Fables originales/Livre IV/Fable 09

Edouard Dentu (p. 99-100).

FABLE IX.

Le Rossignol.


Un rossignol amateur de musique,
Compose un soir une ode symphonique.
Gluck et Mozard maëstro d’outre-Rhin
Eussent rêvé d’ouïr ce chant divin.
Il ravira le dillettante artiste.
Il séduira l’habile instrumentiste.

Le rossignol pourtant demeurait étonné
Que sur harpe et musette il ne fut pas joué.
Il s’étonnait à tort : le merle, la fauvette,
Le pinson, le tarin, le moineau, l’alouette,
Jaloux de son talent contre lui conspiraient ;
Ne soufflaient mot de l’ode, ou pis, la dénigraient.
L’ode inexécutée,
L’écho ne redit pas la musique enchantée.
Rossignol meurt. Soudain en chœur,
Avec accords, avec ardeur,
Tous les oiseaux des verts bocages
Chantèrent ses savantes pages.

De Berlioz il eut le sort ;
Il fut célèbre après sa mort.