Fables d’Ésope (trad. Chambry, 1927)/Le Lion, le Loup et le Renard

Pour les autres éditions de ce texte, voir Le Lion, le Loup et le Renard.

Traduction par Émile Chambry.
FablesSociété d’édition « Les Belles Lettres » (p. 90r-91r).
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LE LION, LE LOUP ET LE RENARD.

Le lion devenu vieux était couché, malade, dans son antre, et tous les animaux étaient venus rendre visite à leur prince, à l’exception du renard. Alors le loup, saisissant l’occasion favorable, accusa le renard par-devant le lion : « il n’avait, disait-il, aucun égard pour celui qui était leur maître à tous, et c’est pour cela qu’il n’était même pas venu le visiter. » Sur ces entrefaites le renard arrivait lui aussi, et il entendit les dernières paroles du loup. Alors le lion poussa un rugissement contre le renard. Mais celui-ci, ayant demandé un moment pour se justifier : « Et qui, dit-il, parmi tous ceux qui sont ici réunis, t’a rendu un aussi grand service que moi, qui suis allé partout demander aux médecins un remède pour te guérir, et qui l’ai trouvé ? » Le lion lui enjoignit de dire aussitôt quel était ce remède. Le renard répondit : « C’est d’écorcher vif un loup, et de te revêtir de sa peau toute chaude. » Le loup fut incontinent mis à mort, et le renard dit en riant : « Il ne faut pas exciter le maître à la malveillance, mais à la douceur, »

Cette fable montre qu’en dressant des embûches à un autre on se tend un piège à soi-même.