Encyclopédie méthodique/Beaux-Arts/Pratique Lettre A


(p. 429-433).

DICTIONNAIRE

DE LA

PRATIQUE DES BEAUX ARTS ([1]).


A

ABREUVER. (v. act.) C’est mettre sur une toile ou sur un panneau qu’on veut imprimer, une couche de colle, ou une première couche de couleur détrempée dans de l’eau mêlée de colle. La toile ou le panneau encore nud s’abreuve de cette premiére couche, s’en pénètre, s’en imprègne, la reçoit dans tous ses pores, & n’admettra plus rien intérieurement des autres couches dont elle : sera couverte.

AHOUAI. (subst. masc.) C’est un arbre laiteux qui croît dans l’île de Ceylan, & dont les feuilles ressemblent à celles du laurier-rose des Indes. Ses fleurs sons jaunes. Sa graine employée en stil de grain, est, dit M. Watin, de la plus grande beauté en peinture. Elle ne le céde point à l’orpin, se soutien ; beaucoup mieux, & n’en a pas les inconvéniens.

AIGUILLE. (subst. fém.) On trouve. quelquefois ce nom donné aux pointes des graveurs à l’eau-forte, parce qu’ils avoient autrefois coutume de les faire avec de grosses aiguilles. Ils préfèrent maintenant de les faire avec de vieux burins, & ils trouvent à cette présérence plusieurs avantages.

On donne aussi le nom d’aiguilles à plusieurs ustensiles des peintres en émail. Ils doivent en avoir au moins deux, l’une est pointue par un bout, en ru plate, faite en dard, & grosse par le milieu comme une moyenne plume à écrire ; l’autre bout est en forme de spatule, large de cinq à six lignes, sur l’épaisseur d’un quart de ligne.


L’autre aiguille doit être pointue par les deux bouts, dont t’un ressemble à celui d’une aigua à coudre, & l’autre est un peu applati vers la pointe. Le bout pointu sert à étendre les teintes sur l’ouvrage, l’autre à les prendre & à les porter à leur place, quand il en faut une certaine quantité.

Les mêmes peintres se servent aussi d’une aiguille de buis. C’est un petit morceau de buis bien sec, qui doit être très-pointu par un bout ; &, par l’autre, un peu mousse & arrondi. Le premier sert à nettoyer les parties de l’ouvrage qui peuvent se trouver boueuses & mal unies ; le second à effacer les défauts. (Ancienne Encyclopédie.)

AMAIGRIR, se dit en sculpture, ou plutôt dans l’art de modeler, du changement qu’éprouve un modele de plâtre ou d’argille dont, en se sèchant, les parties se resserrent, s’affaissent, diminuent de longueur ou de grosseur. On dit qu’elles s’amaigrissent.

AMASSETTE, (subst. fém.) Petite pièce de bois, de corne, d’ivoire, &c. dont les peintres le servent après avoir broyé leurs couleurs, pour les rassembler sur la pierre.

AMBOUTIR ou EMBOUTIR, (v. act.) C’est donner de la convexité à ne piéce de métal qui étoit plate. On amboutit les plaques de métal destinées à être peintes en émail.

AMOUR. On dit qu’un fond préparé pour la peinture à la détrempe, a de l’amour, quand il est propre à recevoir aisément la peinture, c’est-à-dire, quand il a été rendu égal, lisse & coulant.

ANATOMIE. (subst. fém.) Cette science embrasse la connoissance de toutes les parties du corps qui sont cachées sous la peau. Deux branches de cette science sont absolument nécessaires aux artistes qui ont pour objet l’imitation de la nature animée : l’une est celle qui fait connoître la forme & la disposition des os, que l’on peut regarder comme la charpente du corps ; voyez l’article Ostéologie : l’autre est celle qui apprend la forme, l’origine & l’insertion des muscles, qui sont les organes du mouvement & de toutes les actions du corps. Voyez l’article Myologie. M. Watelet a traité succinctement ces deux parties de la science anatomique à l’article Figure du Dictionnaire théorique des Beaux-Arts : mais pour faire usage de ses signes de renvois, il auroit fallu dessiner & graver de nouvelles planches au lieu de celles qui étoient déja faites. Il a été plus simple de faire de nouveaux articles pour ces planches, & l’on a cru nécessaire de leur donner plus d’étendue.

