Encyclopédie méthodique/Beaux-Arts/Large (peindre d’un pinceau )

Panckoucke (1p. 471).
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LARGE. Peindre d’un pinceau large, peindre largement, est le contraire de peindre d’un pinceau maigre & mesquin. La manière large a l’agrément de la facilité ; elle est même fondée sur la vérité, car la nature frappe bien plus nos regards, par ses effets larges, que par ses petits détails. Le grand Maître peint largement, parce qu’il voit en grand la nature, parce qu’il l’observe en masse, & n’est pas obligé de la tâtonner dans ses petites parties. Quand on voit grandement les formes & les effets, on produit un ouvrage qui est largement fait.

Les cheveux sont d’une finesse qui échappe presque à la vue ; mais leur ensemble forme de larges masses, & l’artiste les traite largement.

On doit draper par larges plis, principalement sur les grandes formes. Une foule de plis étroits en détruiroit l’unité, & auroit le desavantage d’offrir des multitudes de petites lumières & de petites ombres qui fatigueroient la vue. Quand on est cependant obligé de faire des petits plis, on a soin de les distribuer par masses ou suites : la lumière domine dans les unes de ces masses, & l’ombre dans les autres.

L’ouvrage entier doit être distribué par larges masses de clair, & de brun : c’est par ce procédé seulement qu’il produit de l’effet, & qu’il appelle le spectateur, qui de loin ne voit que les masses. S’il étoit composé de petites parties d’ombres & de lumières, il n’offriroit de loin que des taches, & seroit méprisé sans avoir été même soumis à l’examen.

L’effet large est le résultat de ces grandes masses.

On dessine largement, comme on peint largement. D’abord en ne se servant point d’un crayon aigu, mais d’un crayon émoussé qui forme des hachures nourries ; ensuite, en établissant largement les masses d’ombre & de lumières, & mettant sur les dernières peu de travaux.

Quand la largeur du dessin est relative au trait, il faut entendre, par cette expression, que l’artiste établit de grandes formes, & ne s’arrête point aux formes mesquines de la nature. On dit cependant aussi qu’un trait est large & moëlleux, pour faire entendre qu’il n’est pas tracé d’un crayon maigre.

Quelquefois les artistes convertissent l’adjectif large en substantif. Ils disent, il y a du large dans ce tableau. (Article de M. Levesque.)