Encyclopédie anarchiste/Crédulité - Cynisme

Collectif
Texte établi par Sébastien FaureLa Librairie internationale (tome 1p. 467-472).


CRÉDULITÉ. n. f. Facilité à croire. L’homme crédule est un individu qui croit sans contrôler ce que lui raconte celui ou ceux en qui, à tort ou à raison, il a placé sa confiance. L’homme est un puits inépuisable de crédulité, car depuis le temps qu’il sert de jouet à tous les fantoches qui l’exploitent, ses yeux et ses oreilles auraient dû s’ouvrir et il devrait savoir analyser les sentiments de ceux qui captent sa confiance et profitent de sa crédulité. Il n’en est hélas pas ainsi. Le Lachâtre nous donne une définition assez juste de l’homme crédule : « L’homme crédule ne peut pas mieux être comparé qu’à un individu qui fermerait les yeux et se boucherait les oreilles pour ne plus voir et ne plus entendre que par les yeux et par les oreilles d’un autre ». N’est-ce pas ainsi que cela se passe et plus particulièrement en matière politique ? Comment l’électeur peut-il être assez crédule pour écouter les sornettes de tous les faux prophètes qui lui promettent le bonheur et comment peut-il être assez naïf pour croire en la force et la puissance d’un individu qu’il délègue dans un parlement quelconque ? La crédulité est un sentiment mystérieux comme la Foi, mais il faut espérer que, à force d’en être les victimes, les crédules se guériront de leur crédulité et qu’ils se refuseront un jour à servir de tremplin aux arrivistes et aux coquins.


CRITIQUE. (Etym : criticus, latin ; kritikos, grec). Si l’on s’en tient à l’étymologie, ce mot signifie difficile, dangereux, pénible. Il qualifie un état de crise. Ex. : période critique, situation critique, point critique, température critique, etc. Mais en art, en littérature, en philosophie, en politique, le terme change de sens et de qualificatif devient substantif. Il désigne alors cette faculté qu’exercent les hommes dans l’examen des choses. Critiquer, c’est voir, étudier, juger, peser ; c’est produire une opinion sur une œuvre, l’analyser, la disséquer. La critique ne vaut, cependant, qu’à la condition d’être étayée sur des connaissances étendues, un goût sûr et une absolue sincérité, exempte de tout parti pris.

La critique remonte à la plus haute antiquité. Toujours les humains se séparèrent en deux catégories : ceux qui créent, ceux qui étudient et discutent les mérites des créateurs. Les uns et les autres ont leur utilité. Le sens critique, même quand il s’accompagne de basse envie, de jalousie, de méchanceté, accomplit une besogne indispensable. Il dépasse le but ; mais sa clairvoyance haineuse permet d’apercevoir les imperfections d’une œuvre d’art ou littéraire. Quand le critique se pique simplement de justice, son action devient bienfaisante. Chez les Grecs, on rencontre ces deux pôles de la critique : Zoïle et Aristarque qui, tous deux, s’attaquèrent à Homère. Mais avec les Grecs, la critique était purement verbale. De même chez les Latins et, dans les débuts, en France. Elle ne devient grammaticale que par la suite. Plus tard encore, elle se divisera en critique historique, critique d’art, critique littéraire, critique dramatique, critique musicale, etc. La spécialisation intervient qui nécessite des compétences particulières.

C’est avec l’école d’Alexandrie que la critique commence à se développer. Jusque-là, Platon, Aristote, ne font que disserter sur la Beauté, la Forme, l’Art, mais ils n’assoient les jugement sur aucune base doctrinaire solide. Ils ne sont dirigés par aucun principe. Les Alexandrins se préoccupèrent de fixer ces principes et d’établir les règles indispensables de la critique : ils furent continués par les Plutarque, les Lucien de Samosate. les Longin. Chez les Latins, la critique ne fait pas de grands progrès. Il faut arriver à Horace et à l’Art poétique pour trouver un maître. Puis, après l’éclipse que provoquent les Barbares et la longue nuit du Moyen-Âge, la critique renaît. Joachim du Bellay, au nom de la Pléiade, lance sa fameuse Défense et illustration de la langue française qui fige la poésie dans l’imitation stérile des Grecs et des Romains. Toute la littérature classique suivra ces commandements et, quand Malherbe « vient », les règles de la littérature comme de la grammaire françaises sont sévèrement édictées.

Au xviiie siècle, il y a des tentatives de libération, avec Diderot et Jean Jacques Rousseau. La critique dramatique et la critique d’art prennent leur essor et la critique sociale fait ses premiers pas (Contrat Social, De l’Inégalité, etc.). Chateaubriand l’oriente ensuite vers l’Histoire et le Romantisme triomphant bouscule les vieux canons, subit l’influence des littératures étrangères, la rend plus compréhensive et plus analytique. C’est alors une magnifique floraison. Ce xixe siècle, que des écrivains tardigrades qualifient de stupide, a toutes les curiosités et dirige ses investigations de tous les côtés. Politique, Science, Économie, Art, sollicitent les efforts des critiques. Mais sur le terrain purement littéraire les Villemain, les Girardin, les Sainte-Beuve, s’avèrent supérieurs. Taine, à son tour, renouvelle la critique qu’il base sur l’observation directe, apporte une nouvelle méthode d’examen. Brunetière défend la tradition et la morale bourgeoises. Jules Lemaitre, le plus averti et le plus enjoué de nos critiques, s’amuse avec les idées. Lanson, Larroumet, Doumic, Faguet, pèsent leurs contemporains avec toute la lourdeur pédagogique.