ANTE. (subst. fém.) C’est ce qui sert à tenir la brosse ou le pinceau, & ce qu’on en pourroit appeller le manche. Les antes de pinceaux doivent être d’un bois léger & poli ; le bois le plus propre à cet usage est celui de fusin. Li baleine est aussi fort bonne. L’ébène & le bois de la Chine ont l’avantage de se nétoyer facilement, mais ils sont trop lourds. La longueur de l’ante doit être environ d’un pied, parce qu’en peignant, il faut tenir le pinceau fort long, habitude que les commençans ont peine à contracter. Les antes de pinceau, pour être bien faites & commodes, doivent être plus grosses dans leur milieu que vers leurs extrêmités, parce que c’est par cette partie qu’un les tient, & elles doivent devenir plus minces à l’endroit où est attaché le pinceau, afin que lorsqu’on en tient un faisceau dans la main, ces pinceaux imprégnés de couleur, ne se gâtent pas mutuellement par leur contact, & restent écartés les uns des autres ; c’est à quoi contribue encore naturellement la ficelle qui en lie les poils.

Pour les pinceaux à laver ou à peindre en miniature, on peut avoir des antes plus agréables. On en fait d’ivoire peint de différentes couleurs, de tuyaux de hérisson, &c. (Elémens de peinture pratique, par de Piles.)

APPRÊT. On entend par ce mot les préparations qu’il faut faire subir au fond destiné à recevoir de la peinture. Voyez l’article Impression. Voyez aussi les articles Détrempe, Email, Fresque, Miniature, Pastel.

On appelle peinture d’apprêt la peinture sur verre. Voyez l’article Verre.

APPUIE-MAIN. (subst. comp. masc.) Les peintres se servent, pour soulager leur main en


peignant, d’une baguette sur laquelle ils s’appuient le poignet. La position presque perpendiculaire de la toile ou du paneau, leur rend ce secours nécessaire. Ils donnent à cette baguette le nom d’appuie-main. Elle est longue de deux à trois pieds, & à-peu-près de la grosseur d’un doigt. Elle doit être en même-temps solide & légère. A l’un des bouts de cette baguette, on fait une petite pomme ou bouton avec un peu de linge pelotonné, qu’on recouvre d’un morceau de peau, & qu’on a soin de lier fortement, en pratiquant, pour la mieux arrêter, une rainure à la baguette. Ce bouton est à-peu-près de la forme & de la grosseur de celui d’un fleuret. On appuie ce bouton sur le tableau, ayant soin de choisir un endroit qui soit bien sec. (Elémens de peint. prat. par de Piles.)

AQUARELLE. (subst. fém.) Dessin au lavis, ans lequel on emploie différentes couleurs, ce qui forme une espèce de peinture sans empâtement, qui mériteroit mieux le nom d’enluminure. Les couleurs y doivent avoir de la transparence & point d’épaisseur ; il faut par conséquent choisir, pour ce genre, celles qui ont le moins de corps ou l’ôter à celles qui en ont. Ce doivent être moins des couleurs que des teintures. Voyez, à l’article BISTRE, le procédé qu’on emploie pour ôter le corps aux couleurs. Les teintures tirées des fleurs n’ont point de corps & sont propres à l’aquarelle. Voyez, article Tournesol, la manière d’exprimer des teintures des fleurs.

ARGÉNTURE. (subst. fém.) Les procédés pour préparer les ouvrages de sculpture à être argentés, sont les mêmes que l’on emploie pour les dorer. Il faut voir ces procédés à l’article DORURE, à l’endroit où l’on parle de la dorure en détrempe.

1.° Quand, suivant ces procédés, l’ouvrage est bien apprêté, adouci, réparé, il faut au lieu de jaunir, comme on le fait pour la dorure, donner une couche de beau blanc de plomb, broyé bien fin à l’eau & détrempé à la colle. Cette manœuvre est la même que celle de jaunir, il n’y a de différence que dans les substances que l’on emploie.

2.˚ Broyez ensuite du blanc de plomb très-fin à l’eau, & détrempez-le avec de la colle plus foible que celle dont vous vous serez servi pour l’apprêt. Donnez-en deux couches qui formeront l’assiette. Voyez ce qui est dit sur l’assiette, à l’article Dorure.

3.˚ Argentez l’ouvrage avec de l’argent en feuilles, de la même manière que l’on dore avec de l’or en feuilles. Voyez encore l’article Dorure.

4.˚ Brunissez les parties de l’ouvrage qui doivent être brunies. Le même article vous instruira de l’opération du brunissage.

