Exposé des principes de l'Association phonétique internationale (1900)

Association phonétique internationale
Association phonétique internationale.

Exposé des principes
de
l’Association phonétique
internationale.


Cotisations:

Membres actifs
6 fr.
Membres adhérents
3 fr. 50


Les cotisations sont dues au 1er Janvier,

En versant quinze cotisations d’un coup, on devient membre à vie.

Le Maître Phonétique, organe de l’Association, paraît le 15 de chaque mois, excepté pendant les vacances d’été. Il est envoyé gratuitement à tous les membres de l’Association. Les membres actifs en recoivent deux exemplaires ; ils peuvent aussi recevoir d’autres publications.

Pour les non-membres, l’abonnement au Maître Phonétique cotise 5 francs.

Au siège social: 20 rue de la Madeleine, Bourg-La-Reine, Seine

(Adresse abrégée: Fonetik, Bour-la-Reine, France).

1900.

PRIX: 0 fr. 50.

Ouvrages recommandés
pour l’étude
de la phonétique et de la pédagogie linguistique[1]

Phonétique générale

W. Vietor, Phonetische Studien (revue), Marburg, 1888—93:.

« Elemente der Phonetik. 4e éd. Leipzig 1898. « Kleine Phonetik. Leipzig 1898.

A. M. Bell, Sounds and their relations. London 1882.

Burt, Elementary phonetics. Toronto 1898.

H. Sweet, Handbook of Phonetics. Oxford 1886.

« Primer of Phonetics. Oxford 1890.

J. Storm, Englische Philologie. 2e éd. Leipzig 1893.

M. Trautmann, Die Sprachlaute. Leipzig 1886.

O. Jespersen, Articulations of speech sounds. Marburg 1889.

« Fonetik. Kœbenhavn 1900.

P. Roorda, De Klankleer. Groningen 1889.

L. Soames, Introduction to phonetics. 2e éd. London 1899.

E. Sievers, Grundztige der Phonetik. 5e éd. Leipzig 1900.

Vietor-Rippmann, Elements of Phonetics. London 1899.

H. Klinghardt, Artikulations- u. Hörübungen. Köthen 1897.

P. Passy, *Écriture phonétique. 3e éd. Paris 1899. — 0 fr. 50.

Phonétique historique

H. Sweet, History of English Sounds. 2e éd. Oxford 1888.

P. Passy, *Étude sur les changements Phonétiques. Paris 1891. — 8 fr.


Phonétique expérimentale

P. Rousselot, Modifications phonétiques. Paris 1889.

C. H. Grandgent, Vowel measurements.

Monographie

W. Vietor, Aussprache des Schriftdeutschen. 4e éd. Leipzig 1898.

« German Pronunciation. 4e éd. Leipzig 1898.

H. Sweet, Spoken Swedish, Spoken Portugueze, Spoken North Welsh; Danish pronunciation, Russian pronunciation. London.

A. Western, Englische Lautlehre. Leipzig 1885.

» Kurze Darstellung d. engl. Ausspr. 3e éd. Leipzig 1897.

R. J. Lloyd, Northern English. Leipzig 1899.

Ph. Wagner, Sprachlaute des Englischen. 3e éd, Stuttgart 1899.

P. Passy, *Sons du Francais. 5e éd. Paris 1899. — 1 fr. 50.

« Abrégé de prononciation francaise. Leipzig 1897.

F. Beyer, Lautsystem des Neufranzdsischen. Köthen 1887.

« Französische phonetik. 2e éd, Köthen 1897.

J. Balassa, A phonetica. Buda-Pest 1886.

K. Quiehl, Französische Aussprache. 3e éd. Marburg 1893.

K. Nyrop, Kortfattet Fransk Lydlære. Kœbenhavn 1893.

A. R. G. Vianna, Pronuncia Normal Portugueza. Lisboa 892.

F. Araujo, Fonetika Kastellana. Toledo 1894.

Lyttkens et Wulff, Svenska Språkets ljudlära. Lund 1885.

P. Passy, *Notes sur quelques patois. Paris 1892–1896. — 0 fr. 50.

Pédagogie

W. Vietor, Die Neueren Sprachen (revue). Marburg, depuis 1893. « Der Sprachunterricht muss umkehren! 2e éd. Leipzig 1886.

H. Sweet, Practical Study of Language. 2e éd. London 1899.

M. Bréal, Enseignement des langues vivantes. Paris 1893.

F. Franke, Die praktische spracherlernung. Heilbronn 1884.

M. Walter, Französische Klassenunterricht. Marburg 1888.

« Englisch nach dem Reformplan. Frankfurt 1899.

G. A. Schrumpf, How to begin French. Hertford 1883.

K. Kühn, Entwurf eines lehrplans. Margburg 1889.

L. Graf von Pfeil, Lehren und Irrlehren beim Unterricht. Berlin 1895.

W. H. Widgery, Teaching of Languages in Schools. London 1888.

Laudenbach-PAssy-Delobel, Méthode directe. Paris 1899.

Lenz-Diez, Enseñanza inductiva del francés. Santiago 1894.

A. Rambeau, Phonetik im Klassenunterricht. Hamburg 1888.

P. Passy, Phonétisme au Congrès de Stockholm. Paris 1887.

Jespersen-Lundell-Western, Quousque Tandem (série de publications).

R. Lenz, Fonetica aplicada. Santiago 1893.

J. Grasé, Directe methode en phonetisch schrift. Groninge 1899.

Livres d’enseignement

Beyer-Passy, Elementarbuch des gespr. Französisch. Coethen 1893.

Rossmann-Schmidt, Lehrbuch der franz. sprache. 3e éd. Leipzig 1895.

Franke, Phrases de tous les jours. 5e éd. Leipzig 1893.

K. Kühn, Französisches Lesebuch. 3e éd. Leipzig 1890.

» Französische Schulgrammatik. Leipzig 1885.

» Kleine französische Schulgrammatik. Leipzig 1890.

O. Jespersen, Fransk Begynderbog. 2e éd. Koebenhavn 1897.

Jespersen-Wallenskœld, Fransk Elementarbok. Helsingfors 1893.

Passy-Tostrup, *Leçons de choses. Paris 1895 et 1898. — 1 fr.

J. Storm, Dialogues français (avec traduction en diverses langues: Norvégien, Danois, Suédois, Allemand, Hollandais, Anglais, Finnois). 1880-1892.

Sœderhjelm-Tœttermann, Fransk Språklæra. Helsingfors 1892.

C. H. Grandgent, Skort French Grammar. Boston 1894.

Alge-Rippman, First French book. London 1898.

Mackay-Curtis, First French book. London 1900.

V. Spiers, First French book. London 1900.

J. Adamovic, Francuska Pocetnica. Agram 1893.

Lenz-Diez, Enseñanza practica del francés. 2e éd. Santiago 1895.

H. Sweet, Elementarbuch des gespr. Englisch. 2e éd. Oxford 1886.

P. Passy, *Eléments d’Anglais parlé. 3e éd. Paris 1900. — 1 fr.

A. Beljame, English Readers. 8e éd. Paris 1895.

Vietor-Dörr, Englisches Lesebuch. 2e éd. Leipzig 1891.

O. Jespersen, Engelsk grammatik. 3e éd. Kœbenhavn 1899.

» Engelsk Begyndergrammatik. Kœbenhavn 1899.

Jespersen-True, Spoken Englisch. 4e éd. Leipzig 1897.

Jespersen-Sarauw, Engelsk Begynderbog. Kœbenhavn 1896.

Jespersen-Saraw-Meijboom, Engelsch voor eerstbeginnenden. Groningen 1900. Nader-würzner, Elementarbuch der engl. sprache. Wien. Englisches Lesebuch. Wien 1886.

K. Brekke, Lærebog i Engelsk. Kristiania 1887.

J. Grase, Oefeningen in de Engelsche taal. Groningen 1899.

J. Afzelius, Engelsk Elementarbok. Goteborg 1888.

A. Western, Engelsk grammatik. Kristiania 1888.

Lenz-Brosseau, Primer libro de lectura inglesa. Santiago 1895.

C. H. Grandgent, Italian Grammar. 3e éd. Boston 1891.

« « Italian composition. Boston 1891.

Alge-Hamburge-Rippmann, Leitfaden für unt. im deutschen. St. Gall. 1899.

J. Cehquist, Tysk Etementarbok. Helsingfors 1894.

J. V. Lindgren, Dansk ock Norsk grammatik. Stockholm 1894.

J. Pestion, Lehrbuch der norwegischen sprache. Leipzig 1890.

TH. Goldschmidt, Méthode intuitive des langues. Copenhague et Paris 1895–9.

Lectures phonétiques

V. Ballu, Méthode de lecture. Paris 1894.

P. Passy, Premier livre (mét. p. apprendre à lire) 3e éd. Paris 1896. — 0 fr. 30.

« Le Français parlé. 5e éd. Leipzig 1897.

« *Versions papulaires du Nouveau Testament. Paris 1893-6. — 2 fr. 50.

« *Lectures variées. Paris 1897. — 1 fr. 50.

« *Histoires pour enfants. Paris 1896-9. — 1 fr. 50.

J. Passy et A. Rambeau, Chrestomathie Phonétique. 2e éd. Paris 1901.

Pitman, Phonetic Readers. Bath 1884.

« New Testament. Bath.

L. Soames, Albany phonetic readers. London 1892.

Nader-Würzner, Englische Lautschrifttexte. Wien 1891.

Vietor-Dörr-Edwards, Englisches Lesebuch. Leipzig 1901.

Jeafferson-Bönsel, English dialogues. Hamburg 1891.

W. Vietor, Lesebuch in lautschrift. Leipzig 1899.

Pierce-Hempl, Wilhelm Tell. New-York 1900.

A. G. Vianna, *Extraits des Lusiades. Paris 1892. — 0 fr. 25.

Djelali-Passy, *Contes et chants arméniens. Paris 1899. — 0 fr. 50.

