Exercices de dévotion de M. Henri Roch avec Mme la duchesse de Condor/04


La Rocambole, notes

Exercices de dévotion, bandeau
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LA ROCAMBOLE,
OU
NOTES ÉDIFIANTES

ET RÉCRÉATIVES.

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(1) La Grenée, Peintre très-eſtimé ; d’un pinceau tendre & voluptueux.


(2) M. de Rhuilleres, dont il s’agit ici, n’eſt pas celui qui eſt attaché aux affaires étrangeres, qui, en ſociété, eſt très-aimable, qui eſt auteur d’un excellent petit traité, en vers alexandrins, ſur les diſputes. Il ne manque à ce M. de Rhuillieres, pour avoir une très-grande réputation, que du courage. Il aime mieux, dit-il, digérer paiſiblement, que d’avoir un nom plus connu. Si nos prédéceſſeurs, qui n’avaient ni plus d’eſprit, ni plus de connaiſſances que lui, avoient ainſi penſé, nous ſerions encore dans les bois.


(3) Greüſe, Peintre d’une grande réputation. Tout le monde connaît ſon tableau de la dame de charité.

Les Peintres ſont dans l’uſage de faire venir chez eux des filles publiques, & de les faire mettre toutes nues ; lorſqu’ils trouvent des formes parfaites, ils travaillent d’après ces modèles. C’eſt ainſi que la nature ſert à la perfection de l’art. M, Greüſe paſſe pour le Peintre qui a vu le plus de modèles, & pour le mari qui, dans ſon état, a été le plus fidele. Demandez-le lui,


(4) Heureux celui. Madame dit des croix de cette vie, ce que Salomon dit de la ſageſſe. Lignum vitæ qui aprebenderit cam beatus. Prov, ch. 3, v. 18. Cette erreur eſt ſans conſéquence, comme la plupart de celles qui ne font pas renchérir le bled au marché. En théologie on a fait ſouvent des citations plus dangereuſes.


(5) Une troiſieme fois. On ne doit pas être étonné de ce triple acte de dévotion, ſur-tout quand on ſonge que Salomon a dit qu’il y avait trois choſes inſatiables. Tria inſaturabilia, infernus, terra & os vulva. Salomon, à ce que diſait M. Boulierot, Curé de S. Gervais, aurait pu dire des choſes plus utiles & plus honnêtes. Ce M. Boulierot avait beaucoup d’eſprit. Il a laiſſé en mourant cent mille écus comptant.


(6) Démoniens. Madame la Ducheſſe veut ſans doute parler des Lacédémoniens ; c’eſt par ignorance qu’elle s’exprime ainſi. On ne lui avait rien appris ; & elle était en état de tout apprendre. Elle parle aujourd’hui pluſieurs langues, ſait l’hiſtoire, la géométrie ; &c. mais elle ſe gardera bien de faire comme Madame de…… quatorze volumes en ſix ans. L’abondance eſt ſouvent ſtérile.


(7) L’Abbé de Reyrac a fait en proſe l’Hymne au Soleil. Cet Hymne, ſi fort vanté dans le Journal de Paris, eſt, ainſi que tous les diſcours des prophêtes, pauvre en penſées, mais riche en paroles ſonores. La pompe & l’abondance des expreſſions y couvre une ſtérilité générale d’idées : c’eſt un gueux vêtu de magnifiques haillons.


(8) Chatou, Triel, Maiſons, Creteil, S. Ouen, S. Denis, Vanvres, Menil-Montant, Nogent, Montreuil, Belleville, ſont des campagnes du voiſinage de Paris. Emath était une bourgade de l’Idumée. Arad, Baſan, Torgama, étaient en Syrie ; Dibon, Medaba, étaient des villes des Moabites.


(9) Les douze mois de l’année, poëme en douze chants, formant un petit volume, auquel l’auteur a joint trois volumes de notes. On commente ordinairement l’ouvrage des autres. M. Roucher s’eſt commenté lui-même. On n’a jamais pouſſé auſſi loin que lui, le privilège d’être bavard en notes. Redire ce que des hommes de génie ont dit ; imprimer ce qui eſt déjà imprimé ; vendre ce que les autres ont dit & imprimé : cela paſſe la raillerie.

On ſait la double réputation qu’eut le poëme des douze mois, avant d’être & après avoir été imprimé. Voyez ce qu’en ont dit MM. Imbert & Garat, bons juges & amis de l’auteur.

