Encyclopédie méthodique/Architecture/Tome 3/Q


QUA


QUADRE, Voyez Cadre.

QUADRIGE, s. m. , du mot quadriga, en latin. Char à quatre chevaux. Nous ne faisons mention de ce mot, que parce que l’objet qu’il exprime a souvent servi, dans l’antiquité, d’ornement ou de couronnement à un fort grand nombre de monumens.

Il n’y a rien de plus fréquent dans les ouvrages de l’art antique, que les représentations des chars, soit à deux chevaux, bigœ, soit à quatre chevaux, quadrigœ. Les exercices du cirque et les victoires à la course des chars, dûrent les multiplier sur les médailles et sur les bas-reliefs. L’art de la guerre en orna ses triomphes chez les Romains. Aussi voyons-nous sur les revers des monnoies, que les plates-formes des attiques, dans les arcs de triomphe, avoient fréquemment leur milieu occupé par un quadrige.

Les quadriges étoient faits le plus souvent en bronze. et il n’y a aucun doute que les quatre chevaux de bronze doré, que les Vénitiens rapportèrent de Constantinople, furent jadis attelés à un char de même métal. Toutefois le beau char en marbre blanc, qu’on voit au Muséum du Vatican, et que la matière désigne assez comme n’ayant pu avoir d’autre emploi qu’un emploi décoratif, indique aussi qu’il put y avoir des quadriges formés de deux matières.

Y avoit-il toujours, dans l’emploi du quadrige sur les monumens, un rapport nécessaire avec l’idée de victoire athlétique et celle de triomphe guerrier ; ou autrement dit, le quadrige signifioit-il, même sur les tombeaux, que le mort avoit été illustré par l’un ou l’autre de ces honneurs ? Il est permis de faire cette question quand on voit que la pyramide du tombeau du roi Mansole étoit couronnée par un quadrige en bronze. L’habitude qu’on a aujourd’hui de considérer le plus grand nombre des objets décoratifs des monumens, comme des accessoires destinés uniquement à l’efset et au plaisir des yeux, nous a fait élever ce doute. Mais nous croirons que, le quadrige qui renfermoit ou la figure du Roi, ou celle d’une victoire, devoit rappeler les exploits guerriers de Mausole, et peut-être aussi ceux qu’il avoit obtenus dans les combats du cirque, jadis école, ou pronostics des succès militaires, et que, pour cette raison, les Grecs s’étoient habitués à payer du même signe d’honneur.

QUAI. s. m. Levée ordinairement revêtue de maçonnerie ou de pierre de taille, soit pour retenir les terres de la berge d’une rivière, soit pour en contenir les eaux dans leur lit ou dans leur bassin, et qui procure, le long de cette rivière, une promenade aussi sûre que commode et agréable.

L’agrément des quais manque à plusieurs grandes villes, telles que Rome et Londres. Lorsque le hasard a placé la situation d’une rivière trop en dehors de la ville, ou que la ville s’est formée par ses développemens successifs, trop loin des rives du fleuve, il devient par la suite inutile d’y construire des quais. D’autres fois, quand les bords d’une rivière se trouvent occupés par des maisons et des habitations considérables, il devient trop dispendieux de les remplacer par les constructions, qu’exigent les levées de terre destinées à maintenir les eaux dans un canal régulier.

Deux villes d’Italie, Pise et Florence, construites chacune sur l’une et l’autre rive de l’Arno, jouissent de l’agrément des quais, qui font aussi une de leurs principales beautés. Les quais de Florence surtout se font remarquer par leur uniformité, par les édifices qui les décorent, par les ponts qui réunissent les deux côtés du fleuve.

Mais aucune ville n’approche, et probablement ne pourra jamais approcher, en ce genre, de l’étendue, de la grandeur et de l’agrément que Paris reçoit de ses constructions de quais, ouvrages commencés depuis long-temps, continués à différens intervalles, et qui, dans l’extension, qu’ils ont obtenue récemment, portent à plus d’une lieue la longueur de l’espace que parcourt la rivière dans un canal de pierres de taille, entrecoupé, de distance en distance, par des ports pour l’arrivage des bateaux et des marchandises.

Il y a déjà long-temps qu’en décrivant les monumens de Paris, ou opposoit à la construction des pyramides d’Egypte, sous le simple rapport de la bâtisse et de la quantité de matériaux taillés, le travail des quais dont la Seine est environnée. Depuis ce temps, la masse de ces constructions s’est accrue dé plus d’un tiers. Depuis ce temps, la mesure exacte de la grande pyramide a été mathématiquement constatée dans toutes les dimensions de son revêtement en pierres. Il ne faudroit donc plus qu’une simple opération de toisé, et le calcul le plus simple, pour arriver au résultat de ce parallèle. Nous l’abandonnons à qui, par curiosité, voudra, prendre cette peine. Mais il ne seroit pas impossible, a notre avis, que deux lieues en longueur de construction en revêtement de pierres de taille, sur une hauteur moyenne de trente pieds, donnassent cinq ou six fois la mesure du revêtement en pierre de la grande pyramide.