5.° Quand ces parties seront sèches, vous prendrez de la colle dans laquelle vous mettrez de l’argent moulu & vous en passerez sur tous les endroits que vous voulez qui soient mais, & dans les profondeurs où l’argent en feuilles n’aura pu pénétrer.

6.° Quand cette opération est terminée, on peut sur-le-champ de l’ouvrage argenté faire en ouvrage doré. Il suffit de donner une couche légère de colle à matter dans laquelle on aura détrempé un peu de vermeil, & quand cette couche sera sèche, de passer dessus un beau vernis à l’or.

Comme l’argenture se gâte au mauvais air, il faut, pour la conserver, y passer un vernis à l’esprit-de-vin. (Extrait de l’art du peintre, doreur, vernisseur, par M. Watin.)

ARGILLE. (subst. fém.) Terre pesante, compacte, onctueuse, ductile, facile à se pétrir sous les doigts, & acquérant au feu beaucoup de dureté. Comme elle se prête à toutes les formes par sa ductilité, & qu’elle les conserve par sa compacité & son onctuosité, elle a été choisie par les sculpteurs, comme l’une des substances les plus convenables à faire leurs modèles.

ARRANGEMENT des couleurs sur la palette. On arrange par degrés les couleurs sur le bord supérieur de la palette ; l’usage est de mettre les couleurs les plus claires du côté où se trouvent placés les doigts, & l’on en fait autant de petits tas séparés les uns des autres. Les couleurs étant ainsi rangées par ordre, on prend la palette de la main gauche, & on passe le pouce dans le trou qui est pratiqué en bas. On tient de la même main les pinceaux dont on doit faire usage & qui forment dans la main un faisceau. Si l’on fait usage d’un appuie-main, c’est encore avec le petit doigt de la même main qu’il faut le tenir, & elle est encore chargée d’un linge que son usage fait nommer torche pinceau, & même encore du couteau qui sert au besoin à mêler les couleurs.

Dans la peinture à l’huile, on se sert ordinairement de huit couleurs principales : c’est du mêlange de ces couleurs que les autres dérivent & se composent. Voici leurs noms, dans l’ordre suivant lequel on a coutume de les ranger sur la palette :

1.° Le blanc de plomb.

2.° L’ochre jaune.

3.° Le brun-rouge.

4.° La laque.

5.° Le stil de grain.

6.° La terre verte. 7.° La terre d’ombre.

8.° Le noir d’os ou d’ivoire.

A ces couleurs les peintres en ajoutent quelquefois d’autres. On n’a point parlé de l’outremer, dont le haut prix ne doit pas empêcher de faire usage, quand on est curieux de faire des tableaux que l’on veut qui conservent leur beauté.

Les couleurs que nous avons nommées se trouvent toutes broyées dans les boutiques ; &, pour les conserver long-temps & proprement, on les enferme dans des morceaux de vessies de porc, qu’on rend maniables & flexibles en les frottant avec un peu d’eau : on en fait de petits paquets qu’on lie avec de la ficelle. Pour faire usage de la couleur qu’elles contiennent, on y fait un petit trou avec une grosse épingle, on en fait sortir à-peu-près la quantité que l’on veut employer, & que l’on met sur la palette. Ce trou ne fait aucun tort à la couleur qui reste dans la vessie, parce que le peu de couleur qui en remplit l’ouverture se sèche bientôt & la referme exactement.

Les autres couleurs se vendent en poudre, & le peintre les détrempe lui-même avec un peu d’huile en les mettant sur la palette. Il se sert du couteau à couleur pour cet usage, & ne charge sa palette de ces couleurs que lorsquil veut s’en servir. La principale est l’outremer ; les autres sont la cendre bleue d’Allemagne, le vermillon, le massicot, le noir de charbon, & plusieurs autres encore qui ne sont pas d’une grande nécessité, & que l’usage fera connoître. On en trouvera les noms suivant leur ordre alphabétique.(Elémens de peinture pratique.)

ARRACHER. (v. act.) Les graveurs au burin se servent quelquefois de ce verbe pour exprimer qu’il faut enlever de dessus le cuivre certaines parties déjà gravées & qu’ils veulent corriger.

ARRÊTE. (subst. fém.) La vive arrête du burin est son tranchant.

ASSIETTE. (subst. fém.) Composition qu’on étend sur ce que l’on veut argenter ou dorer. C’est sur cette composition que doivent être assises les feuilles d’or ou d’argent. Voyez l’article DORURE.