Ah ! mon cher M. Roucher, quand on a fait un poëme qui, à ſa naiſſance ne peut être lu, & qui aujourd’hui eſt profondément oublié, on doit être modeſte ; on ne doit pas ſurtout ſe permettre des ſatyres contre la Henriade, laquelle fait les délices de bien d’honnêtes citoyens. On pardonne à un homme d’être un poëte ennuyeux, mais on ne voudrait pas qu’il fût un juge ridicule.


(10) Les malins ont prétendu que l’Abbé de Voiſenon, ſous les noms barbares de Tel-Ment, de Jon-Rouk, de Ron-fer, de Seri-Rog, de Ro-Te-Sot & de Sei-batar, avait voulu déſigner MM ; Clément, Roujou, Freron, Groſier, Sautreau & Sabatier. Nous n’en croyons rien. Nous penſons au contraire qu’il a voulu parler de ſix Juifs, auſſi fameux par le mépris public dont ils ſont couverts, que par les haillons qu’ils vendent.


(11) Oſée. Dieu envoya d’abord ce petit prophete chez une femme de mauvaiſe vie, avec ordre à lui de s’évertuer avec elle, & de lui faire des enfans de proſtitution. Filios proſtitutionum. Il lui enjoignit enſuite d’aimer & de coucher avec une femme adultere. Vade & dilige mulierem adulteram.

Si on enviſageait ces ordres conformément aux idées reçues, il ſemblerait que Dieu eût pu traiter un peu mieux ſes petits prophetes, que de les envoyer chez des femmes de mauvaiſe vie.

Les grands prophetes étaient moins bien traités ; à l’un il ordonne de manger un livre de parchemin, à l’autre de ſe promener tout nu dans les rues ; à celui-ci de porter un bât, & à celui-là de manger des excrémens humains. Tout conſidéré, le traitement d’Oſée, qu’on envoye ſe gaudir avec des filles de joie, vaut encore mieux que de déjeûner comme Ezéchiel, avec une tartine de m……

Tout change, autrefois Dieu envoyait ſes prophetes à des filles de joie, & aujourd’hui, ſous peine de l’enfer, il défend à ſes prêtres de prendre pour compagnes des femmes honnêtes.

Ce qui mérite l’attention du philoſophe, c’eſt que dans la plus haute antiquité il y avait des filles publiques, à Babylonne, à Jéruſalem, à Ninive, comme il y en a à Paris, à Londres, à Rome, & dans toutes les grandes villes policées. Il y en avait dans les tems patriarchaux. Il s’en trouva une dans le déſert du tems de Moïſe. C’était une femme publique avec laquelle était couché Zambri, lorſqu’il fut tranſpercé par le pieux Phinée. Ce fut une femme publique qui cacha les eſpions que Moïſe avait envoyé à Jéricho. Samſon était avec une fille de joie à Gaza, lorſque ſur le minuit on ferma les portes de la ville pour le prendre. Dalila, de la vallée de Sorec, n’était, ce me ſemble, qu’une courtiſanne, dont le fort Samſon était éperdument amoureux.

Long-tems avant les aventures de ce Samſon, on avait vu le patriarche Juda accoler ſa bru Thamar, croyant être avec une fille publique. La mépriſe fut ſalutaire au genre humain ; car de cet inceſte il en vint Pharès, l’un des ancêtres de Jeſus-Chriſt.

Du tems de Salomon, le manege de ces filles était tel qu’il eſt aujourd’hui. Voici ce que ce Roi en dit dans le livre des Proverbes. Suppoſez toutefois que ce Roi ſe ſoit amuſé à enfiler ces proverbes, dont les uns renferment des erreurs, & les autres ſont faſtidieux par leurs répétitions.

Étant à la fenêtre de ma maiſon, j’apperçois un jeune inſenſé qui, ſur le ſoir, & lorſque la nuit devient obſcure, paſſe dans le coin d’une rue près la maiſon d’une fille. Je la vois venir au-devant de lui, en ſa parure de courtiſanne ; elle prend ce jeune homme, le baiſe & le careſſe effrontément, lui diſant : je me ſuis acquittée de mon vœu aujourd’hui. C’eſt pourquoi je ſuis venue au devant de vous, déſirant vous careſſer. Venez : enivrons-nous de plaiſir juſqu’à ce qu’il faſſe jour. Jouiſſons de ce que nous avons tant déſiré. Mon mari eſt abſent pour long-tems. — Entraîné par ſes careſſes, le jeune homme la ſuit comme un agneau qui va à la mort en bondiſſant. Prov. chap. 7.

