Enfants et Animaux/La Voleuse découverte


Librairie Picard-Bernheim et Cie (p. 79-99).



LA VOLEUSE DÉCOUVERTE




NE DITES JAMAIS DE MENSONGE


Je vous assure, maman, disait la petite Sylvie, que ce n’est pas moi qui ai cassé ce carreau. Paul et Jean se battaient à coups de pierres et une d’elles est justement venue frapper dans la fenêtre.

— Méchante enfant, lui dit sa mère en la secouant rudement par le bras, te voilà encore à me faire des contes et à accuser les autres des sottises que tu fais.

— Mais, maman, je vous assure que ce n’est pas moi. Je n’ai pas bougé de ce coin.

— Tu n’as donc pas honte de mentir ainsi ?

— Maman, je vous jure…

— Ne jure pas. À quoi cela sert-il ? nous ne te croyons plus.

— Qu’y a-t-il donc ? demanda le père qui rentrait à l’instant du travail, et qu’a fait Sylvie ?

La mère de Sylvie était chez l’épicier.

— Je l’ai laissée seule, répondit la mère, pendant que j’allais chez l’épicier. Il n’y avait personne près de la maison, et quand je suis revenue, j’ai trouvé ce carreau de vitre cassé. Maintenant elle ose prétendre que ce n’est pas elle qui a fait cela.

— Papa, dit l’enfant en pleurant, je t’assure que ce sont les garçons qui ont jeté une pierre par là, en se battant.

— Je voudrais pouvoir te croire, reprit le père tristement ; mais, si souvent déjà tu nous as menti que nous ne pouvons plus ajouter foi à ce que tu nous dis. Comment ne sens-tu pas toi-même combien ce défaut est horrible ? et pourquoi ne cherches-tu pas à t’en corriger ?

— Je t’assure que j’essaye, cher papa, mais on ne veut plus me croire et, à chaque instant, je suis grondée ou punie pour des choses que je n’ai pas faites.

— Eh bien ! ce soir tu seras punie pour quelque chose que tu as fait, reprit brusquement la mère, car tu vas aller te coucher sans souper.

Sylvie monta dans sa chambre et se mit au lit en pleurant. Bientôt elle entendit les rires et les bavardages des autres enfants qui rentraient et soupaient gaiement. Oh ! comme elle maudissait ce vilain défaut qui lui occasionnait tant de chagrin, car cette fois elle était innocente et, le lendemain, on trouva le caillou sous un meuble, et son frère Paul avoua qu’il l’avait lancé.

Sylvie avait beaucoup de bonnes qualités ; elle était propre, active, laborieuse et pleine d’intelligence et d’esprit. Malheureusement, lorsqu’elle était petite, on riait des drôles de choses qu’elle disait et elle s’était habituée à inventer toutes sortes de contes. Il n’y aurait pas eu de mal à cela, si elle ne les avait pas donnés comme vrais : mais peu à peu elle prit l’habitude de répéter autrement ce qu’elle entendait dire et de mentir pour s’excuser, quand elle avait commis quelques fautes. Ses camarades d’école l’appelaient la petite menteuse, et cependant cela ne les empêchait pas de lui demander souvent de leur raconter des histoires, parce qu’elle savait le faire d’une manière amusante.

Un matin, en partant pour l’école, elles l’entourèrent et lui dirent :

— Oh ! Sylvie, raconte-nous une belle histoire, aujourd’hui ; mais une histoire vraie, tout à fait vraie.

— Quelle bonne idée ! dit une autre. Tout en marchant, cela fera passer le temps, car la route est si longue d’ici à l’école !

En effet, elles étaient toutes des filles de fermiers, et demeuraient assez loin de la ville.

— Je le veux bien, dit Sylvie ; marchez à côté de moi, mais ne me touchez pas, car vos mains sont si noires qu’elles me saliraient. Vous ne les lavez donc pas avant de partir ?

— À quoi bon ? dit Nancy, la plus malpropre de la bande, elles se salissent tout de suite.


L’HISTOIRE DE LA PETITE ANNETTE


— Eh bien ! reprit Sylvie, je vais te raconter l’histoire d’une petite fille qui te ressemblait et qui s’appelait Annette. Elle ne pouvait souffrir de se laver et jetait des cris perçants toutes les fois que sa mère voulait la débarbouiller ou la peigner.