QUARANTE COLONNES, appelées Tchelminar en persan. Voyez Persepolis.

QUARDERONNER, v. act. Ce mot, formé de quart de rond, ne signifie réellement que faire un quart de rond. On l’emploie toutefois à exprimer l’opération préparatoire par laquelle on abat les arêtes d’une pièce de bois de charpente, d’une poutre, d’un poteau, d’une solive, ou d’un battant de porte de menuiserie, avant d’y pousser le quart de rond qui se trouvera entre deux filets.

QUARRÉ, adj. et subst. On donne ce nom à toute figure qui a quatre côtés, et a quatre angles droits.

On fait non substantif de ce mot, en l’appliquant à plus d’une sorte d’objets.

On appelle un quarré, en architecture, un petit membre qu’on désigne le plus gentiment par le mot listel. Voyez ce mot.

On donne vulgairement le nom de quarré, dans les étages des escaliers, à ce petit espace qui separe un étage de l’autre.

En parlant de jardinage, on appelle quarré, un espace de terre quadrangulaire, dans lequel on plante des fleurs ou des légumes.

QUARRÉES-LES-TOMBES. C’est le nom d’un village de l’Auxois en Bourgogne, qui s’appelle, dans le latin moderne, Parochia dé quadratis, en sous-entendant très-probablement lapidibus.

De temps immémorial, on découvre dans ce village des tombeaux en pierre. Ces tombes sont d’une pierre grisâtre, et ont environ cinq à six pieds de longueur. On en a brisé un grand nombre, pour bâtir et pour paver l’église de ce lieu. On s’en est servi quelquefois pour faire de la chaux, et on en a réservé quelques-unes qu’on a laissées dans le cimetière, pour satisfaire la curiosité.

Il n’y a qu’une seule carrière dont on ait pu tirer les pierres, qui ont servi à faire ces cercueils ; elle est dans un endroit nommé Champ-Rotard, à six lieues de Quarrées-les-Tombes. Or, la qualité et la couleur de la pierre de cette carrière, est parfaitement ressemblante à celle de ces tombeaux.

On a épuisé toutes les sortes de conjectures, pour trouver la raison de ce grand nombre de tombes, et la cause qui les auroit à tel point multipliées dans un lieu si peu célèbre. On a vainement cherché sur ce terrain et dans ses environs, des restes ou des souvenirs de quelque ville considérable. Tout aussi inutilement a-t-on demandé à l’histoire des mentions de quelques grandes batailles, qui auroient nécessité l’emploi d’un grand nombre de cercueils. Mais, outre beaucoup d’autres objections, les tombes, dont il s’agit, ont presque toutes été trouvées dans un état, qui prouve qu’elles n’ont jamais servi à la sépulture.

Il paroît en définitive, que l’amas de tombes, qui a donné le nom au lieu, n’est autre chose qu’un reste de dépôt ou magasin de cercueils, destiné a approvisionner les endroits voisins, dont la pierre eût été d’une trop mauvaise qualité pour cet emploi, et que l’usage des sépultures de pierre ayant cessé peu à peu, le magasin sera devenu inutile. Voyez sur cet article le Dictionnaire d’Antiquités.

QUART DE ROND, s. m. Nom qu’on donne généralement à une moulure dont le coutour décrit une ligne circulaire. On la nomme quelquefois ove.

QUARTIER, s. m. L’emploi le plus ordinaire de ce mot, est de désigner, dans l’ensemble d’une ville, des parties de maisons et de rues, qui reçoivent des noms divers, tirés le plus souvent, ou de l’ancienne dénomination des terrains sur lesquels se sout élevées successivement des maisons nouvelles, sur des percés nouveaux, ou de quelque monument qui précéda ces augmentations, ou de toute autre particularité.

Les quartiers d’une ville ce forment ainsi, par l’effet de l’accroissement de la population, ou par les spéculations d’entrepreneurs qui calculent, d’après les progrès du luxe et de l’opulence, le besoin que de nouveaux riches auront d’occuper des habitations plus agréables et plus commodes. Ainsi, dans beaucoup de villes, on peut compter ces progrès et les changemens de mœurs, par la suite des quartiers, qui, les uns après les autres, ont agrandi l’enceinte primitive, laquelle ne forme plus que le cœur de ce qu’on appelle, par exemple, à Paris et à Londres, la cité.

