Discussion Auteur:Jean Laurenty
Éléments biographiques
modifier- 28 janvier 1900 La Revue diplomatique : politique, littérature -- réunion charmante bd Saint germain {{Gallica|bpt6k57160477/f10.image}
- J'ai rencontré Mérowack chez Laurenty Gallica
- une dédicace [1]
- son nom Lamastre
- a fait partie des 40 femmes de l'académie des femmes de Juliette Adam dan La Nation, 29 décembre 1900 [2]
- janvier 1901 : répond qu'elle souhaite y siéger [3]
- son nom et prénom dans Le Pays de Montbéliard, 18 mars 1900 [4]
LES FEMMES DE LETTRES
« Les femmes, nos égales dans l’art de brosser une toile et même d’y mettre une pensée, nous pourchassent tous les jours davantage sur le terrain littéraire. Il n’y a plus qu’elles qui sachent écrire un roman. La chose ne paraît pas au grand jour, parce que, redoutant encore les persécutions d’autrefois, l’ostracisme ridicule où les tenait, depuis Molière, la prépotence de l’homme, elles masquent volontiers leurs personnalité sous un pseudonyme masculin. (Illustration du 21 janvier 1900).
Nous commettrons une légère indiscrétion en dévoilant quelques-uns de ces pseudonymes et en rendant à César, non à Égérie, ce qui est à Égérie.
A. B., Marie Anne de Bovet — Vicomte d’Albens, Mme de Rute — Ange Bénigne, Comtesse P. de Molènes — Aîné d’Anjou, Dame Gouraud d’Ablancourt — S. Arnaud, Dame Copin Albancelli — Daniel Arnaud, Dame C. Amers — Arvès de Barine, Dame Charles Vincent — Th. Bentzon, Dame Thérèse Blanc — Camille Bernard, Dame de Rute — Camille Bias, Dame Martin — Boli, Comtesse de Martin Mirabeau — Brada, Comtesse de Puliga — Cecil, Dama Leger — Olivier Chantal, Dame J. de Nittis — Jean de Childra, Dame Vallette — Chut, Ctesse de Martel Mirabeau — Georges Duvallon, Ctesse de Sars — Jehan des E rivières, Dame Astie de Valsayre — E Volla, Dame J. Marnière — A. de Gériolles, Dame Louise Gena de Régloi — Gyp, Ctesse de Martel — Gustave Haller, Dame Fould — Robert Halt, Dame Charles Vieu — Hunédelle, Dame Georges de Peyrebrune — I.R.G, Comtesse de la Roche Guyon — Paul Junka, Dlle Jeanne Forponès — Jean Laurenty, Dlle Fernande Lasmartres — Leila Hanoum, Dame A. Piazzi — D. Lesueur, Dame J. Loiseau — Mab, Marie Anne de Bovet — M A B, Dame Ernest Boscq — J. Mairet, Dame C. Bizot — Marco, Mme G. de Peyrebrune — J. Marni, Dame Marnière — Max Lyan, Dame Berthe Nolé — Pierre Migean, Dame Méganel — E. Mill, Dame Huot — Pierre du Morvan, Dame Jeanne Robin — Néron, Dame Passerieu — Nick, Comtesse de Martel — Ossit, Dame Deslandes — Paria Korigan, Dame Emile Lévy — Pierre Patient, Dame Passerieu — Lucien Perey, Dlle Luce Herpin — G. de Peyrebrune, Dame Judicis de Mirandolle — Rachelle, Dame Alf. Vallette — Jean Rolland, Dame Mary Belin — Royaumont, Dame A. Tavernier — R. de Salberg, Angèle Montigny — Robert Sainville, Dame Ouvaroft — Satin, Ctesse P. de Molènes — Savroz, Dlle G. de Sainte-Croix — Scamp, Ctesse de Martel — Jean Scrive, Jane de Lavandère — Jean Steen, Dame A. Daudet — Stéphane. Dame G. Garisson — Baron Stock, Dame de Rute — Mary Summer, Dame Foucaux — Trois Etoiles, Comtesse de Molènes — Louis Urgel, Dame Legru — André Vallès, Dame Bœswiwald — Vend, Dame Olga Nevelskoy — Claude Vento, Comtesse de Lainai Vento — Maxime Villemer, Dame Violet — Violette, Comtesse de Lainal Vento — Jacques Vincent, Dame A. Bory d’Arnex — Gette Noël, Dame Berthe Nolé — Yssim, Mme de Belbeuf — Zot, Comtesse de Martel — Mie d’Aghone, Dame Louise Lacroix — Pierre Ninous, Dame de Roussin — Pierre Paur, Mme de Voisins — Brimberion, Dame Pohline Savari — Sapho, Dame de Lapeyres — Louis Kellner, Dame de Rute — André Les, Dame Champeix — Jean Menos, Dame Hudry Menos — Henri Guville, Dame Durand — Daniel Stern, Comtesse d’Agoult — Smock, Dame C. Selden — Ryco, Dame de Laspeyre — Marion, Dame de Laspeyre — Etincelle, Baronne Double — Jean Barancy, Dame Nadal Gabrille — Jacques Lermont, Dame J. de Sobat — Occida, Dame Louise de la Ramée — Soutache, Comtesse de Molènes.