J. Spieser, Hebräische Lautschrifttexte. Paris 1898. — 0 fr. 25.

DICTIONNAIRE

Michaelis-Passy, Dictionnaire phonétique français. Hannover 1897.


Imprimeries phonétiques

J. Lievens, 52, rue Delerue, St-Maur-les-Fossés, France.

E. Roche, 52bis, rue Jacques-Dulud, Neuilly-s/-Seine, France.

D. Soltau, Norden, Allemagne.

Breitkopf & Härtel, Leipzig, Allemagne.

B. G. Teubner, Leipzig, Allemagne.

Hesse & Becker, Leipzig, Allemagne.

R. Friedrich, Marburg, Allemagne.

S. Geibel & Co., Altenburg, Allemagne.

Turnbull & Spears, Edinburg, Ecosse.

C. L. Brinkmann, Amsterdam, Hollande.

Zollikofersche Hofbuchdruckerei, St-Gall, Suisse.

Greiner & Pfeiffer, Stuttgart, Württemberg.

Languages Printing Company, New-York, Etats-Unis.

Exposé des principes
de
l’Association phonétique internationale


Historique.

L’Association phonétique internationale a été fondée en 1886, par un petit groupe de professeurs francais, qui avaient expérimenté avec succés l’emploi d’une écriture phonétique pour enseigner à leurs éléves la prononciation de l’Anglais, et qui jugeaient utile de populariser une méthode dont ils s’étaient bien trouvé. Bientdt les cadres de la société ont été élargis, et elle a compris des professeurs de diverses langues dans un grand nombre de pays, tous partisans d’une réforme profonde de l’enseignement des langues, basée sur une saine pédagogie et sur les résultats les mieux acquis des recherches scientifiques; puis aussi des linguistes de profession et des étudiants que ces questions intéressaient.

En 1888, a la suite d’une consultation générale, a été élaboré un alphabet phonétique international, qui, très légerement modifié depuis, a servi constamment pour la publication du journal de la société, le Maître Phonétique. Cet alphabet a été rapidement adopté, d’abord par la plus grande partie des membres de l’Association pour leurs études et leur enseignement; puis par d’autres linguistes et professeurs.

L’Association a toujours préconisé l’emploi des méthodes directes d’enseignement des langues, et a fait une guerre sans merci à la méthode dite classique, qui prétend enseigner à parler, au moyen de règles de grammaire apprises par cœur, appliquées dans des themes composés de phrases détachées. Elle n’a pas peu contribué au discrédit dans lequel cette méthode absurde tombe de plus en plus.

Par l’impulsion qu'elle a donné aux mehetuhos phonétiques, elle a contribué à rendre plus réelle et plus pratique l’observation des langues et des dialectes tels qu’on les parle réellement. Elle peut revendiquer une part dans la publication de plusieurs ouvrages linguistiques de grande valeur. C’est sous son influence que l’Ecole pratique des Hautes Etudes de France a créé une conférence de phonétique générale et comparée, et que des leçons de phonétique appliquée se font maintenant dans les nombreux cours de vacances de différents pays. Du même coup, elle a contribué à ruiner les préjugés qui s’attachent toujours aux habitudes traditionnelles en matière pédagogique, et notamment celui qui prête une valeur scientifique ou littéraire aux orthographes courantes des divers peuples civilisés. Par là, elle a prêté un appui utile aux diverses sociétés de réforme et de simplification orthographique. L’action de ses adhérents n’a pas été étrangère au récent décret par lequel le Conseil Supérieur et le Ministre de l’Instruction publique de France ont introduit dans l’enseignement de la grammaire quelques-unes des simplifications réclamées depuis longtemps par les savants et les éducateurs. Enfin, elle a créé entre les membres du corps enseignant de divers pays, des relations de bonne confraternité qui ne peuvent qu’être utiles tant au progrès de la science et de l'enseignement qu’aux relations internationales.


L’Association est administrée par un conseil international de 20 membres, élu pour deux ans au scrutin de liste, et qui élit lui-même son bureau. Voici la composition actuelle de ce conseil:

(Président d’honneur: 'H. Sweet, Oxford, Angleterre.)

Président: W. Vietor, professeur à l’Université de Marburg (Alle- magne).

Vice-présidents: O. Jespersen, professeur à l’Université de Copenhague (Danemark), et R. J. Lloyd, professeur au Collège de Liverpool (Angleterre).

Secretaire-trésorier: Paul Passy, directeur-adjoint à l'Ecole des Hautes Etudes, Paris (France).

Administrateurs: J. Cameron, Toronto, Canada; C. Cloos, Fredrikshavn, Danemark; W. Fœrster, Bonn, Allemagne; R. Lenz, Santiago, Chili; S. Lund, Bourg-la-Reine, France; E. Monseur, Bruxelles, Belgique; E. Nader, Vienne, Autriche; A. Rambeau, Boston, Etats-Unis; J. Spieser, Waldhambach, Allemagne; Ch. Thudichum, Genève, Suisse; W. Tilley, Marburg, Allemagne; A. Vianna, Lisbonne, Portugal; A. Wallensköld, Helsingfors, Finlande; A. Western, Fredriksstad, Norvège; N. Wickerhauser, Agram, Autriche-Hongrie ; F. Wulff, Lund, Suède.

Le tableau suivant indique le nombre des membres de l'Association au commencement de chaque année.

1886 ’87 ’88 ’89 ’90 ’91 ’92 ’93 ’94 ’95 ’96 ’97 ’98 ’99 1900
France 12 24 24 33 35 29 29 39 46 63 71 97 99 135 149
Anglet. 5 12 27 32 28 21 27 38 45 54 53 59 64 140
Allemag. 1 9 35 95 98 131 150 147 164 156 202 272 284 291 290
Autr.-Hon. 11 18 24 23 26 35 29 30 36 48 60 59 57
Suisse 3 4 5 6 8 11 11 10 17 30 30 24
Belgique 1 2 2 5 6 6 7 5 6 5 6 9 11 11
Hollande 1 1 3 3 3 10 16 16 13 16 14 15 21 19 20
Luxemb. 2 2 1 1 1
Italie 1 1 1 1 5 2 2 4 0 3
Espagne 1 3 3 3 3 6 14 11 6 4 5 4 5
Portugal 1 1 2 2 2 5 9 10 10 8 8 6 5
Danemark 3 3 8 14 17 18 35 38 38 78 78 77 73 69
Islande 3 4 3 2 2 2 2 2 2 2 2 2 3
Norvège 3 6 6 7 8 7 7 7 26 27 25 22 25 22
Suède 6 26 101 103 101 105 75 63 75 92 79 59 45 36
Finlande 1 5 4 10 19 26 42 35 39 38 61 43 31
Russie 1 1 3 4 8 9 10 9 9 6 9 8
Roumanie 2 11 0
Turquie 1 1 1 1
Etats-Unis 2 3 7 9 8 6 9 23 24 39 40 25 27 29
Canada 1 1 3 4 3 2 4 5 28 17 17 19 19 17
Amér. cent. 3
Brésil 1 1 1 1 1 1 1 1 1
Chili 2 7 11 27 39 47 50 55
Tunisie 1 2 2
Zanzibar 1 1 1
Madagas. 1 6 7 2
Afr. d. Sud 1 1 1
Congo ind. 1 1 1 1 0 1 1
Congo fran. 1
Sierra Leone 1 1 1 1
Af. Oc. Port. 1
Japon 1 1
Nlle Zélan. 1 0 0 0
Australie 1 2
Total 14 59 140 321 352 381 427 459 522 603 743 865 907 935 953
Principes pédagogiques.

Les principes de l’Association, en ce qui concerne l’enseignement des langues étrangères, sont résumés dans le programme suivant: 1. Ce qu’il faut étudier d’abord dans une langue étrangère, ce n’est pas le langage plus ou moins archaïque de la littérature, mais le langage parlé de tous les jours.

2. Le premier soin du maître doit être de rendre parfaitement familiers aux élèves les sons de la langue étrangère. Dans ce but il se servira d’une transcription phonétique, qui sera employée à l’exclusion de l’orthographe traditionelle pendant la première partie du cours.

3. En second lieu, le maître fera étudier les phrases et les tournures idiomatiques les plus usuelles de la langue étrangère. Pour cela il fera étudier des textes suivis, dialogues, descriptions et récits, aussi faciles, aussi naturels et aussi intéressants que possible.

4. Il enseignera d’abord la grammaire inductivement, comme corollaire et généralisation des faits observés pendant la lecture; une étude plus systématique sera réservée pour la fin.

5. Autant que possible, il rattachera les expressions de la langue étrangère directement aux idées ou à d’autres expressions de la même langue, non à celles de la langue maternelle. Toutes les fois qu’il le pourra, il remplacera donc la traduction par leçons de choses, des leçons sur des images, et des explications données dans la langue étrangère.

6. Quand plus tard il donnera aux élèves des devoirs écrits à faire, ce seront d’abord des reproductions de textes déjà lus et expliqués, puis de récits faits par lui-même de vive voix; ensuite viendront les rédactions libres; les versions et les thèmes seront gardés pour la fin.


N. B. — Ce programme indique les tendances générales de l’Association, non l’opinion individuelle de chaque membre. En ce qui concerne la langue maternelle, l’Association préconise l’emploi d’un alphabet phonétique pour l’enseignement de la lecture aux enfants et aux illettrés.


Ce serait impossible de justifier ici, en détail, les divers articles de ce programme; d’ailleurs ce travail a été fait dans divers ouvrages, dont les principaux sont indiqués sous la rubrique ‘pédagogie’, dans la liste imprimée sur la couverture de cette brochure. Nous nous bornerons donc à donner des explications au sujet de la partie de notre programme qui soulève ordinairement le plus d’objections, et qui est en même temps la plus originale.

L’écriture phonétique internationale.

