Encyclopédie méthodique/Art aratoire et du jardinage/Insectes

Définition

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Insectes ; animaux pernicieux aux végétaux.

Article

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INSECTES, & autres ennemis des végétaux. Ces ennemis sont, les pucerons, les fourmillières, sur-tout celles de dessous terre, qui sont de fourmis jaunes, les punaises des deux espèces, les tigres appellées agathes dans quelques provinces, les perce-oreilles ou fourchettes, les limaçons-escargots (ou à coquilles), les limaces, les vers de toute espèce, sur-tout, les vers blancs de hannetons, & ceux de diverses familles de scarabées, qui ressemblent à la chenille, les sauterelles à couteau, les lisettes ou coupe-bourgeons ; parmi les mouches, les guêpes, & celles qu'en quelques endroits on appelle moines & mulots ou souris de champ, les loirs, les taupes, les courtillières (ailleurs, tays ou taupes-grillons.)

Le puceron est un insecte petit, plat, transparent, & même de couleur verdâtre, avec des ailes plus longues que le reste du corps ; quand il a brouté la feuille, il devient gros, rebondi, & d'un vert brun & foncé ; il dépose ses œufs & ses excrémens sur les feuilles les plus tendres : c'est ce qui y attire la fourmi, qui ne va jamais sur un arbre que pour s'y nourrir des œufs & des excrémens des autres insectes, & pour continuer le dégât que les autres ont commencé.

Le puceron se renouvelle trois fois dans un été : il faut le chercher avec soin, l’écraser sur la feuille, qu'on lave ensuite, ou bien, on fait cette opération un moment avant la pluie.

On peut encore le détruire en mouillant les branches où il est, & ensuite, y répandant du soufre en poudre.

On les détruit encore par le moyen d'une lessive de tabac, dont on arrose les feuilles de l'arbre où est le puceron, & on met du tabac rapé par dessus.

Les fourmis. Les plus dangereuses sont les jaunes, qui travaillent en dessous terre, & qui ruinent, les racines des arbres & des autres plantes.

On les détruit par la lessive du tabac & le tabac en poudre, par de la lessive ordinaire chaude ; par une lessive de tan, dans laquelle on laisse le tan (écorce de chêne, dont les tanneurs se font servis pour les cuirs), & par de l'urine échauffée : il faut ensuite enlever les terres infectées, & en mettre d'autres ; ce qui se pratique après tous les remèdes dont on se sert pour détruire les fourmillières.

On peut faire une mine au-dessous de la fourmillière, la remplir de soufre en poudre & y mettre le feu, puis boucher l’entrée de la mine, & laisser brûler pendant vingt-quatre heures.

On peut remplir cette mine de poudre à canon, & y mettre le feu avec une traînée.

On creuse autour d'une fourmillière, à un pied de profondeur, une jauge ; on met dans cette jauge du bois sec ; on en met encore au dessus de la fourmillière : on laisse brûler le tout, & on enlève les terres le lendemain.

On fait encore une jauge autour de la fourmillière, dont on bat bien le contour élevé en bassin, & on le remplit d'eau.

Presque tous ces expédiens entraînent ainsi la ruine ou le dégât des plantes voisines : il faut avoir, pour ainsi dire, le champ libre pour les pratiquer.

Si la fourmillière est le long du mur, il faut la baigner souvent avec de l’eau, ou avec de la lessive de tabac ou de tan.


Les issues ou entrailles de poisson, le poisson gâté, font périr les fourmis, en en frottant le mur, & en y attachant le poisson ou les entrailles.

On se sert encore, pour les attraper, d'une ou plusieurs fioles remplies d'eau miélée, & attachées dans le corps de l'arbre.

Le charbon, ou la fumée du charbon fait fuir la fourmi : on larde de charbon un espalier ; les fourmis le quittent ; mais, après huit à quinze jours, il faut changer le charbon, dont les vapeurs, attirées par l’air, n'ont plus d'effet sur la fourmi.

Punaises. Il y en a de deux espèces, des petites & des grosses : les grosses allant toujours seules, peuvent aisément être attrappées & écrasées.

Les petites vont en bande ; elles, font, par leurs excrémens, sur la muraille & sur l’arbre, une traînée noire comme de l’encre : le soir, elles se retirent dans les creux du mur.