Cependant il se forme aussi, par mesure de police et de bonne administration, des divisions de quartiers, qui peuvent être indépendantes des époques de leur formation. Ainsi, au temps de Henri IV, la ville de Paris se divisoit en seize quartiers. Depuis, et par suite des augmentations de cette ville, de semblables divisions se sont multipliées sous des noms différens.

Les topographies d’Aurelius-Victor, de Panvinius et d’autres, nous apprennent que la ville de Rome fut plusieurs fois divisée différemment, selon ses accroissemens, en quartiers qu’on appeloit regiones. Aujourd’hui on donne le nom de rioni aux quartiers de Rome morderne.

QUARTIER DE VIS SUSPENDUE. C’est, dans une cage ronde, une portion d’escalier à vis suspendue, pour raccorder deux appartemens qui ne sont pas de plain-pied.

QUARTIER DE VOIE. On appelle ainsi les grosses pierres, dont une ou deux font la charge d’une charrette attelée de quatre chevaux, et qui servent ordinairement pour les jambes d’encoignure et pour les jambes étrières, à la tête des murs mitoyens.

QUARTIER TOURNANT. C’est, dans un escalier un nombre de marches d’angles qui, par leur collet, tiennent au noyau.

QUEUE, s. m. Ce mot, dans la construction et dans les détails des bâtimens, s’applique à plus d’un genre d’objets.

On appelle queue, dans une marche tournante, la partie la plus lage du giron, comme cela se pratique aux escaliers à noyau ou à vis, et aux escaliers à limons rampans ou ayant un noyau circulaire.

On appelle queue d’hironde une manière de tailler l’extrémité d’une pierre, d’une pièce de bois ou de fer, pour l’assembler avec une autre, en faisant l’assemblage plus large à l’extrémité qu’au collet.

On appelle queue en cul-de-lampe, des clefs de voûte, prolongées en contre-bas, et qu’on tailloit de différentes formes, comme on en voit aux voûtes des églises gothiques.

Ce mot se dit aussi des pièces de bois qui, dans les assemblages de cintres en charpente, se prolongent en contre-bas. Cela se pratique aux cintres retroussés, dont on se sert pour la construction des grandes arches des ponts de pierre.

Cet usage des queues en cul-de-lampe, dans le gothique, usage que jamais les erremens de la construction en pierre n’auroient pu faire imaginer, nous a paru être un argument fort plausible en faveur de l’opinion que nous avons avancée ailleurs (voyez Gothique), savoir, que tout le système de formes, de construction, et d’accessoires, dans cette architecture, dérive des formes, des assemblages et des détails de la mé-


thode de construire en bois les églises, auxquelles ont succèdé celles qu’on voit aujourd’hui.

On appelle queue de paon les compartimens, de quelque grandeur et de quelque forme qu’ils soient, qui, dans les figures circulaires, vont en s’élargissant depuis le centre jusqu’à la circonférence, et imitent en quelque manière le développement des plumes de la queue d’un paon.

On appelle queue perdue un assemblage de menuiserie à queue d’hironde, en équerre et à mi-bois, dont les joints sont recouverts.

On appelle queue percée un assemblage de menuiserie, à queue d’hironde et en équerre, dont les joints sont apparens.

QUINCONCE, s. m. (Terme de jardinage.) C’est un plant d’arbres qui a été disposé, dans son origine, en quatre arbres formant un quarré régulier, avec un cinquième dans le milieu. Cette disposition, toujours répétée, compose une sorte de bois planté avec symétrie, lequel présente, de quelque côté qu’on se place, des allées toujours égales et parallèles. C’est de cette sorte de quinconce que parlent Cicéron dans son Cato major, et Quintilien, liv. VIII, chap. 5.

Aujourd’hui on forme un quinconce par un plant d’arbres en plusieurs rangs parallèles, tant en long qu’en large. Le premier du second rang commence au centre du quarré, qui se forme par les deux premiers arbres du premier rang et les deux premiers du troisième. Ceci n’est qu’une autre manière de procéder ou de faire entendre de quelle façon on forme l’échiquier. C’est dans cette ordonnance que doivent êire plantés les jardins qui servent de promenade publique.

La beauté d’un quinconce consiste en ce que les allées s’alignent de toute part, s’enfilent l’une dans l’autre, et toujours dans les mêmes rapports. On ne met dans ce bois ni palissades ni broussailles, mais on y sème quelquefois, sous les arbres, des pièces de gazon, dans des places découvertes.