Dictionnaire universel d’histoire et de géographie Bouillet Chassang/Supplement


DICTIONNAIRE

UNIVERSEL

D’HISTOIRE ET DE GÉOGRAPHIE

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SUPPLÉMENT

(Jusqu’en août 1878).


AGAS ANDE


ABD-UL-AZIZ, sultan des Ottomans, né en 1830, était le second fils de Mahmoud, et le frère d’Abd-ul-Medjid, auquel il succéda en 1861. Arrivé au trône, il annonça d’abord, comme son frère, un esprit réformateur, conserva les ministres de son prédécesseur, réduisit sa liste civile, confirma le hatti-chérif de Gulhané et le hatti-humayum de 1856, et promit l’égalité à tous ses sujets, sans distinction de religion ; créa à Galata-Seraï, sur le modèle des lycées français, un établissement d’instruction qui réunit des élèves mahométans et chrétiens, sous la direction de maîtres européens. Mais il n’eut pas dans les idées la même suite qu’Abd-ul-Medjid : il réprima péniblement une insurrection du Monténégro (1862) et de l’île de Candie (1866-67), et, par une mauvaise administration, prépara la dislocation de l’Empire Ottoman : son règne, qui s’était annoncé par des réformes et des mesures d’économie, finit par les prodigalités et le gaspillage. Déconsidéré en Europe et dans son empire, suspect d’aliénation mentale, Abd-ul-Aziz fut renversé par une révolution de palais, après laquelle, dit-on, il se suicida (juin 1876). Il eut pour successeur son neveu Mourad, qui fut bientôt déposé également comme atteint d’aliénation mentale, et remplacé par le sultan actuel, Abd-ul-Hamid II (août 1876).

ACHARD (Amédée), romancier français, né à Marseille en 1814, m. en 1875; fut d’abord employé dans une maison ne commerce, puis chef de cabinet d’un préfet; débuta comme écrivain en 1838 dans des journaux humoristiques (Ver-Vert, le Charivari, etc.); donna en 1845, dans l’Époque, des Lettres parisiennes qui furent remarquées, et publia en 1847 le plus goûté de ses romans, Belle Rose, que suivirent la Chasse Royale (1850), la Robe de Nessus (1854), Maurice de Treuil (1856)1 etc. Il a aussi écrit avec quelque succès pour le théâtre, et joué un rôle des plus honorables dans les journées de juin 1848.

AGASSIZ (Louis), naturaliste suisse, né en 1807 à Orbe (canton de Vaud), m. en 1873; professa l’hist. naturelle d’abord à Neufchâtel, puis à New-Cambridge (États-Unis). On lui doit des travaux importants : Recherches sur tes poissons fossiles, in-4, 1833-42 ; Monographie des échinodermes vivants et fossiles (1838-42) ; Hist. natur. des poissons d’eau douce, (en collaboration avec M. Vogt, 2 vol., 1839-40); Étude sur tes mollusques fossiles (1840-44); Études sur les glaciers (1840-47) ; Bibliographie zoologique (4 vol. in-4, 1848-50); Zoologie générale (en collaboration de MM. Gould et Perty, 1854 et suiv.). Il était correspondant de l’Institut de France.

ALI-PACHA (Méhémet Emin), homme d’État ottoman, né à Constantinople en 1815, mort en septembre 1871. Élève et successeur de Reschid-Pacha, il le surpassa peut-être en intelligence et en savoir. D'abord simple employé au bureau de traduction de la Porte, il fut successivement élevé aux plus hautes dignités : chargé d’affaires à Londres (1838), puis ambassadeur en titre dans la même résidence (1841), membre du conseil suprême d’État et de justice, chancelier du divan impérial, ministre des affaires étrangères, président du conseil du tanzimat, enfin grand vizir ; il quitta et reprit plusieurs fois ces hautes fonctions, selon que ses idées politiques étaient rejetées ou acceptées par le Sultan. 11 signa comme premier plénipotentiaire le traité de Paris (1856), et présida la commission qui devait régler la situation de la Roumanie (1864). Ali-Pacha, comme son maître Reschid-Pacha et son ami Fuad-Pacha, appartient à une école d’hommes d’État éminents, qui ont réussi à entraîner la Turquie dans le mouvement de la civilisation européenne.

ANCELOT (Marg.-L.-Virginie CHARDON, madame), femme auteur, née à Dijon en 1792, m. en 1875, vint à Paris en 1804 et épousa en 1818 M. Ancelot, qu’elle aida dans la composition de quelques-unes de ses œuvres dramatiques, et qu’elle perdit en 1854 ; écrivit seule quelques comédies qui furent applaudies au Théâtre Français, parmi lesquelles on distingue le Mariage raisonnable, 1835 ; Marie ou Trois époques, 1836 ; puis, de 1838 à 1843, elle donna au Gymnase, au Vaudeville et aux Variétés plusieurs pièces agréables, qui eurent du succès, mais ne sont pas restées à la scène. Elle a publié son Théâtre complet (4 vol. in-8, 1848). Dans ses dernières années, elle écrivit des romans dont les mieux accueillis furent Renée de Varville et la Nièce du banquier (1853).

ANDERSEN (Hans Christian), poëte et romancier danois, né en 1805 à Odensée; m. en 1875; était fils d’ouvrier et destiné à être ouvrier lui-même ; vint chercher fortune à Copenhague, fut quelque temps acteur, se fit remarquer par des pièces de poésie qui lui valurent une bourse royale dans une des meilleurs écoles de Copenhague, et commença ses études à vingt-trois ans (1828); se révéla, deux ans après, comme un des plus grands poëtes du Nord par son recueil de Poésies, suivi bientôt d'un autre (Fantaisies esquisses); passa une grande partie de sa vie à voyager en Allemagne, en France, en Suisse, en Italie, en Orient, et s'inspira de ses voyages pour composer des Esquisses de voyage, une Autobiographie et des romans pleins d'originalité, dont la plupart ont été traduits en français : l'Improvisateur italien, 1837; Rien qu'un violoniste, 1837; Album sans dessins, 1840; Contes, 1842 (ce dernier ouvrage est le plus estimé en France). Andersen a aussi travaillé pour le théâtre, mais avec moins de succès.

ANDRAL (Gabriel), médecin français, né à Paris en 1797, mort en 1876, était fils d'un médecin distingué et devint gendre de Royer-Collard; fut professeur à l'École de médecine, où il succéda à Broussais et enseigna dans un tout autre esprit (1828), devint membre de l'Académie des sciences (1843), et s'est surtout fait un nom en pathologie : Clinique médicale (1823), Précis élémentaire de pathologie (1829); Traité de l'auscultation (1836); Cours de pathologie interne (1836); Hématologie pathologique (1843). – Son fils, M. Paul Andral, né en 1828, après s'être distingué comme avocat, est devenu vice-président du conseil d'État.

ANICET-BOURGEOIS (Auguste), auteur dramatique français, né à Paris en 1806, mort en 1871. Il aborda tous les genres, mais réussit surtout dans le mélodrame : peu soucieux de la forme littéraire et de la vraisemblance, il savait conduire une intrigue et ménager des scènes dramatiques d'un effet quelquefois saisissant. Parmi les nombreux ouvrages qu'il a donnés, soit seul, soit en collaboration, on cite : Charlotte Corday (1821); Latude (1834); la Nonne sanglante (1835); les Sept péchés capitaux (1848); le Fou par amour (1857); la Fille des chiffonniers (1861), etc.

ANTONELLI (le cardinal Giacomo), homme d'État italien, né à Sonnino en 1806; fut successivement sous Grégoire XVI, prélat, assesseur au tribunal criminel supérieur, délégué à Orvieto, à Viterbe et à Macerata, sous-secrétaire d'État, grand trésorier. Dès l'avènement de Pie IX, il devint cardinal, et obtint toute la confiance du nouveau pape, qu'il garda jusqu'à sa mort (1876). Sous le ministère libéral de Rossi, il fut ministre des finances; après la révolution romaine et l'expédition française à Rome, il devint ministre des affaires étrangères, et conseilla ou servit avec empressement une politique de résistance aux idées par lesquelles Pie IX avait inauguré son pontificat. Doué de beaucoup de souplesse d'esprit et d'une grande dextérité de langage, il excellait à atténuer l'effet produit sur diverses puissances de l'Europe par quelques mesures ou allocutions du souverain Pontife.

ARNAL (Étienne), acteur comique français, né à Meulan (Yvelines), en 1794, mort en 1872. Après avoir peu réussi dans les rôles d'amoureux de tragédie, il obtint un succès prolongé sur les scènes du Vaudeville et des Variétés, par un comique naturel et original, par une bonhomie fine et caustique. Il a publié quelques poésies : Boutades en vers (1861), etc.

AUBER (François-Daniel-Esprit), célèbre compositeur français, né à Caen en 1782, mort en 1871. Fils de commerçants, et destiné au commerce, il y renonça pour se consacrer à la musique et se fit l'élève de Chérubini. Il composa d'abord des romances, des concertos, des morceaux de musique religieuse, enfin quelques opéras-comiques pour des théâtres de société. Les premiers essais qu'il donna au théâtre Feydeau (1813 et suiv.) n'eurent pas de succès; mais il ne se découragea pas, et la Bergère châtelaine (1820) commença une période de succès; Leicester (1823) réunit pour la première fois deux noms qui devinrent désormais presque inséparables, ceux de Scribe et d'Auber. La réputation de ce dernier fut définitivement consacrée par le Maçon (1825), et enfin il donna en 1828 à l'Opéra, son chef-d'œuvre la Muette de Portici, dont le duo, Amour sacré de la patrie, devint une sorte de Marseillaise. Il a encore donné à l'Opéra le Philtre (1831); l'Enfant prodigue (1850), Zerline (1851), et à l'Opéra-Comique Fra Diavolo (1830), le Cheval de bronze (1835), l'Ambassadrice (1836), le Domino noir (1837), les Diamants de la Couronne (1841), la Part du Diable (1843), la Sirène (1844), Haydée (1847), Marco Spada (1883), la Fiancée du roi de Garbe (1864) et le Premier jour de bonheur, qui fut sa dernière œuvre. Auber est le plus fécond et le plus populaire des compositeurs français; sa musique est vive, gaie gracieuse, facile, et ne manque pas d'originalité : il donne plus à la mélodie qu'à l'orchestration. – Auber fut appelé à l'Académie des Beaux-Arts en 1829; il fut, sous Louis-Philippe, directeur des concerts de la cour, et, sous Napoléon III, directeur de la musique de la chapelle impériale. Il succéda, en 1842, à Chérubini comme directeur du Conservatoire de musique.

AURELLE DE PALADINES (Cl.-Michel-Louis d’), général français, né en 1804 dans la Lozère, m. en 1877 ; servit avec distinction dans l’armée d’Afrique, au siége de Rome, et dans l’expédition de Crimée ; s’est illustré surtout par l’avantage qu’il obtint, le 9 nov. 1870, à Coulmiers, sur le général bavarois De Thann, et qui fit momentanément abandonner Orléans par les troupes ennemies.

BABINET (Jacques) physicien français né à Lusignan (Vienne) en 1794, mort en 1872; fut élève de l'École polytechnique et de l'École d'application de Metz; abandonna la carrière militaire pour l'enseignement; fut professeur suppléant au Collège de France, puis astronome adjoint du Bureau des longitudes, et membre de l'Académie des sciences. Il a publié de nombreux Mémoires dans les Annales de physique et de chimie et dans les Comptes rendus de l'Académie des sciences; il a apporté des modifications à la construction de divers appareils de physique, et son nom est resté attaché à un perfectionnement de la machine pneumatique; il a publié un Atlas estimé, surtout au point de vue cosmographique; enfin il s'est fait un nom populaire par une série d'articles insérés dans les journaux et les revues, et dans lesquels il s'attachait à vulgariser la science en un style agréable et enjoué.

BAILY (Edward Hodges), sculpteur anglais né à Bristol en 1788, mort en 1867; fut élève de Flaxman. Ses principales œuvres sont : la Statue de Nelson, à Trafalgar Square et l'arc de triomphe du palais Buckingham avec bas-reliefs.

BALARD (Antoine-Jérôme), chimiste français, né à Montpellier en 1802, mort en 1876; fut d'abord pharmacien, puis préparateur de chimie, et plus tard professeur à la Faculté des sciences de Montpellier, professeur de Chimie à la Faculté ces sciences de Paris et au Collége de France, enfin inspecteur général de l'enseignement supérieur. Il était, depuis 1844, membre de l'Académie des sciences. On lui doit la découverte du brome, corps simple métalloïde qu'on n'était pas encore parvenu à isoler, et dont il trouva de nombreuses applications à la science et à l'industrie. Il a également rendu service aux arts industriels en extrayant directement de l'eau de mer le sulfate de soude, ce qui a permis de livrer en abondance et à bas prix la soude factice et les sels de potasse et du commerce. Tous ses travaux sont exposés dans des Mémoires qui font partie des Comptes rendus de l'Académie des sciences et des Annales de physique et de chimie.

BARAGUEY-D’HILLIERS (Achille), maréchal de France, né à Paris en 1796, m. en 1878, était fils d’un général du premier Empire ; assista à la bataille de Leipzig (1813), où il eut le poignet emporté, servit sous la Restauration et sous la monarchie de Juillet ; se fit remarquer après la révolution de 1848, par son attitude énergique contre les tentatives de désordre, fut député du Doubs à la Constituante et à la Législative, président du comité de la rue de Poitiers ; remplaça, en 1851, le général Changarnier comme commandant de l’armée de Paris, concourut au coup d’État du 2 décembre, se distingua dans la guerre contre la Russie, et s’empara de Bomarsund, ce qui lui valut le bâton de maréchal (1854) ; enfin prit une part importante à la bataille de Solférino.

BARANTE (Prosper BRUGIÈRE, baron de), historien et publiciste français, né à Riom en 1782, mort en 1866; fut préfet sous l'Empire; fut nommé par Louis XVIII conseiller d'État, puis pair de France (1819); entra néanmoins bientôt dans les rangs de l'opposition, et partagea son temps entre des brochures politiques d'un libéralisme modéré, des discours à la Chambre des pairs et des publications littéraires, qui le firent recevoir à l'Académie française (1828), et dont la plus estimée est l’Histoire des ducs de Bourgogne de la maison de Valois (1824-26). Après 1830, il fut et demeura un des partisans les plus dévoués du gouvernement de Louis-Philippe et de la politique conservatrice. Il vécut dans la retraite après la révolution de Février, et se consacra tout entier aux lettres. On a de lui, outre l’Hist. des ducs de Bourgogne; une traduction des OEuvres dramatiques de Schiller, une Hist. de la Convention et du Directoire, la Vie politique de Royer-Collard, des Mélanges historiques et littéraires, un Tableau de la littérature au XVIIIe siècle.

BAROCHE (Pierre-Jules), avocat et homme politique français, né à Paris en 1802, mort en 1870. Reçu avocat en 1823, il devint bâtonnier de l’ordre en 1846. Nommé député l’année suivante, il suivit la ligne politique de M. Odilon Barrot, fit partie de l’opposition dynastique, prit part à l’organisation des Banquets, et signa l’acte d’accusation contre le ministère Guizot et Duchâtel. A la Constituante, il vota avec la droite ; il fut nommé procureur général près la Cour d’appel de Paris, et exerça les fonctions du ministère public dans les procès de Bourges et de Versailles. Devenu vice-président de l’Assemblée législative, il essaya d’être un trait d’union entre le parti parlementaire et l’Élysée ; nommé ministre de l’intérieur par le prince-président, en 1850, il signa le décret de révocation du général Changarnier, et prépara la loi du 31 mai, qui restreignait le suffrage universel ; il quitta le ministère en 1851, lorsque L. Napoléon eut demandé le retrait de cette loi. Après le coup d’État du 2 décembre, il fut nommé vice-président de la commission consultative, puis vice-président et enfin président du conseil d’État ; fut chargé en 1860, comme ministre sans porte-feuille, de défendre, devant le Corps législatif et le Sénat, les idées du gouvernement ; devint ministre de la justice et des cultes (1863-1869) : comme tel, il interdit aux évêques la publication du Syllabus. Lors de la chute de l’Empire, il était sénateur et membre du conseil privé. — Son fils, Ernest Baroche, fut sous l’Empire maître des requêtes au conseil d’État, et fut tué à la tête d’un bataillon de gardes mobiles à l’affaire du Bourget, pendant le siége de Paris (30 oct. 1870).

BARRIÈRE (Théodore), auteur dramatique français, né à Paris en 1823, m. en 1877 ; était attaché au Dépôt de la guerre comme graveur-géographe ; a donné au théâtre, soit seul, soit en collaboration avec divers auteurs, un grand nombre de drames et de vaudevilles dont plusieurs ont obtenu un grand succès : la Vie de bohême (1848) ; les Filles de marbre (1853) ; les Parisiens (1855) ; Calino (1856) ; les Faux bonshommes (1856) ; les Jocrisses dé l’amour (1865), etc.

BARROT (Odilon), h. politique français, né à Villefort (Lozère) en 1791, m. en 1873. Fils d’un ancien conventionnel rallié à la monarchie, il devint, en 1814, avocat aux Conseils du roi et à la Cour de cassation ; refusa le serment sous les Cent jours ; combattit, sous la seconde Restauration, les prétentions des émigrés et les excès de la Chambre introuvable, et prit une part active à la révolution de 1830 ; fut, pendant le règne de Louis-Philippe, le chef de la gauche dynastique, et, comme tel, défendit le droit d’association, et combattit les lo1s de septembre ; entreprit contre le ministère de M. Guizot la campagne des banquets réformistes, qui amena la révolution de février 1848 ; siégea à la droite de l’Assemblée constituante, et fut, après l’avènement de L. Napoléon à la présidence, le chef du cabinet qui fit l’expédition de Rome ; rentra, après le 2 décembre 1851, dans la vie privée, d’où il ne sortit qu’en 1872 pour diriger le conseil d’État en qualité de vice-président. Il a publié quelques brochures, parmi lesquelles on distingue : De la centralisation et de ses effets (1870). Il était membre de l’Académie des sciences morales et politiques. — De ses deux frères, l’un (Ferdinand) a été, sous Napoléon III, ministre, membre du conseil d’État, sénateur ; l’autre (Adolphe) a rempli divers postes diplomatiques sous Louis-Philippe et Napoléon III, et a été aussi sénateur.