1. On appelle écriture phonétique un système d’écriture d’après lequel on écrit une langue comme elle se prononce. Il y a dans presque toutes les langues beaucoup de mots écrits phonétiquement, c’est-à-dire comme ils se prononcent; ainsi en Français ni, si, lu, bu, nu, sel, sec, bec, sac, bac, roc, cor, sur, pur, avec, ami, képi, curé, sofa, été, canapé, aplanir, démolir, amiral, animalité. Mais il y en a d’autres, en grand nombre, qui ne le sont pas; ainsi eau qui se prononce o, tort et loup dont la dernière lettre est muette, chant et champ qui s’écrivent différemment et se prononcent de même, les fils qui se lit lé fil ou lé fiss, etc.
Dans une écriture phonétique, ces mots s’écrivent comme ils se prononcent, aussi bien que les autres.

2. On a reconnu depuis longtemps qu’une écriture phonétique est indispensable pour certaines choses; ainsi la sténographie, et l’étude de l’histoire des langues. Plus récemment on a songé à s’en servir pour enseigner les langues étrangères; et on s’est aperçu qu’elle pouvait rendre, dans ce domaine, des services considérables. En effet, quand on se sert de l’orthographe traditionnelle dès le début, on est constamment gêné par les contradictions entre cette orthographe et la prononciation, et les progrès des élèves sont retardés et rendus difficiles. Au contraire, en représentant la véritable prononciation par une écriture phonétique, on la fixe rapidement dans la mémoire, et les progrès sont considérablement facilités. Ce n’est ensuite qu’un jeu d’enfants d’apprendre à lire et à écrire l’orthographe traditionnelle. Ici, comme partout, il y a avantage à diviser et à graduer les difficultés. Des expériences innombrables ne laissent aucun doute à cet égard. Précieuse pour l’enseignement, l’écriture phonétique devient plus nécessaire encore pour l’étude des langues faite sans maître. Quiconque en possède la clé peut étudier une langue inconnue, vivante ou morte, sans être arrêté a chaque instant par la difficulté de savoir comment doivent se lire les mots qu’il voit écrits. L’avantage qui résulte de là est surtout précieux pour les langues à écriture bizarre et compliquée: Arabe, Hébreu, Chinois, Japonais, etc. De même aussi l’écriture phonétique est indispensable pour recueillir d’une manière utile les mots d’une langue non encore écrite; elle rend ainsi les plus grands services aux voyageurs, explorateurs, missionaires, et aussi aux personnes, spécialistes ou non, qui s’intéressent aux charmants patois populaires de nos campagnes. Mais l’écriture phonétique trouve aussi son application dans l’enseignement de la langue maternelle. Autant c’est long et laborieux d’apprendre à lire à un enfant par les méthodes usuelles, autant c’est facile de lui apprendre à lire les textes phonétiques; et quand une fois il lit ceux-ci couramment, il apprend en un rien de temps à lire l’orthographe courante. Il y a là un procédé pédagogique dont on n’a pas encore fait usage suffisamment; on pourrait en tirer un grand parti, notamment pour l’enseignement des illettrés, et aussi des personnes affligées d’une infirmité qui rend leur instruction plus difficile, comme les aveugles et les sourdmuets.
Tous ceux qui s’occupent d’enseignement doivent donc posséder au moins les premiers principes d’écriture phonétique. Du reste, malgré l’aspect rébarbatif de cette écriture, on apprend à la lire en quelques minutes.

3. On peut écrire phonétiquement de diverses manières; ainsi pour représenter le premier son des mots car, quand, képi, ou peut choisir le c, le q ou le k: pourvu qu’on prenne toujours la même lettre pour le même son. On peut écrire phonétiquement avec des caractères latins ou grecs, gothiques ou russes, arméniens ou arabes. En sténographie, on prend des lettres qui ne ressemblent pas du tout aux nôtres.

4. Le système que nous présentons ici est maintenant adopté par environ 2000 linguistes, professeurs et étudiants de tous les pays. Il est basé sur l’alphabet latin et l’usage international: c’est-à-dire qu’on a choisi, pour représenter chaque son, la lettre qui représente ce son dans le plus grand nombre de langues employant l’alphabet latin. Ainsi on prend z pour le premier son de notre mot zèle, contrairement à l’usage Allemand, Italien, Espagnol; et v pour le premier son de notre mot vin, malgré l’usage Allemand et Espagnol; mais on prend j pour le premier son de notre mot yole, malgré l’usage Français, mais conformément à l’usage Allemand, Hollandais, Italien, Scandinave.
C’est même la seule difficulté de notre alphabet: on est dérouté tout d’abord en voyant écrire jø pour yeux et ʃjɛ̃ pour chien. Mais cette difficulté est vite surmontée; alors c’est un grand avantage d’avoir un système applicable à toutes les langues.
Nous allons maintenant donner le tableau des lettres de l’alphabet phonétique. Nous les classons méthodiquement, dans un tableau qui réunit sur une même ligne horizontale les sons formés par la même sorte d’articulation, et sur une même ligne verticale les sons formés par les mêmes organes de la parole.
Bien entendu, ce tableau serait beaucoup plus simple et moins chargé, si au lieu d’y faire figurer les sons distinctifs de toutes les langues étudiées jusqu’ici, on n’y mettait que ceux d’une seule langue.

Laryn-
gales
Guttu-
rales
Uvu
laires
Vélaires Palatales Linguales Labiales
Consonnes Plosives ʔ q ɢ k ɡ c ɟ t d p b
Nasales ŋ ɲ n m
Latérales ɫ ʎ l
Roulées ᴙ ʀ r
Fricatives h ʜ ɦ ᴚ ʁ (ʍ w) x ǥ (ɥ) ç j ɹ, θ ð, ʃ ʒ, s z, ᵷ ↋ f v ꜰ ʋ ʍ w ɥ
Voyelles
Fermées u ɯ ü ï y i (u ü y)
Mi-fermées ᴜ ʏ ɪ (o ö ø)
Moyennes o ö ë ø e
ə
(ɔ ɔ̈ œ)
Mi-ouvertes ɔ ʌ ɔ̈ ä œ ɛ
Ouvertes ɐ æ ɑ a

Nous allons donner l’explication sommaire des lettres de ce tableau, en laissant de côté celles dont la valeur est la même que dans l’usage courant.

Consonnes. — Les palatales (c), (ɟ), s’entendent en Français dans la prononciation populaire de quai (ce), gai (ɟe). — (q) est le qaf Arabe. — (ʔ) s’entend en Allemand du Nord avant les voyelles initiales; c’est le stød Danois, le hamza Arabe. (ɲ) est le gn Français dans règne; (ŋ) le ng germanique. (ʎ) est le l mouillé des Français du Midi, le ll Espagnol, lh Por- tugais, gl Italien. — (ł) est le ‘l grave’ des Russes et des Polonais. — (r) est le r Italien, etc.; (ʀ), le r uvulaire; (ꞯ), le ‘ain’ Arabe. (ꜰ) (ʋ) est une fricative bilabiale simple; elle s'entend dans le Flamand wrocht, dans l’Allemand du Sud wesen, dans l’Allemand commun zwei, dans l’Espagnol sabér. — (ɥ) se forme de la même manière, mais en levant la partie antérieure de la langue: c’est le u consonne du Français buis. En prononçant (ʍ) (w) c’est le fond de la langue qui se lève; c’est notre ou consonne dans oui. (θ) (ð) se prononcent en mettant la pointe de la langue contre les dents d’en haut ou entre les dents: (θ) est le th dur Anglais, z Espagnol, θ Romaïke, þ Islandais; (ð) le th doux Anglais, ð Islandais, δ Romaïke. (ɹ) est le r non roulé des Anglais du Sud, et peut s’employer aussi pour le r simple de l’Espagnol et du Portugais. (ʃ) (ʒ) s’entendent en Français dans champ, Jean. (ç) (j) s’entendent en Allemand dans ich, ja, etc. (x) se trouve en Allemand dans ach; (ǥ), dans wagen, tel qu’il se prononce souvent dans le nord de l’Allemagne. (ᴚ) est le kh Arabe de khalifa; (ʁ) le r Danois; le r Parisien est intermédiaire entre (ʀ) et (ʁ). (ʜ) et (ɦ) sont le ha et le he Arabes. (ᵷ) et (↋) sont des sons Tcherkesses.

Voyelles. — (u) est le u commun, le ou Français; (ᴜ) un o très fermé; (o) le o fermé du Français beau, (ɔ) le o ouvert du Français tort; (ɑ) l’a de pas; (a) l’a de rat; (æ) l’a de l’Anglais man; (ɛ) l’e de fer, (e) l’e de , (ı) un e très fermé. (ɯ) est un (u) prononcé avec les lèvres écartées; (ʌ) un (ɔ) prononcé de même [variété du u anglais de but]; (œ), (ø), (y), sont les palatales arrondies de peur, peu, nu; (ʏ) un intermédiaire entre eu et u. (ä), (ë), (ï), (ö), (ü), sont des sons ‘mixtes’ ou intermédiaires: (ä) la voyelle de l’Anglais fur, (ï) celle du Russe syn, (ü) celle du Norvégien hus. — Les voyelles nasalées s’indiquent ainsi: (ã), (ẽ), etc. (ə) peut s’employer d’une manière générale pour toute voyelle de timbre obscur et indéterminé, ne se rencontrant qu’en syllabe faible, comme le e du français Tournefort; (ɐ) pour une voyelle semblable plus ouverte.