- Laurenty (Mlle Fernande Lasmastres, en littérature Jean), Le Massacre des amazones
- La Plume, 1 décembre 1897 [5]
À PROPOS DU MASSACRE DES AMAZONES
Monsieur Léon Deschamps, Puisque votre revue est une tribune libre, veuillez insérer ces lignes.
Avec une violence digne d'une meilleure cause, M Henri Ner s’attaque à moi. Il me serait facile d’approfondir les motifs secrets de ces critiques exagérées : il est des moyens que je dédaigne. Mais il me plaît de vivre seule. L’isolement a augmenté ma force morale. Je ne recherche aucun appui, je suis ennemie de toutes réclames, aussi bien que des génuflexions d’antichambre, et si je vous prie d’insérer ces lignes, c’est simplement pour éviter un peu de bave à ma dignité littéraire.
M. Henri Ner, dans sa soif d’arriviste trop mûr, a découvert un piédestal digne de tous les éloges ; sa vanité peu exigeante, sa chevalerie à rebours se sont dressées, mesquines et pitoyables, sur le tas d'encriers féminins qu’il croit renverser.
Je ne désire rien, je ne veux rien, je ne demande qu’une chose : c'est que ma solitude ne soit plus troublée par les pauvres cris d’un raté aux abois.
Il m a semblé que mes émotions étaient assez intenses et sincères pour faire tressaillir quelques cœurs, et j’ai consenti à mettre mes songes en feuillets. Je trouve excessif que M. Henri Ner vienne poser sa patte trop lourde de critique sur ces cris, peut-être trop émus, de sensibilité féminine.
Je ne puis m'empêcher de féliciter encore le brillant pamphlétaire du « Massacre des Amazones » de sa scrupuleuse exactitude de pion a relever les fautes typographiques de mon livre, et à les prendre courtoisement pour des corrections de syntaxe.
Il est inutile d’insister plus longtemps sur un tel sujet. I] ne faut voir dans cette protestation que la plainte d’un rêveur épris de solitude, qu'une mouche indiscrète serait venue troubler… Délivrez-moi d’un coléoptère de mauvais goût, c’est tout ce que je veux.
Je suis obligée, par les circonstances, à vous rendre témoin de ces infimes querelles, veuillez m’excuser, et acceptez. Monsieur le Directeur, mes salutations empressées.
JEAN LAURENTY.
- Le Triboulet, 2 mai 1897 [6]
Réunion des plus animées, mardi soir, chez Jean Laurenty, le récent auteur de Joie morte. Citons MM. Quentin, avocat, le sculpteur Kaplan, Mme Nolet, alias Max Lyant le peintre, Roux-Renard, les poètes, Marc Legrand, Henri Giraud, Lucien Le Foyer, les romanciers Louis Roguelin. Henri Bainaldy etc.
- Toulousaine femme de lettres [7]
Résumés critiques…
modifier- Le Siècle, 14 novembre 1897
Jean Laurenty, dans son nouveau roman Joie Morte, publié par l'éditeur Stock, étudie, dans des pages d'âpre analysé et de tristesse passionnée, l'affection maternelle et filiale arrivée aux plus hauts sommets.
