Encyclopédie méthodique/Beaux-Arts/Cartons

Panckoucke (1p. 97-98).

CARTONS. On appelle cartons, dans le langage de la Peinture, des dessins de figures ou de compositions dont le trait est sur-tout rendu avec ; la plus grande correction sur des cartons plus ou moins épais, plus ou moins étendus, relativement à l’usage que l’Artiste a besoin d’en faire. Cet usage a été primitivement destiné à la Peinture à fresque. Il est nécessaire de donner quelques notions de cette manière de peindre, pour faire comprendre le principal usage des cartons.

Pour exécuter la fresque, on enduit d’un mortier fait de chaux & de sable, la voûte ou la muraille que l’on veut enrichir d’une Peinture. Lorsque cet enduit est assez ferme pour ne pas céder au doigt qu’on y applique à dessein de connoître sa consistance, & qu’il conserve cependant de la fraîcheur & de l’humidité ; l’on applique le carton, sur lequel se trouve dessiné & découpé très-correctement le trait d’une figure ou d’un objet qu’on a le projet de peindre. On trace avec une pointe de bois ou d’y voire aiguisée en forme de crayon, le contour de la figure en suivant exactement les bords du carton. Ce trait légérement enfoncé dans l’enduit, lorsqu’il est frais, guide le Peintre qui ne pourroit, comme sur la toile, dessiner avec le crayon ce qu’il ce qu’il doit peindre.

Le carton découpé n’est propre que pour une figure ou un seul objet ; mais lorsqu’il s’agit de tracer une composition entière, on pique le trait de tous les objets qui se trouvent dessinés sur le carton, alors on passe, en appuyant, un sachet rempli de charbon mis en poudre, on fait ensorte que la poudre passe au travers des trous d’épingles qui marquent tous les contours de ces objets, & le trait de ces contours se trouve dessiné sur l’enduit frais qui est préparé pour recevoir la couleur.

Cette opération se fait par deux raisons. J’ai parlé de la première, c’est-à-dire, de l’impossibilité qu’il y auroit de dessiner sur un enduit frais & humide. L’autre est la promptitude avec laquelle il est indispensable de peindre sur l’enduit, pour qu’avant qu’il soit sec, la couleur qu’on y applique puisse s’y incorporer en y pénétrant. Par ces raisons, il est essentiel de tracer les objets de manière que le trait s’y conserve, parce que les opérations ne peuvent supporter de retardement, & qu’on n’a pas le tems de revenir à plusieurs fois. Aussi des deux manières d’employer les cartonsdont je viens de parler, celle des cartons découpés a été le plus en usage dans la Peinture à fresque, parce que cette petite trace que l’on forme, en suivant les contours du carton, quoique très-légérement approfondie, reste plus inaltérable & se retrouve aux yeux de l’Artiste qui n’a point à craindre de la perdre ou de l’altérer.