Durée, accent, intonation. — Un son long se marque en ajoutant (ː); ainsi renne (rɛn), reine (rɛːn). — L’accent de force se marque, quand c’est nécessaire, par un accent aigu (ˊ) avant la première lettre de la syllabe. L’intonation n’est pas marquée généralement, à moins d’indication spéciale; cependant dans les textes suédois et norvégiens on met le signe avant la syllabe forte des mots ayant l’intonation dite composée. Modifieurs. — Divers artifices permettent de représenter encore d’autres nuances. Mentionnons les suivants:
La différence entre une consonne soufflée, comme s, et une consonne vocalique, comme z, quand elle n’est pas indiquée par la forme de la lettre, peut se marquer ainsi: r̬ r vocalique (rare), r̥ r soufflé (poutre).
Les consonnes cacuminales, formées en relevant la pointe de la langue, se marquent ainsi: ṣ, ṭ, ṇ.
Les consonnes emphatiques de l’Arabe, ainsi: s̤, t̤, d̤.
Une consonne accompagnée d'un coup de glotte, ainsi: kʼ, pʼ (Géorgien tʼsɛtsa).
Les voyelles tendues et relâchées se distinguent par les accents aigu et grave: Allemand (béːt, bèt); Anglais (nɔ́ːt, nɔ̀t). — Une voyelle consonante peut se marquer (ŭ), une consonne syllabique (n̗). — A la suite d’une lettre, ꭫ signifie langue plus avancée, ꭪ langue plus retirée, ˕ bouche plus ouverte, ˔ bouche plus fermée, ˒ lèvres plus arrondies, ˓ lèvres plus écartées.
Enfin quand on met une lettre en exposant d'une autre, on indique que le son marqué par la première participe un peu au son marqué par la dernière; ʃᶜ̧ est un ʃ qui tire sur ç.

Remarque importante. D’une manière générale, on n’indique dans l’écriture que ce qui ne peut pas se sous-entendre, ou s’expliquer d’un mot une fois pour toutes; ce qui permet de se passer à peu près complètement des modifieurs, excepté dans les travaux scientifiques. Ainsi on écrit le Français note et l’Anglais knot de la même manière, (nɔt), quand même la voyelle du mot anglais se prononce avec la bouche plus ouverte, et les deux consonnes avec la langue plus retirée. Ce n’est pas une inexactitude, mais une simplification; il suffit, pour qu’on sache à quoi s’en tenir, de dire une fois pour toutes qu’en Anglais (ɔ = ɔ˕), (n = n꭪) et (t = t꭪).
Nous allons maintenant donner des spécimens d’écriture phonétique; d’abord un texte français avec l’orthographe usuelle en regard; puis un passage plus court traduit et transcrit en diverses langues[2].

lə ʃval vɔle.

œ̃ brav peizɑ̃ n avɛ k œ̃ ʃval pur labure sɔ̃ ʃɑ̃. œ̃ ʒuːr ɔ̃ lə lɥi a vɔle.
lə vwala bjɛ̃ trist. kɔm s etɛ la sɛzɔ̃ de labuːr, i lɥi falɛ aˊpsɔlymɑ̃ œ̃ ʃval; e dɛ l lɑ̃dmɛ̃ il ɛ parti pur yn vil vwazin, u i j avɛ fwaːr o bɛstjo sə ʒur la; il ɑ̃ːpɔrtɛ yn pətit sɔm, tu l arʒɑ̃ k il avɛ a la meːzɔ̃, ɛspɛrɑ̃ k sa syfirɛ pur aʃte œ̃n oːtrə ʃəval.
arive a la fwaːr, i s mɛ a rɡarde le ʃvo ki etɛt a vɑ̃ːdr. kɛl n ɛ pa sɔ̃ etɔnmɑ̃ ɑ̃n apɛrsəvɑ̃, parmi ø, sɔ̃ prɔprə ʃəval! s ɛ bjɛ̃ lɥi, i n sə trɔ̃p pɑ; la poːvrə bɛːt a l ɛːr də lə rəkɔnɛːtr osi.
ˊʒystəmɑ̃ œ̃n aʒɑ̃ d pɔlis pɑsɛ. lə peizɑ̃ l apɛl. “məsjø,” lɥi dit i, “sə ʃval ki ɛ la ɛt a mwa; ɔ̃ m l a vɔle dɑ̃ la nɥi d avɑ̃jɛːr a jɛːr.” e kɔm lə marʃɑ̃ d ʃəvo s ˊrekriɛ, “ʒə n vuz akyz pɑ,” dit i, “me pətɛːtrə kə l vɔlœːr vu l a vɑ̃ːdy jɛːr?”
“vu vu trɔ̃pe, mɔ̃ brav ɔm,” repɔ̃ l makiɲɔ̃ avɛk asyrɑ̃s; “sə ʃval rəsɑ̃ːblə pətɛtrə bjɛ̃ o voːtr, me sa n pø pɑ ɛtrə lɥi, kar ʒə l e dəpɥi trwa mwa; ʒə l e aʃte a la fwaːr də ʃɔlɛ, o mwa d ʒyjɛ.”
l aʒɑ̃ n savɛ pɑ a ki ɑ̃tɑ̃ːdr. œ̃n atrupmɑ̃ s fɔrmɛ deʒa. ˊtutaku lə peizɑ̃ a yn ide. “vuz ave sə ʃval dəpɥi trwa mwa, dit vu; alɔːr vu l kɔnɛse bjɛ̃. də kɛl œːj ɛsk i n i vwa pɑ?” — e ɑ̃ mɛm tɑ̃ i mɛtɛ se mɛ̃ syr lez jə dy ʃval.
lə marʃɑ̃ ezit œ̃ mɔmɑ̃, pɥi repɔ̃ ˊbravmɑ̃, “s ɛ d l œj ɡoːʃ.”
“mesjø,” di l peizɑ̃ ɑ̃ dekuvrɑ̃ l œj ɡoːʃ də la bɛːt, “vuz ɛt temwɛ̃ kə də sɛt œj la lə ʃval i vwa ˊparfɛtmɑ̃.”
“he, s ɛ la lɑ̃ːɡ ki m a furʃe,” di l makiɲɔ̃ œ̃ pø truble, me pɛjɑ̃ d odas; “s ɛ l œj drwa kə ʒ vulɛ diːr; mɛːm kə ʒ l ɔrɛ bjɛ̃ vɑ̃dy la smɛn dɛrnjɛːr, si i n avɛ pɑ ete bɔrɲ, sɛt animal la!”
“e bjɛ̃ mɛ̃tnɑ̃,” di l peizɑ̃ ɑ̃ dekuvrɑ̃ l oːtr œːj, “ɔ̃ n dira pɑ k ty n ɛ pɑ œ̃ ˊmɑ̃tœːr e œ̃ ˊvɔlœr. il y vwa bjɛ̃ de døz jø, mɔ̃ vjø nwaro, e ʒ ɛspɛːr k i n səra pɑ bɔrɲ də sito.”
i n j avɛ ply rjɛ̃ a diːr. lə makiɲɔ̃ a ete ɑ̃mne ɑ̃ prizɔ̃, e l peizɑ̃ a py ravwaːr sɔ̃ ʃval.

[L’accent de force, quant il n’est pas marqué, tombe sur la dernière syllabe des mots importants, ou sur l’avant-dernière si la dernière contient la voyelle (ə). — Les consonnes vocaliques sont pleinement vocaliques du commencement à la fin; les plosives soufflées ne sont pas aspirées. Mais il y a assimilation d’une consonne précedente à la suivant: brav peizɑ̃ est pour bra˚ peizɑ̃. Lire partout: t꭫, d꭫, n꭫, l꭫, u꭫, o꭫, ɔ꭫, ə꭪, ɔ̃˔, ɛ̃˕, œ̃˕. Dans la prononciation parisienne, r est remplacé par ʀ.]

Le cheval volé.

Un brave paysan n’avait qu’un cheval pour labourer son champ. Un jour on le lui a volé.
Le voilà bien triste. Comme c’était la saison des labours, il lui fallait absolument un cheval; et dès le lendemain, il est parti pour une ville voisine, où il y avait foire aux bestiaux ce jour-là; il emportait une petite somme, tout l’argent qu’il avait à la maison, espérant que cela suffirait pour acheter un autre cheval.
Arrivé à la foire, il se met à regarder les chevaux qui étaient à vendre. Quel n’est pas son étonnement en apercevant, parmi eux, son propre cheval! C’est bien lui, il ne se trompe pas; la pauvre bête a l’air de le reconnaître aussi.
Justement un agent de police passait. “Monsieur,” lui dit-il, “ce cheval qui est là est à moi; on me l’a volé dans la nuit d’avant-hier à hier.” Et comme le marchand de chevaux se récriait, “Je ne vous accuse pas,” dit-il, “mais peut-être que le voleur vous l’a vendu hier.”
“Vous vous trompez, mon brave homme,” répond le maquignon avec assurance; “ce cheval ressemble peut-être bien au vôtre, mais ça ne peut pas être lui, car je l’ai depuis trois mois; je l’ai acheté à la foire de Cholet, au mois de juillet.”
L’agent ne savait pas à qui entendre. Un attroupement se formait déjà.
Tout à coup le paysan a une idée. “Vous avez ce cheval depuis trois mois, dites-vous; alors vous le connaissez bien. De quel œil est-ce qu’il n’y voit pas?” Et en même temps il mettait ses mains sur les yeux du cheval.
Le marchand hésite un moment, puis repond bravement, “C’est de l’œil gauche.”
“Messieurs,” dit le paysan en découvrant l’œil gauche de la bête, “vous êtes témoins que de cet ceil-là le cheval y voit parfaitement.”
“Hé, c’est la langue qui m’a fourché,” dit le maquignon un peu troublé, mais payant d’audace; “c’est l’œil droit que je voulais dire; même que je l’aurais bien vendu la semaine dernière, s’il n’avait pas été borgne, cet animal là!”
“Eh bien maintenant,” dit le paysan en découvrant l’autre œil, “on ne dira pas que tu n’es pas un menteur et un voleur. Π Il y voit bien des deux yeux, mon vieux Noiraud, et j’espère qu’il ne sera pas borgne de sitôt.”
Il n’y avait plus rien à dire. Le maquignon a été emmené en prison, et le paysan a pu ravoir son cheval.

Français.

nuz avɔ̃ ɔnœːr d atire votr atɑ̃sjɔ̃ syr l œːvrə də l asɔsja1sjɔ̃ fɔnetik ɛ̃tɛrnasjɔnal.

sɛt sɔsjete, ki kɔ̃t mɛ̃tnɑ̃ ply də mil mɑ̃ːbr — leɡɥist, profɛsœr, etydjɑ̃ də tut nasjɔnalite — s ɛ dɔne pur by lǝ devlɔpmɑ̃ də l etyd sjɑ̃tifik e pratik de lɑ̃ɡ parle, ɑ̃ s sɛrvɑ̃ de dɛrnje rezylta de rəfɛrʃ fɔnetik e d l ɛsperjɑ̃ːs pedaɡɔʒik.