- sur Joie morte … la fange apprécié par Rachilde
- sur Joie morte imité de Flaubert Gallica, … Google
- sur Joie morte [8] autre roman et naissance à Toulouse
LES LIVRES
Joie morte
Par JEAN LAURENTY
L’auteur d’Amour pervers, d’Inceste d’âmes nous donne aujourd’hui un nouveau roman Joie morte (Stock éditeur). Disons tout de suite qu’il est regrettable que Jean Laurenty n’ait pas consacré ses brillantes qualités de psychologue et d’observateur à un thème plus spiritualiste que celui qu’il développe dans Joie morte. Laissant de côté le style et les fautes d’impression très nombreuses, nous voyons se dérouler une longue série de naufrages d’amour qui, s’ils étaient placés avec art dissimuleraient peut-être le naturalisme excessif de l’ouvrage. N’étant pas amateur de la littérature des Zola et des Paul de Kock ni des théories fatalistes du R. P. Ollivier, pas plus que du puritanisme des lois Bérenger, qu’il me soit permis de trouver étrange qu’on puisse parler d’amour sans parler du bien, parler d’art sans parler de vertu. Il est triste que tant de nos jeunes littérateurs écrivent pour l’unique plaisir d’écrire et non pour améliorer notre société par l’amour d’une culture moralisatrice et par la véritable essence de l’art, la vie idéale. Ce qui nous console un peu, c’est de rencontrer au sein de ces théorie pessimistes empruntées aux Flaubert et aux Schopenhauer, l’âme d’une Agrippine se dévouant non seulement pour son fils, mais encore pour la fille de sa rivale : C’est comme une pierre brillant au sein des sombres eaux de l’océan ; mais cette perle estisolée.car onne peut Coudoyer dès réalistes et des pessimistes comme ceux dont nous venons de parler, sans que l’air qui vous entoure ne soit imprégné de leurs idées. Toutefois, nous croyons que le désir de l’auteur n’a pas été de se livrer a un passe-temps trop bas comme disait Gon- court, mais à faire réfléchir, précisément en descendant dans ces bas-fonds de la vie et a éclaircir certains mystères de l’existence dont on chercherait en vain la solution dans les pages arides de psychologie. L’activité.et le courage de Jean Laurenty nous promettent d’autres joies, non pas mortes celles-là, nous l’espérons mais vivantes, dignes de ses talents littéraires. Du reste l’auteur n’est pas un de ceux qui ont peur de l’avenir, il est né sur les bords de la Garonne au pied du Capitole, dans cette Toulouse qui vit l’héroïsme de Simon de Montfort et dont les murs ont retenti des accents de la lyre de Clémence Isaure. Peut-on avoir longtemps l’âme si sombre quand elle s’est éveillée a la chaleur du soleil du midi ? Nous ne le croyons pas ; aussi, la république des lettres, confiante en l’avenir et au talent de Jean Laurenty, entrevoit-elle pour son jeune privilégié des jours de succès et peut-être de gloire.
- Floréal N°9 15 janvier 1908 : Rachilde et quelques autres par Marcel Noppeney [9] … ont du talent
- http://images.midiart.bibliotheque.toulouse.fr/B315556101_MIDART_1900-12-15_012.pdf
- Le Midi artiste : journal littéraire, artistique, théâtral, sportif, 24 août 1901 [10]
- Sur l'agrafé [11]
- sur l'adaptation d’Inceste d’âmes au théâtre [12] , [13]
BIBLIOGRAPHIE
Parmi les multitudes de livres parus depuis quelques mois, il nous est agréable de signaler un roman bannissant toutes banalités, récemment édité à Paris chez Villerelle, 59, rue des Mathurins, et dû à l’un de nos jeunes écrivains, Jean Laurenty, notre compatriote.
