Discussion:Trois parmi les autres

  • 15 janvier 1930 Revue des lectures Romans dont la lecture est proposée aux grandes

personnes, malgré le fond ou certaines pages, en raison du profit ou du délassement sans péril qu'ils procureront. [1] Le livre de Mme Simonne Ratel, Trois parmi les autres, mériterait d’assez longs commentaires.

Trois jeunes filles, Antoinette, externe des hôpitaux, Annonciade, peintre d’étoffes, et Suzon, étudiante en droit, délurées mais de cœur encore à demi-ingénu, se trouvent réunies dans la propriété de l’une d’elles. Et, entre elles d’abord, puis avec le curé voisin — un type ! —, puis avec les trois jeunes hommes du château tout proche, elles entament des rêveries, des propos, des discussions sur tous les sujets du monde, les plus vieux, les plus neufs et les plus réservés.

Sans affectation, sans pose, elles pèsent et repèsent tout, n’excluant rien de leur jeune compétence, remettant en question jusqu’à l’existence de l’âme, de l’amour, de Dieu même. Élevées comme des garçons, ce sont néanmoins des femmes, et qui sentent et vibrent en femmes, même si elles savent penser et raisonner en hommes.

Des trois, Suzon serait la plus capable d’une escapade où les sens, la curiosité et le plaisir de vivre auraient plus de part que le cœur. Mais Bertrand, avec qui elle fait de l’auto aux heures défendues de la nuit, gaffe terriblement et cette gaffe préserve à jamais la vertu de Suzon. Elle se rebiffe et une bonne amitié viendra prendre la place encore libre dans son cœur.

Pendant ce temps, sans avoir l’air de rien, candidement, Annonciade chipe le jeune Robert que, depuis toujours, Antoinette se croyait destiné.

Antoinette (l’aînée des trois), fait bonne figure. À Paris, elle se créera de nouvelles occupations.

Livre curieux et curieux types de jeunes filles, beaucoup plus sensibles, beaucoup plus conformistes qu’elles ne veulent en avoir l’air.

Tel quel, ce roman-causerie, ce roman où il ne se passe pas grand événement extérieur, ne laisserait pas d’être troublant pour la majorité de nos jeunes filles. Mme Simonne Ratel doit à son beau et probe talent de nous donner maintenant une œuvre irréprochable.

  • La France active : organe de toutes les formes de l'activité nationale [2]

Trois parmi les autres, par Simonne RATEL, 1 vol. (Bibliothèque reliée Plon)

L'image de la « jeune fille moderne » qui s'est substituée à l'ancien poncif est une caricature succédant à une romance. La réalité est plus complexe ; ce livre, mi-roman, mi-essai, a tenté d'en donner une idée. Les trois jeunes filles que nous présente l'auteur en une sorte de récit imagé et symbolique incarnent trois états d'âme différents. Le cadre du récit est un paysage virgilien de Bourgogne et la vieille demeure, le jardin secret qui abritent les vacances de trois Parisiennes sont propices aux. débats sentimentaux. Livrées à elles-mêmes, les trois amies sa- vourent leur solitude champêtre qui exalte en elles la conscience de cet état favorisé, où beauté, esprit, jeunesse semblent un don gratuit et où l'avenir a le charme d'une promesse.

Ce livre remarquable peut compter parmi les meilleurs romans contemporains. Le Prix Interallié 1932 décerné à la Maison des Bories a du reste consacré le beau talent de Mlle Simonne Ratel.

Revenir à la page « Trois parmi les autres ».