Elle mangeait avec ses doigts, répandait sa soupe sur ses vêtements, et son plus grand plaisir était de tripoter les choses les plus sales. Voilà que, tout à coup, on s’aperçut que son nez et sa bouche s’allongeaient en forme de museau, que ses bras et ses jambes devenaient des pattes et qu’il lui poussait une petite queue qui se tortillait comme un tire-bouchon. Enfin, un beau jour, son père ne trouva plus en rentrant chez lui qu’un vilain cochon à la place de sa petite fille.

— Oh ! Sylvie, s’écria Nancy, nous t’avions demandé une histoire vraie ; celle-là n’est bien sûr pas vraie, et je ne l’aime pas du tout.

— Laisse-la donc finir, dirent les autres enfants.

Sylvie continua : — Le papa prit un bâton et chassa l’animal jusque dans la cour, où il se réfugia sur un tas de fumier. Après avoir grogné, fouillé, mangé des ordures pendant toute la journée, la petite Annette, quand le soir fut venu, voulut rentrer à la maison. Aussitôt tout le monde se mit à la chasser et à la battre en lui disant : — Veux-tu te sauver, vilain animal ! tu sens mauvais et tu es dégoûtant ! Il lui fallut donc retourner sur son fumier où elle fit d’assez tristes réflexions sur sa position.

Le lendemain elle essaya de nouveau d’aller trouver ses parents ; même traitement, elle fut chassée plus cruellement encore. Alors elle se dit que si elle ne pouvait pas redevenir une petite fille, au moins elle pouvait cesser d’être un sale et puant animal. Elle alla donc à l’abreuvoir, entra dans l’eau, se roula, se frotta et sortit de là fraîche et rose. Alors, elle se regarda dans le miroir de l’eau et trouva qu’elle ressemblait déjà beaucoup moins à un porc.

Au lieu de retourner se vautrer dans son fumier, elle se mit dans l’endroit le plus propre de la cour et mangea délicatement des épluchures de légumes. Le soir nouveau bain. Le lendemain de même, et au moment où elle se séchait au soleil, sa mère se précipita vers elle en disant : Ah ! voilà ma chère petite Annette que j’avais crue perdue ! et, la prenant dans ses bras, elle la porta à son papa qui pleura de joie en l’embrassant.

— Eh bien ! dit Sylvie en finissant, n’est-elle pas jolie mon histoire ?

— Oui, répondirent ses compagnes, seulement tu ne peux vouloir la faire passer pour vraie et nous faire croire qu’une petite fille peut être changée en cochon.

Tenez, ce vieil âne a été un paysan.

— Certainement qu’elle est vraie ! J’ai vu la petite Annette en cochon et en petite fille. Ne savez-vous pas que lorsqu’on a un très grand défaut cela vous fait changer en un animal qui a ce défaut-là ? Tenez, ce vieil âne ! Eh bien ! il a été un paysan très entêté que mon père connaissait. Et moi, j’ai eu autrefois une amie qui était très bavarde et un peu voleuse ; elle a été changée en pie et très souvent elle vient me faire des visites dans ma chambre.

— Ton amie vient te faire des visites ? dit Nancy.

— Eh non ! la pie. Un matin, j’étais encore à moitié endormie, lorsque j’entends toc, toc, à ma fenêtre. Je me lève assez effrayée et je vois une belle pie avec son gros bec, sa longue queue et son habit noir et blanc. Elle semblait vouloir entrer. Je lui ouvre la fenêtre, elle vole sur la table et je vois qu’elle a aux pattes de belles petites bottes en drap rouge.

— Une pie avec des bottes ! quel conte tu nous fais là !

— Rien n’est plus vrai pourtant. Elle s’est mise à sauter, à voleter, à tout examiner dans ma chambre de la manière la plus drôle du monde ; seulement, lorsque j’ai voulu la toucher, elle m’a donné deux ou trois grands coups de bec et s’est envolée.

