Alphonse Lemerre, éditeur (p. 53-54).

LOGE D’ACTEUR


À Martial Merlin.


Entre deux becs de gaz, devant le grand miroir,
Il se mire, debout, met le poing sur la hanche,
Secoue un peu sa tête et sa perruque blanche,
Caresse son épée, — il est marquis ce soir.

Il est marquis, — aux gens dira des choses mièvres,
Et de baisers, Martine et Lise auront leur part. —
Comme sa joue est pâle, il y frotte du fard,
Se noircit l’œil, se peint une moustache aux lèvres.


La loge sent la poudre et le cold-cream, odeurs
De maquillages gras, atmosphère mauvaise.
Ses amis qui sont là, troublés et mal à l’aise,
Se croient dans un boudoir de femmes et de fleurs.
Et l’acteur — ce monsieur mis comme eux d’ordinaire,
Qu’ils blaguaient avant la représentation,
Les éblouit et prend une proportion
Toute autre. Il est marquis, et chacun le vénère.