ɑ̃ s ki kɔ̃sɛrn l ãsɛɲmɑ̃ de lɑ̃ːɡ etrɑ̃ʒɛːr, ɛl prekɔniːz le metɔd dit dirɛkt u aktiv, karakterize d yn manjɛːr ʒeneral par l ɑ̃plwa osi rapid e ɛsklyzif kǝ pɔsiblə də la lɑ̃ːɡ etydje, par l etyd ɛ̃dyktiːv də la ɡramer, e par lə rʒɛ de tɛːm di d aplikɑːsjɔ̃. ɑ̃n utr ɛl prɔpaːʒ l ɑ̃plwa d œ̃n alfabɛ fɔnetik, pɛrmɛtɑ̃ də rəprezɑ̃te eɡzaktǝmɑ̃ la pronɔ̃sjasjɔ̃ də tut le lɑ̃ːɡ, e kɑ̃t ɔ̃n ɑ̃ pɔsɛd la kle, də liːr kɔrɛktəmɑ̃ a prəmjɛr vy tu s ki ɛt ekri daprɛ s sistɛːm.

ɛl favɔriːz osi l ɑ̃plwa d l alfabɛ fɔnetik pur l ɑ̃sɛɲmɑ̃ d la lɛktyːr ɑ̃ lɑ̃ːɡ matɛrnɛl oz ɑ̃fɑ̃ e oz ilɛtre.

Espagnol.

tenemos la onra de ʎaˊmaɹ su atenˊθĭon aθĭa la obɹa de la asoθĭaˊθion foˊnetika inteɹnatioˊnal.

esta soθĭeˊda, ke kŭenta ˊpɹoksimamente kon mas de mil miembɹos — liŋɡŭistas, profesoɹes, estudiantes de todas las naθĭones — tĭene por obxeto el desaroʎo del estudĭo θĭenˊtifiko i ˊpraktiko de las leŋɡŭas abladas, utilitando paɹа eʎo los mas reθĭentes resultados de las imbestiɡaθĭones foˊnetikas i de la espeɹĭenθĭa pedaˊɡoxika.

poɹ lo ke aθe a la enseɲanθa de las leŋɡŭas estɹaŋxeɹas, pɹekoniθa los ˊmetodos ʎamados diɹektos o aktibos, kaɹakteɹiθados de un modo xeneˊɹal poɹ el empleo tan ˊrapido i esklusibo komo es posible de la leŋɡŭa ke se kĭere apɹenˊdeɹ, poɹ el estudio induktibo de la ɡɹaˊmatika, i poɹ la eskluˊsĭon de los temas ditʃos de aplikaˊθĭon. pɹopaɡa adeˊmas el empleo de un alfabeto foˊnetiko ke peɹmite repɹesenˊtaɹ kon esaktiˊtud la pronunθĭaˊθion de todas las leŋɡŭas, ponĭendo al ke posee su klabe en disposiˊθĭon de leˊeɹ korektamente a pɹimeɹa bista todo lo eskɹito poɹ aˊkel sistema.

faboɹeθe asimismo el empleo del alfabeto foˊnetiko para la раɹа enseɲanθa de la lektuɹa en leŋɡŭa mateɹna a los niɲos i a las pеɹsonas no instɹuidas.

Préparé par T. Escriche.
Italien.

ɑbbĭɑmo l onore di sollɛtʃiˊtɑr lɑ suɑ ɑttentsĭone sul l ˊopɛrɑ dell ɑssotʃɑtsĭoːne foˊnɛtikɑ intɛrnɑtsionɑːle.

kŭestɑ sotʃeˊtɑ, ke kont ɑddi d ɔddʒi pĭu d um miʎɑːjo di soːtʃi — ɡlɔtˊtɔlɔɡi, prɔfessoːri, studenti di oːɲi nɑtsĭone — ɑ pɛr iskɔːpo di fɑr prɔɡrediːre lo studĭo ʃĭenˊtifiko e ˊprɑtiko delle liŋɡŭe pɑrlɑːte, koll ɑˊjuːto deʎi ˊultimi rizultɑti delle ritʃerke foˊnɛtike e dell esperĭentsĭɑ pedɑˊɡodʒikɑ.

iŋ kŭɑnto tokkɑ l inseɲɑmento delle liŋɡŭe strɑnĭeːre, prekoniddzɑ i ˊmetodi detti diretti ɔ ɑttiːvi, tsɔˊɛ im brɛːve, l uːzo kozi ˊrɑpido e skluziːvo ke posˊsibile dellɑ liŋɡŭɑ studĭɑːtɑ, lo studio induttiːvo dellɑ ɡrɑmˊmɑtikɑ, e l eskluzĭone deʎi ezɛrtʃitsi detti di ɑpplikɑtsĭoːne. propɑːɡɑ in oltre l uzo d un ɑlfɑbeto foˊnɛtiko, ke permette di rɑpprezɛnˊtɑr ezɑttɑmente lɑ pronuntsĭɑ di tutte le liŋɡŭe, e kŭɑndo ɛ ben ɑppreːzo, di ˊlɛddʒɛre korettɑmente ɑ priːmɑ vistɑ tutto kŭello k ɛ skritto koŋ kwesto sistɛːmɑ.

fɑvoriːʃe oltreˊsi l uːzo dell ɑlfɑbeːto foˊnɛtiko pɛr inseˊɲɑr ɑ lɛddʒɛre ɑĭ bɑmbiːni e ɑʎi iɲorɑnti.

Portugais.

temuz ɐ õre də sulisitaɹ atẽsɐ̃u d vɔsɐ iʃsəlẽsjɐ pɐɹa ɔbɹɐ ɐ̃i k s ĩmpɐɲ aːsusjɐsɐ̃u fuˊnɛtikɐ intəɹnɐsjunɑł.

ɛʃte susjedade, kõmpɔʃtɐ də mɑiz də mił mẽmbɹuʒ, ɡluˊtoluɡuʃ, pɹufǝsoɹz, iʃtudjɔzuʒ də todɐz ɐʒ nɐsõiʃ, tɐ̃i ɐ pɐitu u dǝzĩvolvimẽntu du iʃtudu sjẽnˊtifiku i ˊpɹatiku dɐʒ lĩŋɡwɐʃ fɐladɐz, ɐpɹuvɐitɐ̃ndu pɐɹɐ esə fĩ uz ˊułtimuʒ rəzułtaduʒ dɐz ĩvəʃtiɡɐsõiʃ fuˊnɛtikɐz i dɐ ifʃəɹjẽsjɐ pədɐˊɡɔjikɐ.

kõ rǝlɐsɐ̃u ɐu ĩsinu dɐʒ liŋɡwɐz iʃtɹɐ̃ʒɐiɹɐz, ɐdvɔɡɐ uʒ ˊmetuduʃ kə sə dənuˊminɐ̃u diɹɛtuz, o ativuz, i kǝ kõˊsiʃtɐ̃i, ɐ̃i ʒəɹɑł nu ĩmpɹeɡu, kwɐ̃ntu puˊsivɛł, imǝdjatu i iʃkluzivu du idjomɐ k sə vai ĩsinɑɹ, i bɐ̃i ɐsĩ nu iʃtudu ĩndutivu de ɡɹɐˊmatikɐ, kɔ̃ rəzɐisɐ̃u duʃ temɐʒ d izəɹsisju. ɐdot, atɐ̃i d iʃtu, i pɹupaɡɐ u uzu dj ũ ɑłfɑbɛtu fuˊnɛtiku, mədjɐ̃nt u kwɑł s pɔdǝ rəpɹǝzẽntaɹ kɔ̃ izatidɐ̃u ɐ pɹunũsjɐ d kwɑłkɛɹ lĩŋɡwɐ, i kj ɐbilit, apɹẽndidu k sɐʒɐ u siʃtem, a leɹ kurɛtɐmẽnt, a pɹimɐirɐ viʃtɐ, tuduː k for nel iʃkɹitu.

fɐvuɹɛs tɐ̃mbɐ̃i u ĩmpɹeɡu du ɑłfɐbɛtu fuˊnɛtiku pɐɹɐ u ĩsinu de lɐiturɐ dɐ lĩŋɡwɐ mɐtɛɹnɐ aʃ kɹjɐ̃sɐz i ɐuz ɐnɑłfabɛtuʃ.

Préparé par A. R. G. Vianna.
Anglais du Sud.

wij hæv ði ɔnə tə drɔː jɔr ətenʃen tə ðə wəːk ǝv ði intǝˊnæʃənǝl fouˊnetik əsousıˊeiʃen.

ðı ɔbdʒıkt əv ðis səˊsaiıtı, hwıtʃ kaunts nau mɔː ðən ə θauznd membǝz — liŋɡwısts, tijtʃəz, stjuwdnts əv ɔːl næʃəˊnælıtız — ız ðə dıˊveləpmənt əv ðə saiǝnˊtifik ən præktıkl stʌdı əv spoukn læŋɡwıdʒız, bai juwtılaizıŋ ðə leitıst rıˊzʌlts əv fouˊnetik ınvestiˊɡeiʃən ən pedǝˊɡɔdʒık ıksˊpıǝrıəns.

ǝz rıˊɡɑːdz ðə tijtʃiŋ av fɔrin læŋɡwıdzız, ıt ædvǝkeits ðə soukoːld dırekt ɔr æktıv meθədz, kærıktəraizd dzenrǝlı spijkıŋ bai ðə kwikıst ən moust ıksˊkluwsıv juws pɔsıbl əv ðə læŋɡwıdz stʌdıd, bai ðı ınˊdʌktıv stʌdı əv ɡræmə, ən bai ðə rıˊdʒekʃən əv soukoːld trænsˊleiʃən eksǝsaizız.