BARTH (Henri), voyageur et géographe allemand, né à Hambourg en 1821, m. en 1865 ; fit d’excellentes études classiques à Berlin ; voyagea en Italie en 1840, et (de 1845 à 1848) exécuta autour de la Méditerranée un voyage archéologique. Après avoir publié une partie de ses Explorations des côtes de la Méditerranée (Berlin, 1849), il se joignit à l’expédition commerciale et scientifique dans le Soudan, organisée par James Richardson ; subit les plus rudes épreuves pendant un voyage de près de cinq ans (1849-54), sous un climat dévorant et parmi des populations sauvages ; vit tomber autour de lui presque tous ses compagnons, et, à son retour, publia un nombre considérable de documents nouveaux et intéressants sur ces contrées : Voyages et découvertes dans le nord et le centre de l’Afrique (1857-58, 5 vol. in-8, anglais et allemand ; il n’en a été publié en français qu’un extrait d’après un abrégé allemand) ; Vocabulaire des langues de l’Afrique centrale (en allemand, 1862, 2 vol. in-8).

BARTHÉLEMY (Auguste), poëte français, né à Marseille en 1796, m. en 1867 ; fit en collaboration avec son compatriote Méry la Villéliade (1826) et Napoléon en Égypte (1827). Le succès de la Villéliade l’engagea à publier depuis quelques satires politiques, dont une, la Némésis, publication périodique, lui valut une sorte de popularité (1831). Il a donné en 1835-38 une trad. en vers de l’Énéide.

BARYE (Ant.-Louis), statuaire français, né à Paris en 1795, m. en 1815 ; étudia d’abord la gravure sur acier et la peinture, où il n’eut qu’un demi-succès, puis la sculpture, et fut un des élèves les plus marquants du baron Bosio. Appelé en 1848 au musée du Louvre comme conservateur de la galerie des plâtres, il occupa ce poste jusqu’en 1851, et devint en 1854 professeur de dessins d’histoire naturelle au Muséum. Ses œuvres les plus appréciées sont ses nombreuses études d’animaux.

BAUDELAIRE (Ch.-Pierre), littérateur français, né à Paris en 1821, m. en 1867 ; a traduit les Œuvres d’Edgard Poë, et publié des poésies bizarres et quelquefois scandaleuses, mais dont l’originalité a trouvé quelques admirateurs (les Fleurs du mal, 1857).

BAZIN (François-Emmanuel-Joseph), compositeur français, né à Marseille en 1819, m. en 1878 ; fut plusieurs fois lauréat et devint professeur au Conservatoire. Il a donné plusieurs opéras-comiques qui ont eu du succès (Maître Pathelin, le Voyage en Chine, etc.), et divers morceaux estimés de musique sacrée et profane. BECQUEREL (Ant.-César), physicien français, né à Châtillon-sur-Loing en 1788, m. en 1878. Sorti de l’École polytechnique en 1808, il se distingua, comme officier du génie, dans les campagnes d’Espagne et de France ; quitta le service en 1815 et se consacra depuis à des travaux scientifiques qui lui valurent le titre de membre de l’Académie des sciences (1829), et la chaire de professeur de physique au Muséum (1837). Il fit surtout de l’électro-chimie appliquée aux arts l’objet de ses recherches, donna le premier l’idée des piles à courant constant, s’occupa également avec succès de physiologie et de climatologie et prit une grande part à l’amélioration du sol de la Sologne. Outre de nombreux Mémoires, publiés dans les Comptes rendus de l’Académie des sciences, dans les Annales de physique et de chimie, etc., il a donné plusieurs ouvrages, dont les principaux sont : Traité de l’électricité et du magnétisme, 7 vol., 1831-40 ; Traité de physique appliquée à la chimie et aux sciences naturelles, 2 vol. 1847 ; etc. — Son fils, M. Edm. Becquerel, a collaboré à quelques-uns de ses ouvrages (Éléments de physique terrestre et de météorologie, etc.).

BEDEAU (Alphonse), général français, né en 1804, mort en 1863, fut un des officiers qui prirent la part la plus brillante aux guerres d’Algérie, sous le règne de Louis-Philippe, organisa la province de Tlemcen, après en avo1r chassé les Arabes (18112) ; se distingua à la bataille de l’Isly (1844), et commanda la province de Constantine ; fut membre de l’Assemblée constituante de 1848, et fut blessé en combattant l’insurrection de Juin ; fut, comme membre de la droite de l’Assemblée législative, arrêté au coup d’État du 2 déc. 1851, et exilé en Belgique.

BEECHER-STOWE (mistress Harriet), romancière américaine, née à Litchfield (Connecticut) en 1814, m. en 1872. Fille d’un pasteur protestant, elle épousa un autre pasteur ; dut quitter avec lui, pour des opinions abolitionnistes ouvertement déclarées, la ville de Cincinnati où le docteur Stowe était professeur, et se réfugia dans le Maine. Après avoir publié quelques contes ou nouvelles, elle se fit un nom populaire par un roman émouvant, la Case de l’oncle Tom, qui eut un immense succès en Amérique et en Europe, fut traduit dans toutes les langues, et porta un coup terrible à la cause de l’esclavage (1852). D’autres ouvrages, publiés depuis, d’après la même inspiration, n’ont rien ajouté à la réputation de l’auteur.

BELLANGÉ (J.-L.-Hippolyte), peintre d’histoire français, né à Paris en 1800, m. en 1866 ; fut élève de Gros, et s’est fait un nom pour la peinture des batailles et scènes militaires. Plusieurs de ses toiles sont au musée de Versailles.

BELLOGUET (Louis, baron Roget de), né à Bergheim (Haut-Rhin) en 1796, m. en 1872 ; était fils d’un général de l’Empire, devint lui-même chef d’escadron, et quitta le service pour se livrer à des travaux qui font époque dans l’histoire des études celtiques, et qu’il a recueillis sous le titre d’Ethnologie gauloise (Glossaire gaulois, 1858 et 1872 ; Types gaulois, 1861 ; Génie gaulois, 1868).

BERLIOZ (Louis-Hector), compositeur français, né à a Côte-Saint-André (Isère) en 1803, m. en 1869 ; a donné plusieurs symphonies et opéras, parmi lesquels on remarque : Symphonie funèbre ; Symphonie d’Harold et de Roméo et Juliette ; Benvenuto Cellini (1838) et les Troyens (1866). Son œuvre la plus estimée est le Requiem exécuté aux funérailles du général Damrémont (1836). Dès 1832, il se fit connaître comme critique dans la Gazette musicale et dans le Journal des Débats, et y soutint son système musical qui subordonne la mélodie à la recherche de l’expression en général considérée comme propre à la poésie. Il devint membre de l’Académie des beaux-arts (1856), et a laissé plusieurs ouvrages : Traité d’instrumentation et d’orchestration moderne (1844) ; Études sur Beethoven, Gluck et Weber (l845) ; Grotesques de la musique (1859).

BERNARD (Claude), physiologiste français, né à Saint-Julien (Rhône) en 1813, m. en 1878 ; fut successivement interne des hôpitaux de Paris, préparateur de Magendie au Collége de France, professeur de physiologie à la Faculté des sciences de Paris, au Collége de France et au Muséum, membre de l’Académie des sciences et de l’Académie française. Il a donné les résultats de son enseignement dans une suite de publications : Leçons de physiologie expérimentale appliquée à la médecine (1865) ; Leçons sur les effets des puissances toxiques et médicamenteuses (1857) ; Leçons sur la physiologie et la pathologie du système nerveux (1858) ; Leçons sur les propriétés physiologiques et les altérations pathologiques des différents liquides de l’organisme (1859) ; Leçons et expériences physiologiques sur la nutrition et le développement (1860), etc. Il a en outre publié dans la Gazette médicale, dans les Comptes rendus de la Société de biologie et de l’Académie des sciences, dans la Revue des Deux Mondes, des Mémoires ou articles importants (sur les usages du pancréas, sur la fonction glyconique du foie, sur le grand sympathique, sur la chaleur animale, sur le cœur, sur la vie, etc.). On lui doit en outre un Rapport sur les progrès et la marche de la physiologie générale en France (1867). Presque toutes ces publications contiennent quelque découverte de l’auteur dans le domaine de la physiologie, et sont remarquables par la netteté et la précision du style : mais ce qui a fait surtout la célébrité de Claude Bernard, ce sont les développements qu’il a donnés à la physiologie. expérimentale, ou il a dépassé son maître Magendie, et où il a tiré un remarquable parti de la vivisection.

BEULÉ (Charles-Ernest), archéologue et homme politique français, né à Saumur en 1826, mort en 1871 ; fut élève de l’École normale et de l’École française d’Athènes ; se fit de bonne heure un nom par sa découverte de l’escalier de l’Acropole (1853) ; succéda à Raoul-Rochette comme professeur d’archéologie (1854) ; fit des fouilles importantes sur l’emplacement de Carthage ; devint membre de l’Académie des inscriptions (1860) et bientôt (1862) secrétaire perpétuel de l’Académie des beaux-arts ; ajouta à ses travaux de pure érudition (l’Acropole d’Athènes, 1854 ; Études sur le Péloponèse, 1855 ; les Monnaies d’Athènes, 1858 ; Histoire de l’art grec, 1870, etc.) quelques ouvrages fort remarqués, où la recherche et la peinture des faits historiques n’étaient pas exemptes d’allusions contemporaines, et qui ont été réunis sous ce titre général : le Procès des Césars (1866-1870). Il entra dans la vie politique après la révolution de 1870, comme député de Maine-et-Loire, prit place au centre droit, et fut ministre de l’intérieur au 24 mai 1873.

BIBESCO (Georges), hospodar de Valachie, né en 1805 à Craiova, m. en 1873 ; fut hospodar de 1843 à 1848, et, comme membre du divan, chargé de la réorganisation de la Moldo-Valachie (1857) ; se montra partisan de l’union des deux principautés sous la souveraineté d’un prince étranger.

BOECKH (Auguste), érudit allemand né en 1785 à Carlsruhe, m. en 1867 ; enseigna longtemps à Heidelberg et à Berlin, devint directeur du séminaire philologique de cette ville et conseiller intime du roi. Il était membre correspondant de l’Institut de France. On doit à Bœckh de nombreux travaux de philologie et d’archéologie, dont les principaux sont ; Économie politique des Athéniens, 1817, 2 vol. in-8, trad. en français par Laligant ; 1828, 2 vol. in-8, et dont l’auteur a donné une 2e édit. fort augmentée, 3 vol. in-8, 1851 ; édition de Pindare, 18ll-22, 4 vol. in-4 ; Corpus inscriptionum Græcarum, 3 vol. in-fol., 1824-50, continué par Franz et E. Curtius ; etc.

BONJEAN (Louis-Bernard), jurisconsulte français, né à Valence (Drôme) en 1804. Issu d’une famille pauvre, il commença par donner des leçons de mathématiques puis des répétitions de droit. Aux journées de Juillet 1830, il fut un des combattants, et y perdit un œil. Il devint en 1838 avocat à la Cour de cassation. En 1848, il siégea à la Constituante et vota avec la droite. Il suivit, à partir de 1849, la politique du prince-président, fut nommé avocat général à la Cour de cassation (1852), sénateur (1855), président à la Cour de Riom, puis président de chambre à la Cour de cassation (1865). Lors de l’insurrection du 18 mars 1871, il remplissait à titre provisoire les fonctions de premier président ; en cette qualité, il fut arrêté, retenu comme otage, et, après soixante-quatre jours passés au secret, fusillé, le 24 mai, avec l’archevêque de Paris, par ordre de la Commune. — Parmi ses nombreux écrits, on remarque une traduction des Institutes de Justinien et un livre sur le Pouvoir temporel des papes. Il a collaboré au Corps diplomatique et à l’Encyclopédie des lois.

BOPP (Franz), philologue allemand, né à Mayence en 1791, m. en 1867 ; fut longtemps professeur de sanscrit à Berlin, et fonda par son enseignement et par ses publications une science nouvelle, la Grammaire comparée. Il était membre correspondant de l’Institut de France. Ses principaux ouvrages sont : Grammaire comparée des langues sanscrite, zende, grecque, latine, lithuanienne, slave, gothique, et allemande, 1833-49 (2e édit. refondue, 1857, et traduite par M. Bréal, 4 vol. in-8, 1867-1873) ; Grammatico-critica linguæ sanscriticæ, 1829 ; Glossarium sanscritum, 1840, etc.

BOUILHET (Louis), littérateur français, né à Cany (Seine-Inférieure) en 1824, mort en 1869. Après s’être fait remarquer par des poëmes en vers, parmi lesquels on distingue Mélænis, comte romain (1856), il se tourna vers le théâtre, et fit applaudir plusieurs drames en vers, surtout Madame de Montarcy (1856) et Hélène Peyron (1858).

BRASCASSAT (Jacques-Raymond), peintre français, né à Bordeaux en 1805, mort en 1861 ; s’est fait un nom comme paysagiste et comme peintre d’animaux. Il était membre de l’Académie des beaux-arts.

BRONGNIART (Adolphe-Théodore), naturaliste français, né à Paris en 1801 ; était fils d’Alexandre Brongniart (voyez le Dictionnaire) ; fut professeur de botanique et de physique végétales au Muséum, membre de l’Académie des sciences (1831), inspecteur général de l’enseignement supérieur (1852). On lui doit une Histoire des végétaux fossiles (1828 et années suivantes), qui a constitué la paléontologie des végétaux, comme Cuvier a constitué celle des animaux. Il est un des fondateurs des Annales des sciences naturelles.

BROUGHAM (Henry, premier baron et lord), h. politique, orateur et écrivain anglais, né à Édimbourg en 1778, m. en 1868 ; montra d’abord une grande aptitude pour les sciences, et fit quelques ouvrages sur la physique et la géométrie ; collabora avec éclat à la Revue d’Édimbourg, et fut, par de grands succès obtenus au barreau, conduit au Parlement (1810), où il se distingua pendant 25 ans dans la défense des réformes libérales ; devint pair héréditaire et chancelier d’Angleterre sous le ministère de lord Grey (1830), résigna ces fonctions en 1834, lors du ministère de Robert Peel, et s’occupa depuis spécialement de réformes judiciaires et de travaux littéraires. — Ses principaux ouvrages sont : Discours au barreau et au Parlement (4 vol. 1838) ; Esquisses historiques des hommes d’État du temps de George III (1838-43, trad. en fr. 1847) ; Essai sur la constitution anglaise (1845) ; Voltaire et Rousseau, écrit en fr. (1845). Ses OEuvres complètes ont été publiées en 9 vol. in-8 (1851-57).

BULOZ (François), publiciste français, né près de Genève en 1803, m. en 1876 ; commença par être prote d’imprimerie, et fit quelques traductions d’ouvrages anglais ; puis fonda, en 1831, la Revue des Deux-Mondes, qui prit bientôt et qui a gardé le premier rang parmi les périodiques français. Il se consacra tout entier à ce recueil, et en assura le succès par son jugement, par son activité infatigable et par une énergie de volonté qui s’imposait même aux écrivains les plus considérables.

BULWER-LYTTOX (Edouard-Georges Earle), romancier anglais, né à Heydon-Hall (Norfolk) en 1805, m. en 1873 ; débuta comme écrivain par des poésies imitées de Byron ; obtint en 1828 un grand succès par son premier roman, Petham ou Les Aventures d’un gentleman, bientôt suivi de Godolphin, des Pèlerins du Rhin, des Derniers jours de Pompéi, de Rienzi ou le Dernier des tribuns, qui rendirent son nom célèbre en Europe ; donna au théâtre plusieurs pièces, dont deux, la Dame de Lyon (1828) et Money (1840), furent très -applaudies. Membre de la Chambre des communes de 1831 à 1841, il s’y déclara pour les réformes ; rédigea quelque temps (1832) le Monthly Magazine, où il afficha des opinions qui lui valurent le « dandy radical » ; publia en 1836 un pamphlet virulent contre le ministère conservateur de Robert Peel ; publia en 1846, sous le voile de l’anonyme, le Nouveau Timon, où il donnait une série de portraits d’hommes d’État contemporains ; siégea de nouveau à la Chambre des communes de 1852 à 1866, époque où il accepta de lord Derby, avec le titre de lord, un siége à la Chambre haute. Il a laissé des Mémoires. — Son frère (Henry Earle), né en 1804, a rempli plusieurs postes diplomatiques et publié plusieurs ouvrages parmi lesquels on distingue, la Société, la Littérature et la Politique en France (1834), les Lords, !e Gouvernement et le pays (l836).

CABRERA (Ramon, comte de Morella), né à Tortose (Catalogne) en 1810, m. en 1876 ; fut d’abord destiné à l’état ecclésiastique ; mais, peu fait pour ce genre d’existence, il se mit en 1833 à la tête d'une troupe de guérillas pour soutenir contre la reine Isabelle les prétentions de Don Carlos ; soutint pendant plusieurs années une lutte acharnée contre les Christinos : plusieurs fois grièvement blessé, tour à tour vaincu et victorieux, il dut à la reconnaissance de Don Carlos les titres de comte et de lieutenant général, mais finit par être défait par Espartero en 1840. Il essaya de recommencer la lutte en 1848, mais dut repasser les Pyrénées. Depuis il vécut dans une retraite opulente ; et, loin de soutenir la cause du second Don Carlos, il adressa aux Carlistes, en 1875, une proclamation pour les engager à se soumettre au roi Alphonse XII.