Dans le domaine de la critique dramatique, illustrée jadis par Diderot, on peut citer les noms de Jules Janin, Paul de Saint-Victor, Théophile Gautier, Weiss, Francisque Sarcey, Catule Mendès, Brisson, qui tinrent la plume avec plus ou moins d’autorité, d’incompétence ou de mauvaise foi et qui s’opposèrent parfois brutalement aux jeunes et aux novateurs.

La critique d’art a pris, au vingtième siècle, une énorme importance. Elle est née véritablement au dix-septième siècle, avec les conférences imaginées par Lebrun, à l’Académie Royale ; a fleuri avec Diderot, Marmontel, Caylus, pour s’épanouir plus tard sous le sceptre de Ruskin, l’apôtre de la Beauté. Les Baudelaire, les Zola, les Maxime du Camp, les Charles Blanc, les Gustave Planche, les Octave Mirbeau, s’y consacrèrent avec passion. Zola notamment, défendit avec fureur les Manet, les Cézanne ; Mirbeau mit toute son existence au service des jeunes talents et de la vérité. Depuis, comme nous allons le montrer, la diversité des écoles, le bluff organisé, les systèmes les plus inconcevables ont rendu la critique d’art à peu près inopérante.

La critique musicale, peu brillante, trouve néanmoins, sa place dans les Journaux et revues. Le plus illustre de ces critiques est incontestablement Berlioz qui jugeait avec fougue et passion. On peut citer après lui, Arthur Pougin, Ernest Reyer, Adolphe Julien, Camille Bellaigue, et, de nos jours, des écrivains tels que Willy, Georges Pioch, etc…

Aujourd’hui, la critique, dans ses différentes manifestations, s’allie étroitement à la publicité et se détermine le plus souvent par des considérations de boutique et de camaraderie. L’indépendance du critique n’est plus, à quelques exceptions près, qu’un mythe. L’Argent a joué, dans ce domaine, le même rôle dissolvant et pourrisseur que partout ailleurs. Le critique dramatique semble le plus atteint. En réalité, il n’y a pas, il ne peut plus y avoir de véritable critique dramatique. Il n’y a que des comptes rendus dictés par l’intérêt du journal, lequel est lié par des contrats de publicité. Défense de toucher à celui-ci, qui représente une force avec laquelle il faut compter. Ordre d’épargner celui-là qui est l’ami de la maison. Dans ces conditions, le malheureux critique, qui vit d’ailleurs de son métier, ne sait plus comment dire ce qu’il pense de l’œuvre dont il a à entretenir ses lecteurs. Mais, si cette œuvre choque les préjugés, crie de trop cruelles vérités, se mélange de satire, le silence est imposé. On a vu de remarquables exemples de cet esclavage Intellectuel avec les manifestations que provoquèrent des représentations d’œuvres telles que le Foyer de Mirbeau et, plus récemment, la Carcasse, interdite et conspuée par la presse sous le prétexte qu’elle mettait en scène un général grotesque.

La Bourgeoisie est souveraine à notre époque. Les théâtres sont à elle. On ne peut ouvrir un théâtre, aujourd’hui, qu’avec des millions. Les gens qui paient veulent être servis. Une œuvre n’est acceptée et jouée qu’autant qu’elle est susceptible de rapporter de l’argent. On monte une pièce de théâtre comme une affaire et les quelques exceptions que l’on pourrait invoquer ne font que confirmer cette règle. De plus, les acteurs connus et influents, ceux qu’on appelle des vedettes, interviennent, soit pour dicter leurs conditions, soit pour apporter le commanditaire ; cela se voit surtout du côté féminin et il arrive fréquemment qu’une dame armée simplement de ses charmes, parfois surannés, et dépourvue de tout talent, s’impose au directeur de théâtre et au public éberlué sans que les critiques osent protester.

Nous sommes donc très loin de la critique telle qu’on le pratiquait autrefois. La bourgeoisie triomphante, et surtout la fraction de cette bourgeoisie sortie de la guerre ne consent pas à se laisser railler ou fustiger sur la scène. La vérité lui est odieuse. Jadis, un Molière pouvait faire représenter Tartufe devant la cour du Roi-Soleil. Plus tard, un Beaumarchais ne craignait pas de bafouer les nobles de son époque et ces derniers trouvaient très drôles les saillies et réparties de Figaro. Nos modernes bourgeois n’admettent que l’encens des thuriféraires ou les bonnes petites plaisanteries bien salées qui aident à la digestion. Et les critiques payées par la bourgeoisie qui dispose de la presse doivent satisfaire leurs maîtres et seigneurs.

