Discussion:Flaminio
- Entractes http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6228150z/f305.image
- Journal des débats politiques et littéraires 6/11/1854 : critique de Jules Janin [1]
- Le Nouvelliste : quotidien politique, littéraire, industriel et commercial 3/11/1854 : Darthenay [2]
- Figaro 12/11/1854 : B. Jouvin, analyse la critique négative de Flaminio qui a par ailleurs été un succès de scène. http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k269372d/f2.item
- Le Colporteur : critique favorable http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k57547459/f2.item
Flaminio, la nouvelle pièce de George Sand, a vivement
préoccupé cette semaine le monde artistique et littéraire. Comme
pour toute œuvre capitale, les uns louent beaucoup, les autres
critiquent à outrance. De là de longues et interminables discussions ;
discussions qui, le plus souvent, n’ont, par le genre de
leur forme, pas le moindre point de ressemblance avec le sujet
qui leur a donné naissance.
Il est une chose vraiment triste à faire remarquer aujourd’hui, c’est de voir combien la critique est en général passionnée et peu réservée toutes les fois qu’il s’agit de George Sand. Certes, nous sommes loin de prétendre que George Sand n’ait fait que des chefs-d’œuvre. Nous distinguons dans ses romans, à côté des œuvres du génie, à côté des ouvrages qui resteront comme les plus purs monuments de la littérature du dix-neuvième siècle, nous reconnaissons qu’il existe des volumes comme Jeanne, le Compagnon du tour de France, le Meunier d’Angibault, etc., dans lesquels l’auteur a certainement fait fausse route, du moins sous le rapport des sentiments et des idées ; et encore dans ces œuvres reste-t-il le prestige du style et des beautés de détail qui rachètent bien des défauts ; mais ces quelques romans n’ôtent rien au génie de l’écrivain ni au mérite de ses autres ouvrages. Jeanne, le Compagnon du tour de France n’empêcheront point George Sand d’être l’auteur d’Indiana, de Spiridion, d’Horace, d’André, du Secrétaire intime, du Château des Désertes, etc., etc.
Or, nous pensons qu’il n’en est rien, — mais à voir l’ensemble avec lequel certains critiques cherchent à rabaisser chaque œuvre nouvelle de cet éminent écrivain, on dirait qu’ils en font une affaire de coterie et même, pour ainsi dire, une question de sexe ; c’est du moins ce qu’on serait tenté de conclure en voyant l’affectation avec laquelle plusieurs d’entre eux écrivent madame George Sand. Pour nous, le génie n’a point de sexe ; c’est une chose si rare, que nous nous prosternons devant lui partout ou nous le rencontrons, qu’il soit homme on femme.
Encore si les critiques dont nous parlons apportaient dans cette question des arguments sérieux, s’ils examinaient froidement les œuvres de George Sand, et réellement au point de vue de l’art, mais, le plus souvent, ils se contentent d’affirmer sans prouver, et de lancer des boulets qui portent à faux. Dire qu’une chose est mauvaise n’est pas prouver qu’elle le soit. Il me semble, cependant, qu’il serait bien temps de laisser dormir ces vieilles rapsodies usées jusqu’à la corde, et de reconnaître purement et simplement le plus beau génie de notre époque.
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ÉMILE AUBERT
SEMAINE THÉÂTRALE.
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Nous avons revu Flaminio, et notre embarras redouble ! Analyser en pareil cas, c’est divaguer, et ce travail nous répugne. Nous n’avons pas de scénario à vous développer ; car nous, qui vous disions que nous montrerions le défaut de la cuirasse, le voilà : la pièce n’est pas charpentée comme les auteurs aujourd’hui ont l’habitude de le faire, l’explication des situations n’est pas suffisante ; mais l’intérêt en est-il détruit ? Non, certes, car nous ne tenons pas à voir le canevas de cet ouvrage si fin et si complet ; et, du reste, nous sommes tellement initiés à l’intimité réelle de la vie des personnages, les moindres détails de mise en scène sont tellement vrais, que le spectateur devient acteur, et de ce moment qu’est-il besoin de lui expliquer à lui-même son existence. Oui, Flaminio, vous êtes bien toujours ce Teverino que nous avons connu, cette nature fine et élégante du bohémien et de l’homme du monde ; essence délicate et pure, cœur aux nobles inspirations, où bat tout ce qui est poésie ! amour ! Sous les pieds de la société ou à sa tête, la place est marquée, elle est la même, et ce langage, qui étonne dans le bohémien, homme du monde, est vrai et naturel, parce que la vie de liberté et de nature conserve partout et toujours un parfum de fleurs et des rêveries qu’exhalent le grand air et les solitaires montagnes. Rien d’impossible à ces âmes si bien dotées, paresse et insouciance, tout ceci a un effort de volonté, et cette volonté c’est l’amour qui la donne, l’amour qui ennoblit ce qu’il y a de plus noble, l’amour qui purifie l’azur du ciel, donne la mélodie au chant de l’oiseau, la vie au poëte !
