Exécution des criminels en Chine

EXÉCUTION DES CRIMINELS EN CHINE.

Tous les journaux ont rapporté, il y a plusieurs mois, les horribles détails de l’assassinat de l’équipage du navire le Navigateur, et la prompte justice qui a été faite des meurtriers à Canton. Cette déplorable affaire, en attirant l’attention de tous les Européens qui se trouvaient sur les lieux, leur a fourni l’occasion de remarquer dans la législation criminelle des Chinois, quelques usages qui peuvent paraître singuliers, sinon bizarres.

Au moment où les coupables vont être décapités, on les fait mettre à genoux, la figure tournée du côté où se trouve le trône impérial ; et cette position indique qu’ils reconnaissent l’équité de leur condamnation. Ils ont grand soin de s’habiller avec le plus de luxe et propreté possible, persuadés qu’ils arriveront avec ce costume dans un autre monde, ce qui n’empêche pas, cependant, que leur cadavre soit entièrement dépouillé peu de temps après l’exécution.

Les exécuteurs à Canton sont des soldats chinois, qui reçoivent pour ces fonctions une solde annuelle et une demi-piastre pour chaque individu décapité. Lorsqu’un condamné doit avoir les membres coupés, cette somme augmente en proportion ; mais, en général, les employés chargés de la payer en retiennent une partie. Un des exécuteurs, établi depuis trente ans à Canton, disait avoir mis à mort, dans cet espace de temps, environ dix mille condamnés. Pendant que les pirates infestaient ces parages, il en a décapité plus de mille dans le courant d’une année.

Avant d’être conduits au lieu d’exécution, les criminels reçoivent, à la porte de la prison, un morceau de viande de cochon, quatre gâteaux et deux verres d’eau-de-vie. Ces mets sont considérés comme une espèce de sacrifice que la plupart des condamnés mangent avec beaucoup de sang-froid et de tranquillité.

On fait ordinairement grâce de la vie au condamné qui n’a ni enfans ni frères qui puissent perpétuer sa famille. Dans l’affaire du Navigateur, il fut sursis à l’exécution d’un jeune homme, pour établir par une enquête qu’il était fils unique, et que depuis trois générations sa famille n’avait été perpétuée que par un seul mâle ; la grâce du condamné fut le résultat immédiat de cette particularité, constatée par quelques témoins.