ATTELIER. (subst. masc.) Lieu où travaille l’artiste. On peut voir aux planches du dessin, des différentes sortes de peinture, de la sculpture, de la gravure, la représentation des atteliers qu’exigent ces arts différens, & des différens ustensiles dont ils doivent être meublés.

AVIGNON. (graine d’) Cette graine est le fruit d’une espèce de nerprun qui croît aux environs d’Avignon. Il faut la choisir sèche, assez grosse & bien nourrie. On en exprime la couleur en la faisant bouillir avec de l’alun. En la mêlant avec du blanc de Troie, sorte de craie ou de marne blanche, on en fait un stil de grain. La graine d’Avignon demande à être employée avec beaucoup de discrétion même dans la détrempe.

AVIVER. (v. act.) Dans la gravure au burin, aviver une taille, c’est lui donner plus de brillant, ce qui se fait en rentrant la taille avec un burin plus lozange que celui avec lequel elle a d’abord été poussée.

AZUR. (subst. masc.) Bleu d’azur. On peut tirer cette couleur de l’argent ; mais le savant Boyle & Henckel prétendent avec raison que cela n’arrive qu’en raison du cuivre qui se trouve ordinairement mêlé à ce métal. Voici la façon la plus courte de le faire. Faites fondre dans de sort vinaigre distillé, du sel gemme, du sel alkali, & de l’alun de roche. Suspendez au-dessus de ce vinaigre des lames d’argent fort minces, enterrez le vasse où vous aurez fait fondre ces matières dans du marc de raisin : vous pourrez tous tes trois jours ôter de dessus les lames d’argent la couleur bleue qui s’y sera formée.

Autre maniére. Mettez dans une livre de fort vinaigre des lames d’argent aussi minces que du papier : joignez-y deux onces de sel ammoniac bien pulvérise. Mettez le tout dans un pot de terre vernissé que vous boucherez avec soin. Enterrez ce pot dans du fumier de cheval pendant quinze ou vingt jours ; vous trouverez au bout de ce temps les lames d’argent chargées d’un très-beau bleu d’azur.

Autre manière. Prenez une once d’argent dissout dans l’esprit de nitre, deux scrupules & demi de sel ammoniac, autant de vinaigre qu’il en faut pour précipiter l’argent. Décantez le vinaigre ; mettez la matière précipitée dans un matras bien bouché ; laissez reposer le tout pendant un mois, & vous aurez un beau bleu d’azur.

On tire aussi le bleu d’azur du cuivre, du mercure, du plomb. Pour le tirer du cuivre, on prend trois onces de verd-de-gris & autant de sel ammoniac ; on mêle ces deux matières avec de l’eau dans laquelle on a fait fondre du tartre : on en fait une pâte molle ; on met le tout dans un vase bien bouché, qu’on laisse en repos pendant quelques jours, & l’opération est faite.

Autre. On prend deux onces d’œs ustum ou cuivre brûlé, autant de lie de vin, une once


de soufre : on réduit en poudre l’aes ustum & le souffre ; on verse par-dessus du vinaigre ou de l’urine ; on met le mêlange dans un pot vernissé & on le laisse bien bouché pendant quinze jours.

Agricola donne le moyen suivant de tirer le bleu d’azur du vif-argent & du plomb. On met au fond d’un plat de la litharge, & l’on fait fondre par-dessus le souffre pulvérisé : on y jette ensuite le sel ammoniac en poudre & le vif-argent ; on remue toutes ces matières avec un petit bâton, afin qu’elles se mêlent exactement : on laisse réfroidir le mélange qu’on réduit en poudre. On met cette poudre dans un matras bien luté qu’on laissera un peu ouvert. Lorsque le lut sera séché, on mettra le matras sur un trépied & sur un feu modéré ; & on couvrira l’ouverture avec une lame de fer ; on regardera de temps en temps le dessous pour voir s’il ne s’y forme plus d’humidité. Il faut alors boucher l’ouverture avec le lut : on pousse le feu rendant une heure ; on l’augmente encore, jusqu’à ce qu’il s’élève en fumée bleue ; cela fait, on trouvera un beau bleu au fond du matras. (Le baron d’Holbac, dans l’ancienne Encyclopédie)