CALAMATTA (Louis), graveur, né en 1802 à Civita-Vecchia, m. en 1869 ; s’est attaché aux traditions de l’école de M. Ingres. Ses principales œuvres sont : le Vœu de Louis XIII, d’après Ingres ; la Vierge à la chaise, d’après Raphaël ; la Joconde, d’après L. de Vinci ; Françoise de Rimini, d’après A. Scheffer ; M. Guizot, d’après P. Delaroche, etc.

CAPEFIGUE (J.-B.-Raymond), publiciste français, né à Marseille en 1802, m. en 1873 ; se fit un nom, sous la Restauration, dans la presse royaliste ; et publia, après 1830, un grand nombre d’ouvrages historiques, parmi lesquels on distingue : Hist. des Juifs depuis les Machabées jusqu’à nos jours, 1833 ; Hist. de Philippe Auguste (1839). Il a embrassé presque toutes les époques de l’histoire de France dans une série de travaux qui occupent plus de cent volumes, et où l’on trouve plus de facilité que d’études sérieuses.

CARAFA DE COLOBRANO (Paul), compositeur français d’origine italienne, né à Naples en 1787, m. en 1873 ; suivit d’abord la carrière militaire, fit la campagne de Russie comme officier d’ordonnance de Murat ; se consacra ensuite à la musique ; composa quelques opéras pour les théâtres de Naples, de Venise, de Milan de Vienne, et vint en 1821 se fixer à Paris, où il donna le Solitaire (1822), Mazaniello (1828) et un grand nombre d’autres compositions, qui se distinguent par une élégante facilité, mais qui manquent de vigueur, et dans lesquelles l’imitation de Rossini est trop sensible. Il était professeur au Conservatoire, et, depuis 1837, membre de l’Académie des beaux-arts.

CARNÉ (Louis MARCEIN, comte de), publiciste français, né à Quimper en 1804, mort en 1876, fut sous la Restauration secrétaire d’ambassade ; reconnut le gouvernement de Louis-Philippe, qui lui conserva ses fonctions ; devint député en 1839 et fit partie de l’opposition dynastique ; se tint après 1848 à l’écart des affaires polîtiques, resta seulement conseiller général du Finistère et devint en 1863 membre de l’Académie française, préférablement à M. Littré. Ses principaux ouvrages, qui le rattachent à l’école de M. de Montalembert pour la religion, et de M. Guizot pour la politique, sont : Du gouvernement représentatif en France et en Angleterre (1841) ; Études sur l’histoire du gouvernement représentatif en France (1855) ; les Fondateurs de l’unité française (1856).

CARPEAUX (Jean-Baptiste), statuaire français, né à Valenciennes en 1827 ; fut élève de Rune et de Duret ; obtint le prix de Rome en 1854 ; se fit remarquer dès 1859 par une statue en bronze, le Jeune pêcheur, et en 1863 par le groupe d’Ugolin et ses enfants ; a produit depuis un grand nombre d’œuvres vigoureuses et originales. Il était dans toute la force de son talent, quand il fut atteint d’une cruelle maladie, à laquelle il a succombé : il mourut à Courbevoie en 1875, dans une villa mise à sa disposition par le prince Georges Stirbey, fils de l’ancien hospodar de Valachie, dont l’affectueuse sollicitude adoucit pour le pauvre artiste les souffrances de sa longue agonie. Le talent de Carpeaux est reconnu de tous ; mais ses œuvres ont été fort discutées, parce que leur auteur affectait de rompre avec les traditions classiques, et sacrifiait de parti pris les proportions et l’harmonie des lignes à la recherche du pittoresque et de l’effet dramatique. Cette tendance apparaît particulièrement dans ses bas-reliefs pour le pavillon de Flore, et plus encore dans son groupe la Danse, exécuté en 1869 pour le Nouvel-Opéra.

CARRÉ (Michel), auteur dramatique français, né en 1819, m. en 1872 ; débuta par un volume de poésies dans le genre romantique, les Folles rimes (1841) ; fit jouer quelques drames ou vaudevilles peu remarqués ; mais s’est acquis une réputation méritée par des libretti d’opéras-comiques faits en collaboration avec M. Jules Barbier, Galatée (1852) ; les Noces de Jeannette (1853) ; Psyché (1856) ; les Noces de Figaro (1858) ; le Pardon de Ploèrmel (1859) ; la Statue (1861), etc.

CAUMONT (Arcisse de), antiquaire français, né à Bayeux on 1802, m. en 1873 ; a consacré sa vie à des travaux d’histoire naturelle et d’archéologie, parmi lesquels on distingue une Hist. de l’art dans l’ouest de la France jusqu’au seizième siècle, 6 vol. in-8 (1831-40), et une Statistique monumentale du Calvados, 3 vol. in-8 (1847-58). Il était correspondant de l'Institut ; il a fondé plusieurs sociétés savantes, ainsi que les Congrès scientifiques de province, dont la première session eut lieu à Caen en 1834, et qui se tiennent successivement dans toutes les grandes villes de France.

CHAIX D’EST-ANGE (Victor-Charles), avocat et homme politique français, né à Reims en 1800, m. en 1877 ; se fit connaître, sous la Restauration, dans des affaires politiques, et sous Louis-Philippe dans plusieurs procès à sensation (Donon-Cadot, Pescatore, etc.) ; fut député sous la monarchie de juillet, et, sous l’Empire, procureur général près la Cour de Paris, conseiller d’État et sénateur.

CHANGARNIER (Nic.-Anne-Théodule), général français, né à Autun en 1793, m. en 1817; entra dans la carrière militaire sous la Restauration, fit partie des gardes du corps, puis de la garde royale ; se signala en Afrique, sous la monarchie de Juillet par son intrépidité et son énergie, et devint général de division en 1843 ; fut nommé représentant de la Seine à la Constituante de 1848 ; fut pendant deux ans commandant supérieur de la garde nationale de Paris, sous le général Cavaignac et sous la présidence de L. Napoléon, qui ajouta à son commandement celui de l’armée de Paris ; se signala dans ce poste et à la Chambre par son énergie à soutenir l’ordre et par son antipathie contre le gouvernement républicain ; refusa cependant de s’associer aux projets de restauration de l’Empire, fut dépouillé de son double commandement ; fut arrêté au coup d’État du 2 décembre 1851, conduit à Mazas, et éloigné de France par le décret du 9 janvier 1852. Après avoir séjourné quelques années en Belgique, il revint en France, mais resta sous l’Empire dans la vie privée. Dans la guerre de 1810, il reprit du service et assista aux combats qui se livrèrent autour de Metz. En 187l il fut nommé par trois départements député à l'Assemblée nationale, et y siégea au centre droit.

CHASLES (Vict. Philarète), littérateur français, né à Mainvilliers (Eure-et-Loir) en 1798, m. en 1873 ; fut d’abord compositeur d'imprimerie, puis secrétaire et bientôt collaborateur de M. Jouy ; se fit remarquer dès 1827 par son Tableau de la litt. du XVIe siècle, pour lequel il partagea le prix d’éloq. de l’Académie française avec S.-M. Girardin ; et, depuis, écrivit pour le Journal des Débats et diverses revues un grand nombre d’articles, dont il forma, sous le titre d’Études de littérature comparée (1847-64), une série de volumes estimés pour la vivacité originale du style et la fécondité des aperçus : Études sur l’antiquité ; Études sur le moyen âge ; Études sur l’Espagne ; Études sur la littérature et les mœurs de l’Angleterre au XVIIIe et au XIXe siècle ; Études sur Shakespeare, Marie Stuart et l’Arétin ; Études sur l’Allemagne ; Voyage d’un critique à travers la vie et les livres. Il était conservateur à la bibliothèque Mazarine depuis 1837, et, depuis 1841, professeur de langues et littératures étrangères de l’Europe moderne au Collége de France.

CHEVÉ (Émile), professeur de musique français, né à Douarnenez (Finistère) vers 1800, m. en 1864 ; est l’un des fondateurs de la Société chorale Galin-Paris-Chevé. Voyez GALIN, dans le corps du Dictionnaire.

CLARENDON (Georges-William-Frédéric Villiers), baron d’Hyde, lord), homme politique et patr d’Angleterre, né à Londres en 1800, mort en 1870. Élève de l’université d'Oxford, il débuta dans la diplomatie en 1820 comme attaché d’ambassade à Saint-Pétersbourg ; négocia un traité de commerce avec la France (1831) ; devînt ministre plénipotentiaire à Madrid (1833), et y déploya une grande habileté pendant la guerre de la succession de Ferdinand VII ; devint membre du conseil privé (1840), ministre du commerce (1846), lord lieutenant d’Irlande (1847). Un instant écarté du pouvoir, comme whig, sous le ministère de lord Derby (1852), il rentra aux affaires en 1853 comme ministre des affaires étrangères, signa le traité de Paris comme ministre plénipotentiaire, et remplit encore diverses missions diplomatiques, notamment en 1868, auprès du pape et du roi d’Italie, pour affirmer la neutralité de l’Angleterre en cas de guerre.

COGNIARD (Théodore), vaudevilliste français, né en 1806, m. en 1872 ; a dirigé pendant sept ans la théâtre Saint-Marun, avec son frère Hippolyte Cogniard ; a donné en collaboration avec lui (de 1831 à 1871) un grand nombre de pièces (drames, vaudevilles et féeries), dont quelques-unes ont obtenu un succès de vogue : Pauvre Jacques, Bobèche et Galimafré, la Fille de l’air, la Chatte blanche, le Pied de mouton, etc.

CORMENIN (Louis-Marie de LA HAYE, vicomte de), publiciste et jurisconsulte français, né à Paris en 1788, m. en 1868 ; entra comme auditeur au conseil d’État en 1810 ; fut maître des requêtes en 1815, et se fit dès lors remarquer par des publications sur le droit administratif ; devint en 1828 député d’Orléans et siégea dans les rangs de l’opposition dynastique ; protesta en juillet 1830 contre l’élévation au trône de la maison d’Orléans ; siégea depuis à la gauche et publia, sous le pseudonyme de Timon, une série de pamphlets politiques qui rendirent son nom populaire ; fut appelé, en 1848, à la Constituante ; prit une part active à la rédaction de la Constitution ; rentra au conseil d’État, où il fut maintenu par l’Empire ; fut, en 1855, nommé par décret membre de l’Académie des sciences morales et politiques ; a laissé, outre ses pamphlets, des Études sur les orateurs parlementaires (1838, souvent réimprimées), un Cours de droit administratif (1840, 2 vol. in-8), les Entretiens de village (1846), etc. — M. de Cormenin a fondé plusieurs établissements de charité et d’instruction.

CORNELIUS (Pierre de), peintre allemand, né à Dusseldorf en 1787, m. en 1867 ; se fit connaître de bonne heure par des peintures à la coupole de l’église de Neuss, et par des compositions sur le Faust de Gœthe, sur les Nibelungen ; alla compléter ses études à Rome (1810-1817) ; puis revint en Allemagne, où il restaura l’art négligé de la peinture à fresque (décoration de la glyptothèque et de la pinacothèque de Munich, de l’église Saint-Louis, à Munich, de Campo-Santo, à Berlin, etc.) . On cite parmi ses élèves M. Kaulbach. Il était membre étranger de l’Académie des beaux-arts.

COROT (J.-B.-Camille), peintre français, né à Paris en 1796, mort en 1875 ; fut élève de Michallon et de V. Bertin, alla étudier seul plusieurs années en Italie. Dès 1827, il se fit connaître par des compositions où l’on remarqua un vif sentiment poétique, et parmi lesquelles on distingue surtout ses paysages (Danse des nymphes, Soleil levant, Soleil couchant, Idylle, le Lac, Souvenir d’Italie, etc.).

COSTE (J.-J.-Victor), naturaliste français, né en 1807 à Castres (Hérault), m. en 1873 ; se voua de bonne heure à l’étude de l’embryogénie, fut professeur au Muséum et au Collége de France, et membre de l’Académie des sciences. Ses principaux ouvrages sont le cours d’Embryogénie comparée (1837) et l’Hist. générale et particulière du développement des êtres organisés (1847, 2 vol. in-4). M. Coste est le vulgarisateur de la pisciculture, c’est-à -dire de l'art de multiplier les poissons au moyen de la fécondation artificielle ; il est le promoteur de la piscine moderne de Huningue qui, en deux ans, fournit 600 000 saumons ou truites pour l’ensemencement du Rhône. Il avait été nommé en 1862 inspecteur général de la pêche fluviale et de la pêche côtière maritime.

COURBET (Gustave), peintre français, né à Ornans (Doubs) en 1819, m. en 1877 ; était destiné par sa famille à la carrière du droit, mais se livra avec passion à la peinture, qu’il apprit presque sans maître ; eut pour la première fois un tableau exposé au Salon de 1844 ; affecta, à partir de 1848, de se poser en chef d’école, opposant au culte de l’idéal le réalisme souvent le plus vulgaire, et portant une sorte de défi à la tradition classique par des toiles comme l’Après-dînée à Ornans, l’Enterrement d’Ornans, les Baigneuses, les Demoiselles des bords de la Seine, etc. (1849-1857), où il semblait avoir le parti pris de rechercher les types les plus laids ; mais en même temps montra des qualités de premier ordre dans des tableaux où il n’était pas égaré par son système (les Casseurs de pierres, les Chevreuils, un Combat de cerfs, Biche forcée à la neige, etc.). Dans les dernières années de l’Empire, il se fit remarquer par l’exaltation de ses opinions politiques, devint en mars 1871 membre de la Commune, et provoqua le décret qui ordonnait « le déboulonnement de la colonne Vendôme ; passa en conseil de guerre, fut rendu responsable seulement de cet acte de vandalisme, et fut condamné à six mois d’emprisonnement et aux frais. C’est la vanité, qui a fait de Courbet un émeutier comme elle l’a empêché de devenir, ainsi qu’il l’aurait pu, un très-grand peintre.

COURT (Joseph-Désiré), peintre d’histoire français, né à Rouen en 1798, m. en 1865, fut élève de Gros. On distingue, parmi ses toiles, la Mort de César (au Louvre).

COUSIN (Victor), philosophe et écrivain français, né à Paris en 1792, m. en 1867 ; fit de brillantes études au lycée Charlemagne ; fut élève de l’École normale dès sa fondation, y professa lui-même, à sa sortie, la littérature grecque, puis la philosophie ; suppléa de 1815 à 1821, à la Faculté des lettres de Paris, son ancien maitre Royer-Collard, qu’il suivit d’abord docilement dans les voies de la philosophie écossaise, mais dont bientôt, à la suite d’un voyage en Allemagne, il abandonna les traces pour initier son auditoire à la métaphysique de Kant, de Fichte, de Schelling et de Hegel ; fut lors de la réaction de 1822, suspendu de ses fonctions à la Faculté, et, par suite du licenciement de l’École normale, privé de tout emploi public ; devint précepteur d’un fils du maréchal Lannes, et entreprit d’importantes publications philosophiques : édition des Œuvres inédites de Proclus (texte grec avec commentaire latin, 1820-27, 6 vol. in-8 ; 2e édit., 1865, 1 vol. in-4), et des Œuvres complètes de Descartes (1826, 11 vol. in-8) ; traduction des Œuvres complètes de Platon (1825-40, 13 vol. in-8). Après un second voyage en Allemagne, pendant lequel il fut, comme suspect de carbonarisme, arrêté à Dresde et emprisonné six mois à Berlin, il fut rétabli par le ministère Martignac (1827) dans la chaire de la Faculté des lettres, où il enseigna avec le plus grand éclat à côté de MM. Villemain et Guizot. Comblé d’honneurs après 1830, nommé coup sur coup conseiller d’État, pair de France, directeur de l’École normale, membre du conseil royal de l’Université, professeur titulaire à la Faculté des lettres (où il se fit dès lors suppléer), et en même temps élu membre de l’Académie française (1830) et de l’Académie des sciences morales et politiques à sa création (1832), il fut un instant ministre de l’instruction publique dans le cabinet Thiers (1840). Avant comme après ce ministère, dont il a résumé les actes dans la Revue des Deux-Mondes (Huit mois de ministère), il fut, en qualité de conseiller de l'Université, le chef unique de l’enseignement philosophique en France, qu’il dirigea dans le sens de l’éclectisme et du spiritualisme, dont il prit à tâche d’écarter les opinions dissidentes, et qu’il défendit de sa parole et de sa plume contre les attaques du parti ultra-catholique (Défense de l’Université et de la Philosophie, 1844, in-8, etc.). C’est alors qu’il fit ses principales publications philosophiques, la plupart simples reproductions ou remaniements de ses anciens cours, qui donnèrent une vive impulsion aux recherches savantes, et qui forment un précieux répertoire d’expositions et d’observations relatives aux divers systèmes de philosophie, mais d'où il est difficile de tirer un corps de doctrines bien arrêté : Cours de l’histoire de la philosophie au XVIIIe siècle (1840, 3 vol. in-8) ; Cours d’histoire de la philosophie moderne (1841, in-8) ; Cours d’histoire de la philosophie morale (ce dernier ouvrage a été publié par MM. Vacherot et Danton, 5 vol. in-8) ; Leçons sur la philosophie de Kant (1842, in-8) ; de la Métaphysique d’Aristote (1835), OEuvres inédites d’Abélard (1836) ; Fragments philosophiques, etc., etc. A la même époque appartiennent quelques publications critiques ou pédagogiques : des Pensées de Pascal (1842), où il appelait l’attention sur les altérations du texte des Pensées ; Jacqueline Pascal (1842) ; de l’instruction publique en Hollande (1837) et en Allemagne (1840). Écarté de la carrière publique en 1848, il se borna à prendre part aux publications moralisatrices demandées par le gén. Cavaignac à l’Académie des sciences morales et politiques, et publia Justice et Charité, et une édition populaire de la Profession de foi du vicaire savoyard. Il perdit, en 1852, la direction de l’enseignement de la philosophie en France, par la suppression de la section permanente du conseil de l’instruction publique, et passa dans la retraite ses dernières années, qu’il consacra à de nouveaux remaniements de ses anciennes leçons (parmi lesquels on distingua son volume du Vrai, au Beau et du Bien (1853), et son Hist. générale de la philosophie depuis les temps les plus anciens jusque la fin du XVIIIe siècle (1863, 1 vol. in-8), et à des publications des plus intéressantes pour l’histoire des lettres et de la société au XVIIe siècle : Mme de Longueville (1863 et suiv.) ; Mme de Sablé (1854) ; Mme de Chevreuse, Mme de Hautefort (1856) ; la Société française au XVIIe siècle d’après le grand Cyrus (1858) ; la Jeunesse de Mazarin (1865).