La presse parisienne vient de donner son appréciation sur ce nouvel ouvrage L’Agrafé. Voici dans quels termes : « Dans L’Agrafé, Laurenty fait vivre, avec une ardeur passionnée, un jeune artiste, Yves de Sainte-Croix, qui symbolise la Beauté de l’art et de l’amour dans les sursauts de l’hystérie moderne. Sainte-Croix est attachant jusques dans ses pires déchéances, puisqu’il ne cesse de poursuivre l’éternelle chimère… »
Nos confrères sont tous unanimes à déclarer forte et belle cette œuvre. Il nous plaît d’ajouter à ces éloges très vrais, parce que mérités, quelques mots : Connaissant l’auteur, ayant assisté à son évolution graduelle, depuis sept ou huit ans, dans le domaine des lettres, ayant lu attentivement et successivement ses trois premiers ouvrages, Amour pervers, Joie morte, Les Errants terribles, nous pouvons, de façon impartiale, juger L’Agrafé. À deux reprises, la lecture nous a apporté la profonde conviction que ce roman plaçait celui qui l’a conçu parmi l’élite de la jeune littérature contemporaine. Ce nous est ici à nous, décentralisateurs persévérants, une joie intense, non pas exclusivement d’adresser d’uniques et banales félicitations à Laurenty, mais de proclamer devant tous que la fertile terre languedocienne peut s’enorgueillir d’avoir fécondé, à côté d’artistes glorieux, manieurs de palette, de ciseaux ou de lyre, de vigoureux et à la fois délicats ouvriers de l’esthétique et de la puissance littéraires : Jean Laurenty, la Toulousaine femme de lettres, s’affirme comme devant en être l’un des plus brillants représentants. R. C.
- 1897 Journal des débats [14]
Joie morte, par JEAN LAURENTY. Stock. In-18 3 fr. 50.
Il serait malaisé de résumer en quelques lignes un livre qui, tout en restant un roman, est plutôt une sorte de procès-verbal, simple et rapide, des mœurs et des attitudes de la classe moyenne. Peut-être n'y trouvera-t-on pas l'unité de composition et la science de la gradation dans le développement des situations et des caractères ; mais, en revanche, l'observation y est souvent juste, et la figure de Francine, la principale héroïne, se détache avec un singulier relief. Fille d'un brave homme, que des revers de fortune ont amené à Paris, elle se distingue par une délicatesse native de sentiments, sans cesse en contradiction avec les transports du tempérament le plus exalté elle eût été une épouse modèle, si son mari ne l'eût poussée par d'inexcusables écarts au découragement et au désœuvrement, cent fois plus redoutables que les mauvais instincts.
Toujours navrée de ses propres fautes, l'inconséquente Francine trouve, il est vrai, un puissant soutien dans l'affection profonde qu'elle porte a son fils mais elle comprend bientôt que lui non plus ne sera jamais heureux : soumis comme sa mère aux impulsions d'une nature désordonnée, le désespoir d'un mal incurable le pousse à une lamentable fin. Pourquoi ne pouvons-nous atteindre ni le calme ni le bonheur ? Pourquoi ne rencontrons-nous ici-bas que la joie morte et plaisirs amers ? C'est que nous sommes invinciblement dominés par nos instincts et nos passions qui l'emportent toujours sur nos résolutions : telle est la moralité peu consolante à dégager de l'étude hardie de Mme Jean Laurenty.
- L'Art méridional, 1 décembre 1897 [15]
Nous sommes heureux de signaler dans notre confrère Lutèce un précieux témoignage de bonne confraternité entre un romancier et un poète « antique ».
Mlle Jean Laurenty, l’auteur si discuté de Joie morte, dont vie n t de paraître une nouvelle édition, se plaît, en effet, à peindre les passions extrêmes ou les sentiments d’exception : et le prochain roman qu’elle nous donnera, les Errants, mettra, croyons-nous, en plus grande lumière, ce côté particulier de son talent.
L’appréciation si franche qu’elle a donnée de l’Âme angélique, œuvre de sérénité si éloignée de son genre d’études préféré, est d’ailleurs comme corroborée par ces lignes récentes de M. Louis Proal : « Sait-on comment George Sand se guérit de la « manie du suicide ? Par la lecture des classiques grecs et latins ! Et cela n’est pas étonnant : les classiques grecs et latins sont des génies sains, des esprits bien équilibrés, d’une puissante raison, calme, élevée. Chez eux, l’imagination est toujours réglée par le bon sens, ils ne sont jamais dans le faux. À l’école de ces hommes de génie, qui sont aussi et surtout des hommes de bon sens, l’imagination ne s’exalte pas, l’esprit se calme, la raison se développe, la sensibilité se modère. »
- Sur les Errants terribles [16] 1899 dans Le Maître de maison : journal littéraire et mondain indépendant""
- Causerie littéraire [17] dans L’Estafette, 14 novembre 1899 p. 2/4
- Express, 25 octobre 1896 [18]
FRANCE
Lettre Parisienne.