ıt fəːðə ınkʌrıdʒız ðə juws əv ǝ fouˊnetik ælfǝbit, əˊlauıŋ ðı ıɡˊzækt reprǝzənˊteiʃən əv ðə prənʌnsiˊeiʃen əv ɔːl læŋɡwıdʒız, ænd, hwen wʌn hæz ðə kij tu ıt, ðə kǝˊrekt rijdıŋ ət fəːst saıt əv evrı0ıŋ ðǝt s ritn əˊkɔːdıŋ tə ðis sistım.

ıt ɔlsou feivəz ðə juws əv ðə fouˊnetik ælfǝbıt fǝ tijtʃıŋ tfuldrən ənd ˊʌnˊedʒukeitıd pijpl tə rijd ın ðɛə neitıv læŋɡwıdʒ.

Préparé par H. Sweet.
Allemand.

hiːrˊdurç neːmen viːr uns di frɑihɑit, iːrə ɑufmerkzɑːmkɑit ɑuf di bəˊʃtreːbuŋən des intərnɑtsioˊnɑːlən foˊneːtiʃən ferˊɑins tsu riçtən.

dɑs tsiːl diːzes ferˊɑins, deːr jetst etvɑː tsvølf hundert mitɡliːdər — ʃprɑːxɡəleːrtə, leːrər unt ʃtuˊdiːrəndə ɑlər lendər — tsɛːlt, ist di førdəruŋ des visənʃɑftliçən unt prɑktiʃən ʃtuːdiums der leːbəndən ʃprɑːxen ɑuf ɡrunt der noyəstən erˊɡeːpnise der foˊneːtifen fɔrfuŋ viː der pedɑˊɡoːɡiʃen erˊfɑːruŋ.

in bəˊtsuːk ɑuf den fremtʃprɑːxliçen untərriçt ferˊtrit der ferˊɑin di ˊzoːɡəˊnɑntə noyǝ oːdər diˊrektə meˊtoːdə, deːren ɑiɡenˊtyːmliçkɑit veːzǝntliç dɑːrin beˊfteːt, dɑs zi di fremdə ʃprɑxe møːkliçst bɑlt unt møːkliçst ɑˊlɑin ferˊvendət, di ɡrɑˊmɑtik indukˊtiːf ɡəˊvinən lest unt di yːbərˊzetsuŋsyːbuŋen ferˊvirft. fernər ferˊbrɑitǝt der ferˊɑin den ɡeˊbrɑux ɑines foˊneːtifən ɑlfɑˊbeːts, dɑs di ɡǝˊnɑuə lɑutliçe viːdərɡɑːbe ɑiner jeːdən ʃprɑːxe ɡəʃtɑtət, unt desən kentnis in den ʃtɑnt zetst, ɑləs in diːzər lɑutʃrift ɡəˊʃriːbənə ɑuf den eːrsten blik riçtiç tsu leːzən.

der ferˊɑin empfiːlt di ɑnvenduŋ des foˊneːtifən ɑlfɑˊbeːts ɑux bɑim unterriçt fon kindərn odər erˊvɑksənən in der muterʃprɑːxe.

Préparé par W. VIETOR.
Anglais du Nord.

wi əv ði ɔnʌɹ tʊ drɔː jʊr əˊtɛnʃʌn tʊ ðə wʌɹk ʌv ði ıntʌɹˊnaʃʌnʌl fɔˊnɛtık əsoːsıˊeːʃʌn.

ðı sɔˊsaıetı, hwıtʃ naʊ nʌmbʌɹz moːɹ ðən ə θaʊzənd mɛmbʌɹz, — lıŋɡwısts, tiːtʃʌɹz, stjuːdnts, ʌv ɛvrı naʃʌˊnalıtı, — haz fʌr ıts eːım tʊ dıˊvɛlʌp, ın əˊkɔɹdns wıð ðə leːtest rıˊzʌlts ʌv fɔˊnɛtık rıˊsʌɹtʃ ənd ɛdjʊˊkeːʃʌnʌl ekˊspiːriəns; ðə saıənˊtifik ən praktıkl stʌdı ʌv spoːkn laŋwedʒez.

az rıˊɡɑːɹdz ðə tiːtʃıŋ ʌv fɔren laŋwedʒez, ðə sɔˊsaıetı advɔkeːts ðə mɛθʌdz staıld ‘daırɛkt’, ɔr ‘aktıv’, huːz dʒɛnʌɹʌl karektʌˊrıstıks ɑːr, tu juːz, əz spiːdılı ənd əz ekˊskluːsıvlı əz pɔsıbl, ðə laŋwedʒ tʊ bi stʌdıd, tʊ stʌdı ðə ɡramʌr ınˊdʌktıvlı, and tʊ dısˊkɑːɹd tranˊsleːʃʌn ɛksʌɹsaızez.

ıt prʌmoːts ɔːlso ðə juːs ʌv ə fɔˊnɛtik alfəbet, sʌtʃ əz tʊ əˊfoːɹd ən eɡˊzakt rɛprızɛnˊteːʃʌn ʌv ðə prʌnʌnsıˊeːʃʌn ʌv ɛnı laŋwedʒ, and ə kʌˊrɛkt riːdıŋ, at saıt, hwɛn ðə kiː tʊ ıt həz bin mɑːstʌɹd, ɔv ɛnıθıŋ ðət juːs ʌv ðə fɔˊnɛtık alfəbet fʌɹ tiːtʃıŋ ðə riːdıŋ ʌv ðə mʌðʌɹtʌŋ tʊ tʃıldrʌn, and tʊ ði ılıtʌret.

Préparé par R. J. Lloyd.

Hollandais.

ʋɛĭ nemǝn hiːrbɛi de vrɛĭhɛĭt y andɑxt tə vɛstəxǝn ɔp ət ʋɛrːken ɛn streːven dɛr ıntɛrnɑtsjoˊnɑːle foˊneːtisə vɛrˊeːnəxəŋ.

hɛd dul deːzǝr vɛrˊeːnəxeŋ, di ny meːr dɑn dœĭzǝnt leːdən tɛlt — taːlkœndəxen, leːrars en stydeːrəndən ın ɑlǝ lɑnːdən — ıs dǝ bəˊvɔrdərəŋ dɛr ʋetənˊsxɑpəlǝkǝ ɛn prɑktisə st ydidɛr leːvəndə taːlən, xəxrɔnt ɔp ət laːtste foˊneːtis ɔnːdərzuk ɛn də pedɑˊxoːxısə ɛrˊvaːrǝŋ.

ʋɑt ət ɔndǝrixt ın vreːmde taːlən bəˊtrɛft, xev də vɛrˊenǝxəŋ də foːrkør an də zoxǝnamdə niːʋə ɔv diˊrɛktə meˊtoːdə, ʋarˊvan de ɛĭxǝnˊardəxhɛĭt in hoːftsak hirın bəstaːt, dɑt sə dǝ vreːmdə taːl zo spuːdəx ɛn zo œĭtslœĭtent moːxələk xəˊbrœĭkt, ɛn də xrɑˊmɛːrə ɔp ındyktivə ʋɛĭzə ɔndərʋɛĭst, zoˊdɑt mɛn xen teːmas ɛn vɛrˊtaːləŋən xəbrœĭkt. ok maɡ də vərˊeːnǝxeŋ propaˊxɑnːda vor ən foˊneːtis ɑlfabet (xǝlœĭtsrıft), dɑt ət jœĭst ʋeːrxeːvən dər klɑŋkən vɑn iːdərə taːl tulat, ɛn dœs iːdər, di ət kɛnt, ın staːt stɛlt ɑləs ʋɑt ın en ɔf ɑndərə vreːmdə taːl mɛd dıt xelœĭtsrıft xǝsreːven ıs, ɔp hɛt eːrstə xəzıxt mɛd de jœĭstə œĭtspraːk tə leːzən.

də vɛrˊeːnəxəŋ bəˊveːlt ət xǝbrœĭk fɑn ət xǝlœĭtsrift oɡ bɛĭ ət ɔndərʋɛĭs ın də mudǝrtaːl an kındərən ɛn vɔlˊʋɑsənən an.

Danois.

vi ˊthelaʔðer ɔs hɛʔrveð ɔ ˊhɛnleʔdə dærǝs ɔbˊmær̥ksɔmheʔð pɔ dɛnʔ ˊvır̥ksɔmheʔd sɔm ˊuðfmlʔəs a dn entərnaʃoˊnaʔlə foˊneʔtisɡǝ fɔˊreʔneŋ.

dɛne fɔˊreʔneŋ, sɔm nu thɛlər ɔuʔər thuʔsn ˊmɛðlɛmʔər — ˊsbrɔǥfɔrsɡərə, lɛːrrə ɔ sduˊdeʔrənə heːlə ˊværːdn ɔuʔer — hɑ sdeləð sai sɔm ˊɔbɡaːve ɔ ˊuðveɡlə de ˊprɑktisɡə ɔ viðnˊsɡaʔbəliǝ ˊsduʔdjom a di leːvənə sbrɔʔq, iˊde dn sdødər sai te dn foˊneʔtisɡe ˊfɔr̥sɡneŋs ɔ dn pɛdaˊɡoʔǥisɡə ɛrˊfaʔreŋs seːnəsdə resulˊthaʔdər.

