Encyclopédie moderne/ou Bibliothèque, 2e éd., 1841/Académie de marine

ACADÉMIE DE MARINE. Il existait sous ce nom, avant la révolution, une société savante composée d’hommes instruits dans les différentes branches de la science de la marine. Les premiers fondements de cette association furent jetés, en~ 752, par quelques oficiers de marine et employés supérieurs du port de Brest, qui se réunissaient de temps en temps pour conférer sur des sujets relatifs à leurs fonctions. Sur leur demande, le ministre d’alors, M. Rouillé, donna à leur société ; avec · ùne organisation régulière, le litre d’académie de marine. Dès sa naissane, cette académie se distingua par d’utiles travaux et rendit d’impOrtants services à la marine ; mais la guerre qui éclata ~en ·~ 756 lui porta un coup funeste en dispersant ses membres, ce qui engagea Je ministre à arrêter le paiement des fonds assignés à l’académie. Au retour de la paix , plusieurs officiers d’un mérite éminent et quelques administrateurs éclairés travaillèrent au rétablissement de cette société. En~ 769, le duc de Praslin la reconstitua sous le titre d’académie royale de marine ; Il n’entre pas dans notre plan de faire l’énumération des travaux de cette académie ; les lecteurs curieux de les connaitre peuvent consulter ses mémoires :il suf6td’en citer quelques-uns , tels que le perfectionnement des moyens d’observer à la mer, l’invention du cercle répétiteur, la confection des cartes marines les plus impOrtantes, la description claire et méthodique de la plupart des arts de la marine, la traduction des ouvrages de plusieurs ·sa vants étrangers, etc. La guerre de n78 , quoique peu décisive , montra les heureux fruits retirés de l’établissement de l’académie oigitized by de marine, dont elle n’imerrompit pas entièrement les utiles opérations. Cette académie disparut dans la tourmente révoluUonnaire avec toutes les instituUons de l’ancien régime. Au nombre des canses qui nous firen & éprouver tant de renrs dans les deux guerres maritimes que nous eûmes à soutenir de n95 à ~SU, peut-être faut-il ranger la suppression de l’académie de marine. Le mouvemeo’ qu’elle imprimait aux sciences et au arts se trouva arrêté ; l’émulatioa qu’elle excitait parmi les officiers de I’arméenavaleeessa d’exister ; onn’en vit presque plus nair de grandes coanaissaoces lhéoriques à l’expérience acquise à la mer ; la pratique seule’ c’est-à —dire la routine, régna sanspartage pendant vingt années sur nos Aottes ; et, comme les occasions d’aller à la mer acquérir cette pratique devinrent de plus en plus rares, l’instruction s’éteignit graduellement dans le corps de la marine. L’un des moyens les plus sûrs pour ea rallumer le flambeau serait le rétablissement de l’académie de mariae. Il serait à propos de ne plus différer de ressusciter une institution aussi utile. M. Charles Dupin, membre de l’Instituf, qui a publié1 il y a plusieurs années un mémoire sur la nécessité de rétablir l’académie de marine, s’exprime ainsi : • Quelle est la partie de la marine qui n’ait plus rien à demander, soit àla théorie, soit à l’expérience ? Estce l’art de donner à nos vaisseaux les formes les plut parfaites, tandis que les plus simples phénomènes du mouvement des corptflottants sont encore ao"-n& d ! énigmes pour nous ? Est-ee la dispesiüen militaire de nos vaisseaux, deut "* les mariDs habiles se plaignent amèrement ? Est. ;.ee l’art de manœuvrer nos vaisseaux, cette immense combinaison de tant d’éléments divers ; et pour laquelle nous n’avons pas seulement un manuel uniforme de préceptes, tandis que tous les temps de la charge d’un fusil ont été calculés et sont méthodiquement enseignés à nos soldats d’infanterie ? Est-ce enfin tart d’appliquer les forees de l’homme et de la nature aux grands travaux de nos ports, quand jusqu’ici, malgré les meilleures intentions, tant de choses s’y font encore avee le plus de temps, d’hommes et d’argent possible ? Puisqu’il nous reste encore tant à faire pour arriver au but, cherchons donc sans relâche les moyens les plus propres à nous y conduire. Il n’est C}Ue deux moyens pour produire de grandes choses dans un état, e’est de former la jeunesse et de tirer parti de l’âge mûr. On atteindra le premier but en fondant des écoles d’après des vues grandes et libérales ; mais, pour tirer parti des connaissances acquises par l’âge mûr, il est des institutions scientifiques dont l’utilité peut être immédiate et démontrée à tous les yeux, dès l’instant de leur création:ce sont les académies. Il sur.fit que le choix des membres soit bien fait; leurs travam parleront pour eux •. Nous n’entrerons ici dans auco11 détail sur le plan qu’il conviendrait de suivre dans le rétablissement de l’académie de marine. Ce plan est parfaitement exposé dans le mémoire de M. Dupin que nous..-enons Citer, et nous y renvoyons nos lecteurs. Nous terminerons cet aricle eil lndiquânt quelques trataftt d(Jdt n iuipt1r~i’ait que l’acàdémie 4ie mariRe a’aeellpât aussitôtap ! Wil&n rétablissement. L’uo des tJIUs néœssaires setàit sans doute la oolllpositiôJl d1un dictionnaire de marine. En Jti&ne temps que l’académie fixerait de la sdrte notre langue maritime, elle pourrait entreprendre la desëtiption complète des arts de la marine. Le$ traités particuliers pttbliés slfr ees arts sont presque tous à tefalre. C’est principalement sur la manœuvre des vaisseaux , la navigà· tion, l’artillerie et la tactique navale, que itou~ manquons de bons ouvrages, et qu’ils sèraient le plus utiles, paree que c’est 111 ce qui touche Je plus imlllédiatemeni à l’honneur du pavillon français, et à notre gloire nationale.

J. T. Parisot
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