Dieu gard celuy qui les sauts inventa

Les Œuvres poëtiques du sieur Bernier de la BrousseJulian Thoreau (p. 47).

XL.

Arbres fueillus, dont la verdeur premiere
 ombrage l’huis du palais nompareil,
 Où le deſtin tient enclos ce bel œil
 Qui me rauit de ſa viue lumiere,
Las ! pleuſt au fils de la blonde Eſcumiere
 Qu’un iour prefix des l’Aube au doigt vermeil,
 Iuſqu’au coucher des courſiers du Soleil,
 Ie fuſſe vif ſous voſtre eſcorce Ormiere.
Deſpuis ce point, ie verrois curieux
 Ma belle Nymphe, eſclatante à mes yeux,
 Sans offenser ſes beautez que i’adore.
Ô grand amour, des grands Dieux le plus beau,
 Pour exalter le brandon qui t’honore
 Fay qu’en ce lieu ie reſſemble vn Ormeau.


XLI.

 
Dieu gard celuy qui les ſauts inuenta,
 Soit Apollon, Philete, ou Athalante :
 Sous les lauriers de ma dame excellente
 I’eſtois-vn ſoir, dont mon feu s’augmenta.
Son frere aiſné de ſauter me tenta,
 Moytout ſoudain ie diſpoſay ma plante
 A ce contraſte, & la belle preſente
 Promit le prix dont il ſe contenta.
Quand ie la vey, mon pied foible, & debile,
 Par ſes atraicts, deuint fort, & agile,
 Plus que jamais de gloire ambitieux :
Ô faict d’Icare ! ou du fils de Clymene !
 Preſque mon chef il planta dans les Cieux,
 Croyant ſauter entre les bras d’Helene.