Encyclopédie méthodique/Art aratoire et du jardinage/Semis

Définition

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Semis ; endroit où l'on sème des graines d'arbres, pour les mettre ensuite en pépinières.

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SEMIS ; endroit où l’on sème des graines d’arbre, pour les lever & les mettre en pépinière au bout de trois ou quatre ans.

Du semoir.

Le semoir, comme l’indique son nom, est un instrument avec lequel on sème le bled & les autres graines par rangées. Il fait les sillons, y sème la graine & la couvre tout à la-fois avec beaucoup d’exactitude & de vitesse.

Les principales parties du semoir sont la boîte à semence, la trémie & la charrue avec sa herse.

De ces parties la boîte est la principale ; elle mesure, ou plutôt elle compte la semence qu’elle reçoit de la trémie, & elle est par rapport à cela comme une main artificielle qui la délivre avec plus d’égalité qu’une main naturelle ne pourroit faire.

De même que la boîte à semence est la principale partie du semoir, de mêne la mortaise est la principale partie de la boîte à semence.

Les descriptions suivantes feront voir en quoi cette mortaise diffère des ordinaires.

Cette mortaise diffère d’une mortaise commune, en ce qu’il est impossible de l’ajuster avec un tenon, à cause qu’elle est plus étroite par en haut, & plus courte par en bas.

Les aires ou les plans imaginaires de son haut & de son bas sont parallèles, mais non pas égaux ; ses deux côtés opposés sont égaux, mais non pas parallèles, à cause qu’ils inclinent l’un vers l'autre de bas en haut, ce qui fait le biais dont nous allons parler.

Les deux bouts ne font ni parallèles ni égaux, à cause que celui de derrière est perpendiculaire à l’égard du haut & du bas, & celui de devant oblique, & par conséquent plus long.

Quand deux côtés opposés aux deux surfaces inclinent l'une vers l’autre de bas en haut, j'appelle cette inclination un biais : mais quand elles inclinent de haut en bas, je l’appelle un biais renversé.

Le bout de la mortaise étant élevé à sa place, sera à angle droit avec les plans du haut & du bas, lesquels étant tous les deux des parallélogrammes rectangles, prouvent que le biais est le même d'un bout des côtés à l’autre ; lesquels côtés font les hypoténuses de ces deux triangles : mais cela ne pourroit pas être prouvé par les triangles du bout opposé, à cause que les bases étant les mêmes que l’autre, & ayant les côtés plus longs, les angles verticaux sont plus aigus ; les côtés sont plus longs, à cause que l’extrémité, quand elle est dans sa place, n'est pas à angle droit avec le haut & le bas de la mortaise.

Ce qui doit ensuite être décrit dans la mortaise, est le grand trou, lequel se voit mieux dans le côté de celle d'un semoir à froment, étant plus grand, c'est la section d'un cylindre creux qui passe par la mortaise, & dont l'axe est parallèle aux bords des extrémités de la mortaise ; ce cylindre étant coupé obliquement par le côté de la mortaise, & non parallèlement à sa base, est une ellipse.

Le plus long diamètre de cette ellipse, est à angle droit avec les bords d'en haut & d'en bas des côtés de la mortaise.

Son plus court diamètre est le diamètre du cylindre qui coupe le plus grand, diamètre à angle droit au centre.

La demi-ellipse est la partie la plus utile, & par conséquent le bord doit être bien uni & sans crevasse, comme le doivent être aussi les surfaces des côtés de la mortaise entre l'ellipse & le bout de devant.

La langue de la boîte à semence diffère de celle du sommier d'un orgue, d'où j'en ai pris l’idée, par la figure, par la situation, & par la manière dont elle est attachée à la mortaise.

Celle de l'orgue est dans sa surface un long quarré ou un parallélogramme rectangle, & est un peu plus large & plus longue que la mortaise, ou la rainure qu'elle forme ; mais cette langue qui est ici tournée en bas, étant dans sa surface supérieure un plan, est un trapèse de la même figure que le bout de devant de la mortaise, que nous venons de décrire, excepté que la langue a un moindre biais.