La critique littéraire est également régie par la publicité et soumise à ses exigences. Elle cède aux obligations de la camaraderie et aux désirs des coteries et chapelles. La plupart des écrivains, romanciers, poètes, essayistes, s’adonnent à la critique et rendent le bien pour le bien. Rares sont ceux qui peuvent se proclamer indépendants et disent toute leur pensée. Il faut reconnaître, cependant, qu’Il en est encore quelques-uns et que la critique littéraire n’est point complètement muselée.

La critique d’art est tout simplement inexistante. Elle est faite à peu près des communiqués de marchands de tableaux et de négociants en peinture. On ouvre une exposition comme une boutique d’épicerie. On lance un artiste comme un produit. Il faut ajouter à cela, les faux engouements pour certaines théories projetées par le bluff ou l’impuissance, engouements habilement entretenus par les intéressés qui profitent de la sottise publique et du snobisme. On en est parvenu ainsi à classer, parmi les plus purs chefs-d’œuvres, des tableaux sans dessin ni forme, des blocs de marbre sans ligne. Tout ce que peut imaginer la fantaisie la plus abracadabrante dans l’absurde et l’incohérent, se donne libre essor et recueille tous les suffrages. Quiconque s’avise de protester ou de vouloir des œuvres saines et fortes se voit conspué, qualifié de pompier. Tout métier est rigoureusement banni, toute technique suspecte. Le bon sens devient une denrée méprisable. Dans ce babélisme inouï, où chaque école parle sa langue, où chaque clan a son vocabulaire, les commerçants en art tirent gloire et revenus, au détriment des artistes probes et sincères. Et la critique, inféodée aux hommes d’affaires, se tait ; la critique est impuissante à remonter le courant.

On ne rencontre de libre critique que dans de petits journaux et revues d’avant-garde. Là, le sens critique s’exerce sans retenue et les vérités sonnent à toutes les lignes. Par malheur, ces feuilles dotées d’une clientèle réduite et dépourvues de numéraire n’ont qu’une action limitée sur un petit nombre de lecteurs.

On peut affirmer, cependant, que jamais le sens critique ne se développa et ne s’aiguisa comme à notre époque. La critique sort du domaine de la littérature, de l’art, de l’histoire… Elle est surtout sociale. Elle poursuit ses investigations dans tous les milieux, pose tous les problèmes, étudie les lois et les conditions auxquelles sont soumis les hommes et aboutit, tout naturellement, à dénoncer l’organisation sociale basée sur l’exploitation de l’homme par l’homme. Et, ici, nous touchons à la critique socialiste. Mais les anarchistes vont plus loin et donnent leur attention au principe d’autorité d’où découle toute la malfaisance sociale.

Ainsi la critique, qu’elle touche à la littérature, à l’art, au théâtre, est dominée par des préoccupations sociales, à la condition toutefois, qu’elle demeure libre et échappe à la terrible emprise de l’Argent. Le sens critique qui est la marque même de la raison et se manifeste, en un temps de bas mercantilisme et d’incertitude, par l’ironie, quelquefois par le sarcasme, s’affirme partout, contre les préjugés ridicules et odieux, contre la Bêtise régnante, contre les Dieux, contre les Concepts, contre les Autorités, contre les Mensonges. Il conduit tout droit sur la route de la Révolte.

Le jour où la justice et la logique seront introduites dans l’ordre social, la critique échappant au joug du capital, reprendra tous ses droits. ― Victor Méric.


CROISADE. n. f. Le mot « croisade » dans le langage consacré, sert à désigner les pèlerinages militaires entrepris par divers monarques européens du xie siècle au xiiie siècle. Ces excursions armées se faisaient sous le couvert de la religion et avaient pour but avoué de convertir au catholicisme les infidèles d’Orient ; en vérité leur véritable but était de conquérir la Palestine et d’en chasser les musulmans. La première des Croisades, prêchée par Pierre l’Ermite et décidée au Concile de Clermont, fut conduite par Godefroy de Bouillon, duc de Lorraine et Raymond, comte de Toulouse. Les armées féodales étaient fortement organisées et s’emparèrent de Nicée, d’Antioche et enfin de Jérusalem dont Godefroy de Bouillon se fit proclamer roi. La première Croisade dura de 1096 à 1099. La seconde fut couronnée par un échec. Elle fut entreprise par le roi Louis VII en 1147 et se termina en 1149 après un siège inutile devant Damas. De 1189 à 1270, six autres Croisades furent entreprises. La dernière fut conduite par le roi Louis XI, pour venger l’insuccès de la Croisade précédente où Louis IX fut fait prisonnier et dut payer une forte rançon pour recouvrer sa liberté. Cette dernière expédition coûta la vie au roi qui mourut de la peste devant Tunis. L’armée fut elle-même décimée par le terrible fléau.