Depuis, elle est revenue bien souvent, et comme ma chambre est très chaude, et que je laisse la fenêtre ouverte, la nuit quelquefois, en m’éveillant, je la trouve déjà là, touchant à tout, furetant partout et me jouant toutes sortes de niches. Mais, nous voici arrivées devant la ferme où demeure ma sœur Maria. J’ai une commission à lui faire. Allez toujours devant, je vous rattraperai.

La pie voleuse.

Maria était la sœur aînée de Sylvie. Voyant qu’il y avait beaucoup d’enfants à la maison et que ses parents avaient bien de la peine à se tirer d’affaire, elle avait demandé à se placer comme petite bonne chez une riche fermière. Elle travaillait de toutes ses forces et on était très content d’elle. Sylvie venait lui demander, de la part de ses parents, si elle pourrait venir dîner le dimanche suivant avec eux.

— Oui, dit Maria, toute joyeuse, et mes maîtresses ont même eu la bonté de me permettre de rester jusqu’à lundi matin, à la condition que je serai de retour ici de très bonne heure.

— Oh ! tant mieux ! s’écria Sylvie, comme je serai contente de t’avoir encore à coucher dans ma chambre ! Sais-tu que je ne suis pas très rassurée, comme cela toute seule dans le haut de cette tourelle ? La première fois que la pie est venue j’ai eu bien peur.

— La pie ! quelle pie ? demanda Marie.

— Comment, reprit Sylvie, je ne t’en avais pas encore parlé ? une belle pie avec des bas rouges.

— Sylvie, Sylvie, dit Maria tristement, voilà encore que tu me fais des contes. Allons ! cours vite à l’école, ou tu seras en retard, et à dimanche.


MARIA ACCUSÉE DE VOL


Cette journée du dimanche se passa très agréablement. Toute la famille était heureuse d’avoir la bonne Maria, si douce et si prévenante. Elle coucha dans le même lit que Sylvie et toutes deux ne s’endormirent qu’après avoir bien bavardé. Sylvie ne parla plus de la pie, puisqu’elle voyait qu’on ne voulait pas la croire ; mais elle espérait bien qu’elle viendrait le lendemain matin et qu’elle pourrait la montrer à sa sœur ; car si l’histoire du cochon n’était qu’une fable qu’elle avait inventée, celle de la pie était parfaitement vraie.

Justement, le lundi matin, l’oiseau ne vint pas, tandis que le mardi, la petite fille en s’éveillant le trouva déjà sautant, jasant et farfouillant autour de son lit.

Ce jour-là, au milieu de la classe de l’après-midi, Sylvie fut effrayée de voir arriver son frère Jean, qui, l’appelant à la porte, lui dit d’un air tout bouleversé, qu’il fallait qu’elle revînt de suite à la maison ; qu’il y avait des gens qui cherchaient dans sa chambre, que sa mère pleurait, qu’il était arrivé quelque chose à Maria, il ne comprenait pas quoi.

— Oh ! ma pauvre sœur ! que peut-il lui être arrivé ? s’écria l’enfant. Courons vite. Et ils partirent à toutes jambes.

Il était arrivé à la pauvre Maria que sa maîtresse l’accusait de l’avoir volée. Une broche en or, des boutons de manchettes, une chaîne et des médailles avaient disparu. Ces objets étaient serrés dans un petit meuble dont la fermière avait la clef, mais dans lequel Maria cherchait quelque chose le samedi précédent, justement au moment où Sylvie était venue lui parler. Le plaisir de voir sa sœur lui avait fait oublier de refermer le meuble qui était dans une chambre inhabitée, et depuis, elle n’y avait plus pensé. On savait que le lendemain elle avait été coucher chez ses parents, et on pensait qu’elle pouvait y avoir caché ces objets, car chez elle on n’avait rien trouvé.

Au moment où Sylvie arriva, on avait déjà cherché dans toute la maison et dans son propre lit ; cachés entre le bois de lit et la paillasse, on avait trouvé la chaîne, les médailles et les boutons. La broche seule manquait ; on ne pouvait guère douter de la culpabilité de Maria, et on allait la conduire en prison.

La pauvre fille sanglotait.