Celle de l'orgue est située dans le dehors de la mortaise, qu'elle ferme par le ressort qui est par-derrière, s'ouvrant immédiatement par le doigt de l’organiste, qui presse en bas la clef pour laisser entrer l’air comprimé dans les tuyaux : mais celle-ci est située au-dedans de la mortaise de la boite à semence, & placée d'une manière presque diagonale ; car si elle étoit placée comme l’autre, la semence se mettant entre elle & les bords de la mortaise, ne permettroit pas qu'elle se fermât, comme l’air le permet à l’autre, & la tiendroit toujours ouverte, ce qui la rendroit inutile pour semer le grain.

La manière d'attacher la langue de l'orgue à sa mortaise, est de coller du parchemin ou du cuir à sa surface & au bout du sommier, qui est opposé à celui que la clef ouvre en pressant, & qui se ferme par le ressort : mais la nôtre est attachée au-dedans de la mortaise, & sait son mouvement sur un axe qui passe par son bout d'en haut, qui est plus étroit, & cet axe est la cheville qui doit être exactement parallèle au bord du bout de la mortaise.

La largeur de la langue doit être conforme à la largeur & au biais de la mortaise ; quand étant sur son axe bien dressée, l'on voit ses bords d'en haut toucher les deux côtés de la mortaise de toute leur longueur, alors elle est bien faite, & en touchant lesdits deux côtés bien exactement, quand elle est dressée à ce degré, il paroît que les deux bords d'en haut de ses côtés, inclinent l'un vers l’autre en un angle qui est plus aigu d'environ un tiers, que l’angle d'inclinaison des côtés de la mortaise.

Il arrive de-là que quand on la laisse en bas à sa place, il y a des deux côtés un espace vide entre elle & la mortaise, qui forme un triangle fort aigu dont l’angle vertical est plus ou moins aigu, suivant qu'elle approche ou s'éloigne plus du noyau.

La raison pourquoi la surface inférieure est plus étroite que la supérieure, est pour conserver le biseau du triangle vide ; car quoique le biseau des côtés de la mortaise puisse suffire pour cela, s'il étoit sûr que les deux côtés de la langue gardassent une égale distance du noyau ; comme cependant la langue n'est jamais si serrée sur son axe, qu'un de ses coins ne soit quelquefois plus près du noyau que l'autre, en ce cas, le côté qui est le plus près renverseroit ce biseau, de façon qu'il rendroit l'espace vide, qui est entre la mortaise & la langue, plus large en haut qu'en bas.

La longueur de la langue doit être telle, qu'elle puisse atteindre plus bas que pour toucher précisément le fond du grand trou, comme une tangente ; car si elle n'étoit pas plus longue, il pourroit arriver quand il n'y a point de semence dans la mortaise, & que la langue est bien serrée, qu'une roue en tournant ou autrement, reculât un peu, & fût cause qu'un cran du noyau saisît le bout de la langue, & l'arrachât de la mortaise ; c'est pourquoi il est bon qu'elle descende un peu au-dessous du noyau.

Si la langue étoit placée si obliquement, qu'elle fit un angle de beaucoup moins de 45 degrés, elle se leveroit trop contre le biseau de la mortaise, & le ressort auroit plus de difficultés à la faire retourner dans sa place, quand elle auroit été chassée en arrière par la force des crans.

D'ailleurs si la langue étoit éloignée du noyau, il pourroit y avoir tant de place entre elle & les côtés de la mortaise, que quelques grains de semence passassent par-là.

La longueur de la vis qui tient le ressort attaché à la langue, est ordinairement d'un demi-pouce ou environ ; son épaisseur doit être proportionnée, à ses autres dimensions ; & au degré de roideur qui est nécessaire ; son épaisseur ordinaire est d'environ celle d'une pièce de 24 sous.

On mesure les degrés de roideur de cette manière : on attache deux planches, laissant dans un endroit une ouverture entre elles d'un pouce de longueur ; on met le ressort quand il est trempé à travers de cette ouverture, de manière que son milieu soit exactement dessus. On met alors sur le ressort un cordon, dont on fait passer les deux bouts par l’ouverture, & on y attache au-dessous des planches un poids capable de tirer en bas son milieu, au point qu'il touche l’ouverture, & qu'il soit au niveau de ses deux bouts ; cela fait voir le degré de sa roideur : on remarque qu'il doit être courbé, & porter seulement sur ses bouts, le côté creux devant être en haut.