Il faut, secouer les branches où il y a des punaises, ou les jeter bas avec un petit balai de plume, & les écraser à terre.

Ou bien, écarter de la muraille les branches où elles sont, & le soir, verser sur ces branches plusieurs arrosoirs d'eau fraîche, ce qui les fait crever.

Quand on prévoit un orage, on écarte les branches chargées de punaises, & cela fait l’effet de l’arrosoir.

On peut aussi blanchir, avec de la chaux vive, les creux où elles se retirent. (Voyez Punaises.)

Les perce-oreilles ou fourchettes, qui entament les fruits, & s'y logent, y attirent les fourmis, pour faire entr'elles le plus cruel dégât. On les prend aisément sur les espaliers, dans des cornets de papier à sucre, dans des cornes de bœuf ou de mouton, dans les montans de laitues, & dans de petits paquets d'herbes desséchées : ces insectes s'y réfugient la nuit ; le matin, on secoue les pièges, & on les écrase.

Les tigres ou agathes, qui sont de petits insectes, presque ronds, d'une couleur vive, tantôt safranée, tantôt rouge foncé, avec de petites taches noires, n'attaquent que les poiriers, & pommiers ; ils se rassemblent chaque nuit, & dans les tems de pluie, dans quelque creux ou gerçure de l’arbre, où il faut les chercher & les écraser.

Les limaçons escargots (ou grosses & petites coquilles), & les limaces, sont aisés à trouver, ou la nuit, sur les arbres, ou le matin, en suivant leur traînée argentine.

Les petits collimaçons, ou coquilles, s’attachent à la feuille lors de la pousse : il faut les chercher & leur déclarer la guerre, car ce sont de grands destructeurs en jardinage.

Les chenilles. On doit chercher leurs nids pendant l’hiver, les couper & les brûler, de même que les bagues d'œufs de certaines chenilles, qui enveloppent & entourent une branche en orme de bague ; il faut aussi chercher avec soin celles qui éclosent pendant l’été ; c’est le seul secret infaillible contre cet insecte : dès qu’on en apperçoit quelques œufs, il faut tout de suite les écraser, ou les brûler.

Les fumigations, soit avec des torchons gras que l’on brûle, soit avec le soufre allumé, sont des moyens insuffisans, & qui ne valent pas l'œil & la main, pour détruire les chenilles, & prévenir leur ravage.

Une corde de crin autour de la tige & des premières branches d’un espalier, empêche les chenilles, les limaces & les perce-oreilles d’y monter.

Les vers. Les vers ordinaires, ou de terre, sont inévitables : néanmoins, il faut les détruire, autant que l’on peut, en labourant, & par les tems de pluie, dans lesquels ils sortent volontiers de terre. Quoique ces vers ne nuisent pas beaucoup par eux-mêmes aux productions, néanmoins ils sont à craindre pour elles, en ce qu’ils attirent les taupes, qui gâtent & dérangent tout un jardin.

Il faut chercher & détruire exactement les vers de hannetons : on connoît où ils sont, par la langueur des arbres & des autres végétaux, aux racines & aux collets desquels ces vers s’attachent,.

Ce ver est hideux, informe, & plus gros vers le cul qu’à la tête ; il est grisâtre ou blanc, suivant son âge s’il est trois ans à se former, avant de se métamorphoser en hanneton : c’est le plus dangereux destructeur des plantes, arbres ou légumes, tout lui convient : il ronge les racines, puis il pique le cœur.

Il y a un autre ver assez semblable à celui-ci, mais plus allongé & plus blanc, qui ne lui cède guère pour la destruction : il ressemble à une chenille presque lisse.

Pour prévenir le ravage du ver de hanneton, il faut détruire le hanneton, lorsqu’il paroît au printems, le chercher sur les arbres, les secouer pour le faire tomber, & l’écraser ; le chercher dans les bordures, & sur-tout dans celles de fraisier.


Il y a encore un petit ver à tête noire, qui, dès le commencement de la pousse, s’entortille dans les bourgeons & boutons à fruit : il faut le chercher soigneusement dans ce tems, & l’on est bien payé de sa peine, par le fruit que l’on sauve, non-seulement pour l’année présente, mais pour la suivante : car un arbre rongé par les vers, ne se remet souvent que dans la troisième année.