Si l’on se reporte à l’époque où les Croisades furent entreprises, il faut reconnaître qu’elles exercèrent, dans une certaine mesure, une influence heureuse sur l’avenir. C’est par les Croisades que les Européens prirent contact avec les Asiatiques et, durant ces deux siècles de lutte, les uns et les autres apprirent à se connaître. L’historien français Lavallée s’exprime ainsi en parlant des Croisades : « Une commotion violente fut donnée à tous les esprits, à toutes les facultés, à toutes les existences. On était jeté hors de l’isolement féodal ; on promenait ses regards sur un vaste horizon ; on se mettait en contact avec de nouveaux hommes, de nouvelles choses, de nouvelles idées. La féodalité en reçut un immense échec ; elle s’était remuée, elle était sortie de ce qui faisait sa force, de ses châteaux et de ses terres ».

S’il est vrai que les Croisades furent un facteur d’évolution, il ne faudrait pas en conclure que la guerre est parfois utile. La guerre est toujours néfaste et il ne faut pas oublier que les Croisades furent organisées à une époque où la civilisation et le progrès n’étaient, en France, qu’embryonnaire. Il en est autrement de nos jours et les diverses Croisades entreprises par les capitalistes pour accaparer les territoires propres à être exploités, et les guerres coloniales qui se perpétuent malgré les protestations populaires, ont un tout autre caractère. Les Croisades modernes sont plus meurtrières que celles du passé. « Les Croisades, nous dit Voltaire, coûtèrent à l’Europe plus de deux millions d’habitants en deux siècles ». La dernière guerre de 1914 qui, dans l’esprit populaire, prit le caractère d’une Croisade ayant pour but le triomphe de la civilisation et la mort du militarisme, coûta, en quatre ans, près de dix millions de vies humaines. La civilisation en est sortie affaiblie et le militarisme renforcé.

Il est une Croisade qui serait et qui est utile à prêcher : c’est celle contre les préjugés, contre les croyances, contre le mensonge sur lesquels reposent nos sociétés bourgeoises. Et cette Croisade est sainte, car elle a pour but la libération et l’égalité de tous les hommes. Elle soulève, hélas ! moins d’enthousiasme que toutes les aventures dirigées par les conquérants ; et le peuple reste souvent sourd à l’appel de la raison. Espérons que, à la faveur des événements, tout cela changera et que la dernière des Croisades abolira définitivement le capitalisme et tous les maux qui en résultent.


CROYANCE. n. f. Confiance irraisonnée à un dogme, à une religion. Le mot « croyance » s’applique plus particulièrement aux faits sur lesquels reposent les systèmes religieux. La croyance est un phénomène d’ordre sentimental, car elle ne s’adresse jamais à la raison ni à la logique ; elle se refuse à toute analyse car elle ne peut être soumise à l’analyse des bases sur lesquelles elle repose, se perdant dans l’abstraction. Il est faux de prétendre que la croyance ne se manifeste que chez l’individu peu développé et peu cultivé. Il y a des croyants sincères qui, sont, pourtant, pourvus d’une haute culture. Tolstoï était croyant et cependant on ne peut le taxer d’ignorance.

L’homme, à sa naissance, n’hérite pas seulement des tares physiques de ses ancêtres ; il hérite également de leurs tares morales et intellectuelles et ce n’est que lentement que l’individu se transforme. La croyance est un legs du passé. Les siècles d’esclavage qui nous ont précédé, l’obscurantisme religieux ont laissé des empreintes profondes sur les cerveaux. L’homme est imprégné de croyances : mais le travail d’évolution se poursuit, et de génération en génération, on voit de plus en plus s’effacer les préjugés qui obstruaient la route de la Vérité.

Les croyances disparaissent. Certes l’instinct et le sentiment jouent encore un grand rôle dans la vie des individus et des sociétés ; cependant, ils sont appelés à céder la place à la raison et les générations futures s’orientent de plus en plus vers la lumière, laissant derrière elles les croyances qui sont les derniers vestiges de l’ignorance et de l’erreur.


CRUAUTÉ. n. f. Inclination à faire souffrir ses semblables. La cruauté, dit Lachâtre, « est toujours un grand mal ; mais quand elle se trouve dans un homme revêtu de quelque autorité, elle devient un fléau ».

L’histoire est remplie d’actes de cruauté et certains d’entre eux sont devenus proverbiaux. Qui donc ignore la cruauté des Borgia et plus particulièrement de César et de Lucrèce qui furent cruels jusqu’au sadisme. Néron fut aussi un maître dans l’art de la cruauté. Ce tyran perverti et sanguinaire ne se plaisait que dans le crime et tout son règne est marqué de boue et de sang. Hélas ! La cruauté n’a pas encore disparu de la terre et, si elle n’emprunte plus la même forme et ne se réclame pas des mêmes principes, elle ne s’exerce pas moins sur une certaine classe d’individus. C’est la cruauté du juge qui s’abat sur le miséreux qui crève de faim et qui se révolte ; c’est celle du policier qui se manifeste au cours des démonstrations populaires ; c’est la cruauté des tortionnaires dont sont victimes les malheureux réfractaires envoyés dans les bagnes lointains. Et cependant, l’homme n’est pas cruel par nature ; il est rendu méchant par les rudes nécessités de l’existence, inhérentes au désordre social créé par le capitalisme et la bourgeoisie. Dans une société où le bonheur des uns ne sera pas fait du malheur des autres, l’homme n’aura aucune raison d’être méchant, et la solidarité effacera la cruauté.