Remarquons que cette donzelle dit qu’elle a fait ſa priere. Hodie vota mea Deo reddidi. Il en eſt ainſi de nos jours : point de fille de joie, qui de temps en temps ne faſſe dire des meſſes, pour que Dieu lui envoye des chalans. L’Abbé de Voiſenon en avait trouvé pluſieurs qui lui avaient aſſuré que cela leur avait toujours réuſſi. Cet Abbé ſe plaiſait à conter les ſcrupules & la délicateſſe de conſcience de la Tante-Miel, l’une des plus honnêtes pourvoyeuſes de Paris.

Il lui demanda un jour ſi elle faiſait bien ſes affaires, & elle répondit très-chrétiennement : ah ! M. l’Abbé, quand on fait ſon métier en honneur & conſcience, Dieu ne nous abandonne jamais.

L’Abbé une autrefois lui témoignait des craintes ſur la ſanté d’une demoiſelle qu’elle lui avait envoyée. Pour qui me prenez-vous, dit-elle, n’ai-je pas, tout comme vous, une ame à ſauver ?

Laiſſons les filles & M. l’Abbé. Revenons au prophete Oſée. La ſeconde femme chez qui Dieu lui ordonna d’aller s’amuſer, lui coûta quinze pieces d’argent & une meſure & demi d’orge. Quindecim argenteis & coro & dimidio hordei. Il y a des filles de nos jours, qui coûtent beaucoup plus, & d’autres beaucoup moins. Il y en a de vingt, de trente, de quarante mille francs par an. Il y en a à douze ſous pour les laquais, & à vingt-quatre pour les étudians, ſoit en chirurgie, ſoit en théologie.


(12) Tel que Salomon. J’irai, dit ce Roi, en parlant d’une viſite qu’il veut faire à la Sulamite, j’irai au mont de la myrrhe & à la colline de l’encens. Vadam ad montem myrrhæ & ad collem thuris. Cent commentateurs, Eſpagnols, Portugais, Italiens, Flamands, François, Allemands, Polonais, ſe ſont ſignalés pour expliquer ce paſſage.


(13) Sous la forme d’un maître ouvrier. Dieu demanda au prophete Amos, quid vides ? Que voyez-vous ? Et Amos répondit, je vous vois ſur une muraille avec une truelle à la main. Je ne me ſervirai plus de truelle avec mon peuple, lui réplique le Seigneur, je ne recrépirai plus ſes murailles. Et ecce ponam truellam, non dejiciam ſuper indue eum.


(14) Quoique ſon né. La comparaiſon que Salomon fait du né de ſa maîtreſſe avec une tour, prouve que de ſon tems les grands, nés étaient à la mode chez les femmes juives. Il comparait auſſi ſon ventre à un boiſſeau. Les gros ventres ſont regardés de nos jours, comme une imperfection dans la taille des femmes ; mais les grands nés ont encore leur prix.


(15) Le ſavant Baumé, fameux Apoticaire ; il eſt de l’Académie des Sciences ; il eſt auſſi le premier qui ait dépouillé l’opium de ſa partie enivrante.

Il eſt bon d’obſerver que M. Henri Roch dans cet endroit de ſa priere, parle par inſpiration. Perſonne n’ignore que dans l’état d’inſpiré, un homme fait peu de cas de l’exactitude, que ſouvent il ne ſait ce qu’il dit, témoins tous ces livres orientaux, dans leſquels les auteurs inſpirés, ou ſe diſant inſpirés, ont laiſſé tant d’abſurdités & tant d’erreurs ſur la phyſique, ſur la chymie, ſur la géométrie, ſur l’aſtronomie, la géographie & l’hiſtoire naturelle. La bible en eſt remplie.


(16) Lucienne, ſitué ſur la machine de Marly, a un point de vue des plus beaux & des plus agréables. Cette campagne appartient à Madame la Comteſſe du Barry, jadis en grande faveur.


(17) Engaddi. Les raiſins d’Engaddi étaient fort renommés. Les prophetes en parlent avec éloge. Jacob en béniſſant ſon fils Juda, compare ſes yeux au vin.


(18) Le Sanci. Ce diamant eſt en effet le plus beau de la couronne de France ; il vint d’Antoine, Roi de Portugal. Ce Roi détrôné & réfugié en France, mit pour vivre ce diamant en gage ; il penſait qu’il valait encore mieux avoir du pain que des diamans. Les malheurs avaient formé ce Roi.