COUZA (Alex.-Jean), homme politique roumain, né à Galatz (Moldavie) en 1820, m. en 1873 ; appartenait à la petite noblesse des Principautés danubiennes ; était colonel dans la milice moldave, lorsque, par suite de la Convention de Paris du 19 août 1858, la Moldavie et la Valachie furent constituées en Principautés unies ; fut choisi pour hospodar à la fois par ces deux principautés ; obtint de la Porte, avec la ratification de son élection, un firman qui complétait leur union ; mais ne sut pas contenir les partis, et, après une longue série de crises ministérielles, malgré un plébiscite qui lui avait été favorable (611 094 voix sur 682 621), fut renversé, et remplacé par Charles Ier de Hohenzollern, prince de Roumanie (20 fév. 1866).

CRUVEILHIER (Jean), médecin français, né à Limoges en 1791, mort en 1874 ; fut élève de Dupuytren, médecin des hôpitaux, professeur à la Faculté de médecine de Parts. Son grand ouvrage sur l’Anatomie pathologique du corps humain (1835) le fit nommer membre de l’Académie des sciences.

DARBOY (Georges), prélat et écrivain français, né à Fay-Billot (Haute-Marne) en 1813, de parents commerçants ; fut ordonné prêtre en 1836, et, après trois ans de vicariat à Saint-Dizier, devint professeur de philosophie, puis de théologie au grand séminaire de Langres, dont il avait été un des élèves les plus distingués (1841). Nommé aumônier du collège Henri IV par Mgr Affre, puis chanoine de Notre-Dame, il fut chargé par Mgr Sibour d’inspecter l’enseignement religieux dans les lycées, et reçut le titre de vicaire général honoraire. Il devint en 1865 vicaire général titulaire, puis (1859) évêque de Nancy, enfin (1863) archevêque de Paris ; il fut nommé en 1864 grand aumônier de l’empereur et sénateur. Après l’insurrection du 18 mars 1871, il fut arrêté par ordre de la Commune, retenu comme otage, et, après deux mois passés au secret, fut fusillé, le 24 mai, avec le président Bonjean et plusieurs ecclésiastiques. — Prédicateur éminent, écrivain distingué, Mgr Darboy a laissé une traduction, avec Introduction et notes, de saint Denys l’Aréopagite, et divers ouvrages de littérature et de piété : les Femmes de la Bible (1848), les Saintes femmes (1850), la Vie de saint Thomas Becket (1860). — Sous le titre de Mgr Darboy, Esquisses familières (in-12, 1872), M. Alexis Pierron a donné sur ce prélat d’intéressants détails biographiques.

DASH (Cisterne de Courtiras, dite comtesse), romancière française, née à Paris en 1805. m. en 1872. Après de grands revers de fortune, elle chercha et trouva des ressources dans le travail littéraire. Elle publia, sous le pseudonyme de comtesse Dash, auquel elle donna quelque célébrité, un nombre considérable de romans d’un style facile, et dont les sujets sont en général empruntés aux mœurs du grand monde : le Jeu de la reine, la Bien-aimée du Sacré-Cœur, la Belle aux yeux d’or, etc., etc.

DAUBIGNY (Ch.-François), peintre et graveur français, né à Paris en 1817, m. en 1878 ; fut élève de Paul Delaroche et de son père, qui était peintre paysagiste, s’adonna, comme son père, à la peinture de paysage, et, depuis 1838, se fit remarquer à toutes les expositions par des toiles qui placent son nom à côté de ceux de Corot et de Théod. Rousseau.

DAUMAS (Eugène), général français, né en 1803, m. en 1871 ; fit toute sa carrière militaire en Algérie, fut le principal organisateur des bureaux arabes, et devint en 1850 directeur des affaires de l’Algérie au ministère de la guerre, en 1853 général de division, et en 1857 sénateur. Il a publié sur l’Algérie plusieurs ouvrages estimé : la Société arabe (1845) ; le Sahara algérien (1845) ; Mœurs et coutumes de l’Algérie (1857) ; la Kabylie (1857) ; les Chevaux du Sahara (1858).

DAVID (Félicien), compositeur français, né à Cadenet (Vaucluse) en 1810, m. en 1877 ; fut d’abord clerc d’avoué, puis chef d’orchestre au théâtre d’Aix ; vint à Paris en 1830 et attira l’attention de Chérubini ; entra au Conservatoire ; se fit saint-simonien, mit en musique tous les chœurs destinés à être chantés par les adeptes de la religion nouvelle, et visita l’Orient avec le P. Enfantin. À son retour il publia un recueil de Mélodies orientales (1835), qui passèrent presque inaperçues ; mais son ode-symphonie du Désert eut une vogue européenne. Il fut moins heureux avec son Moïse sur le Sinaï et son Christophe Colomb, mais il retrouva le succès avec sa composition des Hirondelles, son opéra d’Herculanum (1859) et ses opéras-comiques de la Perle du Brésil (1851) et de Lalla-Roukh (1862). Il était membre de l’Académie des beaux-arts.

DEAK (François), h. politique hongrois, né en 1803, m. en 1876 ; fut d’abord avocat à Zala, entra dans la vie politique en 1832 comme député de Pesth à la Diète de Presbourg, et devint bientôt le chef de l’opposition hongroise contre le centralisme autrichien ; essaya en 1840 de faire prévaloir des idées de conciliation entre la Diète et l’Empereur ; devint, à la révolution de mars 1848, ministre de la justice dans le cabinet du comte Bathyani, mais se retira lors de l’arrivée de Kossuth au pouvoir ; fut un des négociateurs envoyés par la Diète, à la fin de 1849, auprès du prince Windischgraetz, et, n’ayant pu obtenir aucune concession, se tint éloigné des affaires publiques jusqu’en 1840. Lorsque une Constitution fut donnée à son pays (1860), il redevint député à la Diète et demanda la création d’un ministère hongrois en résidence à Pesth ; enfin, lorsque M. de Beust, en créant le dualisme austro-hongrois (1867), eut donné satisfaction au parti modéré, il se rallia au Gouvernement et le soutint dans les principales questions politiques.

DÉJAZET (Virginie), actrice française, née en 1798, m. en 1875 ; monta sur les planches dès l’âge de cinq ans ; joua d’abord loi rôles d’enfants, puis, sur les scènes du Vaudeville, des Variétés et du Gymnase, obtint de très-grands succès dans les rôles masculins, dont elle se fit une spécialité, et où elle était remarquable de désinvolture et de vivacité. Elle excellait encore à chanter les couplets. Jusque dans sa vieillesse, elle resta au théâtre, y parut toujours jeune et sémillante, et ne cessa d’y être accueillie avec faveur. De 1860 à 1865, elle donna ses dernières représentations suivies au Théâtre Déjazet, pour lequel son fils (Eugène Déjazet) composa un certain nombre d’opérettes. DELAUNAY (Ch.-Eugène), mathématicien français, né à Lusigny (Aube) en 1816, m. en 1872 ; fut élève, puis professeur à l'École polytechnique, directeur de l’Observatoire et membre de l’Institut. Il a publié un Cours élémentaire d’astronomie (1855) ; un Traité de mécanique rationnelle (1856), et, dans les Comptes rendus de l’Académie des sciences, une Nouvelle théorie du mouvement de la lune (1846).

DELESCLUSE (L.-Charles), journaliste français, né à Dreux en 1809 ; fit partie, dès 1830, des sociétés politiques républicaines ; fut, après le 24 février 1848, nommé commissaire général dans le Nord et le Pas-de-Calais ; encourut plusieurs condamnations pour délits de presse, et fut envoyé à Cayenne en 1858 ; rentra en France en 1859, à la faveur de l’amnistie ; fonda en 1868 le Réveil, où il soutenait la cause de la révolution démocratique et sociale, qui fut supprimé en 1869, reparut en 1870 et fut supprimé de nouveau en janv. 1871. Arrêté à l’occasion de l’émeute du 31 oct. 1870, il fut mis en liberté en janv. 1871, et nommé maire du XIVe arrondissement, puis député de la Seine ; devint, après l’insurrection du 18 mars, un des chefs de la Commune, membre du Comité de salut public, ministre de la guerre ; passe pour avoir donné des ordres en vue de l’exécution des otages et des incendies ; et fut tué sur les barricades lors de l’entrée des troupes à Paris (25 mai 1871).

DENFERT·ROCHEREAU, officier français, né à Saint-Maixent en 1823, m. en 1878 ; était élève de l’École polytechnique, devint lieutenant-colonel en Crimée, et s’illustra par l’héroïque défense de Belfort (l870-1811) ; fut élu député en 1871, et siégea depuis dans les assemblées comme membre de la gauche.

DESCHAMPS (Émile), littérateur et poëte français, né à Bourges en 1791, mort en 1871, partagea sa vie entre l’administration (il était employé au ministère des finances) et la littérature. Il fut, en 1828, un des champions de l'École romantique, composa quelques jolis vers (Études françaises et étrangères, 1829, etc.), et traduisit en vers Roméo et Juliette (1839) et Macbeth (1844). Un grand nombre de ses poésies ont été mises en musique par les compositeurs les plus célèbres. Il a écrit dans divers Recueils périodiques un grand nombre d’articles littéraires (critique ou nouvelles). — Son frère, Antony Deschamps (né à Paris en 1800, mort en 1871), écrivit aussi en vers et en prose, mais avec moins de fécondité et de succès. Son œuvre principale est une traduction de la Divine Comédie (1829).

DIDOT (Ambroise-Firmin) imprimeur et érudit français, descendant d’une illustre famille d’imprimeurs (voyez le Dictionnaire), né à Paris en 1790, m. en 1876 ; voyagea en Grèce et en Orient de 1815 à 1818 ; s’occupa, à son retour, à la fois de philologie grecque et de typographie ; succéda en 1827 à son père dans la direction de sa grande maison de papeterie, d’imprimerie et de librairie, à laquelle il donna un développement nouveau, et d’où sont sorties des publications importantes (Bibliothèque grecque-latine, Thesaurus linguæ græcæ, Univers pittoresque, Biographie générale, etc.). Il a personnellement publié de savants travaux, qui lui ont valu le titre de membre libre de l’Académie des inscriptions : Traduction d’Anacréon et de Thucydide ; Essai sur la typographie ; les Estienne ; la Vie et les Œuvres du sire de Joinville ; Observations sur l’orthographe française ; Alde Manuce et l’hellénisme à Venise, etc. Il fut de plus membre de la Chambre du commerce, du jury de plusieurs expositions et du Conseil municipal de Paris (sous l’Empire). Il avait réuni une riche collection de livres rares, de manuscrits et d’estampes, dont il a donné une idée dans son étude sur le Missel de Juvénal des Ursins, son Catalogue de sa bibliothèque (inachevé) ; et son Essai sur Jean Cousin.

DICKENS (Charles), célèbre romancier anglais, né à Portsmouth en 1812, mort en 1870. Il débuta dans les lettres comme collaborateur du Morning Chronicle ; s'y fit remarquer par des esquisses littéraires signées Boy ; publia en 1828 Olivier Twist et en 1837 le roman de Pickwick, qui commença sa réputation et qui est resté un de ses meilleurs ouvrages. Il donna successivement : Nicolas Nickleby (1839), Barnabé Rudge (1841), le Grillon du foyer (1845), Dombey (1847), David Copperfield (1850), Bleak House (1852), la Petite Dorrit (1856), le Mystère d’Edwin-Rood (1870). Tous ces romans furent traduits en plusieurs langues et fort répandus : ils sont remarquables par un talent d’observation minutieuse et satirique, par l’entrain et la gaieté de la narration. Les mêmes qualités distinguent deux relations qu’il a données de ses voyages : Circulation aux États-Unis (1842) ; Scènes d’Italie (1848).

DUBNER (Frédéric), philologue, né en Saxe-Gotha en 1812, m. en 1867 ; fut d’abord professeur à Gotha et vint dès 1832 se fixer à Paris, où il prit une part active à tous les grands travaux de la librairie Firmin Didot (Thesaurus linguæ græcæ, Collection grecque-latine) ; a donné de bonnes éditions d’auteurs classiques, parmi lesquelles on distingue les Œuvres morales de Plutarque, les Scholies d’Aristophane, Saint Jean Chrysostome, l’Anthologie, Jules César, etc., ainsi qu’une Grammaire élémentaire de la langue grecque (1855).

DUBUFE (Claude-Marie), peintre français, né à Paris en 1790, m. en 1864, fut élève de David, composa des tableaux d’histoire, des allégories, des tableaux de genre, mais s’est fait un nom surtout pour les portraits. — Son fils, Édouard Dubufe, élève de son père et de P. Delaroche, a également obtenu une grande vogue comme peintre de portraits.

DUCHATEL (Charles Tanneguy, comte), homme politique, né à Paris en 1803, m. en 1867 ; fut successivement conseiller d’État (1830), député (1833), puis ministre du commerce (1834), des finances ), vice-président de la Chambre (1837), et, comme ministre de l’intérieur, fut de 1840 au 23 févr. 1848 l’un des principaux soutiens de la politique représentée par M. Guizot. Il était membre de l’Académie des sciences morales et politiques.

DUMAS (Alexandre), écrivain français, né en 1803 à Villers-Cotterets, mort en 1870. Petit-fils du marquis de la Pailletterie, fils du général républicain Davy Dumas (voyez le Dictionnaire) et de la négresse Tiennette, il vint de bonne heure chercher fortune à Paris : il entra, par la protection du général Foy, chez le duc d’Orléans en qualité de commis du secrétariat, débuta en 1826 dans la carrière des lettres par un volume de Nouvelles, et dès 1827 se mit à écrire pour le théâtre, où il fut un des promoteurs des réformes de la nouvelle école littéraire. Son drame de Henri III obtint un éclatant succès (1829), et le duc d’Orléans, le lendemain de la première représentation, le nomma son bibliothécaire. Après la révolution de 1830, il fut décoré, et pendant tout le règne de Louis-Philippe fut en grande faveur à la cour. C’est l’époque la plus brillante de sa vie et celle de ses plus grands succès. Il donna successivement au théâtre, soit seul, soit avec divers collaborateurs : Antony, drame (1831) ; la Tour de Nesle, drame (1832) ; Angèle, drame (1833) ; Catherine Howard, drame (1834) ; Kean ou Désordre et génie, drame (1836) ; Caligula, drame (1837) ; Paul Junes, comédie (1838) ; Mademoiselle de Belle-Isle, comédie (1839) ; un Mariage sous Louis XV, comédie (1841) ; les Demoiselles de Saint-Cyr, comédie (1843). Son répertoire devint tellement abondant qu’il créa en 1846 un théâtre tout exprès pour la représentation de ses pièces, le Théâtre-Historique. En même temps, sa verve intarissable fournissait aux journaux ou revues des romans de fantaisie ou d’histoire qui se succédaient en feuilletons ou en articles, étaient toujours accueillis avec une faveur empressée, et le plus souvent, après avoir eu un succès de vogue à la lecture, en obtenaient tout autant à la scène. Les principaux sont : les Trois Mousquetaires (1844) ; Vingt ans après (1845) ; le Vicomte de Bragelonne (1847) ; le Comte de Monte-Cristo (1841-1845) ; la Reine Margot (1845) ; le Chevalier de Maison-Rouge (1847) ; le Chevalier d’Harmental (1849) ; la Dame de Montsoreau (1850) ; les Louves de Machecoul, etc., etc. En 1848, Alexandre Dumas essaya de jouer un rôle politique ; en 1852, il passa en Belgique après le coup d’État ; en 1860, il partit pour l’Italie, où il se fit le compagnon et l’historiographe de Garibaldi, et devint conservateur des musées napolitains. De retour en France, il recommença à publier des romans, qui n’eurent pas le même succès que les précédents : les Mohicans de Paris, Isaac Laquedem, etc. Il voulut aussi se faire journaliste, et fonda plusieurs journaux qui ne vécurent pas. Il a encore publié, à diverses époques, des Impressions de voyage (1833-41), qui comptent parmi ses meilleurs ouvrages, des livres d'histoire, enfin des causeries, des Mémoires (1852), où la personnalité de l’auteur est mise en relief avec une complaisance souvent excessive. – Peu d’écrivains ont été aussi heureusement doués qu’Alexandre Dumas : imagination, originalité, vivacité d’esprit, facilité et souplesse de style, art prodigieux pour arranger les faits en roman ou en drame, entente du dialogue et de la mise en scène, il réunissait plus de qualités qu’il n’en faut pour faire un grand écrivain. Mais tout entier aux succès du moment, il ne prit jamais le temps d’élaborer des œuvres durables : pendant trente ans de sa vie, il multiplia presque coup sur coup les productions de tout genre avec une fécondité qui paraissait inépuisable, et qui même fit douter que tous les ouvrages publiés sous son nom lui appartinssent : il eut des collaborateurs dont quelques-uns revendiquèrent avec éclat une partie du mérite de plusieurs de ses œuvres ; mais ce qui prouve que la part d’Alexandre Dumas était toujours considérable, même dans ces travaux en commun, c’est qu’aucun de ses collaborateurs, travaillant seul, n’a jamais réussi au même degré. Parmi les œuvres hâtives qui sont sorties de sa plume, soit drames, soit romans, plusieurs resteront, parce qu’elles sont vigoureuses, vivantes et spirituelles, et parce que nul écrivain n’a su, plus qu’Alexandre Dumas, amuser et captiver son lecteur.