— Ce n’est pas elle ! s’écria Sylvie dès qu’elle eut compris de quoi il s’agissait. Je ne l’ai pas quittée d’un instant. Elle n’a rien caché. J’en suis sûre. D’ailleurs ces objets n’étaient pas là hier, je les aurais bien vus ! Puis, s’arrêtant tout à coup : — La pie ! s’écria-t-elle, c’est la pie qui les a apportés là, j’en suis certaine. Je me rappelle maintenant qu’elle avait quelque chose de brillant dans son bec, ce matin, quand elle furetait par ici.

— Ah ! dit un des agents de police, si vous avez une pie, c’est différent. Ces oiseaux sont très voleurs et aiment beaucoup ce qui brille. Comme il y avait une fenêtre ouverte en face du meuble où se trouvaient les bijoux, elle a très bien pu les prendre et les apporter ici. Où est-elle votre pie ?

— Nous n’avons pas de pie, dit le père d’un air embarrassé. Je ne sais ce que l’enfant veut dire.

— Ce sont des contes qu’elle vous fait là, dit une méchante voisine. C’est une menteuse qui ne dit jamais un mot de vérité.

— Le fait est, dit une autre, que nous ne connaissons pas une seule pie apprivoisée dans tout le voisinage.

— Il y en a une pourtant, reprit Sylvie, puisqu’elle vient très souvent dans cette chambre ; seulement, comme elle entre par la fenêtre, les autres personnes de la maison ne la voient pas.

— Comment expliques-tu, demanda l’agent, que, recevant de si singulières visites, tu n’en aies parlé à personne ?

— J’en ai parlé quelquefois, répondit l’enfant, mais on ne m’a pas crue et je n’ai plus rien dit.

— Et on ne peut pas te croire non plus maintenant, puisque tu as la réputation d’être menteuse.

En disant ces mots, l’agent se tourna vers Maria, et, lui prenant le bras, lui dit : Allons, ma pauvre fille, il faut venir en prison ; si tu es innocente, on te relâchera.

Quelle position pour la malheureuse Sylvie ! voir sa sœur accusée, traitée comme une voleuse, la savoir innocente et ne pouvoir convaincre personne ! ses parents mêmes ne la croyaient pas. Oh ! comme elle maudissait son funeste défaut !

— Monsieur ! Monsieur ! cria-t-elle à l’agent, si je retrouve la pie, relâchera-t-on Maria ?

— Sans doute, si tu peux prouver qu’elle a pris les objets, lui fut-il répondu.


LA PIE VOLEUSE


L’idée qu’elle pouvait faire quelque chose pour prouver l’innocence de sa sœur rendit un peu de calme à Sylvie. Oh ! comme elle désirait revoir la pie ! et justement, il se passa deux longs jours sans qu’elle reparût. Le troisième, en s’éveillant, Sylvie eut le bonheur de voir l’oiseau sur la table de sa chambre. Elle se lève et sort bien doucement, pour aller chercher des témoins qui puissent dire l’avoir vue.

Il était de grand matin, et tout le monde dormait encore. Elle fait lever son père et une des filles de ferme et remonte avec eux dans sa chambre. Hélas ! elle n’avait pas pensé à fermer sa fenêtre et la pie était repartie sans laisser aucunes traces. Son père et la servante, croyant qu’elle les avait réveillés pour rien, se fâchèrent fort et dirent qu’une autre fois ils ne bougeraient plus.

Les parents de Maria étaient bien tourmentés, bien malheureux. Ils ne croyaient certainement pas que leur fille fût coupable, mais ils ne croyaient pas non plus l’histoire de la pie, parce qu’ils ne l’avaient jamais vue.

La chambre de Sylvie était, comme nous l’avons dit, tout en haut d’une tourelle et la seule de la maison dont les fenêtres donnassent d’un côté où il y avait de grands arbres, de sorte que l’oiseau volait des arbres dans la chambre et de la chambre dans les arbres sans être remarqué de personne.

Pendant ce temps, la pauvre Maria était toujours en prison, malade de chagrin, et Sylvie s’en désolait. À force de réfléchir à ce qu’elle pourrait bien faire, elle finit par se dire qu’une pie qui a du drap rouge cousu autour de ses pattes doit avoir été élevée et apprivoisée par quelqu’un et qu’il fallait tâcher de trouver où elle allait, puisqu’elle ne restait pas dans ce voisinage.