CULTES. Les cultes solaires, origine du christianisme — Les mystères des premiers chrétiens et la communauté des femmes. — Dans mon article sur la Bible, j’ai déjà fait allusion aux ressemblances qui existent entre le christianisme et les religions orientales. Les origines du christianisme sont toujours discutées et donnent lieu à toutes sortes d’hypothèses, parce que c’est l’existence du christianisme primitif qui suppose celle du Christ et non pas l’existence du Christ qui implique le fait chrétien.

On en revient aux idées que Dupuis avait formulées dans un livre fort documenté trop oublié aujourd’hui : L’abrégé de l’origine de tous les Cultes, reprise par Réthoré, Jensen, Robertson, etc., et qui fait du christianisme une religion solaire, à peine modifiée par des juifs messianiques, croyant proche la fin du monde.

A les en croire, ainsi que leurs continuateurs, le christianisme est une religion d’origine solaire, comme l’étaient les autres cultes orientaux, celui d’Adonis en Syrie, d’Attis en Phrygie, de Thammouz et de Mardouk en Mésopotamie, de Dionysos en terre hellénique.

L’idée d’un Dieu qui ressuscite à l’entrée du printemps est commune à tous les cultes orientaux. Réthoré a montré que les dieux Agni, Mithra, Osiris, Thammouz, Adonis, Bacchus, Apollon, Manou, Bouddha, suivent un même cycle. Ils naissent le 25 décembre, au solstice d’hiver, d’une vierge mère dans une grotte ou une étable. Tous meurent et ressuscitent parce que le soleil vaincu périodiquement par la nuit et l’hiver, revient, chaque matin et chaque printemps.

Les grandes paraboles évangéliques, qui se retrouvent dans les Synoptiques sont solaires, ont trait aux semailles, à la moisson, aux vendanges, aux cultivateurs. Par exemple : les paraboles du Semeur, de l’Ivraie, nu Grain de sènevé, du Levain, du Vin nouveau dans les vieilles outres, du Figuier, des Vignerons.

Dans les livres sacrés des chrétiens et surtout dans l’Apocalypse, un de leurs livres d’initiation, Jésus est appelé l’agneau, nom du signe de l’équinoxe de printemps (bélier ou agneau, selon les régions). Cet agneau triomphant paraît debout sur la montagne et les douze tribus l’environnent, leur destin étant de le suivre partout où il va. Ici-bas d’ailleurs, le Christ était suivi de douze disciples. Ce chiffre douze correspond aux 12 signes du zodiaque.

Dans la scène de la Transfiguration (Matth., XVII), le visage de Jésus resplendit comme le soleil et ses vêtements devinrent blanc comme la lumière. L’Ostensoir est une représentation du soleil.

Tout cela ne veut pas dire qu’il n’ait pas vécu au siècle d’Auguste un révolté ou un chef de bande juif, rebelle au joug romain et haïssant ceux de ses compatriotes qui s’étaient courbés devant la puissance des Césars. Il se peut qu’il ait été crucifié (on en crucifiait tant, de ces provocateurs d’émeute !) et que, par suite de circonstances ignorées, toute une légende se soit créée autour de cet homme, qu’on en ait fait le porte-nom et le porte-drapeau d’une religion nouvelle.

On a voulu voir dans le Jésus ben Pandéra du Talmud, un de ces types d’agitateurs dont certains traits auraient servi à la construction de la légende du Christ historique. Cela se peut, mais la crucifixion de ce Jésus-là est antérieure d’un siècle au commencement de l’ère vulgaire.

D’ailleurs, rien ne prouve que les chrétiens n’existaient pas, en tant que secte, bien longtemps avant leur apparition dans l’histoire, à Antioche.

Les chrétiens primitifs avaient des mystères appelés Agapes, qui disparurent au ive siècle et dont un des rites courants était la promiscuité sexuelle.

Les cultes solaires dionysiaques. et orientaux, ont des mystères dont la promiscuité sexuelle fait également partie intégrante, parce qu’elle symbolise l’union du Soleil qui ne refuse à aucune plante ses rayons fécondants avec la Terre qui ne se refuse pas non plus, elle, aux caresses maturatrices du Soleil.

Si le mystère de cette promiscuité s’accomplit parfois dans un lieu où règne l’obscurité, naturelle ou produite artificiellement, c’est parce que le blé germe en hiver, alors qu’il fait froid et sombre, que le soleil parait à peine à l’horizon, qu’il a à lutter avec les ténèbres et les frimas.

Le mystère de la promiscuité sexuelle, dans ces religions, n’est pas un acte de dépravation, c’est un symbole que comprenaient tous les initiés.

Sans doute, il faut procéder avec une extrême précaution lorsqu’on s’en réfère aux Évangiles ou biographes de l’hypothétique fondateur du christianisme. Il est évident qu’au moment où elles sont définitivement classées dans le canon sacré, c’est-à-dire au ive siècle de notre ère, elles ont été mises au diapason du dogme catholique.

