Discussion:Vous serez comme des dieux
Éditions
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1921 : | Vous serez comme des dieux | Gallica | en feuilleton dans le Correspondant |
Critiques
modifierpar Colette Yver
Voici une œuvre de psychologie remarquable. L’auteur, en une suite d’exemples frappants, a entrepris de montrer les horribles ravages exercés dans les cervelles humaines par l’orgueil et, fort judicieusement, elle a placé l’intrigue dans les milieux littéraires parisiens, où les manifestations de ce tout-puissant péché sont assez apparentes.
Le développement de l’intrigue nous fait insensiblement pénétrer plus avant dans l’âme des personnages étudiés et le principal ressort de leur activité nous apparaît bientôt : c’est l’orgueil le fil conducteur unique de leur existence. Paul Clergeon, le célèbre romancier, n’a épousé la fille du fameux Evariste Hilaire que pour pouvoir bénéficier de la toute puissante influence de ce dernier. Grâce à quoi il entre à l’Académie. Isabelle Sernanska, du jour où elle devient la femme de lettres en vogue, dédaigne l’amour passionné de Carlavan, qui est un travailleur obscur, pour épouser l’homme du jour : Zacharie, le directeur des Cahiers populaires. Ce Zacharie n’a passé au partie de la révolution sociale que dans l’espoir d’y acquérir quelque notoriété. Le résultat a dépassé tous ses espoirs. Madame Houssenin abandonne son mari, parce qu’il ne lui offre point une existence suffisamment fastueuse à son gré. Le jeune secrétaire de Clergeon nourrit contre son patron une inapaisable haine, parce qu’il ne lui fait point une place qui corresponde aux extraordinaires capacités dont, personnellement, il se croit doté. Et l’abbé Parochin, lui-même, s’écarte un instant de l’orthodoxie, dans son ardent desir de mettre en avant sa personnalité. Tous ces drames ne se développent point parallèlement. Leur progression est habilement liée et leur interdépendance assurée. Des scènes pleines d’une émotion puissante, de vigoureuses descriptions donnent à cette intéressante étude un incontestable caractère de vérité et de vie.
- Le Temps 23 aout 1922 [3]
Un magnifique dessein a inspiré le dernier livre de Mme Colette Yver, Vous serez comme des dieux ! (Calmann-Lévy, éditeurs). C’est le roman d’un personnage formidable et protéiforme, toujours le même et toujours divers, l’orgueil : l’orgueil du monde, l’orgueil purement spéculatif de l’intellectuel, l’orgueil de la race, l’orgueil de la femme… Nulle pédanterie ne défigure ce livre saisissant. On n’y trouve rien de préconçu ou d’arbitraire. Chacun des types qui évoluent dans le milieu que Mme Colette Yver a choisi obéit à son destin propre et vit ardemment sa vie. La physionomie de l’héroïne, Mme Isabelle Sernanska, a été notamment traitée avec une remarquable et impitoyable sûreté. Il y fallait beaucoup de délicatesse. Comment ne pas rendre antipathique le caractère de cette femme qui doit sa fortune et sa gloire au modeste fonctionnaire qui l’aime et qu’elle aime, et que le démon de l’ambition pousse irrésistiblement dans les bras d’un autre ? Mme Colette Yver ne l’excuse pas. Mais elle l’explique. Et elle la fait comprendre.