ɔuʔərfɔr ˊonərviʔsneŋn i fræmeðe sbrɔʔɡ anbəfaʔler fɔˊreʔneŋn meːǥəd dən ˊsɔkhalʔde ˊdirɛɡdə ɛlər ˊakthiʔvə meˊthoːðe, dǝr fɔʔr sit sɛːrpr̥ɛʔǥ ˊdɛʔrveð, a man sɔ snaʔrd ɔ sɔ ˊuːðəloɡənə sɔm ˊmuːli bəˊnøder de sbroʔǥ sɔm sduˊdeʔrəs, a man ˊenøʔvər ɡrɑmaˊthiɡən a ˊendukthiʔv vaı̆ʔ, samd a man eɡǝ bruːer ɡrɑmaˊthiksdiːlə ɛfdər ˊsdiːløvəlsə. dəsuðen vır̥ɡer fɔˊreʔneŋn fɔr ˊanvenʔlsen a ən lyðsɡreft, dər sɛdər eʔn i sdanʔ thel nɔ̈ı̆ˊaxdi ɔ ɡɛnɡi ǝdˊvɛʔrt sbrɔʔǥs ˊuðthaːlə ɔ thel, sɔˊsnaʔrd man khɛnǝr thaiʔnnəs vɛrˊdiʔ, kɔˊrækt ɔ lɛːse alʔd, va dǝr ə sɡreːveð ɛfdər dɛdə syˊsdeʔm.

fɔˊreʔneŋn ˊanbəfalər ɔsə bəˊnødlsən a lyðsɡreft, nɔr man sɡa lɛːrə sɔvɛl bœʔrn sɔm vɔksnə ɔ lɛːse dərəs ˊmoːðərsmɔʔl.

Préparé par C. Cloos.
Suédois.

vi beːdja at hæːrmed fɔ fɛsta edər ˇupmærksamhet pɔ dən intərnatʃoˊnɛla foˊneːtiske fœrˊeːniŋ ɔk dɛs ˇstrɛːvandən.

ˇdɛnna fœrˊeːniŋ, sɔm rɛknar meːr ɛn tʏːsəndə ˊmeːdlemar — sprɔːkfɔrskarə, ˇlærarə ɔk stʏˊdeːrandə ɑv ˇalla naˊtʃoːnər — hɑɹ sat sɔm sit mɔːl at ˇfulkɔmna ɔk ˇundərlɛtta et ˇveːtənskɑplikt ɔk praktiskt ˇinhɛmtandə ɑv nʏː ˇleːvandə ˇtɑːlsprɔːk, med ˊtiljɛlp ɑv de ˇnyːastə resulˊtɑːt sɔm hɑ ˊupnɔts ɑv dɛn foˊneːtiska fɔrskniŋən ɔk ɑv den ˇærfarənheːtən sɔm jorts vid ˇundərviːsniŋ.

i frɔːɡa ɔm inlærandǝt ɑv ˇfrɛmmandə sprɔːk, ˇfœːroːɹdar fœrˊeːniŋən dɛn sɔ kalladə diˊrɛkta ɛller akˊtiːva meˊtoːdən, altsɔ et sɔ ˇtiːdikt ɔk sɔ ˊʏːtəslʏːtandə brʏːk sɔm ˇmœjlikt ɑv dɛt sprɔːk sɔm dɛt jɛllər at ˇinlæra, dærjɛmtə et indukˊtiːvt ˇtilɛŋnandə ɑv ɡrammaˊtiːkəns reːɡlər, med ˇundvikandə ɑv øːvəɹsɛtniŋ til dɛt frɛmmandə sprɔːket. fœrˊeːniŋen fœrˊsøːker ɔksɔ at ˇʏːtbreːda anvɛndandət ɑv et foˊneːtiskt alfaˊbeːt, sɔm kan med tilrɛkliɡ ˊnoːɡranheːt ˇɔtərjiːva varjə sprɔːks ʏːttɑːl, ɔk sɔm med ˊtiljɛlp ɑv en ɛŋkəl fœrˊklɑːriŋ sɛtter ˊlɛːsarǝn i stɔnd at ˇriktikt lɛːsa alt sɔm ær ˇupteknat ɛftəɹ ˇdɛtta ˇskriːvsysteːm.

fœrˊeːniŋǝn ˊfœːroːɹdar ɛːvən, at man mɔ ˇnyttja dɛtta alfaˊbeːt viːd ˇmoːdœɹsmɔːlets ˇinlæːrande, næːr dɛt jɛller at læːra bɑːɹn ɛlər ɛldre ˇnyːbœrjarə at lɛːsa ˇinnantil.

Norvégien.

vi tillɑːter ɔs hɛrveːd ɔ henleːdə deːrǝs ɔpˊmɛrksɔmheːt pɔ dn intərnɑʃonɑːlə foˊneːtiskə fɔrˊeːniŋs ˊvirksɔmheːt.

ˇdenːə fɔrˊeːniŋ, sɔm nu ˇtelːǝr oːvəɹ tuːsn ˇmeːdlemər — ˊsprɔːɡmen, ˇlɛːrərə ɔ stuˊdeːrənə ɑ ˇɑlːə nɑˊʃoːnǝr — hɑr til mɔːl ɔ ˊfremːǝ stuːdiət ɑ di ˊleːvənə sprɔːɡ, sɔˊvel viːdnˊskɑːbəli sɔm prɑktisk, pɔ ˇɡrunːlɑːɡ ɑ di ˊnyːəstə foˊneːtiskə ˊunːərsøkəlsərs ɔ pedɑˊɡoːɡiskə ɛrˊfɑriŋərs resulˊtɑːtər.

vɑ stuːdiət ɑ ˇfremːədə sprɔːɡ ɑnɡɔːr, søːkər fɔrˊeniŋən ɔ uːtbreːdə dən sɔːkɑltə diˊrektə elər imiˊtɑtiːvə meˇtoːdə, vis ˇhoːvədɛiəndɔməliheːt bəˊstɔːr i sɔ snɑːrt ɔ sɔ vitː sɔm ˊmuːli ɔ ɑnvenə ˇselvə də ˇfremːədə sprɔːɡ, i ɔ ˇlɛːrə ɡrɑmɑˊtikən induktift, ɔ i fɔrˊkɑstlsə ɑ dn ˇɡɑmlə stiːlskrivniŋ (ˇɔːvərsetlsə frɑ ˇmoːrsmɔːlə til də ˊfremːədə sprɔːɡ).

desːutn ˇsøker dən ɔ infœːrə bruːkən ɑ ət foˊneːtisk ɑlfɑˊbeːt, ve vis jelp etˊvɛrt sprɔːɡs ˊuːttɑːlə kɑn fremstiləs nœiˊakti, ɔ sɔm, sɔˊsnɑːrt de ɛr inːøːvət, vil setǝ enˊvɛːr iˊstɑnː til ɔ ˊleːsə rikti frɑ blɑːdə ɑlt vɑ dɛr ɛr ˇskreːvət eftər detːǝ syˊsteːm. den ɑnbǝfɑːlər ɔsːɔ bruːkǝn ɑ dǝ foˊneːtiskə ɑlfɑˊbeːt ve dn ˇfœrstə ˊleːsə-unǝr-viːsniŋ i ˇmorsmɔːlə.

Préparé par A. Western.
Islandais.

með kvɛːrı θɛsʏ ˊleıːvʏm vjer ɔs að ˊvɛːca ˊaːthıɡlı ıðaı aʊ ˊtılɡaʊnɟı ɔǥ ˊaːðɟœrdʏm hıns ˊalmɛna ˊhljoʊːðfraıdısfjɛːlaxs.

i ˇfjɛːlaɟi θesʏ ˊɛːrʏ nu ıːvır θuːsynd ˊmans, ˊmaʊlfraıðıŋɡar, cɛnarar ɔǥ ˊnɛːmɛndʏr av ˊœdlʏm ˊθjoʊːdʏm. ˊtilɡaʊnɡʏr θɛs ˊɛːr að ˊøʏka ɔǥ ˊɛbla baıdı ˊviːsındaleːǥa ɔǥ ɡaɡnleːǥa ˊıðkʏn aʊ ˊtuŋɡʏmaʊːlʏm, ˊeıns ɔǥ θøʏǥ ɛːrʏ ˊtœːlʏð. i θvi ˊsɟıːnı ˊfaıːrʏm vjer ɔs i ˊnıːt ˊnijʏsdʏ ˊnıːðʏrsdœːdʏr, sem ˊhljoʊðfraıdıŋɡar ˊkɔːmast ˊaːð með ˊransoʊknʏm siːnʏm ɔǥ ˊcɛnarar með ˊreınslʏ sını.

kvað ˊcɛnslʏ ˊsnɛrtır i ˊuːtlɛndʏm ˊtuŋɡʏm, ˊhɛldʏr ˊfjɛːlaɟıð ˊsjɛrilaɟı fram ˊaðfɛrðʏm θeım, sem ˊkadlast ˊbeıːnar eːða ˊsɡapandı. ˊθað sem i ˊsdʏtʏ maʊːlı ˊeiŋcɛnır θaır ˊɛːr, að sɔ ˊfljoʊt sem ˊʏnt ɛːr aʊ ˊcɛnslan að ˊfaːra ˊfram aʊ θvi ˊmaʊːlı, sem ˊvɛːrıð ɛr að ˊlaıːra, ɔǥ aʊ ˊθvi ˊeıŋɡøʏŋɡʏ; — að ˊɔrðmındafraıːdın ˊɛcı ɛːr laırð ˊuːt av fırır ˊsıǥ, ˊhɛldʏr i ˊnaʊnasda ˊsambandı vıð ˊθað sem ˊsɛt ɛr ˊfırır, ˊθanıǥ að ˊaːthıɡlı ˊnɛːmandans ˊdraːɟist tıl ˊdaıːmana, ɔǥ han ˊsjaʊlvʏr ɟɛːti ˊsmaʊt ɔǥ smaʊt ˊsɡaːpað eːða ˊframleıt ˊfraıːði ˊmaʊlsıns; — að ˊsvɔnɛmdar ˊsdiːlaıvıŋɡar ɛːrʏ ˊaːvnʏmdar.