Malgré cette cuisine, pas toujours.très adroite, — en comparant les textes du Nouveau Testament avec les accusations portées contre les premiers chrétiens par les contemporains et avec les pratiques des sectes hérétiques, où la tradition primitive avait beaucoup plus de chance de se conserver que dans une Église devenue officielle — en procédant donc d’après la méthode critique qu’on applique à tout récit légendaire ou même historique, on peut se rendre compte des mœurs des chrétiens primitifs.

Ainsi, on s’aperçoit que le Christ légendaire est un homme de mœurs assez « relâchées ». Son attitude aux noces de Cana, ses relations avec la courtisane Marie, sœur de Marthe, sa bonne amie également (c’est cette courtisane hystérique qui baignait ses pieds de larmes et les oignait de parfum), ses festins continuels en compagnie de péagers et de gens de mauvaise vie, ses dispositions à l’égard de la femme adultère, ses entretiens néo-platoniciens avec la Samaritaine qui avait eu cinq maris et dont le compagnon actuel n’était pas le mari, les femmes aisées et énamourées, cela va sans dire qui l’assistaient de leurs bourses — tout cela ne fait pas du Jésus mythique un ascète ni un doctrinaire très rigoureux sur le chapitre des mœurs.

Le rôle de Père la Pudeur, de Modérateur, fut destiné à un certain Saul, natif de Tarse, en Cilicie, un visionnaire doublé d’un épileptique, qui a orienté le christianisme naissant vers le dogmatisme et l’ecclésiasticisme.

À remarquer qu’à Tarse on adorait le dieu Sardan, qui présidait à la végétation, une divinité solaire qui mourait sur un bûcher puis montait au ciel.

Toujours est-il que converti au christianisme, sous le nom de Paul, cet homme, croyant la fin du monde proche (comme les autres chrétiens d’ailleurs), se mit en tête d’édifier et de moraliser à la judaïque les communautés chrétiennes primitives. Dans.ce but, il leur écrivit lettres sur lettres. Ces lettres prêches sont connues sous le nom d’Épîtres. Nous ne les connaissons pas dans leur rédaction primitive. L’autorité de certaines est contestée. Il est évident qu’elles ont été mises elles aussi, au diapason de la dogmatique ecclésiastique du ive siècle.

On veut que ces Épîtres aient subi des remaniements dus aux disciples du gnostique Marcion et aux anti-marcionites. Ce n’est qu’après avoir gratté la couche de ces corrections qu’on retrouve le véritable texte de Saint Paul.

Sans vouloir creuser aussi profondément, contentons nous de dire que ces Épîtres nous présentent Paul sous les traits d’un farouche contempteur de l’œuvre de chair. Il pense « qu’il est bon pour l’homme de ne point avoir de contact avec la femme » (I Corinth. 7/1). S’il autorise le mariage c’est par « condescendance » (id. 7/), et parce qu’il vaut mieux encore se marier que brûler. À ceux qui ne sont pas mariés et aux veuves il déclare, qu’il est bon de rester comme lui, célibataire (id. 7/8). Farouche, partisan de l’autorité paternelle il énonce : « Celui qui marie sa fille fait bien, celui qui ne la marie pas fait mieux » (id. 7/38).

Il entreprend une campagne contre les mœurs libres des premiers chrétiens et ce que les censeurs ecclésiastiques ont laissé passer montre ce qu’elles étaient. On entend dire généralement, écrit-il aux Corinthiens (I Corinth. 5/1), qu’il y a parmi vous de l’impudicité et une impudicité telle qu’elle ne se rencontre pas même chez les païens. Mêmes objurgations dans ses épîtres aux fidèles des églises de Colosses, Philippes, Éphèse, Thessalonique, etc… Partout le même refrain : Guerre à l’impureté, l’impudicité, les passions, les désirs, etc…

D’ailleurs, il veut commencer par en haut sa réforme des mœurs : « Que l’évêque, que le diacre, que l’ancien soit le mari d’une seule femme ». (Ep. à Timothée et à Tité.)

Les exégètes catholiques prétendent que dans ces derniers textes, il faut voir une allusion aux « secondes noces », question qui troublait alors l’Église. Un pasteur protestant m’a objecté une fois que la loi romaine autorisant le concubinage, on avait toléré la polygamie dans certains cas, pour ne pas dissoudre la famille. Mais ce sont des explications après coup. Il n’y a qu’à se rendre compte de l’état d’esprit du célibataire Paul et de son attitude arrogante à l’égard des libres mœurs des chrétiens primitifs, pour se rendre compte qu’il ne voulait pas de dignitaires polygames dans les communautés ou églises qu’il dirigeait ou influençait. Il ne voulait de polygames que pour martyrs.

Jude, au verset 12 de son Épître, avoue qu’il y a des hommes qui « souillent leur chair » et qui sont des « écueils » dans les Agapes. Il est forcé ainsi de donner raison aux romains, qui prétendaient que lesdites agapes étaient un lieu « de mystères infâmes », y compris la pédérastie.

