Fleurs de France/Lettre à l’auteur

Fleurs de FranceAlfred Mame et fils (p. 9-10).

LETTRE

DE MGR MERMILLOD, ÉVÊQUE D’HÉBRON
À L’AUTEUR




Ferney, 22 septembre, fête de saint Maurice.


Madame,

J’ai lu avec le plus grand charme vos Neiges d’antan et Hyacinthe Rigaud. Vous avez trouvé le secret d’allier à des récits simples, qui semblent des réalités vivantes, toute l’émotion des fictions dramatiques. Les faits se déroulent, les caractères se révèlent avec une originalité qui n’exclut pas le naturel. En vous lisant, l’esprit et le cœur ont de douces jouissances ; l’âme se sent rassérénée, parce qu’elle a vécu dans une atmosphère de lumière, de paix et de force chrétiennes. Vous avez réussi, me semble-t-il, à nous donner des pages dont nul ne contestera la valeur littéraire. Nous avons besoin, devant un public religieux qui grandit chaque jour, d’avoir des livres utiles et attrayants, car il faut à tout prix écarter les productions corruptrices, comme aussi certaines publications qui se disent religieuses et qui ne sont que fades et puériles.

Je sais que vous n’avez livré que vos premiers travaux ; il vous reste dans vos portefeuilles bien des pages que je crois supérieures à celles que vos lecteurs connaissent. Je ne suis pas indiscret en réclamant vos Légendes de Trianon. Vous l’avez écrit : « Les légendes sont les fleurs de l’histoire. Elles éclosent à nos yeux lorsque, après avoir étudié les livres, les monuments, les traditions, nous voyons resplendir dans une clarté soudaine ce qui fut beau, vivant, harmonieux autrefois. Alors le passé se ranime, de même que les caractères tracés avec une encre invisible apparaissent sur le vélin à l’approche de la flamme ; et nous entendons une voix intérieure nous faire un récit. Ce récit coloré, cette parlante apparition, c’est la légende. Elle présente la forme glorieuse des faits et des personnages, et, accentuant le vrai sens de l’histoire, le fixe à jamais dans la mémoire des peuples. »

Le sacrifice et l’art chrétien sont naturalisés à votre foyer ; continuez donc à creuser et à ensemencer ce sillon où naissent des fleurs et mûrissent des fruits pour la sainte Église de Dieu.

Agréez, Madame, avec mes remerciements et mes vœux, l’expression de mes sentiments dévoués en Notre-Seigneur.

† GASPARD,
Évêque d’Hébron, vicaire apostolique de Genève.