ˊɛnfrɛmʏr laıːtʏr ˊfjɛːlaɟıð sjer ˊant ʏm að ˊuːtbreıːða ˊhljoʊdfraıðıslext ˊsdaːvrɔːf; ˊmaʊ með ˊθvi ˊnaʊkvaımleǥa ˊtaʊkna ˊframbʏrð i ˊkwʏrjʏ ˊmaʊːlı sem ˊɛːr, ɔǥ ˊθɛːǥar eıŋkwʏr ˊɛr θvi ˊɡaɡnkʏnʏǥʏr, ɟɛːtʏr han aʊ ˊsvıpsdʏndʏ ˊlɛːsıð ˊrjɛt alt sem rıːtað ɛːr með ˊθeım ˊhaıtı. liːka ˊmaıːlır θað ˊfram með að ˊnɔːta ˊhljoʊðrıːtʏn, θɛːǥar ˊcɛna aʊ ˊbœdnʏm eːða ˊoʊːlaıːsʏm að ˊlɛːsa ˊmoʊːdʏrmaʊlið.

Préparé par S. Sveinbjörnson.
Note sur la transcription.

Italien. — L’accent de force, quand il n’est pas marqué, tombe sur l’avant-dernière syllabe des mots importants. Les voyelles des syllabes fortes non finales sont demi-longues quand nous ne les marquons pas longues. Lire (a꭫). (ɔ) est plus ouvert et plus net qu’en Français.

Espagnol. — L’accent de force, quand il n’est pas marqué, tombe sur l’avant-dernière syllabe des mots importants. (b), (d), (ɡ) passent à (ʋ), (ð), (ǥ) entre deux voyelles, surtout (b) qui n’est guère franchement plosif qu’après (m). (r) est fortement roulé, (ɹ) formé d’un seul coup de langue. Lire (e˕), (o˕), (s꭪).

Portugais. L’accent de force, quand il n’est pas marqué, tombe sur l’avant-dernière syllabe des mots importants terminés par une voyelle simple ou une des consonnes (ʃ), (ʒ), (z); sur la dernière des mots terminés par une des autres consonnes ou une diphtongue. (ɐ) sonne comme un (a) étouffé. (ə) est un (ï) relâché; devant (ʃ), (ʒ) il devient (ı). Deux voyelles consécutives forment diphtongue; (i), (u) des diphtongues valent presque (j), (w).

Anglais. — L’accent de force, quand il n’est pas marqué, tombe sur la première syllabe des mots importants. Les voyelles brèves sont relâchées surtout dans l’Anglais du Sud. — Deux voyelles consécutives forment diphtongue. (a) des diphtongues est (ä). — Lire partout (ə˕), (ɔ˕), (t꭪), (d꭪), (n꭪), (l꭪). (ː) n’indique qu’une demi-longueur devant les consonnes soufflées. En Anglais du Sud (r) est pour (ɹ); en Anglais du Nord (r) garde sa valeur, mais (ɹ) se réduit souvent à une modification de la voyelle précédente, c’est-à-dire que (ɑɹ) est (ɑʴː).

Allemand. L’accent de même. — (p), (t), (k) aspirés en tête des mots. — Voyelles brèves relâchées en syllabe fermée. Les voyelles initiales doivent se lire précédées d’un (ʔ) plus ou moins fort. — Lire (ə꭫˔). Les groupes (ɑi), (ɑu), (oy) sont des diphtongues.

Hollandais. — L’accent de force comme en Allemand. — (v) est ordinairement dévocalisé et se confond parfois avec (f); inversement (x) est parfois vocalisé en (ǥ). (œ) tend vers (ö). — Durée des voyelles souvent incertaine. (eː), (oː) tendent vers (eĭ), (oŭ).

Danois. — L’accent de même. (b), (d), (ɡ) doivent se lire (b̥), (d̥), (g̊). (r) est mis pour (ʁ). — (e) comme en Allemand. — Le stød (ʔ) se fait entendre après une voyelle, mais en même temps qu’une consonne écrite précédemment.

Norvégien. — L’accent de force, (ə), et (p), (t), (k), comme en Allemand. — (rt), (rd), (rn), (rl), (rs) sont pour (ɹ̣ṭ), (ɹ̣ḍ), etc., ou même simplement (ṭ), (ḍ), etc. Deux voyelles consécutives forment diphtongue. (u), (o), (ɔ) se lisent (ü), (o˒) ou (ʊ), (ɔ˒).

Suédois. — L’accent de force, (ə), (p), (t), (k), et les groupes (rt), (rd), etc., comme en Norvégien. Lire (u˓˕), (o˒) ou (ʊ), (ɔ˒), (ʏ˕˒). — (ɔ) est relâché quand il est bref.

Islandais. — Les consonnes finales sont dévocalisées; de même aussi (b), (d), (ɟ), (ɡ) après (s), et les groupes (dl), (dn). — (t), (d), (1), (n) sont interdentals. (hl) vaut à peu près (l̥) fortement prononcé. Lire (e˕꭪), (ø˕). — Deux voyelles consécutives forment diphtongue.

Méthode classique et méthode directe.

La méthode classique d'enseignement des langues consiste essentiellement en un travail de construction; construction lente, détaillée, progressive, des diverses parties de la langue, suivant des règles soigneusement préparées et classées d’avance. Ces règles sont celles qu’une longue observation et une analyse minutieuse ont fait découvrir dans la langue en question; mais elles sont présentées comme des lois, auxquelles doit se plier le langage, que, par une singulière fiction, les enfants sont censés construire de nouveau. On les apprend une à une, sans les raisonner, sans montrer comment elles font partie d’un tout. On les compare seulement au langage maternel, en disant, par exemple: «la queue du chat», tournez «le chat sa queue», the cat’s tail; — comme s’il s’agissait essentiellement, pour faire de l’anglais, d’infliger au français une déformation systématique. Puis on fournit à l’élève des matériaux de construction, c’est-à-dire des mots; et on lui fait construire des séries de phrases détachées sur le même modèle, dans l’espoir qu’à la longue, la règle dont ces phrases sont les applications finira par se graver dans sa mémoire: exemple:

La tête du chien. La main du garçon. Etc.
head dog hand boy

Quand on juge la dose suffisante, on passe à une nouvelle règle, et on «l’applique» de même; et ainsi de suite jusqu’à ce qu’on ait traversé toute la grammaire. Arrivé là, on peut donner à traduire des thèmes suivis, puisque toutes les «règles» qu’il faut «appliquer» sont supposées connues et étudiées; on peut aussi varier un peu les exercices, faire faire des «versions» (qui seront d’abord, elles aussi, des phrases détachées), lire un peu d’un auteur, en traduisant «d’abord mot à mot, puis en bon (?) français», faire apprendre quelque morceau de poésie ou de prose littéraire. Enfin, s’il reste du temps, l’élève pourra essayer de la lecture cursive, et même tâcher d'exprimer ses propres pensées dans l’idiome qu’il aura si laborieusement étudié. Cette méthode part d’un principe tout à fait erroné. Elle serait déjà fort critiquable, s’il s’agissait en effet de construire, d’édifier quelque chose. Pour apprendre à quelqu’un à fabriquer une machine, une bicyclette par exemple, il vaudrait mieux lui donner d’abord une idée de l’ensemble, que de lui présenter les différentes parties démontées, et de lui apprendre successivement à faire les vis, les écrous, les pédales, les rayons, puis à assembler le tout. Mais en fait il n’y a aucune analogie entre l’acquisition d’une langue et la construction d’une machine. La machine existe, c’est la parole humaine, ou si on veut, la faculté (physique et intellectuelle) de parler; il s’agit simplement d’apprendre à s’en servir d’une manière déterminée. Ce n’est pas une construction qu’il faut exécuter, c’est une habitude active qu’il faut acquérir. Pour reprendre la comparaison de la bicyclette, notre élève se trouve dans la position d’un homme qui possède une bicyclette, mais qui ne sait pas s’en servir. Lui donnerons-nous, Lui donnerons-nous, successivement, une série de leçons sur l’activité du cycliste comparée à celle du marcheur, sur le mouvement des pédales, le mécanisme du guidon, la manœuvre du frein? Non certes; nous lui montrerons comment font ceux qui savent monter, en dirigeant son observation sur les points importants; et nous l’aiderons à imiter, en lui évitant d’abord les difficultés, en guidant son imitation, en la corrigeant quand elle est défectueuse.


L’imitation, c’est là en effet le secret ouvert de la bonne acquisition d’une langue. C’est par l’imitation—l’imitation naturelle, spontanée, irréfléchie que le petit enfant apprend sa langue maternelle, sans fatigue, sans effort pénible, sans travail intellectuel exagéré. Il peut même en apprendre plusieurs simultanément. Bien des enfants apprennent en même temps, soit le breton et le français, soit le basque et l’espagnol, soit le gallois et l’anglais, soit le suédois et le finnois, soit l’arménien et le turc; il ne paraît pas que leur intelligence en soit surchargée; au contraire, ces enfants bilingues se montrent souvent plus intelligents que d’autres.

C’est aussi l’imitation, non la construction, qui doit être la base d’une méthode rationnelle pour l’acquisition d’une langue étrangère, quand il s’agit, non plus d’un bébé qui ne sait pas encore parler, mais d’un enfant qui possède déjà une langue et doit en apprendre une autre. Tous ceux qui veulent réformer l’enseignement sont d’accord là-dessus; et tous pensent que l’imitation dont il s’agit doit ressembler, dans ses grands traits, à l’imitation spontanée du bébé. C’est là en effet, notre modèle tout indiqué: le simple fait que le bébé apprend sa langue et peut en apprendre plusieurs, nous montre qu’il possède une bonne méthode, et que nous ferons bien de le prendre pour guide.

Extrait de P. Passy, Méthode directe.

Imprimerie de B. G. Teubner, Leipzig.
  1. Les ouvrages marqués d’un astérisque peuvent étre fournis à moitié prix et franco aux membres de l’Association par le secrétaire de rédaction du Maître Phonétique.)
  2. Il est clair qu’on peut représenter par l’écriture phonétique, n’importe quelle prononciation. Dans nos textes Français nous avons essayé de représenter la prononciation usuelle plus exactement la prononciation familière ralentie des personnes cultivées du Nord de la France. Mais il n’y a pas deux personnes qui parlent absolument de même, et chaque lecteur fera bien de noter les points sur lesquels sa prononciation diffère de celle que nous indiquons ici.