Imprimerie Poupart-Davyl et Cie (p. 41-43).

V


Lorsque, au fond des déserts de l’ardente Syrie,
Échappant à la mort que le simoun charrie,

Le voyageur perdu dans le sable mouvant,
Les pieds ensanglantés, aveuglé par le vent,
L’écume sur la lèvre et la gorge altérée,
Aperçoit l’oasis longuement désirée,
Les gazons verdoyants sous les ombrages frais,
Les bambous élancés, les bananiers épais,
Les fruits mûrs suspendus en grappes savoureuses,
Et les fleurs du lotus et les citernes creuses,
Levant les bras au ciel, éclatant en sanglots,
Il se traîne mourant vers ces vivantes eaux.
Plus de morne horizon, de décevant mirage,
Un repos bienfaisant ranime son courage,
Il ne se souvient plus du mal qu’il a souffert.
Ah ! tu marchais aussi, Framès, dans un désert !
Parmi les désespoirs aux sombres solitudes,
Les désillusions, les tristes lassitudes.

Et les cuisants remords venus avant le temps,
Comme un désespéré tu traînais tes trente ans
Tu cherchais la fraîcheur des amours virginales :
Or, cette jeune enfant, aux grâces idéales,
Fut la verte oasis où tu crus retrouvés
Tous les bonheurs perdus, tous les bonheurs rêvés.