24 octobre. Les gens prudes et, passez moi le mot, bégueules, me semblent les plus misérables des hommes. Nous appartenons à une nation et à une race où on aime l'esprit libre, et le verbe juste ne nous déplaît pas. Mais ce qui nous déplaît, ce sont ces faux vertueux qui ont toujours la rougeur au front et s’enferment à triple tour dans leur cabinet de travail pour regarder les collections des gravures libres et graveleuses du XVIIIe siècle. Cette petite procession de foi littéraire étant admise, j'aurais bien envie de chercher une bonne querelle à notre oncle Sarcey qui me semble être sorti de son naturel et avoir abandonné ce gros bon sens qui nous le rend cher pour écrire une préface d'un livre dont je n’aurais certes pas parlé sans cette préface qui fait un certain bruit dans le landerneau des porteurs de plume. Et, vraiment, il y a de quoi. Jugez en :
Le livre est celui d’un écrivain de talent
M. Camille Pert mais qui a une tournure
d’esprit tout à fait spéciale. Il me suffira
de vous citer les titres de ses trois romans
Vénale, Amoureuse et Amante.
Voici maintenant Le Frère, avec une préface de M. Francisque Sarcey. Ce n’est pas seulement ce qui lui donne de la valeur, mais c’est ce qui le signale tout particulièrement à l’attention du public. De fait, les curiosités ont été piquées, et un étalagiste me disait que les paquets se succèdent aux étalages. Bref, c’est un succès de vente. La préface de Sarcey y est à coup sûr pour quelque chose et le sujet choisi par M. Camille Pert a fait le reste. Comme je vous le disais, tout à l'heure, sans la préface de notre oncle, je ne vous aurais pas entretenu de ce Frère qui a paru dans la collection Simonis Empis qui est en train de devenir une des plus inintéressantes de Paris.
De quoi s’agit-t’il donc dans ce roman qui tient les conversations en haleine, en attendant la rentrée des Chambres.
Non, tenez j’aime mieux laisser parler M. Sarcey lui-même.
« Vous avez choisi là un sujet bien scabreux, écrit M. Sarcey à l’auteur, l’amour d’une sœur pour son frère qui la paie de retour. Mais il est vrai de reconnaître que vous avez pris toutes sortes de précautions pour en adoucir l’horreur, pour ne pas effaroucher les scrupules ou, si vous préférez le mot, les « préjugés » de ceux qui vous liront ».
N'allons pas plus loin, vous savez maintenant ce dont il s'agit, et l’auteur a eu beau nous choisir deux jeunes gens veufs tous les deux, entourer ses personnages de toute l’atmosphère sympathique possible, le fait n'en est pas moins là, brutal. La sœur peut, à la fin, aller se jeter dans l’étang et disparaître, elle et l’enfant qui allait naître, il n’en reste pas moins la donnée que je trouve non pas hardie mais déplaisante, et, je vous l'ai dit, je ne suis pas un rigoriste, loin de là. Mais, sangrebleu, dans notre société où tout a croulé, où on nous a arraché une à une toutes les croyances sans lesquelles, en définitive, il n'y a pas de peuple fort et de nation prospère, nous n’avons conservé que deux croyances : la foi dans la patrie et la foi dans la famille. Voilà que vous vous amusez, pour rien, pour le plaisir de montrer que vous avez un incontestable talent de virtuose, à détruire une des deux croyances qui nous reste. Ne venez pas nous dire que vous n’avez représenté là qu’une exception : il se trouvera toujours des gens plus ou moins déséquilibrés pour se couvrir de cette exception, pour s’en faire une sorte de paravent moral et se fabriquer des excuses pour les dépravations.
Et pour brocher sur le tout, Sarcey arrive dans sa préface à traiter le sentiment de répulsion que nous inspire l’inceste de « préjugé ». Ne croyez pas que le mot ait échappé à Sarcey, il est trop sûr de sa plume pour laisser échapper un mot qui ne rendrait pas sa pensée. D'autant que la préface a quatre petites pages et Sarcey répète le mot quatre fois. Au surplus, le célèbre critique reconnaît que le jour où un frère pourrait lever sur sa sœur un regard chargé de désirs et d’espoir, il n’y aurait plus de famille possible.
Eh bien, cette appréciation suffit pour juger un pareil livre. Sarcey a cru pouvoir en être le parrain, il en a pour sa part assuré le succès, il doit en supporter sa part de responsabilité.
