Encyclopédie méthodique/Beaux-Arts/Enluminure

Panckoucke (1p. 252).
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ENLUMINURE. (subst. fem.) C’est une sorte de peinture faite sur des estampes avec des couleurs délayées à la gomme. Il y a aussi des papier-tapisseries qui sont enluminés, c’est-à-dire, dont la planche n’a fourni que le trait, & dont les couleurs ont été placés au pinceau.

On enlumine grossièrement de ses mauvaises estampes qu’on appelle images, pour l’usage du peuple qui est toujours à peu près sauvage, même chez les nations les plus policées, & dont la vue est plus agréablement récréée par le spectacle des couleurs dures & tranchantes, qu’elle ne le seroit par les tableaux les mieux fondus des plus grands coloristes. Pour rendre ces images encore plus agréables à ceux à qui elles sont destinées, on relève quelquefois en or les auréoles des saints & quelques parties des draperies.

On applique aussi de l’or & de l’argent moulu à des enleminures plus précieuses ; c’est ce qu’on appellechausser. Pour donner à ces métaux tout leur éclat, on les brunit avec la dent de loup.

On enlumine avec plus ou moins de soin des estampes représentant des vues, des intérieurs de temples, &c. qu’on destine à être regardées dans des machines d’optique.

Quelquefois, des curieux sans goût ont pris plaisir à faire enluminer de belles estampes, croyant qu’elles acquerroient un nouveau prix, & qu’elles approcheroient du mérite des tableaux, quand elles seroient barbouillées de couleurs. Tout le fruit de leur dépense étoit de faire détruire le travail heureux du graveur par le travail routinier des enlumineuses.

Cependant, l’enluminure faite avec soin & intelligence n’est pas toujours méprisable. Elle est fort utile à l’histoire naturelle. Des planches d’oiseaux, de plantes, de coquilles, instruisent fort imparfaitement, si elles ne sont pas accompagnées des couleurs propres à l’objet. Enfin l’enluminure est utile toutes les fois qu’on doit montrer l’objet colorié. Le graveur doit alors renoncer à l’ambition de plaire, & consentir à voir les travaux de son art couverts par le travail des enlumineurs.

Il y a des enluminures, d’oiseaux, de coquilles, &c, faites avec tant de soin & tant d’art qu’on peut les prendre au premier coup d’œil pour des miniatures ou des peintures à gouazze. Il est bon alors que les travaux de la gravure ne soient pas trop fortement prononcés, & que le ton de l’estampe soit fort doux.

Une enluminure commune peut quelquefois remplir suffisamment son objet, comme lorsqu’il s’agit de faire connoître les couleurs des uniformes de troupes, ou celles des pavillons & des flammes de vaisseaux, &c. (Article de M Levesque.)