Sur un tel canevas, laissez broder George Sand avec son talent de fée, sa nature intelligente de tout ce qui est sentiment et délicatesse ; puis regardez de bien près le travail achevé, fouillez ensuite un coin de votre cœur, et dites-moi si vous n’y verrez pas une des cordes que fait vibrer avec tant de vérité ce poëte, ce philosophe si savant dans tous les secrets de l’âme !
Allez, comme moi, voir et revoir Flaminio, et quand vous aurez bien écouté et bien applaudi, recueillez-vous un instant dans ces rêves qui vous ont bercé, et dites-moi si je n’ai pas raison de me refuser à vous écrire un froid et prosaïque compte-rendu ! Ah ! pour vous exprimer ma profonde admiration pour les interprètes, ma tâche est facile. Pas un n’est resté au-dessous de l’œuvre ! et je ne crois pas qu’il soit possible de rendre avec plus d’intelligence et de vérité le rôle de Flaminio. On ne peut, devant une telle réalité, ne pas reconnaître qu’il vît une grande partie du personnage dans la nature individuelle de Lafontaine et de madame Rose Chéri. Riez donc maintenant du baragouin anglo-français, quand c’est la bouche de madame Chéri-Lesueur qui le prononce ; tout le ridicule est bien présenté, j’espère, mais retrouvez-le derrière ces sentiments si bons et si dignes ; quant à M. Garraud, je défie bien de ne pas le considérer pomme ayant toujours occupé la place qu’il a si vite et si bien prise au Gymnase. M. Lesueur, M. Villars, mademoiselle Figeac et vous mademoiselle Judith, vous êtes dignes de votre passé ; nous n’avons pas de meilleure justice à vous rendre. Je n’ai plus personne à applaudir ni à critiquer, ce sont les seuls interprètes de Flaminio, et, je vous le jure, je n’ai loué que les artistes qui le méritaient.
Pardon ; connaissez-vous Iffland, auteur allemand fort distingué de 1784 ; non ? Eh bien, c’est lui qui, sous le titre de : le Crime par ambition, a fait la Conscience. Voulez-vous que je vous fasse un aveu ; eh bien, je suis de la dernière faiblesse sur les dates, et l’on ne me sortira pas de la tête que c’est Iffland qui a copié Alexandre Dumas
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Auguste Brisac
- La Sylphide : journal de modes, de littérature, de théâtres et de musique : [3]
- Revue parisienne : correspondance littéraire : théâtre, romans-feuilletons, beaux-arts [4]
REVUE DRAMATIQUE PARISIENNE.
Depuis longtemps M. Mazères n’avait rien écrit pour le Théâtre-Français; il vient d’y rentrer avec la Niaise, comédie en cinq actes,...
Le Gymnase a aussi obtenu son succès, succès
bien mérité, avec Flaminio, comédie en trois actes
et un prologue, de Mme George Sand.
Flaminio est une sorte de bohémien, un enfant du hasard, comme il le dit lui-même, doué des facultés les plus brillantes et des instincts les plus élevés ; le malheur, c’est qu’il ne sait que faire de tout cela. Un jour, dans les montagnes de la Savoie, auprès d’un châlet, il fait la rencontre d’une jeune femme, lady Melvil, qui est venue aux eaux avec quelques amis. Sous un costume d’homme comme il faut, le bohémien laisse éclater tout à coup les sentiments les plus exquis, une noblesse d’âme qui frappe lady Melvil : la jeune veuve se prend à suivre avec un intérêt qu’elle ne s’explique pas, la conversation de cet homme extraordinaire, et lorsqu’un moment plus tard, Flaminio, redevenu contrebandier, est blessé, elle ressent en elle-même une douleur sourde et profonde.