(19) Allegrain, excellent ſculpteur. Pendant tout un été, on courut à ſon atelier pour voir ſa ſtatue de Diane, qui eſt un chef-d’œuvre, & de laquelle quelques jeunes gens, dit-on, devinrent amoureux, quoiqu’elle fût de marbre.


(20) Le beau Gabriel. Il n’eſt point de peintre, qui ne cherche à exceller, en peignant le tableau de l’Annonciation. Ils aiment à repréſenter l’ange Gabriel, qui tout-à-coup parait aux yeux d’une jeune Vierge, montrant une jambe belle & nue ; une cuiſſe bien nourrie & toute nue ; un derriere à demi découvert, & une légere draperie voltigeant & couvrant à peine cette partie de l’homme, qui dans un Ange, eſt fort inutile ; mais dont les alentours peuvent, en un ſeul clin d’œil, embraſer les ſens de toutes les vierges juives & françaiſes.

J’ai été témoin de l’effet prodigieux que dans l’égliſe d’un village près de Paris, fit un pareil tableau ſur l’imagination d’une demoiſelle bien née, ſage & vertueuſe juſqu’alors.


(21) Sanir. Les prophetes dans leurs viſions parlent des ſapins de Sanir & des chênes de Baſan. Ces chênes étaient très-renommés ; mais un peu moins que ceux de Dodone qui prophétiſaient. Les prophéties de ces arbres ſont tombées dans le diſcrédit. Chaque choſe a ſon tems ; nous nous en tenons toujours à celles des grands & des petits prophetes juifs.


(22) Cinq anus d’or. Dieu, pour punir les Philiſtins de ce qu’ils retenaient ſon arche, les affligea d’hémorroïdes, & leur fit pourrir le derriere. Pour ſe délivrer de cette horrible maladie, ils lui offrirent cinq anus d’or. Dieu fut ſenſible à leur offrande & les guérit. Cette offrande n’eſt plus d’aucun prix aux yeux de Dieu. J’en ai fait la triſte expérience.


(23) Andreſi eſt un des villages des plus rians des environs de Paris. Il eſt ſitué au bas de la montagne du Hauti, au confluant de l’Oiſe & de la Seine. L’air d’Andreſi eſt très-pur, ſes vins ſont bons, ſes ceriſes délicieuſes, & Mademoiſelle de Bourbon Condé qui l’habite, une princeſſe adorable.


(24) Sein Virginal. Comment peut-on appeller ſein virginal le ſein de Madame la Ducheſſe ? C’eſt, ſans doute par un trope ou figure de rhétorique dont j’ai oublié le nom. Le lecteur, qui ſera curieux de le ſavoir, peut s’adreſſer à M. Bauzée de l’Académie françaiſe. Il n’en coûte que deux ſous par la petite poſte, &, en vérité, pour une figure d’académie, deux ſous ſont bien peu de choſe !


(25) Chérubins. Il n’eſt que trop ordinaire de confondre les Chérubins avec les autres puiſſances céleſtes ; c’eſt, comme ſi on confondait nos grands Seigneurs à talons rouges & les valets de pied du Prince.

Dans le ciel il y a des chérubins, des ſéraphins, des anges, des archanges, des trônes, des dominations, des potentats, des vertus, des forts, des légers, des ſouffles, des flammes, des étincelles, &c.

Si on veut s’inſtruire à fond de la hiérarchie de ces êtres, on peut lire l’ouvrage d’un docteur de Sorbonne ſur les aîles des chérubins. Cet ouvrage qui valut à ſon auteur le titre de Docteur ailé, n’a que neuf volumes in-folio : c’eſt le comble du génie d’avoir en ſi peu de volumes dit tant de choſes, de ſi curieuſes & de ſi utiles.

Les théologiens de Sorbonne ont, ma foi, rendu de très-grands ſervices à l’état. Que Dieu & le Roi les maintiennent en leur garde contre ces malheureux philoſophes qui prétendent qu’une frérie de cordonniers eſt encore plus néceſſaire dans Paris, que des théologiens, qui diſputent contre ces malheureux philoſophes, qui aſſurent que M. Parmentier, qui a perfectionné l’art de la boulangerie, vaut cent fois plus que le Docteur ailé ; qui déſirent que les étables de Sorbonne ſoient bientôt converties en un beau college de medécine & de pharmacie.