Elle avait vu qu’elle s’envolait toujours du même côté, et un jour, elle mit un gros morceau de pain dans sa poche, et au lieu d’aller à l’école elle se mit à marcher de ce côté-là.

Quand elle fut à une certaine distance, elle commença à s’informer si on ne connaissait pas une pie apprivoisée qui avait des bas rouges aux pattes. Pendant longtemps on lui répondit non, toujours non. Elle commençait à se décourager, lorsque quelques petits garçons lui dirent avoir souvent vu un semblable oiseau passer en volant, ou perché sur le haut d’un arbre. Elle se remit donc en marche avec plus d’ardeur que jamais.

Vers la fin de la journée, le découragement la prit de nouveau. Elle était bien fatiguée, elle avait faim, car son pain était mangé depuis longtemps. Ce qui l’inquiétait surtout, c’est que la nuit approchait et qu’elle n’était pas du tout sûre de pouvoir retrouver son chemin pour revenir à la maison. Elle commençait à ne plus savoir que faire, quand elle arriva auprès d’une belle propriété et vit de loin un jeune garçon qui se promenait en tenant sur son doigt quelque chose de noir et blanc. Elle s’avance : oh bonheur ! c’est un oiseau, c’est la pie ! Il n’y a pas à en douter ; voilà les bottes rouges. La grille est ouverte, elle entre et s’approche du jeune garçon. Arrivée près de lui, le courage lui manque pour s’expliquer, et elle fond en larmes. Étonné, effrayé du triste état où il voit la pauvre enfant, le jeune homme appelle sa mère. On entoure Sylvie, on la questionne doucement, et elle raconte toute l’histoire.

— Comment, dit le jeune garçon, qui se nommait Georges, cette coquine de Margot profite de ce que je ne suis pas levé le matin pour aller si loin, et faire de si mauvais coups ? Mais maintenant, comment prouver aux juges que c’est bien elle qui est la voleuse ? Pour mon compte, je n’en doute pas, car je sais qu’elle a la passion de tout ce qui est en or.

— Tous les objets ont-ils été retrouvés ? demanda la dame.

— Non, répondit Sylvie, il manquait encore une broche en or et une pièce de monnaie percée d’un trou.

— Georges, dit la mère, si tu cherchais dans toutes les cachettes de ta vilaine bête, peut-être les y trouverais-tu.

— C’est une bonne idée, s’écria le jeune garçon, je sais où elle a commencé à faire son nid ; peut-être y a-t-elle caché ces objets.

Il partit en courant et, peu de temps après, revint d’un air triomphant. Il n’avait rien trouvé dans le nid, mais tout près de là, ayant déplacé un vieux sac de toile qu’on avait laissé à terre, il avait trouvé dessous toute une collection d’objets, qu’il versa sur les genoux de sa mère.

— Oh ! dit Sylvie, voici la broche, la pièce d’argent et un dé qui est à moi ! la coquine l’a pris dans ma chambre, et je le croyais perdu.

— Et des pelotons ! et des sous ! et des ciseaux ! ajouta la dame. Décidément, Georges, si tu veux garder cet oiseau, il faut que tu le mettes en cage. Tu vois l’inconvénient de le laisser en liberté. Allons, ma pauvre petite, viens au château te restaurer un peu. Pendant ce temps, on attellera la voiture et nous te reconduirons chez toi. Nous emporterons Margot, et j’espère que, dès ce soir, ta sœur pourra être remise en liberté et que, à l’avenir, tu ne déguiseras plus jamais la vérité.

— Oh ! Madame, s’écria Sylvie, j’ai été trop sévèrement punie pour n’être plus jamais tentée de recommencer.

En effet, l’innocence de Maria fut complètement reconnue et ses maîtres, désolés de l’avoir faussement accusée et de lui avoir causé tant de chagrin, lui firent un beau cadeau et augmentèrent ses gages.

Quant à Sylvie, depuis ce jour-là elle fut la petite fille la plus véridique du monde ; aussi, alors même que ce qu’elle disait paraissait extraordinaire, on la croyait toujours sans hésiter.