Encyclopédie méthodique/Art aratoire et du jardinage/Fruitier

Définition

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Fruitier ou Fruiterie ; lieu où l’on sert les fruits.

Article

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FRUITIER ou Fruiterie ; lieu où l’on serre les fruits. La grandeur du bâtiment, sa position, son exposition, la hauteur du plancher, l'épaisseur convenable des murs, les ouvertures des portes & des croisées, la propreté, les tablettes & les distances entr'elles, ainsi que leur largeur, le transport & l'arrangement des fruits sont toutes choses qui doivent concourir pour former une bonne fruiterie.

Voici les conditions que doit avoir une fruiterie pour être bonne :

1°. Elle doit être impénétrable à la gelée. Le grand froid est très-dangereux aux fruits ; . ceux qui ont été une fois gelés, ne sont plus bons qu'à jetter.

1°. Une fruiterie doit être exposée au midi, ou au levant, ou du moins au couchant ; l'exposition du nord lui seroit pernicieuse.

3°. Les murs doivent être pour le moins de vingt-quatre pouces d'épais ; une moindre épaisseur ne garantiroit pas des fortes gelées.

4°. Les fenêtres doivent avoir de fort bons chassis doubles, faits de papier, & bien calfeutrés. Ils garantissent mieux que le verre. Il faut aussi qu'il y ait une double porte pour l'entrée, en sorte que jamais, dans les tems de gelée, l'air froid de dehors ne puisse avoir liberté d'entrer, car il détruiroit l'air tempéré qui est au-dedans. On ne sauroit avoir trop de précaution la-dessus ; il ne faut qu'une petite ouverture néglige pour faire en une nuit de gelée un désordre infini.

L'on n'approuve nullement que l'on fasse du feu dans la fruiterie. Un bon & grand thermomètre, placé en dehors de la fruiterie à l’exposition du nord, est, durant la gelée, utile & même nécessaire. Il faut juger que le péril est grand quand deux nuits de suite, ce thermomètre continue d'être au cinquième ou au sixième degré au-dessous de zéro. Une première nuit peut n'avoir point fait de mal, une deuxième doit faire tout craindre : ainsi dès le lendemain d'une premier nuit fâcheuse, servez-vous de bons matelats ou de bonnes couvertures de lit bien velues, ou de beaucoup de mousse bien sèche, pour mettre vos fruits si bien à couvert que la gelée ne puisse y atteindre. Si même vous avez une bonne cave, faites les y porter, pour ne les y laisser que pendant le grand froid. En tous ces cas, prenez soin de remettre les fruits dans leur serre ordinaire, dès que le tems est radouci, & continuez d'ôter ceux qui sont mûrs & ceux qui se gâtent. La pourriture est un des fâcheux accidens à craindre pendant que les fruits sont hors d'état de pouvoir être souvent visités l’un après l'autre.


5°. Après, avoir été muni contre le froid, il faut vous étudier à garantir les fruits contre le mauvais goût, le voisinage du foin, de la paille, du fumier, du fromage, de beaucoup de linge sale, sur-tout de linge de cuisine, sont extrêmement à craindre : ainsi il faut que la fruiterie en soit tout-à-fait éloignée. Attendu que certain goût de renfermé, avec une odeur de plusieurs fruits mis ensemble, font encore un grand désagrément, il est à désirer que non-seulement la serre soit bien percée, mais encore assez élevée, comme de dix à douze pieds. L'on doit en tenir souvent les fenêtres ouvertes ; c'est-à-dire, aussi souvent que le grand froid n'est point à craindre, soit la nuit, soit le jour : un air nouveau de dehors, quand il est de bonne qualité, faisant des merveilles pour purifier & rétablir celui qui est renfermé depuis long-tems.

6°. Un rez-de-chaussée convient très-bien pour une fruiterie. Le fruit se conserve aussi parfaitement dans une cave sèche. Au premier étage, & dans les lieux plus élevés, il avance trop. Enfin, on peut regarder comme certain qu'une bonne fruiterie doit être un peu enfoncée en terre ; en sorte qu'elle soit fraîche & sèche & qu'il n'y gêle pas, & que les rats ne puissent y entrer. Les fruits y étant arrangés sur des tablettes, peu de jours après on les voit couverts d'humidité ; les jardiniers disent que ces fruits ressuent. Alors il faut laisser les croisées ouvertes pour qu'ils dessèchent. Ensuite, par un beau tems, on ferme exactement toutes les croisées, n'en laissant d'ouverte qu'une petite, afin de voir assez clair pour ôter les fruits qui se pourriront. On enveloppe les plus beaux dans du papier & on les conserve dans des armoires.

On sent que la serre doit être souvent visitée de celui qui en est chargé, ce qui arrive rarement quand elle n'est point commodément placée.

7°. Il faut que, dans une fruiterie, il y ait beaucoup de tablettes enchâssées les unes dans les autres, afin d'y loger les fruits séparément ; les principaux dans le plus beau côté, les poires à cuire dans le moins beau, les pommes encore à part. La distance raisonnable de ces tablettes doit être de neuf à dix ponces, avec une largeur convenable pour chacune, qui soit d'ordinaire de dix-sept à dix-huit pouces, pour y en loger beaucoup ensemble & en voir beaucoup d'une seule vue. Si les planches sont portées sur des poteaux & isolées, on a la commodité de visiter les fruits des deux côtés des tablettes.

8°. Il faut que ces tablettes soient un peu en pente vers la partie de dehors, c'est-à-dire d'environ trois pouces dans leur largeur, & qu'elles soient bordées d'une petite tringle d’environ deux doigts, pour empêcher les fruits de tomber. On ne voit pas si bien d’un coup-d'œil tous les fruits d’une tablette, quand elle est de niveau ; on ne s’apperçoit pas si aisément alors de la pourriture qui survient à quelques fruits, & qui se communique à leurs voisins quand on n’y remédie pas d’abord.

9°. Cette pourriture à craindre oblige pour neuvième condition que, sans y manquer . on visite au moins chaque tablette de deux jours l’un, pour ôter exactement tout ce qui est gâté.

10°. On demande pour dixième condition, que les tablettes soient garnies de mousse bien sèche ou d’environ un pouce de sable fin, afin que chaque fruit posé sur sa base, c’est-à-dire sur la partie où est l’œil, se fasse une manière de nid ou de niche particulière qui le maintient droit SeFempêche de toucher à ses voisins ; car il ne faut point souffrir que les fruits se touchent.

11°. Pour dernière condition, on aura grand soin de nettoyer & balayer souvent la fruiterie, d’en ôter les toiles d’araignée, d’y tenir des pièges pour les rats & les souris, & même il n’est pas mal à propos d’y laisser quelqu’entrée secrète pour les chats ; autrement, on a souvent le chagrin de voir les plus beaux fruits attaqués par ces petits animaux mal-faisans. (Extr. du Dict. économ.)