St. Bonaventure a auſſi beaucoup écrit ſur les chérubins & ſur les ſéraphins. Ce fut un chérubin, qui fut mis en ſentinelle à la porte du paradis terrestre, brandiſſant une épée flamboyante pour empêcher Adam & Eve de rentrer dans ce ſéjour de délices.

C’était des chérubins, qui précédaient les roues myſtérieuſes, qu’Ezechiel vit ſous le firmament. Quand Dieu allait en voyage ; c’était ordinairement un chérubin, qui lui ſervait de monture, aſcendit ſuper Cherubin & volavit ; & c’eſt peut-être à cauſe de cela que le prophete donne aux chérubins le nom d’animaux, animalia.

Papa, diſait Voltaire dans ſon enfance, quelle eſt cette bête qu’un chérubin ? Y en a-t-il à la foire ? Quand il y en aura, je vous prie de m’en faire voir un.


(26) Avec les cometes. Nous avons un excellent traité, qui contient des choſes neuves & des vérités utiles en aſtronomie ſur les marches, les promenades & les courſes de ces aſtres ; mais il n’y eſt pas dit un mot, ni de leurs chevelures, ni de leurs queues, ni de leurs danſes, & c’eſt le ſeul défaut que le pere Berthier de l’oratoire trouve à cet ouvrage ſur les cometes.

L’auteur de cet ouvrage eſt M. Dionis du Séjour, Conſeiller de Grand-Chambre, Magiſtrat auſſi integre, auſſi judicieux, auſſi paiſible qu’Académicien éclairé.

Je ne ſais quel bon citoyen a dit, que ſi parmi les peres conſcripts il y en avait beaucoup qui le valuſſent, on ne déſeſpérerait pas du ſalut d’Iſraël.


(27) Agag. On ſait que Saül qui, en cherchant des âneſſes, avait trouvé un royaume, uſa de miſéricorde envers Agag, après l’avoir vaincu. Cette miſéricorde, comme on ſait encore, déplût à Dieu & à ſon prêtre Samuel, qui, pour réparer la faute de Saül, coupa en petits morceaux ſa majeſté Amalécite.

Voltaire a dit quelque part, que le prêtre Samuel mit ce Roi Agag en hachis : c’eſt-là une des petites goguenarderies de ce grand’homme. Les meilleurs interpretes penſent au contraire, que Samuel en fit une fricaſſée avec une ſauſſe à la maître d’hôtel.

Quelques Jéſuites, tels que Dina, Tambourinus & Gambacurta ont bien prétendu que ſa majeſté Agag fut mis en haricot. Mais ce ſentiment n’a jamais été que probable, & même, depuis la deſtruction des Jéſuites, il eſt entierement rejetté par les théologiens de Sorbonne. Voyez ce qu’en dit Marcillon dans le Cuiſinier bourgeois.


(28) Cataractes. Qu’entend-on par cataractes ? Qu’eſt-ce qu’un Ciel ? Qu’eſt-ce qu’un firmament ?

C’eſt-là le ſujet d’un prix, que nous propoſons aux érudits de toutes les univerſités, ſans en excepter les profeſſeurs du college de Tours, de Poitiers, de Bordeaux, de Toulon, de Nantes, de la Rochelle & de Clermont en Auvergne. Le prix ſera un chérubin vivant, ou un chérubin en or du poids de mille francs. Les diſcours écrits en français feront adreſſés, francs de port, à M. le Marquis de Condorcet, Secrétaire de l’Académie des ſciences de Paris.


(29) On l’eut accuſé d’être ſorcier. Dans le quatorzième ſiecle un docteur de Sorbonne, nommé Guillaume Edelin & Prieur de St. Germain en Laye, eut une intrigue avec une jeune Dame de condition. Elle devint groſſe. Le docteur de Sorbonne fut arrêté & accuſé d’être ſorcier. On devait le faire brûler ; mais il rachetta ſa vie, en s’avouant coupable ; en s’accuſant d’avoir été au ſabbath ; d’y avoir adoré le diable ſous la forme d’un bouc ; de lui avoir baiſé le derriere : enfin d’être un vrai ſorcier. Il en fut quitte après cette confeſſion pour une priſon perpétuelle, & pour jeûner le reſte de ſa vie. C’était s’en tirer à bon marché ! Il y a, ma foi, des gens heureux.

Depuis le docteur Edelin il n’y a plus de ſorcier en Sorbonne : c’eſt du moins le ſentiment de maître Ribaudier, Syndic de ladite école.


FIN DES NOTES.