C'est précisément parce que M. Camille Pert a beaucoup de talent que l’on doit lui en vouloir d’avoir choisi un pareil sujet. Il y a quelques mois, une jeune fille qui est en train de se faire un nom dans les lettres, Mlle Lasmartres, qui signe du pseudonyme de Jean Laurenty, a publié sous le titre d’Amour pervers, un roman sur le même sujet. Un ami est venu me demander de parler du volume et je m’y suis formellement refusé; il me semblait que l’on devait punir les auteurs de ces œuvres par le silence. Et notez que Mlle Lasmartres ou Jean Laurenty comme vous voudrez, est une demoiselle d’une conduite à l’abri de tout reproche, atteinte d’une terrible infirmité : elle vit aux côtés de sa mère et écrit avec une virtuosité de plume des romans qui ne sont pas sans mérites ; mais pourquoi, diable, de braves gens, estimables de leur personne, vont-ils chercher de semblables sujets qui déconcertent et déroutent ; et si maintenant M. Francisque Sarcey, qu’on peut railler en long et en large, mais qui est un des bons esprits de notre époque, si l’oncle lui-même se met de la partie et ne trouve qu'à dire que c’est un préjugé en tenant ces volumes sur les fonts baptismaux. Alors je ne comprends plus ma parole, et vous ?
Voyons, il faudrait bien que M. Sarcey nous explique cela un de ces jours où il sera de loisir. Ce n’est pas assurément pour lui chercher pouille, mais « préjugé » diable, cria nous parait tout simplement une monstruosité !
Oh ! je n’ignore pas que M. Camille Pert pourra nous citer des exemples, mais ce sont fort heureusement des exceptions dans notre époque et quant aux exemples de la Bible ils sont un peu usés aujourd'hui.
On nous dira que chez les juifs on pouvait épouser sa sœur, et on rappellera le drame qui se déroula dans le temple du roi David lui-même ; quand Amnon violenta sa sœur Themar, celle-ci lui dit, si nous en croyons les écritures:
« Ne me faites pas de sottises, car je ne pourrai supporter cet opprobre, et vous passerez pour un fou mais demandez-moi au roi mon père en mariage et il ne vous refusera pas. »
Je ne suis pas assez savant pour savoir comment les commentateurs concilient ces paroles avec les passages du Lévitique qui interdit à un frère d’épouser sa sœur. Ce sont là querelles de théologiens qui ne nous regardent pas. On citera encore l’exemple des Perses modernes qui épousent leur sœur couramment. Oui, oui, tout cela est possible, mais nous n’en sommes pas à aller chercher des principes de civilisation dans les annales du temple de David aux cinq cents femmes, ni chez les modernes habitants de Téhéran ; nous sommes de notre temps et de notre pays, et nous estimons que de pareilles thèses, surtout soutenues avec talent, sont dangereuses, nuisibles, et un succès de librairie ne les légitime ni ne les excuse. Mais ce qui me dépasse et je termine là-dessus, c’est la préface de Sarcey et son préjugé.
Non, non on ne nous fera pas avaler celle-là : elle est un peu trop forte.
Nous voulions seulement parler, en quelques lignes, de ces livres, et leur avons consacré toute notre causerie. Il n’y avait du reste rien de plus pressé, car nous sommes dans la veillée de la rentrée de la Chambre et déjà les apprentis ministres regardent qui pourrait bien jeter la fameuse « pelure de pêche » sur laquelle glissent d’habitude les cabinets qui sont dans la posture de celui qui détient le pouvoir.
Voilà des gaillards je vous assure qui ne se préoccupent guère de savoir si c’est un « préjugé » ou pas ; leur attention est ailleurs; ils interrogent les augures parlementaires pour savoir si la majorité est solide ou si, comme le café de Louis XV, elle est prête à f...iche le camp.
Car les intrigues vont recommencer et sous peu de jours on se mettra à la recherche de grands hommes pour leur confier le gouvernement de la France.
Jean-Bernard.
Inceste d'Ames,joué hier au Théâtre-Libre, a été tiré d'un roman paru il y a trois mois, Amour pervers, signé Jean Laurenty, pseudonyme masculin qui cache une femme de lettres. M. Hauser a fait l'adaptation dramatique.