Dans l’Apocalypse, les églises de Pergame et de Thyatire sont encore stigmatisées comme impudiques. Et l’Apocalypse est d’une date tardive.

Il ne faut pas prendre au tragique les mines scandalisées des écrivains romains quand ils parlaient des chrétiens primitifs. Les chrétiens primitifs fournissaient aux dirigeants de l’Empire un commode moyen de diversion politique, et l’on criait « aux lions les chrétiens » comme on fait aujourd’hui des procès de tendance aux communistes, aux révolutionnaires, aux anarchistes.

Les adeptes des cultes orientaux faisaient dans leurs mystères les mêmes gestes que les premiers chrétiens dans leurs agapes, mais ils ne se montraient pas rétifs devant l’autorité.

Les premiers chrétiens, au contraire, de par leur ascendance, judaïque de race ou d’intellect — les juifs étaient un peuple au col « roide » — se montraient rebelles au gouvernement impérial. Le service civil leur répugnait, le métier militaire leur était odieux ; enfin — et c’était là le principal — ils ne voulaient pas prêter le serment civique « au nom du génie de l’empereur ». L’État ne leur pardonnait pas ce refus et y voyait motif à suspicion.

Ce n’est donc pas à cause de leurs cris au scandale que j’accepte en partie les accusations des Romains contre les premiers chrétiens. C’est parce qu’elles cadrent avec les admonestations des Épîtres, ou ce qui en est parvenu jusqu’à nous.

Quand on veut se faire une idée des mœurs des primitifs, on ne se réfère pas à la morale officiellement en vigueur au sein des civilisations anglo-saxonne ou latine, par exemple.

On s’en va vers les aborigènes de l’Australie de l’Afrique Centrale ou Méridionale, de l’Amérique du Sud. On suppose que moins ils sont en contact avec nos civilisations, plus ils ont conservé de traits primitifs.

De même, quand on veut se faire une idée des mœurs des premiers chrétiens, on ne se réfère pas au catholicisme, à l’orthodoxie grecque, au luthérianisme, à l’anglicanisme, au calvinisme, etc., qui représentent des aspects civilisés du christianisme.

On s’en réfère aux Carpocratiens, aux Turlupins aux Kloeffers, aux Adamites, aux Hommes de l’Intelligence, aux Frères du Libre Esprit, etc., où on a tout lieu de supposer que la tradition primitive avait été conservée avec plus de pureté que dans les Églises officielles, d’autant plus que ces dernières les traquaient avec une férocité semblable à celles que les civilisés montrent à l’égard des Primitifs.

Or, toutes ces sectes, tous ces hérétiques (et il y en a bien d’autres), ont pratiqué le communisme sexuel ou la communauté des femmes comme corollaires de la communauté des biens.

Et contre eux, les sociétés catholiques ou protestantes ou orthodoxes ont formulé les mêmes accusations que les gouvernants ou chroniqueurs romains décochaient aux premiers chrétiens.

De plus, faisant œuvre documentaire et critique, je n’attache pas plus d’importance aux prétentions émises par Paul d’être en communion avec la Divinité, que j’en attache à des prétentions identiques émises par un Jean de Leyde, le prophète des Anabaptistes communistes, ou d’un Joseph Smith, l’apôtre des Mormons.

Ou j’y attache la même importance, si l’on préfère.

Et je ferai remarquer en passant qu’on possède beaucoup plus de détails sur les faits et gestes de Jean de Leyde ou de Joseph Smith que l’on en a sur l’hypothétique Jésus ou sur l’énigmatique Saint-Paul.

On connaît par le menu l’activité de Jean de Leyde à Munster quand ses coreligionnaires y exerçaient le pouvoir, sous sa dictature ; il n’y a aucun doute sur les phases de son procès, sur son supplice. On connaît la vie de Joseph Smith, son apostolat, son lynchage et le canon des livres sacrés des Mormons a été très rapidement constitué.

Par suite, si on veut nous faire accepter que Paul se rendant à Damas pour y persécuter les chrétiens ait été frappé de cécité à l’ouïe d’une voix qui lui criait : « Saul, Saul, pourquoi me persécutes-tu (Actes, XXII, 8) » ou qu’une autre fois il ait été ravi au troisième ciel (il ne sait si c’est dans ou hors de son corps), enlevé dans le Paradis « où il entendit des paroles ineffables qu’il n’est pas permis à un homme de répéter » (II Corinth. 12/2). Si on veut nous faire croire à la bonne foi de François d’Assise sur le corps duquel, dans une vision, un séraphin crucifié imprime les « stigmates » de la passion, où à l’apparition de la Vierge à Ignace de Loyola, je veux croire aussi à la bonne foi de Jean de Leyde et de Joseph Smith.

À vrai dire, je pense qu’à tous, Paul y compris, un séjour dans un institut de guérison des maladies nerveuses aurait été nécessaire.

Donc, indifférent aux excommunications séculières ou ecclésiastiques, je tiens comme d’essence chrétienne la doctrine anabaptiste telle que Matthias ou Melchior Hoffmann l’a exposée dans son fameux livre du Rétablissement, qui implique communauté des biens et pluralité des femmes, doctrine appliquée à Munster par Jean de Leyde, choisi, au dire du prophète anabaptiste Tuiscosurer, par « le Seigneur » pour exercer le pouvoir.