DUPIN (André-Marie-J.-J.), dit DUPIN AÎNÉ, jurisconsulte et magistrat français, né à Varzy (Nièvre) en 1783, m. en 1865 ; se distingua de bonne heure par son ardeur au travail, et se fit promptement au barreau une réputation par son savoir, par sa lucidité d’exposition, par la vivacité originale de sa parole ; les causes politiques qu’il plaida sous la Restauration (défense du maréchal Ney, de Béranger, de Jay et Jouy, etc.) le rendirent populaire, et le firent élire en 1827 membre de la Chambre des députés, où il siégea au centre gauche. Mêlé dès lors d’une manière continue aux affaires publiques, sans abandonner le barreau, il fit une vive opposition au ministère Polignac, prit une part active à l’élection de Louis-Philippe comme roi des Français et fut le principal rédacteur de la nouvelle Charte ; devint procureur général à la Cour de cassation ; fut, de 1832 à 1840, président de la Chambre des députés, où il soutint constamment le nouveau pouvoir avec fidélité et indépendance ; essaya vainement aux journées de février 1848, de faire voter par la Chambre la régence de la duchesse d’Orléans ; fut élu représentant à la Constituante, participa aux travaux du comité de législation et de la commission de Constitution, appuya toutes les mesures propres à ramener l'ordre dans le pays, et soutint quelque temps la politique du prince-président ; mais protesta, comme président de la Législative, contre le coup d’État du 2 décembre 1851, et donna sa démission de procureur général de la Cour de cassation à la suite du décret qui confisquait les biens de la famille d’Orléans. Après une retraite de six années, qu’il consacra à l’agriculture et à la publication de ses Mémoires (4 vol. in~8, 1855-63), il fut renommé procureur général de la Cour de cassation, et fut appelé au Sénat ; dans ce double poste, malgré sa vieillesse, il fit encore preuve d’activité et de talent oratoire, et sur les questions religieuses défendit avec ardeur les opinions gallicanes qu’il avait professées dès sa jeunesse. Il était membre de l’Académie française (1831) et de l’Académie des sciences morales et politiques (1832). Il a été publié de M. Dupin, outre ses Mémoires, quelques-uns de ses Plaidoyers (1823), de ses Réquisitoires (1852), ses Mercuriales (1846) ses Travaux académiques (1862), et un grand nombre d’ouvrages de jurisprudence dont les principaux sont : Traité des successions ab intestat (1804) ; Lois commerciales (1820) ; Lois de procédure, Lois criminelles (1821, 2 vol.); Lois forestières (1822) ; Lois des communes (1823) ; Manuel des étudiants en droit (1824) ; les Libertés de l’Église gallicane (1824); Traité des apanages (1835); Manuel du droit public ecclésiastique français (4e édit. 1845) ; le Procès de Jésus-Christ (1828) ou Jésus devant Caïphe et Pilate (1855). – De ses deux frères, l’un (Philippe), né en 1795, m. en 1846, a été un des avocats les plus brillants du barreau de Paris, et deux fois bâtonnier de l’ordre ; l'autre (Charles Dupin), né en 1784, m. en 1873, a été fait baron par Louis-Philippe, sénateur par Napoléon III. Ancien élève de l’École polytechnique, il est devenu membre de l’Académie des sciences morales et politiques, et s’est fait un nom comme économiste et statisticien, par ses travaux, dont les principaux sont ; Voyages dans la Grande-Bretagne, 6 vol. in-4o, 1816-21 ; Forces productives et commerciales de la France (1827) ; Harmonie des intérêts sociaux (1833), etc. ·

DUPONT (Pierre), chansonnier français, né à Lyon en 1821, mort en 1870. Fils de pauvres artisans de Provins, il fut racheté de la conscription par cette ville, qui lui fournit les moyens d’éditer ses premières œuvres (1842). Ayant obtenu un prix de poésie à l’Académie française, il fut attaché à la rédaction du Dictionnaire. En 1847, il conquit une certaine popularité par sa chanson les Bœufs, et par quelques autres, qui ont une couleur socialiste ; envoyé à Lambessa après le coup d’État du 2 décembre, il fut gracié par l’intervention de quelques amis. Ses chansons et poésies ont été recueillies en un volume in-32 (1851).

DURET (Francisque-Joseph), sculpteur français, né à Paris en 1804, m. en 1865, fils d’un sculpteur, élève de son père et de Bosio, fut membre de l’Académie des beaux-arts, concourut à la décoration de l’hôtel de ville de Paris et du nouveau Louvre. C’est de lui qu’est la fontaine monumentale de la place Saint-Michel.

ÉLIE DE BEAUMONT (J.-B.-Léonce), géologue français, né à Caen (Calvados) en 1798, m. en 1874 ; fut élève de l’École polytechnique et de l’École des mines ; ingénieur des mines (1824), professeur à l'École des mines (1829) et au Collége de France (1832), membre et bientôt (1835) secrétaire perpétuel de l’Académie des sciences, enfin sénateur dès le rétablissement du Sénat par le second Empire. Il a laissé d’importants travaux : sur la métallurgie et la géologie, parmi lesquels on distingue Coup d’œil sur les mines (1824), Voyage métallurgique en Angleterre (1827), de nombreux mémoires insérés dans les Annales des mines et dans les Mémoires de la Société géologique de France. C’est dans sa Notice sur les systèmes des montagnes qu’il expose ses idées sur les soulèvements des chaînes de montagnes, leur direction, leurs rapports entre eux et la succession des formations sédimentaires : après avoir ainsi posé les bases d’une théorie nouvelle de géologie stratigraphique, il la défendit pendant les dernières années de sa vie contre toutes les attaques dont elle fut l’objet. Enfin, avec M.M. Brochant de Villiers et Dufrénoy, il prit une part considérable à l’établissement de la Carte géologique de France, ouvrage monumental qui a plus de sept mètres de largeur, et dont le premier fragment a paru à l’Exposition universelle de 1855.

ENFANTIN (Barthélemy-Prosper), l’un des fondateurs du saint-simonisme, né à Paris en 1796, m. en 1864 ; fut d’abord voyageur de commerce ; se lia avec Saint-Simon, et, après sa mort (l825), devint un des plus ardents propagateurs de ses doctrines ; fut élu, en 1830, l’un des Pères suprêmes de l’association saint-simonienne, qui fut dissoute, en 1832, par mesure de police ; organisa, la même année, à Ménilmontant, avec le concours de quarante disciples, dont plusieurs se sont fait depuis un nom dans l’industrie et les finances, une nouvelle communauté qui fut également dissoute ; se fit plus tard maître de poste, fut un des membres de la commission scientifique de l’Algérie (1841) et devint, en 1845, directeur du chemin de fer de Lyon. Ses principaux ouvrages sont : Économie politique (1831) ; J !orale (1832) ; Correspondance philosophique, religieuse et politique (1847-49) ; la Vie éternelle (1861). Ses Œuvres ont été publiées par ses disciples, avec celles de Saint-Simon.

FARADAY (Michel), physicien anglais, né en 1794, m. en 1867 ; entra comme préparateur au laboratoire de sir Humfrey Davy à l’Institut royal de Londres (1813), et y succéda à son maître comme professeur de physique et de chimie. Ses principaux travaux sont : Recherches expérimentales sur l’électricité (1855, 3 vol. in-8) ; Mémoire sur les formes qu’affectent les fluides en vibration sur des surfaces élastiques, etc. Célèbre expérimentateur, il a particulièrement étudié l’électricité dans ses rapports avec la lumière et la chaleur, et est arrivé à cette conclusion que ce ne sont que les agents naturels d’une même force variant dans ses effets.

FÉNIANS (Société des), association fondée vers les premières années de ce siècle par des Irlandais émigrés en Amérique, dans le but de soustraire l’Irlande à l’oppression de l’Angleterre. Elle s’est recrutée depuis parmi les partisans des réformes sociales, et compte, dit-on, plus de cent mille adhérents répandus dans le monde entier, particulièrement dans l’Amérique du Nord. A la fin de 1865, à la suite d’une proclamation de la République irlandaise, faite à Philadelphie, une conspiration de Fénians éclata en Irlande ; elle fut réprimée immédiatement de la manière la plus énergique par le gouvernement anglais. On ignore la véritable origine du nom des Fénians : selon les uns, il vient de celui des Phéniciens, qui auraient autrefois peuplé l’Irlande ; selon d’autres, il est tiré du phénix, oiseau qui serait pour cette Société le symbole de la renaissance de l’Irlande.

FERDINAND Ier, ex-empereur d’Autriche, né à Vienne en 1793, du second mariage de l’emp. François Ier avec Marie-Thérèse de Naples ; épousa en 1831 une des filles de Victor-Emmanuel, roi de Sardaigne (la princesse Anne-Caroline) ; monta sur le trône en 1835, continua d’abord la politique de son père, laissa la direction des affaires à son oncle l’archiduc Louis et au prince de Metternich, et donna un grand essor à l’industrie et aux chemin de fer ; puis céda au courant révolutionnaire de 1848, se sépara de M. de Metternich, fit faire un projet de constitution ; enfin, voyant l’inutilité de ses efforts de conciliation, et découragé par deux révoltes successives à Vienne (mai et oct. 1848), abdiqua en faveur de son neveu François-Joseph ler (déc. 1848), et passa le reste de sa vie à Prague sans prendre part aux affaires publiques.

FLOURENS (Marie-Jean-Pierre), physiologiste et écrivain français, né à Maureilhan (Hérault) en 1794, m. en 1867 ; fut docteur en médecine à dix-neuf ans ; collabora à divers recueils scientifiques ; fut chargé par Cuvier de deux cours d’anatomie au Muséum d’hist. nat. au Coll. de France (1832~1835) ; devint membre (1828), puis (1833) secret. perpétuel de l’Acad. des sciences, membre de l’Acad. franç. (1840), député (1837), pair de France (1846-48), membre du Conseil municipal de Paris (1864). Ses principaux ouvrages sont : Recherches expérimentales sur les propriétés et les fonctions du système nerveux dans les animaux vertébrés (1824) ; Examen de la phrénologie (1841) ; Cours de physiologie comparée (1854) ; de la Longévité humaine (1854) ; de la Vie et de l’Intelligence (1841) ; Analyse raisonnée des travaux de G. Cuvier (1841) ; Buffon, ses idées, ses travaux (1844) ; Fontenelle ou la philosophie moderne (1854) ; Examen du livre M. Darwin sur l’origine des espèces (1864), etc. – Un de ses fils, Gustave Flourens (né en 1839), s’est fait un nom comme un fougueux révolutionnaire dès les dernières années du règne de Napoléon III. Il a pris une part active à l’insurrection du 31 octobre 1870, pendant le siége de Paris, et a été tué en avril 1871 à la tête d’une des bandes de la Commune, qu’il conduisait contre l’armée de Versailles.

FORCADE LA ROQUETTE (J.-L.-Victor-Adolphe), homme politique français, né à Paris en 1820, m. en 1874 ; était frère utérin du maréchal de Saint-Arnaud ; débuta comme avocat en 184l ; devint maître des requêtes au conseil d’État lors de la réorganisation de 1852 ; directeur général des forêts en 1857 ; directeur général des douanes et contributions indirectes en 1859 ; fut une année ministre des finances (1860), puis sénateur, vice-président du conseil d’État (1863), ministre de l’agriculture et du commerce (1867) ; enfin fut chargé, en 1868, du portefeuille de l’intérieur qu’il garda après le message de juillet 1869, où était annoncé le retour à la responsabilité ministérielle, et qu’il ne quitta que lors de la formation du ministère Émile Ollivier (janvier 1870). Il rentra dans la vie privée après la chute de l’Empire.

FOREY (Élie-Frédéric), maréchal de France, né à Paris en 1804, m. en 1872 ; prit ses premiers grades en Algérie ; prêta, comme général de brigade, un concours énergique au coup d’État du 2 déc. 1851 ; fut chargé momentanément du commandement des troupes françaises devant Sébastopol (1854) ; se distingua dans la campagne d’Italie, à la tête du premier corps d’armée (1859), et surtout au Mexique, où il gagna le titre de maréchal ; réunit, après la prise de Puebla (17 mai 1863), les pouvoirs civils et militaires, et prépara l’avénement de l’empereur Maximilien ; puis céda le commandement au général Bazaine.

FOUCAULT (Jean-Léon), physicien français, né à Paris en 1819, m. en 1868 ; s’occupa d’abord de médecine, puis de physique et de théories mécaniques pour le Bureau des longitudes, et rendit sensible, par un pendule libre oscillant dans l’espace, le mouvement et la rotation de la terre ; fit plusieurs découvertes relatives au daguerréotype, à la photographie, à la lumière électrique ; obtint pour ces divers travaux la grande médaille décernée par la Société royale de Londres ; fut nommé physicien à l’Observatoire (1855) et membre de l’Académie des sciences (1865). Une partie de ses Mémoires ont été insérés dans les Comptes rendus de l’Académie des sciences ; ses OEuvres étant restées en partie inédites, le ministre de l’instr. publique a chargé une commission de les publier.

FOUDRAS (L.-Aug.-Théodore, marquis de), romancier français, né à Paris en 1810, m. en 1872 ; fut, sous la Restauration, d’abord officier, puis attaché à la cour ; écrivit, après 1830, dans les journaux légitimistes ; publia quelques poésies, et composa de nombreux romans où il peignit assez au naturel la vie du grand monde, celle des gentilshommes campagnards, et les grandes chasses, par exemple : les Gentilshommes d’autrefois, les Viveurs d’autrefois, les Veillées de saint Hubert, les Chevaliers du lansquenet, etc.

FOULD (Achille), financier et ministre français, né à Paris en 1800, m. en 1867 ; fut membre du Conseil général et député des Hautes-Pyrénées (1842), membre de la Constituante (1848) ; puis à plusieurs reprises ministre des finances sous la Présidence et sous l’Empire, et de 1852 à 1857 ministre d’État et de la maison de l’Empereur. Il était sénateur et membre libre de l’Académie des beaux-arts. – Son frère aîné, Benoît Fould (1792-1858), chef de la maison de banque Fould et Cie, fut député de 1834 à 1848.

FROMENTIN (Eugène), peintre et littérateur français, né à la Rochelle en 1820, m. en 1876 ; étudia le paysage sous M. Cabat, puis alla s’inspirer des sites de l’Orient, et particulièrement de l’Algérie, qu’il a excellé à reproduire (les Gorges de la Chiffa, Cavaliers revenant d’une fantasia près d’Alger, Sites algériens, Bivac arabe, Fauconnier arabe, Coup de vent dans les plaines d’Alfa, etc.). Il a laissé quelques mélanges d’archéologie (Visites artistiques), des récits de voyage (Une année dans le Sahel) et un roman de mœurs contemporaines fort distingué (Dominique, 1863).

FUAD-MEHMED-PACHA, homme d’État et littérateur ottoman, né à Constantinople en 1814 d’une famille de poëtes, commença lui-même par faire des vers, puis étudia la médecine, enfin entra au bureau des Interprètes de la Porte, et étudia les langues étrangères, la diplomatie, l’économie politique ; fut attaché comme premier secrétaire à l’ambassade de Chekih-Effendi à Londres (1840) ; rapporta d’Espagne, où il occupa un second poste diplomatique (1844), des travaux politiques et des œuvres littéraires ; fut nommé grand interprète de la Porte (1845), puis grand référendaire du divan (1848) ; fut chargé de missions importantes dans les Principautés danubiennes (1848), à Saint-Pétersbourg (1850) et en Égypte (1852) ; devint ministre des affaires étrangères (1853), membre du conseil du tanzimat et pacha (1854) à la suite d’une insurrection des Grecs d’Épire étouffée par lui ; rentra au ministère des affaires étrangères (1855-60) ; signala son administration par la création de phares et de télégraphes et par la répression de violences exercées contre les chrétiens en Syrie ; et prit part en 1856 au Congrès de Paris ; fut porté au ministère de la guerre qu’il occupa jusqu’à sa mort (1869). — Il a publié une Grammaire ottomane (1852), et fit partie de l’Académie des sciences et belles-lettres de Constantinople dès sa fondation (1851).