Mais une année a passé sur cette aventure, et Sarah Melvil oublierait peut-être Flaminio, si différentes circonstances n’amenaient celui-ci à Paris, où la jeune femme le revoit. Alors s’établit entre ces deux êtres une communion intime, un amour chaste et poétique qui devient leur vie : Flaminio pour être digne de cet amour auquel il ne se reconnaît pas de droits est devenu un homme, dans tout le sens moral du mot ; il a abandonné son existence vagabonde, il travaille, il est artiste, il vit de son labeur.
Tout est-il fini ? Non : une fausse jalousie, un soupçon mal fondé brise subitement sa vie, et le pauvre régénéré fuit par le monde auquel il demande de lui faire oublié le passé.
Un jour, il se retrouve en Savoie, à ce même châlet où pour la première fois il a rencontré Sarah ; il est riche alors et il croit avoir oublié. Mais le hasard amène lady Melvil ; ils se sont vus, et tous deux essaient de faire taire leurs cœurs qui se réveillent; ils feignent de ne pas se reconnaître.
Toutefois, un insolent parle outrageusement de Sarah ; alors Flaminio renaît ; il se bat pour l’honneur de la jeune femme, et lorsqu’il revient de ce duel où il a joué sa vie, ses bras s’ouvrent et lady Melvil s’y précipite.
Lafontaine, dans le rôle de Flaminio et Mme Rose-Chéri, sous les traits de Sarah Melvil, ont soulevé les plus chaleureux applaudissements.
Nous citerons encore comme pièces qui ont le plus marqué : Les maris me font toujours rire, au Vaudeville, le Grand Panorama de la Guerre d’O- rient, aux Variétés, puis l’Histoire d’un Sou et l’Héritage de ma Tante, au Palais-Royal.
Mentionnons surtout le comte de Lavernie, le drame en cinq actes, de M. Auguste Maquet, représenté à la Porte-Saint-Martin, et dans lequel Baron, Deshayes. Mmes Guyon et Lucie Mabire ont été d’éminents interprètes.
Aux Folies, le Violon du père Dimanche et l’Enfant de la Halte, aux Délassements, sont encore deux pièces à citer parmi les plus jolis succès.
ADOLPHE FAVRE.
- Le Journal pour rire : journal d'images, journal comique, critique, satirique, lithographique... [5]
THÉÂTRES.
Ah! mais voici une semaine qui a glorieusement arboré sur son mémorial des noms chéris du public : George Sand, Alexandre Dumas père, Alexandre Dumas fils! Quelles tentations!... comme s’il ne suffisait pas, pour attirer les spectateurs dans les salles de théâtre, des premiers brouillards de l’automne, qui rendent impossibles les promenades du soir.
Madame George Sand a ressuscité pour la scène du gymnase le Tévérino de son roman, et il est devenu Flaminio. Ce Flaminio est une fantaisie, mais une fantaisie adorable ; c’est le type le plus pur de la beauté humaine unie à l’intelligence capricieuse, à l’insouciance vagabonde ; c’est la force du corps jointe à la vigueur de l’âme. Ce Flaminio est, en vérité, un admirable bohémien, un grand seigneur en haillons, un dissipateur des richesses du coeur et l’esprit, un poète, un artiste perdu sur les grands chemins, rêvant pieds nus aux bords des sources limpides, au fond des bois épais, gagnant son pain au hasard, et ne se donnant pas toujours la peine de le manger, fainéant prédestiné, simple comme tout être supérieur, généreux comme le pauvre, type digne de tenter l’artiste, personnage créé pour la perspective théâtrale.
Avec Flaminio, madame George Sand a fait une pièce étrange, pleine d’éblouissement, de paillettes, de surprises. Chaque personnage y parle une langue enchantée, et l’oreille se laisse voluptueusement chatouiller par l’enivrante musique du dialogue. Et puis il faut dire aussi que c’est un des ouvrages les mieux joués que nous ayons vus. Lafontaine a créé Flaminio avec une intelligence supérieure. Madame Rose-Chéri est égale, sinon supérieur à elle-même dans le personnage de lady Sarah. Quelle admirable troupe que cette troupe du Gymnase! C’est la première de Paris !
De George Sand passons à Alexandre Dumas père, du Flaminio du Gymnase passons à la Conscience de l’Odéon.
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Albert Monnier
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