  39. On se demande, comment ainsi douée, elle resta insensible au charme, mélancolique sans doute, mais envahissant de la nature et de l’art à Rome.
  40. Lutèce.
  41. Caro, ouvrage sur G. Sand. Collection des grands écrivains.