Livre I
Gaspard de la nuitMercure de France (p. 45-46).


I

HARLEM


Quand d’Amsterdam le coq d’or chantera,
La poule d’or de Harlem pondera.

Les Centuries de Nostradamus.


Harlem, cette admirable bambochade qui résume l’école flamande, Harlem peint par Jean Breughel, Peeter Neef, David Téniers et Paul Rembrandt ;

Et le canal où l’eau bleue tremble, et l’église où le vitrage d’or flamboie, et le stoël[1] où sèche le linge au soleil, et les toits, verts de houblon ;

Et les cigognes qui battent des ailes autour de l’horloge de la ville, tendant le col du haut des airs et recevant dans leur bec les gouttes de pluie ;

Et l’insouciant bourguemestre qui caresse de la main son menton double, et l’amoureux fleuriste qui maigrit, l’œil attaché à une tulipe ;

Et la bohémienne qui se pâme sur sa mandoline, et le vieillard qui joue du Rommelpot[2], et l’enfant qui enfle une vessie ;

Et les buveurs qui fument dans l’estaminet borgne, et la servante de l’hôtellerie qui accroche à la fenêtre un faisan mort.



  1. Balcon de pierre.
  2. Instrument de musique.