Et je considère comme d’essence chrétienne le livre Doctrine and Covenants, révélations faites à Joseph Smith, dont les premières éditions imprimées datent de 1833 et 1835 et qui complètent pour les Mormons les Épîtres du Nouveau Testament.

Or, que trouve-t-on à la section 132 de ce livre, aussi « sacré » à mon sens que tous les autres livres « sacrés » des chrétiens : c’est que Moïse, Abraham, Isaac, Jacob, David, Salomon, reçurent des femmes et des concubines, que cela leur fut imputé à justice, parce que dans toutes ces choses ils accomplirent ce qui leur avait été commandé.

Dans cette même section, verset 61 : « Si un homme épouse une vierge et désire en épouser une autre et que la première donne son consentement, et s’il épouse la seconde et qu’elles soient vierges, ne s’étant promises à aucun autre homme, cet homme là est justifié. Il ne peut commettre d’adultère avec qui lui appartient, à lui, et à personne d’autre. Et si dix vierges lui sont données, de par ladite loi, il ne peut pas commettre adultère, car elles lui appartiennent et lui sont données, à lui. C’est pourquoi il est justifié ».

Je ne vois pas que « Le Père Eternel » ait retiré sa bénédiction à la communauté des Mormons. Leur Église, dont j’exècre l’organisation hiérarchique, est l’une des plus riches et des plus prospères qui soient au monde. Sans doute le président Wilford Woodruff, en 1890, a fait renoncer officiellement son Église à la pluralité des femmes. Mais il n’a joué dans tout cela qu’un rôle analogue à celui de Saint Paul moralisant la seconde ou troisième ou quatrième génération ( ?) chrétienne. C’est parce qu’ils pratiquaient la pluralité des femmes que les Mormons ont été chassés de l’ouest des États-Unis, qu’ils ont dû se réfugier dans l’est, au-delà des Montagnes Rocheuses, et défricher l’Utah, ce qu’ils n’auraient pu faire d’ailleurs sans l’aide de leur nombreuse progéniture. Je les tiens pour des descendants attardés des chrétiens primitifs. — E. Armand.


CUPIDITÉ. n. f. La cupidité est le désir de certains de posséder des richesses et de Jouir passionnément des biens terrestres. L’individu cupide n’est jamais satisfait et, plus il possède, plus il veut posséder. Cela frise parfois la folie, car il est impossible à un esprit sain de comprendre la soif insatiable de certains hommes de l’argent et de la propriété. Si la cupidité poussée au paroxysme est une maladie, avouons que c’est une maladie dangereuse dont ne souffrent pas particulièrement ceux qui en sont atteints, mais les autres : ceux qui sont victimes des cupides. Que de mal peut faire à la collectivité humaine la cupidité des Rotschild, des Rockfeller, etc., etc…, qui amassent des fortunes colossales dont ils n’ont nul besoin et dont ils pourraient se passer sans pour cela changer même leur genre de vie. La cupidité est un vice qui engendre de terribles fléaux et la guerre n’est qu’une conséquence de la cupidité. C’est le rôle et le devoir des classes opprimées de la combattre si elles veulent voir le monde, affranchi de l’égoïsme et de l’avidité, marcher rapidement vers la fraternité de tous les hommes.


CURIOSITÉ. n. f. Il y a deux sortes de curiosité : la curiosité utile et celle qui est nuisible. La première est louable, parce qu’elle signale un désir de savoir, de connaître, de s’instruire et que, par ses découvertes, elle est bienfaisante à l’humanité. Elle est en lutte constante avec l’ignorance et pénètre les secrets de la nature et du passé. Par ses recherches, elle ouvre la voie de l’Avenir. La seconde est blâmable, car elle a pour but de pénétrer les secrets d’autrui ; elle est indiscrète et impertinente et l’individu qui est atteint de ce défaut commet parfois des bassesses pour satisfaire sa curiosité. La curiosité est souvent déterminée par le désir de nuire ; il faut donc se méfier des curieux qui nous entourent et nous espionnent ; ce sont des êtres dangereux.


CYNISME. n. m. Doctrine de certains philosophes de l’antiquité qui tenaient leur école à Athènes. Les cyniques méprisaient ou affectaient de mépriser toutes les convenances sociales et leur vie errante les fit comparer au chien. Le chien, était du reste l’emblème de leur secte. Par extension on a donné le nom de cynisme a tout ce qui est impudent, effronté, et qui pousse à l’excès la malpropreté morale. Un homme cynique est un individu qui reconnaît froidement ses méfaits et semblent railler ceux qui en sont victimes. Le cynisme de certains hommes d’État est révoltant et les crimes dont ils se sont rendus complices leur sont légers ; malgré l’hostilité qui se manifeste à leur égard, ils ont le « cynisme » de poursuivre leur carrière politique ou sociale et de préparer avec « cynisme » d’autres hécatombes.