Voici comment s’exprime, sur le bleu d’azur, l’auteur du Traité de la peinture au pastel ; (Paris, Defer de Maisonneuve, 1788). L’azur est du verre en poudre que fournit le régule du cobalt, substance métallique particulière, qu’on a regardée long-temps comme une simple mine arsénicale, mais dont on tire un régule qui differe absolument de l’arsénic. Les fabriques de Saxe, d’où l’azur se tire, ne le mettent dans le commerce qu’avec beaucoup d’autre verre en poudre ou du sable fin. Quand on fond la chaux du cobalt sans aucun mêlange (il faut alors un feu de la plus grande violence) elle produit un verre d’un bleu si profond qu’il paroît noir. On peut aussi tirer ce verre du safre ; c’est la mine du cobalt calcinée : mais le safre est mêlé de beaucoup de sable ou de verre. On peut l’en séparer en mettant, par exemple, une once de safre sur une soucoupe. On enfonce la soucoupe dans l’eau d’un baquet ; on l’y balance ; le safre s’échappe dans ce mouvement d’ondulation, & laisse le safre. Il peut fournir du régule de cobalt, au moyen d’un flux réductif.

On trouve aussi de ce régule dans quelques boutiques de pharmacie ; il est fort cher. On sait que ce demi-métal, dissout dans l’acide nitreux avec un peu de sel de cuisine, sur la cendre cha de, forme une encre de sympathie singulière. Il suffit d’étendre cette dissolution dans de l’eau pure. Si l’on écrit avec cette eau, l’écriture, d’abord invisible, se montre d’une couleur verte quand on l’approche du feu, disparoît quand on l’en éloigne, & reparoît de nouveau dès qu’on l’en approche. La chaux, précipitée de cette dissolution par les alkalis fixe ou volatil, est rose pâle, quelquefois cramoisie, & quelquefois couleur de rouille. Mais quoique très-fixe & très-réfractaire, elle se change toujours, avec des sels vitrifians, en un verre d’un très-beau bleu, plus ou moins profond, suivant la quantité des autres substances vitrescibles qu’on y joint. C’est de ce verre qu’est composé le bleu qu’on voit sur la fayence, la porcelaine & les émaux. Le régule de cobalt contient presque toujours beaucoup de bismuth & d’arsenic : mars en versant dans la dissolution dont nous venons de parler beaucoup d’eau, on en sépare le bismuth. L’eau le précipite en poudre blanche. On précipite ensuite le cobalt en jettant de l’alkali dans le vase. Quant à l’arsenic, il s’évapore au feu.

Le verre de cobalt pourroit entrer aussi dans la peinture à l’huile : mais il faudroit qu’il eût été mêlé de très-peu d’autres matières vitrifiées, & qu’on le jettât brùant dans l’eau froide pour pouvoir mieux l’atténuer. Broyé long-temps sur un plateau de verre ou de crystal, avec du blanc, il auroit assez d’intensité pour fournir un beau bleu clair qui ne changeroit jamais & qui produiroit le même effet que l’outre-mer. Il n’y auroit pas la moindre différence. On peut trouver dans les fayenceries du verre bleu de


cobalt. Il réussiroit aussi très-bien dans la fresque, où l’on auroit grand besoin d’un bleu solide.

AZUR à poudrer. Avant de lire cet article, voyez l’article Email, bleu d’émail. Plus le grain d’émail est gros, & plus le bleu est vif ; il tire un peu sur le violet comme l’azur, mais l’émail est d’un plus beau bleu céleste. Le grain d’azur à poudrer est si gros, qu’on ne peut l’employer que très-difficilement, & seulement à détrempe ou à fresque, ou pour mettre dans l’ampois ou amidon avec lequel il se lie fort bien. On l’appelle azur à poudrer, parce que, pour faire un beau fond d’un bleu turquin, on le poudre sur un blanc à l’huile couché médiocrement épais, & le plus gras que l’on peut. On l’y étend aussitôt avec une plume ; mais il faut l’avoir bien fait sécher auparavant sur un papier au-dessus du feu. On y en met assez épais, on l’y laisse jusqu’à ce que le fond soit bien sec, & ainsi le blanc en prend autant qu’il peut. Ensuite on le secoue, & on en ôte tout ce qui ne tient pas au blanc, en le frottant légèrement avec une plume ou une brosse douce. C’est une couleur très-vive, & qui dure long-temps, quoiqu’exposée à l’air & à la pluie. (Article de l’ancienne Encyclopédie.)



  1. (*) Pour éviter tout reproche de plagiat, le Rédacteur du Dictionnaire des Beaux Arts déclare qu'il a le plus souvent borné son travail, pour cette seconde partie, à choisir les articles, & quelquefois à les abreger, ou à y ajouter quelques détails & quelques éclaircissemens qui lui ont paru nécessaires.