GAUTIER (Théophile), écrivain français, né à Tarbes en 1808, m. en 1872. Il se destina d’abord à la peinture, mais y renonça pour cultiver les lettres, et fut un des premiers et des plus ardents champions du romantisme : il publia, d’après cette inspiration, des Poésies (1830), la légende en vers d’Albertus (1832), la Comédie de la mort (1838), Émaux et Camées (1852). li donna aussi plusieurs livrets de ballets (Giselle, 1841 ; la Péri, 1843 ; Sacountala, 1858); des romans dont les principaux sont : les Jeunes France (1833) ; Mademoiselle de Maupin, ouvrage qui fit scandale et dont la Préface semble mettre l’art en dehors et au-dessus de la morale (1835); Fortunio (1838) ; le Capitaine Fracasse (1833) ; des récits de voyage estimés : Tra los Montes (1843) ; Zigzags (1845) ; Italia (1852) ; Constantinople (1854). Enfin il a collaboré à un grand nombre de Revues, et rédigé pendant plus de trente ans, soit à la Presse, soit au Moniteur, des feuilletons consacrés à la critique d’art ou de théâtre, qui se distinguaient à la fois par la justesse et la bienveillance des appréciations : quelques-uns ont été réunis sous le titre d’Histoire de la Littérature dramatique (6 vol. in-12). – Quelques réserves que l’on doive faire, au point de vue du goût et de la morale, sur certaines œuvres de Th. Gautier, il est impossible de ne pas reconnaître dans toutes un véritable amour de l’art, un vif sentiment de la beauté littéraire et artistique, une riche imagination, et un style d’un éclatant coloris.

GAVARNI (Paul CHEVALIER, dit), dessinateur français, né à Paris en 1801, m. en 1866, a publié dans le Charivari (1836-50) une série de compositions de lithographiées su la vie de Paris et celle de Londres, accompagnées d’une légende satirique, qui eurent une immense vogue et donnèrent à son nom une grande popularité. Il a, de plus, illustré le Juif errant d’E. Sue, les Contes d’Hoffmann, etc. Ses Œuvres choisies ont paru avec un texte de J. Janin, Balzac et Th. Gautier (4 vol. in-8, 1845). MM. de Goncourt ont donné une étude biographique et critique sur Gavarni, 1871.

GEORGES (Marguerite-Georges WEYMER, dite Mlle), actrice française, née vers 1786 à Amiens, m. en 1866 ; célèbre par sa beauté et son talent dramatique, reçut des leçons de Mlle Raucourt, et joua les reines de tragédie au Théâtre-Français avec un talent que faisait ressortir la majesté de sa taille ; fut, en 1812, attachée au théâtre de St-Pétersbourg, et donna une suite de représentations en Allemagne devant Alexandre et Napoléon ; abandonna l’ancien répertoire tragique pour le drame nouveau, et obtint de 1830 à 1840 de grands succès au théâtre de la Porte-St-Martin dans les drames de Lucrèce Borgia, Marie Tudor, la Tour de Nesle, etc.

GEORGES V, le dernier roi de Hanovre, fils du roi Ernest-Auguste, naquit en 1819, et devint roi en 1851. Il était aveugle depuis plusieurs années, et le roi son père avait rendu une ordonnance d’après laquelle tous les actes soumis à la signature du futur souverain devaient être lus en présence de douze témoins. Son gouvernement intérieur fut peu libéral; à l’extérieur il opposa une vive résistance à la politique envahissante de la Prusse, combattit cette puissance en 1866, fut vaincu, détrôné ; et ne cessa depuis de protester à l’étranger contre l’annexion de son royaume à la monarchie prussienne. Ce prince aimait et cultivait les arts, surtout la musique.

GERHARD (Édouard), archéologue allemand, né à Posen en 1795, mort en 1867. Après avoir professé quelque temps à Breslau, il passa quinze ans à Rome, où il se livra avec passion à l'étude des antiques, fonda et dirigea jusqu’en 1837 l’Instituto di correspondanza archeologica ; il fut, à son retour en Prusse, professeur à l’Université de Berlin. Il était membre étranger de l’Institut de France. Il a fait plusieurs publications archéologiques très-estimées : Antiques (1827) ; Vases étrusques (1839) ; Miroirs étrusques (1845) ; Coupes étrusques (1846), etc.

GHIKA ou GRHYKA, famille princière des principautés moldo-valaques ; fournit plusieurs hospodars à la Valachie et à la Moldavie, notamment Grégoire Alexandre (1797-1862), hospodar de 1834 à 1843.

GOUSSET (Thomas-Marie-Joseph), prélat français, né d’une famille de paysans de la Haute-Saône en 1792, m. en 1866 ; cultiva les champs jusqu’à l’âge de 17 ans, où il commença ses études ; entra dans les ordres en 1817 ; professa la théologie morale au grand séminaire de Besançon ; devint évêque de Périgueux (1835), archevêque de Reims (1840) et cardinal (1850). Il a laissé d’importants travaux théologiques, particulièrement sur les cas de conscience et le droit canon : Théologie morale (1844), Théologie dogmatique (1848), Principes de droit canonique (1859), et a réédité avec les notes et suppléments le Dictionn. théologique de Bergier (1826).

GOZLAN (Léon), homme de lettres français, né en 1806 à Marseille, m. en 1866 ; écrivit pour les journaux et les revues une foule de nouvelles et des romans, qui furent très-remarqués par leur originalité piquante, et qui se succédèrent de 1828 à 1860 avec une inépuisable fécondité. Il a aussi écrit avec succès pour le théâtre le Lion empaillé, une Tempête dans un verre d’eau, la Queue du chien d’Alcibiade, etc.

GRATRY (l’abbé Aug.-Jos.-Alphonse), écrivain français, né à Lille en 1805, m. en 1872 ; fut élève de l'École polytechnique, prit les ordres, dirigea le coll. Stanislas, fut aumônier de l’École normale, profess. à la Faculté de théol. de Paris, et membre de l’Académie française. Il se consacra, en 1852, avec l’abbé Pétetot, à la reconstitution de l’ordre des Oratoriens. Son principal ouvrage est un cours de philosophie en trois parties : Connaissance de l’âme, Logique, Connaissance de Dieu (6 vol. in-8, 1855-57). On lui doit aussi les Sources, conseils pour la conduite de l’esprit (1861).

GRISI (Giulia), cantatrice italienne, née à Milan en 1810, morte en 1869, suivit et surpassa au théâtre sa sœur Judith Grisi (1805-1840). Sa beauté, son talent dramatique et sa voix brillante de mezzo soprano lui valurent les plus grands succès sur les différentes scènes de l’Italie, et au théâtre italien de Paris et de Londres (1832-1857). — Sa cousine, Carlotta Grisi (1821-71), s’est aussi fait un nom au théâtre : elle dansait et chantait à la fois, et créa le ballet de Giselle à l’Opéra.

GROTE (Georges), historien anglais d’origine allemande, né à Clayhill (comté de Kent) en 1794, mort en 1871. Il fut employé dans la banque de son père, tout en s’occupant d’études sur l’histoire de la Grèce. Après avoir représenté la ville de Londres de 1832 à 1841, il renonça à la politique pour consacrer tout son temps à son Histoire générale de la Grèce, qui, commencée en 1828, ne fut achevée qu’en 1850 : cet ouvrage, d’une érudition profonde, mais un peu indigeste, lui a valu le titre de membre correspondant de l’Académie des inscriptions ; il a été traduit en français par M. de Sadous (1884- 67), 19 vol. in-8.

GUÉRIN DU CAYLA (G.-Maurice de), littérateur français, né près d’Albi en 18l0, mort en 1839, subit fortement l’influence mélancolique de René et d’Oberman, se retira quelque temps à la Chesnaye, en Bretagne, auprès de Larnenna1s (1833), et mourut, laissant quelques pages distinguées qui lui ont fait un nom posthume parmi un public d’élite : Journal, lettres et poëmes, publiés par M. Trébutien (1855). — Le même éditeur a donné (1862) un Journal et des Lettres de sa sœur, Eugénie de Guérin (1805-1848), dont la vie a été tout entière remplie par la piété et par son affection pour son frère, et dont les fragments se recommandent par l’élévation des pensées et la délicatesse de l’expression.

GUERRAZZI (Fr.-Dominique), littérateur et h. politique italien, né à Livourne en 1805, m. en 1873 ; exerça avec éclat la profession d’avocat ; débuta dans la carrière littéraire par des tragédies et quelques poésies inspirées de L. Byron, publia plusieurs romans (la Bataille de Bénévent, le Siége de Florence, Isabelle Orsini) ; prit part à diverses conspirations pour la cause de la république et de l’unité italienne, et fut plusieurs fois condamné à la prison ; fut un instant (oct. 1849) imposé comme ministre au grand-duc de Toscane Léopold II, devint bientôt dictateur, après la fuite de ce prince, fut renversé par la contre-révolution de 1849 et condamné à un bannissement perpétuel ; se retira à Bastia, où il écrivit son roman de Beatrice Cenci ; devint en 1860 membre du parlement italien, et fit partie de toutes les législatures, excepté de la dernière. Guerrazzi est l’écrivain moderne le plus populaire en Italie, après Manzoni. D’une nature violente et emportée, il a été, en politique, plutôt un agitateur qu’un homme d’État.

GUICCIOLI (Florence Teresa, comtesse), née à Paris en 1799 m. en 1873 ; doit une certaine célébrité à ses relations avec lord Byron, sur le génie duquel elle exerça, dit-on, quelque influence. Elle épousa en 1851 le marquis de Boissy.

GUIZOT (François-Pierre-Guillaume), homme d’État et écrivain français, né à Nîmes en 1787 d’une famille protestante. Son père, avocat distingué, ayant péri sur l’échafaud révolutionnaire en 1794, sa mère le conduisit à Genève, où il fit ses études. Venu à Paris en 1805, pour faire son droit, il s’occupa de littérature, et publia en 1809 un nouveau Dictionnaire des Synonymes français. En 1812, il épousa Mlle Pauline Meulan (voyez dans le Dictionnaire l’art. Mme Guizot), qui le seconda dans quelques-uns de ses travaux, par exemple les Vies des poëles français du siècle de Louis XIV (1813), la traduction de l’Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain de Gibbon (1812 et suiv.). Il la perdit en 1827, et épousa l’année suivante Mlle Elisa Dillon, qu’il perdit en 1833, et dont il avait eu une fille (Mme Cornélis de Witt) et un fils (M. Guillaume Guizot). Il devint en 1813 suppléant, puis titulaire de la chaire d’histoire moderne à la Sorbonne, et, à la chute du premier Empire, entra dans la vie politique comme secrétaire général du ministre de l’intérieur, l’abbé de Montesquiou, et comme membre du Comité de censure ; suivit Louis XVIII à Gand pendant les Cent jours ; se posa sous la seconde Restauration comme royaliste constitutionnel, et fut, avec M. Royer-Collard, l’un des principaux représentants de l’école doctrinaire. Il publia diverses brochures politiques (du Gouvernement représentatif, 1816 ; des Moyens de gouvernement et d’opposition dans l’état actuel de la France, 1821 ; de la Peine de mort en matière politique, 1822, etc.) Après a voir été, sous les ministres Barbès-Marbois et Decazes, secrétaire général du ministère de la justice, maître des requêtes, conseiller d’État, directeur général de l’administration départementale et communale, il perdit ses places politiques au moment de la réaction qui suivit l’assassinat du duc de Berri (ministère de Villèle, décembre 1821), et remonta dans sa chaire de la Sorbonne ; le libéralisme d’opinions qu’il professait, et dont témoigne la reproduction d’une partie de ses leçons faite sous le titre d’Histoire du gouvernement représentatif, 1822, fit fermer son cours en 1825. Le ministère Martignac rendit à M. Guizot sa place au conseil d’État à côté de MM. Villemain et Cousin. C’est alors qu’il publia ses plus importants travaux historiques et littéraires : Édition des Œuvres de Rollin, 1821 ; révision de la Traduction de Shakespeare de Letourneur , 1821 ; Essai sur l'histoire de France, 1823 ; Collection des Mémoires relatifs à la révolution d’Angleterre, 26 vol. in-8, 1823 et suiv. ; Collection des Mémoires relatifs à l’histoire de France, 31 vol. in-8, 1823 et suiv. ; Histoire de la Révolution d’Angleterre depuis Charles Ier jusqu’à Charles II, 2 vol. in-8, 1827 ; Histoire de la Civilisation en Europe et de la Civilisation en France, 5 vol. in-8, 1828-1830. En même temps il collaborait à divers recueils (le Globe, etc.), dirigeait l’Encyclopédie progressive et fondait la Revue française (1828). Envoyé en janvier 1830 à la Chambre des députés par les électeurs de Lisieux, qui depuis lui renouvelèrent leur mandat, M. Guizot combattit vivement le ministère Polignac ; signa l’adresse des 221 ; rédigea, le 27 juillet, la protestation des députés contre les Ordonnances, et, le lendemain, la proclamation par laquelle la Chambre appelait le duc d’Orléans à la lieutenance générale du royaume ; devint ministre de l’intérieur dans le premier cabinet formé par le roi Louis-Philippe ; s’efforça, d’accord avec le duc de Broglie et le comte Molé, de faire prévaloir la politique du parti constitutionnel ou du juste-milieu contre le parti légitimiste et le parti républicain ou démocratique ; essaya vainement de satisfaire la gauche par des projets de lois libéraux, comme celui qui déférait au jury les délits de presse et les délits politiques, mais aima mieux quitter le ministère que de faire partie d’un cabinet à tendances plus avancées, présidé par M. Laffitte (novembre 1830). Il appuya de sa parole et de son autorité le ministère Casimir Périer (mars 1831-mai 1832) et entra, comme ministre de l’instruction publique, dans le cabinet du 11 oct. 1832, où Il était le collègue du maréchal Soult, du duc de Broglie et de M. Thiers, et où il marqua la trace de son passage par le rétablissement de l’Académie des sciences-morales et politiques au sein de l’Institut et par l’organisation de l’instruction primaire (loi du 28 juin 1833). Après la dissolution du ministère (22 février 1836) et quelques mois de retraite et de silence, M. Guizot rentra comme ministre de l’instruction publique dans le premier ministère Mole (6 oct. 18116) : il ne fit pas partie du second ministère Mole (15 avril 1837), lui fit une vive opposition, et le renversa (31 mars 1839) en s’unissant avec MM. Thiers, Berryer, Odilon Barrot dans une coalition qui lui a été fort reprochée. Sous le ministère Soult il fut appelé à l’ambassade de Londres (9 février 1840), poste où il fut maintenu par le ministère Thiers (1 mars 1840), mais où il se trouva en dissentiment d’opinions avec le président du Conseil, et ne put empêcher le traité du 14 juillet signé sans la France par l’Angleterre, la Russie, l’Autriche et la Prusse. Le 29 octobre 1840, il entra comme ministre des affaires étrangères dans un cabinet qui dura huit ans, mais fut le dernier de la royauté de Juillet, et que signalèrent particulièrement : 1o au dehors, la convention des Détroits (13 juillet 1841), qui fit rentrer la France dans le concert européen ; le maintien de la paix au prix de concessions fort exploitées par l’opposition (droit de visite, indemnité Pritchard, etc.) et nonobstant l’occupation des îles Marquises (1842) et les mariages espagnols (1846) ; 2o  au dedans, la loi de la régence, la lutte contre les légitimistes, dont les députés sont « flétris » dans l’Adresse de 1844 pour leur pèlerinage à Belgrave-Square ; et la résistance aux propositions de réforme électorale plusieurs fois reprises en vain dans la Chambre des députés. L’agitation créée par les Banquets réformistes ayant amené des troubles qui aboutirent à la révolution du 24 février, M. Guizot dut quitter le ministère le 23, passa en Angleterre, et demeura jusqu’à sa mort (sept. 1874) presque entièrement étranger à la politique active, tout entier à ses études et aux affaires, soit de la communion protestante à laquelle il appartenait, soit des trois Académies dont il faisait partie (Académie française, des sciences morales et politiques, des inscriptions et belles-lettres). Dans cette dernière période de sa vie il publia : de la Démocratie en France (1849), Pourquoi la Révolution d’Angleterre a-t-elle réussi ? (1850) ; Nos mécomptes et nos espérances (1855) ; l’Église et la société chrétienne (1861) ; Méditations et études morales (1851) ; Mémoires pour servir à l’histoire de mon temps, 7 vol. in-8 (1858-64) ; Discours académiques (18Gl) ; Histoire parlementaire de France (4 vol., 1863) ; Méditations sur l’essence de la religion chrétienne (1864) ; Histoire de France racontée à mes petits-enfants (5 vol. in-8, 1869 et suiv. Le 5e est de Mme de Witt). À ces divers ouvrages il faut enjoindre un autre qu’il publia pendant son dernier ministère : Vie, correspondance et écrits de Washington (6 vol. in-8, 1839-40). M. Guizot laisse un grand nom comme publiciste, comme professeur et comme orateur parlementaire ; et, s’il a été très-contesté comme homme d’État, son caractère privé a toujours été entouré de respect.

HAMON (Jean-Louis), peintre français, né à Plouha (Côtes-du-Nord) en 1821, m. en 1874, fut élève de Paul Delaroche ; se fit remarquer dès 1848 par quelques tableaux de genre ; travailla plusieurs années pour la manufacture de Sèvres. Il s’est fait un nom surtout par des compositions gracieuses qui représentent des scènes enfantines : Ma sœur n’y est pas, Ce n’est pas moi, les Orphelines, etc.

HAUTPOUL (Alphonse-Henri, marquis d’), général français, né à Versailles en 1789, m. en 1865 ; fit les dernières campagnes de l’Empire et celles de la Restauration ; fut nommé pair de France en 1846, élu représentant de l’Aude à la Législative, et devint ministre de la guerre du Prince-président (1849), gouverneur de l’Algérie (1850), et enfin grand référendaire du Sénat (1852).

HEIM (François-Joseph), peintre d’histoire français, né à Belfort en 1787, m. en 1865 ; fut membre de l’Institut (Acad. des beaux-arts), a concouru à la décoration du Louvre et laissé plusieurs toiles distinguées parmi lesquelles on remarque le Massacre des Juifs.