Il doit porter contre le revers de la langue aux deux bouts, & être creux au milieu ; le degré de son creux est essentiel, car c'est de-là que dépend la distance du mouvement que fait la langue vers le noyau par la semence,qui est pressée contre elle par la force des crans quand les roues les font mouvoir ; car plus le ressort est courbé, plus il pouffera la langue loin de son milieu, si sa force est supérieure à celle qui lui résiste, comme elle doit l'être : ce mouvement de la langue est appelle son jeu.

Pour mesurer la distance ou la quantité de ce mouvement, il faut considérer que la langue se mouvant sur son axe en haut, décrit par son


bout d'en bas un arc de cercle, la corde duquel arc est la mesure requise.

Mesurer cette distance par l’angle que la langue fait à son centre, ne seroit pas une règl» pour faire les boîtes, à cause que quelques langues sont plus longues, d'autres plus courtes à proportion des différens diamètres des noyaux contre lesquels elles ont leur mouvement : les plus courtes doivent cependant avoir autant de jeu que les plus longues ; c'est-à-dire, qu'elles doivent décrire un aussi grand arc à l’endroit de la pression, & par conséquent les plus courtes feroient les plus grands angles.

Une manière courte & aisée de la mesurer, est donc la suivante. On tourne la vis du dedans, jusqu'à ce que la langue soit à un quart de pouce près du noyau ; on ôte alors ce dernier, & on tire du centre du trou sur le côté de la mortaise une ligne perpendiculaire à la langue, sur le bord de laquelle on fait une marque avec un compas ou une plume ; on la fait alors retourner par force contre la vis aussi loin qu'elle puisse aller, c'est-à-dire, jusqu'à ce que le ressort touche le revers entier de la langue. On prolonge la même ligne au même bord de la langue, ou on y met le bout de la règle, & on tire avec elle une autre ligne depuis la marque jusqu'au bord de la langue, quand elle est le plus en arrière, & l’on y fait la seconde marque : la règle employée de cette façon montrera & la perpendiculaire, & la mesure.

Une voie plus expéditive est celle-ci : on place la langue avec la vis sur le bout du trou ; & lorsqu'elle est enfoncée à force, on mesure depuis la langue jusqu'à la plus proche partie du trou, ce qui fera toujours une ligne perpendiculaire tirée du centre du trou à l’endroit de la pression ci-devant mentionnée, & on y fait une autre marque. Or, la distance qu'il y a entre ces deux marques, est à peu près la mesure du jeu de la langue à l’endroit de la pression ; quoique cette ligne qui est tirée sur le côté de la mortaise ne soit pas exactement perpendiculaire à la surface de la langue, mais seulement à son bord, cependant la différence n'est presque rien, & on ne doit pas y avoir égard.

Si la mesure est un quart de pouce, l'expérience fait voir qu'elle est d'une bonne grandeur pour toutes les sortes de bled & les pois ; si elle est un peu moindre, il n'y a pas de mal ; mais si elle est un peu plus, c'est un défaut préjudiciable.

Quand la largue a trop de jeu, la semence est sujette à être chassée trop vîte, ou bien trop lentement, quoi que fasse le semeur ; car quand elle est mise à sa vraie distance du noyau, & qu'elle est poussée tout-à-fait en arrière par la semence que les entaillures en tournant pressent contre elle ; le ressort n'étant pas capable, de la faire retourner à sa première place d'une telle distance, dans le tems qu'elle passe les intervalles qui sont entre les entaillures ; comme l'espace qui est entre le noyau & la langue est trop ouvert, la semence sort trop vite.

Pour obvier à cet inconvénient, le semeur la met contre le noyau ; & alors toutes les fois qu'il arrive que le ressort surmonte la force de la pression de la semence, comme il le fait quelquefois, elle sort trop lentement.

Quand elle sort avec inégalité, ces boites deviennent inutiles.

Il y a différentes manières de varier, c'est-à-dire, d'augmenter ou diminuer la proportion de la semence ; comme premièrement par la vis avec laquelle on peut sans inconvénient mettre la langue si loin du noyau, qu'un tour des entaillures puisse faire sortir quatre fois autant, qu'il fait sortir quand la langue est fort près du noyau ; on peut ainsi varier la proportion à des degrés moyens sans nombre.