Il y a encore, au même tems que ces vers paroissent, une petite chenille lisse & verdâtre, non moins vorace que le ver, & qu’il faut également détruire.

Les sauterelles coupent les légumes, en piquent le cœur : il est aisé de les voir, les prendre, & les écraser.

La lisette ou coupe-bourgeons est un petit insecte presque tout rond, aîlé, de couleur brune, ayant une tête pointue, & en avant, deux pinces avec lesquelles il coupe les bourgeons des arbres dans la première verdure : il faut le chercher, secouer les branches où on en voit, & l’écraser : cet insecte, qui est aussi un grand destructeur, ressemble en petit au hanneton.

Il y a encore d’autres petits insectes semblables, pour la forme du corps, à celui-ci, mais de couleur différente ; les uns mirant sur le vert, les autres presque noirs, qui ne détruisent pas moins que la lisette : il faut donc les traiter de même.

Les mouches, telles que les guêpes, se prennent dans des fioles d’eau emmiélée. Dans le tems, il faut donner la chasse à une espèce de mouche, dont le corps est allongé, les aîles noires ; & le reste du corps d’un rouge de corail.

Pour garantir les figuiers, les cerisiers & les chasselas de la voracité des moineaux, il faut faire trois tours avec un simple brin de laine rouge ; l’un vers le bas de l’arbre, le second vers le milieu, & le troisième vers le haut.

Les moineaux sont aussi de grands destructeurs des pousses & bourgeons, qu’ils coupent avec leur bec.

Les mulots & les loirs. On les prend dans les pièges ordinaires, ou on cherche à les empoisonner : le meilleur des pièges est de mettre en terre des pots, dont les bords sont au niveau de terre ; on les remplit à moitié d’eau ; ces animaux viennent s’y jetter & s’y noyer, ainsi que les taupes, les courtillières ou tays.

Pour mieux réussir dans le piège, il faudroit que les pots, un peu plus gros que les pots communs à œillets, fussent plus larges du fond que de l’ouverture, & un peu plus profonds qu’un pot à œillets.

Une feuille de papier blanc, que l’on met auprès des pêches prêtes à mûrir, empêche les loirs & les mulots d'y toucher.

Pour les emprisonner, on fait une pâte avec de la farine, dans laquelle on met de la noix vomique râpée : on fait cuire cette pâte, & on fait fondre dessus du vieux lard, qu'on saupoudre encore de noix vomique ; on met des morceaux de cette pâte dans les endroits où passent les loirs, soit sur un tuilot, soit entre deux morceaux de tuile creuse ; ils en mangent, & s'empoisonnent : mais il faut prendre garde que ni chats, ni chiens ne mangent de cet appât.

Les taupes. On prétend que le fumier frais de chèvre, mis dans les trous de taupes, les fait fuir. On attribue un peu plus de vertu à la noix bouillie dans de la lessive : on ouvre cette noix ; on la met dans les trous ; la taupe en mange, & cela la fait mourir. Le hareng saure, découpé comme des vers ; mis dans les trous de la taupe, produit aussi quelque effet.

Un expédient plus sûr, est d'amasser des vérs de terre, de les mettre dans un pot, de les couvrir & les saupoudrer par-tout de noix vomique râpée, de les laisser vingt-quatre heures, dans cet état, & de les mettre ensuite dans les trous de taupes, qui les mangent, & elles périssenr.

Mais, de tous ces expédiens, le sabot ou boëte, que l’on met au passage de la taupe, est le meilleur, si ce n'est celui de les guéter, & de les prendre avec la bêche, au lever & au coucher du soleil, ou un peu avant la pluie.

Il faut fouler la terre soulevée par les taupes, mais avant, il faut arroser, pour faire couler de la terre dans le trou fait par la taupe.

La courtiliere (ou tays, ou taupe-grillon), est un insecte aussi hideux, que dangereux & destructeur. On le prend aisément dans les pots dont on a parlé ci-dessus : on lui donne encore la chasse, & on le prend infailliblement, en versant dans le trou qu'il fait pour sortir de terre, qui est un peu moins large qu'un petit sou, de l’eau en suffisance, & sur cette eau, on coule un peu d'huile de navette ou de chenevis : ce qui force l’insecte à sortir, & on l’écrase.