HITTORF (Jacques-Ignace), architecte et archéologue français, né à Cologne en 1793, m. en 1867 ; fut élève de Percier et Belanger ; devint architecte du roi sous la Restauration et le gouvernement de Juillet ; fut chargé d’un grand nombre de travaux publics (embellissements des Champs-Élysées et de la place de la Concorde, construction de l’église Saint-Vincent de Paul, etc.), et devint membre de l’Académie des beaux-arts (1853). Il a laissé des ouvrages d’archéologie fort estimés : Architecture antique de la Sicile (1826-30, 3 vol.) ; Architecture polychrome chez les Grecs (1831).

HUET (Paul), peintre français, né à Paris 1804, mort en 1869. Élève de Gros et de Guérin, 11 s’est surtout fait connaître comme paysagiste, et a laissé beaucoup d’aquarelles estimées.

INGRES (Jean-Dominique-Auguste), peintre français, né en 1781 à Montauban, m. en 1867 ; fut élève de David, et resta longtemps en Italie (1807-24), où il se passionna pour Raphaël et composa plusieurs tableaux qui furent reçus à Paris avec froideur : Œdipe et le Sphinx, l’Odalisque couchée, Jésus-Christ remettant les clefs à saint Pierre, Virgile lisant l’Énéide, Roger délivrant Angélique, Henri IV en famille. Il n’obtint son premier grand succès qu’avec le Vœu de Louis XIII (1824) qui le fit reconnaître comme le chef de l’école idéaliste, et lui valut la croix et un fauteuil à l’Institut (Acad. des beaux-arts). Il a été depuis directeur de l’école française de Rome (1834-41). On a encore de l’Apothéose d’Homère, pour un plafond du Louvre, le Martyre de saint Symphorien, la Vierge d l’hostie, Stra tonice, Cherubini inspiré par la Muse, Jeanne d’Arc au sacre de Charles VII, l’Apothéose de Napoléon Ier, la Source, etc. Ingres a aussi excellé dans le portrait ; ses chefs-d’œuvre en ce genre sont : M. Bertin ainé, le comte Molé, le marquis de Pastoret, Napoléon III. Le talent d’Ingres a été longtemps méconnu ; mais dans ses dernières années il a vécu en pleine possession d’une gloire incontestée comme chef de l’école classique moderne. Son talent et son caractère ont été récompensés par les plus grands honneurs publics : il est mort grand officier de la Légion d’honneur et membre du Sénat.

JANIN (Jules), écrivain français, né à Condrieu (Loire) en 1804 ; écrivit dès 1823 dans divers journaux des articles de littérature et même de politique ; publia en 1829 un roman qui fut remarqué pour sa singularité, l’Âne mort et la Femme guillotinée, et en 1831 une monographie historique, Barnave, entra en 1830 au Journal des Débats, où il resta jusqu’à sa mort (1874), et où il se signala, surtout de 1830 à 1850, par des feuilletons de théâtre pleins d’esprit, de verve, d’originalité et d’enjouement, qui lui firent une place à part parmi les critiques dramatiques mais dont le mérite un peu léger ne s’est pas maintenu lorsque les principaux d’entre eux ont été réunis en volumes, sous le titre d’Histoire de la littérature dramatique (6 vol. in-12, 1858). C’est néanmoins.le principal titre littéraire de Jules Janin, dont l’esprit abondant et facile s’est encore répandu dans une foule d’ouvrages d’imagination, de critique ou de description, parmi lesquels on distingue : Contes et Nouvelles littéraires (1832-34) ; le Chemin de traverse (1836) ; Versailles et son Musée historique (1838) ; Voyage en Italie (1842) ; la Normandie et la Bretagne historiques, pittoresques et monumentales (1844), etc., ainsi que de nombreuses notices en tête d’éditions de divers auteurs, une traduction d’Horace, etc., etc. Il fut reçu à l’Académie française en 1870, et mourut en 1874.

JEAN (Népomucène-Marie-Joseph), roi de Saxe, né en 1801, m. en 1873. Dernier fils du roi Maximilien, il succéda à son frère Frédéric-Auguste en 1854. Son règne a été marqué par l’abolition de la juridiction seigneuriale et par la réforme du Code pénal. Il resta neutre dans la guerre de l’Autriche contre la Prusse (1866), mais soutint activement cette dernière puissance dans la guerre contre la France (1870-7l). Avant d’arriver au trône, il s’était fait connaître par son goût pour les lettres et les arts, avait publié une traduction de la Divine Comédie (1839-49), et avait été nommé président de la Société d’histoire et d’antiquités de Dresde.

JOBERT DE LAMBALLE (Antoine-Joseph), médecin français, né à Lamballe (Côtes-du-Nord) en 1799, m. en 1867 ; fut professeur de clinique chirurgicale à la Faculté de Paris, chirurgien de plusieurs hôpitaux, membre de l’Académie de médecine et de l’Académie des sciences. Il a laissé des ouvrages importants parmi lesquels on distingue : Traité des maladies chirurgicales de l’intestin (1829) ; Études sur le système nerveux (1838) ; Traité de chirurgie plastique (1849, etc.).

JOMINI (Henri, baron), général et écrivain stratégique né à Pazerne (Vaud) en 1779, m. en 1869 ; servit d’abord dans un régiment suisse à la solde de la France, puis dans l’armée française, fut créé par Napoléon Ier baron, général de brigade et historiographe de France ; puis, ayant été disgracié (1813), passa au service de l’empereur de Russie, dont il devint aide de camp, et fut chargé de compléter l’éducation militaire du grand-duc Nicolas ; a écrit plusieurs ouvrages qui lui ont fait une grande réputation de tacticien : Traité des grandes opérations militaires (1819, 3 vol. in-8) ; Hist. critique et militaire des guerres de la Révolution (1805-21, 15 vol. in-8) ; Vie politique et militaire de Napoléon (1827, 4 vol.), etc.

JUAREZ (Benito), président de la République mexicaine, né vers 1810 ; appartenait à la race indienne et à une famille très-pauvre ; se fit un nom comme avocat ; fut, en 1856, nommé député au Congrès, et devint président de la Cour suprême de justice ; se mit, lors de la chute de Comonfort (1857), à la tête du parti constitutionnel ou fédéral, et lutta les armes à la main contre les présidents qui succédèrent à Comonfort, le gén. Zuloaga et le gén. Miramon ; organisa un gouvernement qu’il fit reconnaître par les États-Unis (1859), puis (après la défaite de Miramon) par les puissances occidentales (1861) ; mais ne put réprimer les désordres intérieurs et ne se soutint qu’à l’aide d’exactions de toute sorte, dont eurent à souffrir les Européens ; provoqua par ces mesures une expédition franco-anglo-espagnole (1862) ; sut désintéresser l’Angleterre et l’Espagne, eut à combattre les troupes françaises ; appela aux armes la nation entière pour résister à l’invasion, soutint une lutte à outrance, qu’il continua par une guerre de guérillas, même après de nombreux revers et la proclamation comme empereur de l’archiduc d’Autriche Maximilien (1864) ; s’empara, après le départ des troupes françaises, de la personne de Maximilien, qu’il fit fusiller (1867) ; fut réélu président par le Congrès en 1871, gouverna quelque temps au milieu d’insurrections continuelles, soutenues par Porfirio Diaz, Marquez, etc. ; mourut en 1872, et eut pour successeur Lerdo de Tejada.

JUSUF (Le gén.), né à l’île d’Elbe en 1805, m. en 1866 ; passa une partie de son enfance à Tunis, où il avait été amené par les corsaires ; entra en 1830 au service de la France, qu’il servit dès lors en Algérie, dans le corps des spahis, avec une rare intelligence et une bravoure à toute épreuve ; fut naturalisé Français en 1839, et devint en 1856 général de division. Il a publié en 1850 un ouvrage intéressant, la Guerre en Afrique.

KAULBACH (Guillaume de), peintre allemand, né à Arolsen (Waldeck) en 1805, m. en 18711 ; fut élève de Cornélius ; reproduisit d’abord le style simple et sévère de ce maître dans des sujets antiques comme Apollon au milieu des Muses, Psyché et l’Amour ; mais s’en écarta depuis dans de vastes compositions inspirées des romantiques allemands (la Bataille des Huns, la Destruction de Jérusalem, le Roman du Renard, la Tour de Babel, la Réformation, etc.), qui lui valurent la faveur du roi Louis Ier de Bavière, la direction de l’Académie des arts de Munich, et une très-grande popularité dans toute l’Allemagne. — Son neveu, M. Fréd. Kaulbach, s’est fait un nom comme peintre de portraits.

KISSELEFF (Paul-Dmitrévitch, comte de), général et diplomate russe, né à Moscou en 1788, m. en 1872 ; fit les campagnes de Tilsitt, Eylau, Friedland, la Moskowa ; devint lieutenant général à la suite de la guerre se 1828 contre les Turcs ; exerça les pouvoirs civils et militaires dans les Principautés danubiennes de 1829 à 1834 ; fut, de 1856 à 1862, ambassadeur à Paris, et fixa jusqu’à la fin de ses jours sa résidence dans cette capitale. — Son frère (Nicolas), né en 1800, également diplomate, l’avait précédé comme chargé de légation, puis ministre plénipotentiaire à Paris (1847-1854).

KOCK (Charles-Paul de), auteur dramatique et romancier français, né à Passy (Seine) en 1794, mort en 1871. Fils d’un banquier hollandais mort en 93 sur l’échafaud, il entra à quinze ans dans le commerce, mais en sortit deux ans après pour se livrer aux lettres. Il a écrit pour le théâtre dans les genres les plus variés (mélodrame, opéra-comique, vaudeville) avec divers collaborateurs, et souvent avec succès. Mais ce qui a rendu son nom populaire en France, et même à l’étranger, ce sont ses nombreux romans d’une gaieté souvent un peu trop gauloise, et dont le nombre dépasse deux cents. Les plus connus sont les suivants : Georgette ou la nièce du tabellion (1820) ; Gustave ou le mauvais sujet (1821) ; Frère Jacques (1822) ; Monsieur Dupont (1824) ; le Barbier de Paris (1826) ; Mœurs parisiennes (1837) ; Moustache (1838) ; l’Homme au trois culottes (1840) ; Ce monsieur ! (1842), etc.

LAFAYE (Benjamin), philologue français, né dans l’Yonne en 1809, m. en 1867 ; fut élève de l’École normale, professeur de philosophie, doyen de la Faculté des lettres d’Aix. Il a laissé un excellent Dictionn. des synonymes de la langue française (1858).

LA FERRIÈRE (Adolphe), artiste dramatique français, né à Alençon vers 1796, m. en 1877 ; obtint de bonne heure des succès dans le drame, fut distingué par Frédérick Lemaître, et s’illustra particulièrement par le rôle d’Antony dans la pièce d’Alexandre Dumas. Il a joué avec succès jusqu’à ses dernières années, avec un air de jeunesse qui ne le quitta jamais.

LA GUÉRONNIÈRE (L.-Ét. Arthur, vicomte de), publiciste français, né en 1816 en Poitou, m. en 1875 ; débuta dans les journaux légitimistes ; suivit de 1848 à 1850 la ligne politique de M. de Lamartine ; devint un des auxiliaires du président L. Napoléon, donna son adhésion au coup d’État de 2 décembre ; fut député du Cantal au Corps législatif (1851), conseiller d’État (1853), sénateur (1861). Il a fondé en 1862 et dirigé plusieurs année le journal la France ; a donné des Portraits politiques contemporains (1851-56), et, sous le voile de l’anonyme, plusieurs brochures politiques qui ont paru interpréter les pensées secrètes de Napoléon III. Il a publié dans la dernière année de sa vie le Droit public et l’Europe moderne (2 vol. in-8, 1875). – Un de ses frères, le baron Ch. de L., né en 1826, est mort sous l’Empire préfet de la Haute-Garonne.

LAMARTINE (Alphonse PRAT de), poëte et h. politique, né à Mâcon en 1790, m. en 1869. Il était fils d’un officier et servit lui-même (1814) dans les gardes du corps ; il publia en 1820 les Méditations poétiques, ouvrage qui eut un immense succès par le contraste qu’il offrait avec la poésie de l’Empire ; donna ensuite les Nouvelles Méditations (1823), la Mort de Socrate, le Dernier Chant de Child-Harold (1824), le Chant du Sacre (1825), les Harmonies poétiques et religieuses (1829), et fut élu membre de l’Académie française (1829). Dans l’intervalle, Lamartine était entré dans la diplomatie (1821), et, la même année, étant attaché à la légation de Naples, avait épousé une jeune et riche Anglaise, était devenu secrétaire d’ambassade à Londres, puis chargé d’affaires en Toscane enfin (1830) ministre plénipotentiaire en Grèce. Il donna sa démission à l’avènement du roi Louis-Philippe, et entreprit en 1832 un voyage en Orient qu’il fit avec une magnificence princière, mais dans lequel il porta des atteintes irréparables à sa fortune, et où à eut la douleur de perdre sa fille ; il en rapporta un remarquable ouvrage en prose : le Voyage en Orient (1835). Il publia la même année le poëme de Jocelyn, qui mit le comble à sa réputation ; la Chute d’un Ange (1838), les Recueillements poétiques (1839). Depuis plusieurs années déjà, sa pensée était tournée vers la politique : après deux tentatives infructueuses, à Toulon et à Dunkerque, pour obtenir la députation (1831), il fut envoyé à la Chambre par les électeurs de Bergues (1834), et de 1839 à 1848 y représenta Mâcon, sa ville natale. Il traita surtout à la tribune les questions générales, et s’y fit une réputation d’orateur presque égale à sa réputation de poète ; se tint pendant longtemps à l’écart des partis, mais, dans les dernières années du règne de L.-Philippe, s’éloigna de plus en plus de la politique officielle, et, en 1847, publia l’Histoire des Girondins, ouvrage qui n’avait pas tout le sérieux de l’histoire, mais qui, grâce à des qualités brillantes, eut un immense retentissement, et prépara les esprits, à l’avènement de la République. Il contribua, plus que tout autre, aux résolutions prises, le 24 février 1848, dans la tumultueuse séance de la Chambre des députés, où fut proclamé un gouvernement provisoire ; fut lui-même un des membres de ce gouvernement, où il tint le portefeuille des affaires étrangères et joua d’ailleurs un rôle prépondérant ; devint pour toute la partie modérée du pays le principal garant des principes d’ordre et de conservation, et déploya pour leur défense beaucoup d’éloquence, de courage et d’énergie ; assura la paix à l’extérieur par un brillant Manifeste, qui témoignait des intentions pacifiques du nouveau gouvernement ; fut élu à l’Assemblée constituante par dix départements (4 mai), et nommé un des cinq membres de la commission exécutive (10 mai) ; redevint simple représentant après les journées de Juin, qui portèrent au pouvoir le gén. Cavaignac ; fit partie de la Législative (1849), et, après le coup d’État du 2 décembre 1851, rentra dans la vie privée où il resta jusqu’à sa mort. Ses dernières années furent attristées par l’oubli qu’il voyait succéder pour lui à une éclatante popularité, troublées par de cruelles préoccupations de fortune, et remplies par des publications historiques et littéraires un peu hâtives, dont la plupart n’ajoutèrent rien à sa réputation : Trois mois au Pouvoir (1848) ; Hist. de la révolution de 1848 (1849) ; Raphaël (1849) ; le Conseiller du Peuple, journal (1849-50) ; Confidences et Nouvelles Confidences (1849-51) ; Toussaint-Louverture, drame (1850) ; le Civilisateur (1851) ; Geneviève ; le Tailleur de Saint-Point (1851) ; Graziella (1852) ; Hist. de la Restauration (1851-63) ; Nouveau Voyage en Orient (1853) ; Hist. de la Turquie (1854) ; Hist. de la Russie (1855) ; Cours familier de littérature (1856 et suiv.). – Plusieurs éditions de ses Œuvres complètes ont été publiées en divers formats.

LANFREY (Pierre), littérateur français, né à Chambéry en 1828, m. en 1877 ; s’est fait d’abord un nom par diverses œuvres de polémique philosophique et politique : l’Église et les philosophes au XVIIIe siècle (1867) ; Essai sur la révolution française (1858), etc. Son ouvrage le plus important est l’Histoire de Napoléon Ier (1867, et suiv.), où il s’attache à détruire la légende impériale et la remplace par une appréciation des plus sévères du premier Empire. En 1871, il fut représentant du Rhône, puis devint ministre plénipotentiaire en Suisse, enfin sénateur.

LEBRUN (Pierre-Antoine), poëte français, né à Paris en 1785, m. en 1813 ; attira l’attention de l’Empereur par une Ode à la Grande-Armée, qui lui valut une pension de 1200 fr., et la recette du Havre ; perdit l’une et l’autre à la Restauration pour un Poëme sur la mort de l’Empereur ; se consacra dès lors tout entier aux lettres ; donna au théâtre plusieurs pièces, dont une, Marie Stuart, obtint un grand succès, grâce à une imitation discrète de Schiller et à quelques concessions faites au goût de l’école romantique (1820) ; publia un Voyage en Grèce, qui fut fort goûté (828), et entra, la même année, à l’Académie française ; fut de 1830 à 1848, directeur de l’Imprimerie royale, pair de France sous Louis-Philippe, et sénateur sous Napoléon III. On a réuni ses Œuvres, 5 vol. in-8 (1844-63).

LECLERC (Joseph-Victor), érudit français, né à Paris en 1789, m. en 1865 ; fut successivement professeur de rhétorique au lycée Charlemagne, maître de conférences à l'École normale, professeur d’éloquence latine à la Faculté des lettres de Paris, doyen de cette Faculté (1832-65), et membre de l’Institut (Acad. des inscriptions et belles-lettres, 1834). On lui doit une édition annotée de Montaigne (1826), la traduction des Œuvres de Cicéron (1821-25, 30 vol. in-8), de savants mémoires, comme les Journaux chez les Romains (1838), le Discours sur l’état des lettres en France au XIVe s. (1865), et de nombreux articles dans l’Histoire littéraire de la France, de l’Acad. des inscriptions.