Secondement, si on veut augmenter cette proportion encore davantage, on peut faire les entaillures plus grandes ; mais, on ne peut rien ajouter à leur nombre, à moins qu'il n'y ait assez de place pour les doubler, en faisant une nouvelle entaillure entre deux. Oh ne peut pas diminuer la proportion de la semence par les mêmes entaillures, à cause qu'elles ne peuvent pas être faites plus petites ou en plus petit nombre, si on veut faire quelqu'autre changement dans la proportion de la semence par les entaillures, il faut en faire un autre rang, ce qui est faisable à cause que le noyau de bois peut avoir trois rangs. On peut se servir de celui des trois si l'on veut, en mouvant les rondelles ou les roues vers l'un ou l’autre bout du noyau de bois, comme il sera démontré dans la description des trémies.

Quant au noyau de cuivre du semoir à navets, il ne peut y avoir qu'un rang d'entaillures ; par conséquent, quoiqu'on puisse augmenter la proportion de la semence en aggrandissant les entaillures, ou en doublant leur nombre, on ne peut pas la diminuer, par les entaillures mêmes, à moins qu'on en ait un nouveau rang ; & cela met dans la nécessité d'avoir un autre noyau. Quant à la vis du semoir à navets, elle augmente la proportion de la semence avec les mêmes entaillures, beaucoup plus que celles du semoir à froment.

Une autre manière de varier la proportion de la semence dans les mêmes boîtes, est de le faire par le diamètre des roues quand on peut les


changer ; car de quelque diamètre qu'elles soient, il faut qu'elles fassent faire le tour à toutes les entaillures dans une révolution ; de manière que des roues de 20 pouces de diamètre font sortir dans la même longueur des canaux, un tiers plus de semence que celles qui ont 30 pouces : mais on a rarement occasion de les changer, à moins que ce ne soit pour planter une espèce de semence d'une différente grandeur, comme sont les pois de la grosse espèce, du froment à petit grain, & la semence de sainfoin.

Il n'y a point d'autres manières que celle-ci de changer la proportion de la semence qu'il plante avec la même boîte ; les deux grandeurs ci-devant décrites étant suffisantes pour toutes sortes de grain & de semence qu'on seme communément depuis les gros pois, jusqu'à la semence de navets : mais les boîtes doivent être plus grosses pour planter des sèves, & on les fait communément de bois, en donnant au noyau 2 pouces de diamètre au plus, & 2 pouces de largeur aux boîtes. Il est bon de remarquer que cette augmentation de la langue de la mortaise d'un pouce & demi jusqu'à deux, augmente la quantité de la semence presqu'au double, à cause que ce demi-pouce est ajouté tout entier au milieu des entaillures, où elles sont plus profondes que leurs bouts, le biseau desquels prend une partie considérable de la longueur des premiers. Pour planter des fèves on fait en sorte d'avoir des roues aussi basses qu'elles puissent l’être : ces semoirs de bois sont à présent fort communs dans beaucoup d'endroits.

Les boîtes de bois ne diffèrent de celles de cuivre dans aucune des parties essentielles ; les premières doivent seulement être plus épaisses que les dernières ; le ressort doit aussi être droit, au lieu que l'autre est courbé ; & étant dans le derrière de la langue de bois, il porte contre ses deux bouts ; le canal dans lequel il est placé étant creux dans le milieu, le ressort y a son jeu, & doit être plus roide, & avoir un peu plus de jeu dans le semoir à fèves, que dans les boîtes à semence qui sont plus petites.

Les boîtes à semence de bois de buis bien sec réussissent fort bien ; mais il est plus avantageux d'en faire de cuivre, à cause qu'elles sont à quelques égards meilleures que celles de bois, qui est sujet à s'enfler & à se resserrer. D'ailleurs elles durent plus que celles de bois, & ne coûtent pas beaucoup plus.

Quant aux noyaux des boîtes à navets, on les fait d'un métal mêlé, moitié étain, moitié zinc ; ils sont fort faciles à faire, à cause que ce métal fond, aussi facilement que le plomb ; au lieu que le cuivre ne fond pas sans un creuset, & un grand feu.