LEDRU-ROLLIN (Alexandre-Auguste Ledru, dit), jurisconsulte et homme politique français, né à Paris en 1808, était fils d’un médecin distingué et petit-fils du physicien Ledru (voyez le Dictionnaire). Avocat à Paris, il prit le nom de Ledru-Rollin, pour se distinguer d’un de ses confrères ; dirigea, de 1837 à 1847, le Journal du Palais (17 vol. in-8), donna une nouvelle édition des 46 années précédentes de ce recueil (1791-1836, 27 vol. in-8), publia, sous le titre de Jurisprudence française ou Répertoire du Journal du Palais (1843-48, 8 vol. in-4), une table méthodique qui exposait à la fois la jurisprudence française et son histoire, et compléta ces vastes collections par une autre en 9 vol. in-8 : la Jurisprudence administrative en matière contentieuse de 1789 à 1831 (1844-46). – il se signala de bonne heure par des opinions très-avancées, rédigea, après l’insurrection de juin 1832, une consultation contre l’état de siége, publia en 1834 un pamphlet sur les événements de la rue Transnonain, et devint le défenseur attitré de la plupart des accusés pour délits de presse, pour délits ou crimes politiques (Caussidière, Lavaux et Dupoty dans l’affaire Meunier et Quénisset, etc.). Il fut nommé député de la Sarthe en 1841, après avoir fait une profession de foi ouvertement républicaine, et pendant les sept dernières années de la royauté de Juillet, fut l’orateur de l’extrême gauche. Il fonda, en 18ii5, le journal la Réforme, qui professait des opinions socialistes et préparait l’avènement du suffrage universel. En février 1848, il fut membre du Gouvernement provisoire avec le portefeuille de l’intérieur, et se signala dans ce poste par des tendances ultra-démocratiques consignées dans des circulaires restées fameuses et encore exagérées par quelques-uns des commissaires extraordinaires qu’il avait nommés. Élu membre de la Commission exécutive, il s’y maintint jusqu’au 24 juin dans un continuel antagonisme avec ses collègues plus modérés et en butte aux soupçons de ses amis comme de ses adversaires ; devint néanmoins, dans l’Assemblée, chef de la Montagne ; mais, s’étant porté candidat à la présidence, il n’obtint que 370 000 suffrages. Sous la Législative, il fit la plus vive opposition à la politique du président L. Napoléon, dont il demanda la mise en accusation au sujet de l’expédition de Rome, provoqua l’insurrection du 13 juin 1849, faillit être pris par la troupe au Conservatoire des arts et métiers, s’enfuit en Angleterre, et fut condamné par contumace, par la Haute-Cour, à la déportation. Réfugié en Angleterre, il publia, outre quelques brochures, deux ouvrages étendus : de la Décadence de l’Angleterre et de la Loi anglaise ; fut l’un des principaux rédacteurs de la Voix du proscrit ; fut impliqué, en 1857, dans un complot contre la vie de l’Empereur, et de nouveau condamné à la déportation. Il rentra en France par suite de l’amnistie de 1869, et fut élu député en 1871 par trois départements ; mais l’état de sa santé ne lui permit pas de prendre une part active aux débats parlementaires. Il est mort en 187 4, laissant la réputation d’un tribun et d’un puissant agitateur plutôt que d’un homme politique.

LÉLUT (L.- François), médecin et philosophe français, né à Gy (Haute-Saône) en 1804, m. en 1877. Il a été membre de l’Académie des sciences morales et politiques et s’est surtout occupé des maladies mentales et de la phrénologie. Dans ses opuscules sur le Démon de Socrate et sur l’Amulette de Pascal, il présente Socrate et Pascal comme des hallucinés. Son principal ouvrage est la Physiologie de la pensée, 2 vol., 1861. Il a été, sous le second Empire, membre du Corps législatif.

LEMAITRE (Frédérick), célèbre acteur français, né au Havre en 1800, d’une famille d’artistes dramatiques, m. en 1876 ; débuta à l’Odéon dans le répertoire classique ; puis, passant à un autre genre, obtint d’éclatants succès à l’Ambigu et à la Porte-Saint-Martin dans Robert Macaire, Cartouche, Richard d’Arlington, l’Aubetge des Adrets, Trente ans ou la Vie d’un joueur, Don César de Bazan, Kean, Ruy Blas, le Chiffonnier, Paillasse, etc. Pas un acteur n’a été plus populaire que Frédérick Lemaître : il a paru sur la scène jusque dans ses dernières années, et y a presque toujours été accueilli avec enthousiasme ; il suppléait alors à l’insuffisance de sa voix par les effets saisissants de sa pantomime. On l’a appelé « le roi du Drame », « le Talma du boulevard » : c’était en effet un artiste accompli pour l’interprétation du théâtre romantique ; nul n’a su aussi bien que lui allier le tragique au bouffon et la noblesse du geste à la tenue souvent la plus débraillée. Aussi son triomphe était-il moins encore dans les rôles de Robert Macaire et de Paillasse que dans ceux de Kean et de Don César de Bazan, où il faisait puissamment ressortir le contraste « du désordre et du génie », et savait se draper dans des guenilles avec la fierté d’un gentilhomme de la plus noble race.

LÉOPOLD Ier, roi des Belges, né en 1790 du duc François de Saxe-Cobourg Saalfeeld ; servit dans l’armée russe de 1808 à 1814 ; se fit naturaliser Anglais (1816), et épousa la princesse Charlotte, qui mourut un an après (1817) ; fut, après la révolution de Belgique, élu roi des Belges (juin 1831), épousa la princesse Louise d’Orléans, fille du roi Louis-Philippe Ier (1832) ; affermit, avec le secours de la France, le nouveau royaume contre la Hollande (1831-41), y assit sur des bases solides un gouvernement libéral, et, par son attention à satisfaire l’opinion publique et à maintenir l’équilibre entre les partis extrêmes, parut être un modèle de roi constitutionnel. À partir de 1861, suivant le mouvement imprimé aux affaires commerciales par la France, il a signé avec les puissances étrangères de nombreux traités de commerce. À sa mort (déc. 1865), il a laissé le trône à son fils ainé, le duc de Brabant, auj. roi sous le nom de Léopold II.

LEROUX (Pierre), philosophe et économiste français, né à Paris en 1798, mort en 1871. D’abord employé dans une imprimerie, il devint collaborateur de M. Dubois nu journal le Globe (1824). Après avoir embrassé en 1831 les doctrines saint-simoniennes, il se sépara du P. Enfantin, fonda avec Mme Sand la Revue indépendante (1841), puis avec Jean Reynaud l’Encyclopédie nouvelle (1842), et y fut un des promoteurs des doctrines socialistes et antichrétiennes. Après la révolution de 1848, il fut membre de l’Assemblée constituante et de l’Assemblée législative, et y exposa dans plusieurs discours les opinions les plus radicales. Il renonça à la politique après le coup d'État du 2 décembre, et, après avoir passé quelques années à Jersey, rentra en France lors de l’amnistie de 1860. Ses principaux ouvrages sont : de l’Humanité, de son avenir (1845) ; Projet d’une constitution démocratique et sociale (1848) ; la Ploutocratie ou le gouvernement des riches (l848). Il a donné une traduction du Werther de Gœthe (1843).

LESPÈS (Leo), littérateur français, né à Bouchain (Nord) en 1811, m. en 1875 ; écrivit de 1840 à 1861 dans les petits journaux, publia plusieurs romans (les Esprits de l’Atre, les Filles de Barrabas) et, à partir de 1862, se fit une grande notoriété, par des articles de chronique quotidienne publiés dans le Petit Journal sous le pseudonyme de Timothée Trimm.

LEVER (Charles), romancier irlandais, né à Dublin en 1806, m. en 1873 ; était médecin, se distingua par son courage lors du choléra de 1832, fut nommé médecin de la légation britannique de Bruxelles, et termina sa vie dans les consulats. On lui doit plusieurs nouvelles ou romans pleins de verve, de malice et d’originalité, qui ont rendu son nom populaire en Angleterre : les Confessions de Harry Lorrequer, Charles O’Malley, Jack Hinton, etc.

LE VERRIER (Urbain-Jean-Joseph), astronome français, né en 1811 à Saint-Lô. Élève de l’École polytechnique, il en sortit comme ingénieur des tabacs, et s’adonna d’abord à des recherches de chimie, mais ne tarda pas à se livrer à son goût pour les mathématiques ; devint répétiteur à l’École polytechnique, étudia particulièrement la mécanique céleste ; et présenta plusieurs mémoires d’astronomie remarquables à l’Académie des sciences, qui le fit entrer dans son sein dès 1846. La découverte de la planète Neptune, faite par Le Verrier en juin 1846, et confirmée Par l’astronome allemand Galle, lui fit une réputation européenne. Il devint peu après professeur d’astronomie à la Faculté des sciences et astronome-adjoint au Bureau des longitudes. Député de la Manche à l’Assemblée législative (1849), il s’attacha à la fortune du président L. Napoléon, qui, après le coup d’État du 2 décembre, le nomma sénateur et inspecteur général de l’enseignement supérieur. Peu de temps après la mort de Fr. Arago (1853), il lui succéda dans la direction de l’Observatoire, poste qu’il dut quitter à la fin de l’Empire, mais qui lui fut rendu par M. Thiers, et qu’il conserva jusqu’à sa mort (1817).

LIEBIG (Justus, baron de), chimiste allemand, né en 1803 à Darmstadt, m. en 1813 ; étudia la chimie à l’Université de Bonn et à la Faculté des sciences de Paris (1822-23) ; professa pendant vingt-cinq ans à l’Université de Giessen, puis (1850) à celle de Heidelberg, et (1852) à celle de Munich ; fut en 1895 créé baron par le grand-duc de Hesse, et en 1861 élu associé étranger de l’Académie des sciences de Paris. Liebig, qui est un des créateurs de la chimie oranique, a publié, outre de nombreux Mémoires, plusieurs ouvrages importants : Dictionnaire de Chimie, avec la collaboration de Poggendorf (1837-51, 5 vol.) ; Chimie organique appliquée à la physiologie animale et à la pathologie (1840) ; Chimie organique appliquée à la physiologie végétale et à l’agriculture (1842) ; Traité de Chimie organique (1844) ; Lettres sur la Chimie (1852). Ces quatre derniers ouvrages ont été traduits par Ch. Gerhardt (1845-52). – Le nom de Liebig a été popularisé par un extrait de viande dont il a donne la formule.

LIVINGSTONE (David), célèbre voyageur anglais, né à Blantyre (Écosse) en 1812. Après avoir fait à l’Université de Glasgow des études de médecine et de théologie, le docteur Livingstone entreprit en 1840 dans l’Afrique méridionale une série de voyages qui ont jeté de grandes lumières sur la géographie de pays encore inexplorés, séjourna plusieurs années au Cap, où il épousa la fille d’un autre missionnaire protestant ; s’avança vers le nord en 1849, et en 1852 traversa l’Afrique dans toute sa largeur, du Congo à la vallée du Zambèze, ce qui n’avait encore été fait par aucun Européen ; retourna en 1858 à la vallée du Zambèze pour reconnaître exactement le cours de ce fleuve ; entreprit en 1865 une troisième expédition pour étendre, autant que possible, les connaissances géographiques sur l'Afrique équatoriale ; se vit abandonné en 1866 par une partie des hommes de son escorte, qui revinrent à Zanzibar, annonçant faussement qu’il était mort assassiné par les sauvages ; n’en poursuivit pas moins son exploration avec quelques serviteurs fidèles ; fut recherché en vain par une mission : anglaise, mais retrouvé par l’Américain Henri Stanley, en 1872 ; enfin mourut de la dyssenterie en 1873 : son corps, ayant été rapporté en Angleterre, fut enseveli avec des honneurs exceptionnels à Westminster, aux frais du Trésor. On doit au docteur Livingstone, non-seulement la connaissance du cours du Zambèze et de ses affluents, mais la première notion exacte du plateau qui constitue le sud de l’Afrique. Il alliait le triple caractère du géographe, du médecin et du missionnaire philanthrope : il a toujours travaillé de tout son pouvoir à l’extinction du trafic des esclaves dans les pays qu’il a visités. Il a donné des relations de ses diverses explorations, relations qui ont été traduites en français (1858, 1866, 1875, 3 vol. in-8).

LIVRY (Charles de). Voyez SANGUIN.

LOPEZ (François Solano), homme politique du Paraguay, né à l’Assomption en 1827, mort en 1870. Après avoir achevé son éducation an Europe, il fut ministre de la guerre et de la marine sous son père, Carlo Lopez, président de 1844 à 1862, qui développa les ressources commerciales du Paraguay, et y établit les premiers chemins de fer. Il lui succéda, et soutint de 1865 à 18701 contre le Brésil, Montevideo et la Plata, une lutte inégale qui eut des résultats désastreux pour le pays, mais où Lopez fit preuve d’énergie, d’héroïsme et de grandes qualités militaires.

LOUIS (Charles-Auguste), roi de Bavière, né le 25 août 1786 du premier mariage du roi Maximilien Ier, épousa en 1810 Thérèse de Saxe ; monta sur le trône en 1825 ; fit d’abord de sages réformes financières, et manifesta les intentions les plus libérales, mais fut amené par l’influence croissante du clergé puis par celle d’une favorite, la comtesse de Lansfeld (Lola Montès), à un système de réaction qui occasionna un soulèvement populaire et le contraignit à abdiquer en faveur de son fils aîné Maximilien II (mars 1848) ; vécut depuis dans la retraite et mourut en 1868. Son règne a été signalé par plusieurs grandes entreprises, telles que le premier chemin de fer allemand, le canal entre le Mein et le Danube, etc. ; il encouragea de tout son pouvoir les savants et les artistes, embellit Munich de nombreux monuments, parmi lesquels on remarque l’Odéon, le Palais-Royal, la nouvelle Pinacothèque. Il s’occupait lui-même de belles-lettres et a publié des Poésies (1829), et un livre original, intitulé les Compagnons du Walhalla (1843).

LOUIS (le docteur P.-Ch.-Alex.), médecin français, né en 1787 à Aï (Marne), m. en 1812 ; s’est illustré à la fois comme praticien et comme savant, et a victorieusement réfuté le système de Broussais sur la phthisie pulmonaire et la fièvre typhoïde. Ses principaux ouvrages sont : Recherches anatomico-pathologiques sur la phthisie (1825) ; Mémoires sur la membrane muqueuse de l’estomac, le croup, les abcès du foie (1826) ; Recherches sur la fièvre typhoïde (1841).

LUCCHESI-PALLI (Hector, comte de), diplomate italien, né dans le roy. napolitain vers 1805, m. en 1864 ; fut attaché à l’ambassade napolitaine au Brésil, puis en Espagne, et devint en 1833 l’époux morganatique de la duchesse de Berry. – Un membre de sa famille, Antonio Lucchesi-Palli, fut ministre du royaume des Deux-Siciles, et mourut en 1873.

MALLEFILLE (Félicien), littérateur français, né à l'île Maurice en 1813, m. en 1868 ; commença sa carrière littéraire à vingt ans, l’interrompit en 1848 pour remplir à Lisbonne une mission diplomatique et la reprit en 1849. On a de lui des romans parmi lesquels on distingue les Mémoires de Don Juan (1847, ouvrage resté inachevé), et des pièces de théâtre qui offrent des situations hardies et un style ferme et vigoureux : Glenarvan, drame, 1836 ; les Sept enfants de Lara, drame, 1836 ; le Cœur et la Dot, comédie, 1852 ; les Mères repenties, drame, 1858 ; les Sceptiques, comédie, 1867 ; les Deux Veuves, comédie, etc.

MANZONI (Alexandre, comte), poëte italien, né à Milan en 1784, m. en 1873. Petit-fils de Beccaria par sa mère, il fit d’excellentes études à Milan, puis à Paris, ou il se lia avec Volney, Garat, de Tracy, Fauriel ; épousa une Génevoise, qu’il convertit au catholicisme ; chanta dans les Inni Sacri (1810) la Nativité, la Passion, la Résurrection ; se déclara en littérature pour le romantisme, qu’il introduisit et popularisa en Italie par deux pièces (le Comte de Carmagnole, 1820 ; Adelchi, 1823) ; donna en 1822, sur la mort de l’Empereur, une ode célèbre : le Cinq Mai ; et mit le sceau à sa réputation par son roman les Fiancés (1827), qui présente un tableau animé de la société italienne au XVIIe siècle. Il vécut depuis dans une retraite absolue voué à la pratique de la religion la plus austère, et fut éprouvé par les pertes de famille les plus cruelles ; il fut nommé néanmoins sénateur du royaume d’Italie en 1860.

MARIE (Alexandre-Thomas), avocat et homme politique français, né en 1797, à Auxerre (Yonne), se distingua de bonne heure au barreau de Paris, m. en avril 1870 ; se signala dans plusieurs procès politiques importants, entre autres celui des accusés de juin 1832, et de Pépin, le complice de Fieschi, etc., et fut bâtonnier en 1840 et 1841. Nommé député de Paris en 1846, il siégea parmi les membres de l’opposition, et prit une part importante à la révolution de février 1848 ; fut membre du Gouvernement provisoire, et, comme ministre des travaux publics, organisa les ateliers nationaux ; fut un des cinq membres de la commission exécutive que renversa l’insurrection de Juin ; devint, sous le gouvernement du général Cavaignac, président de l’Assemblée constituante, et bientôt ministre de la justice ; combattit la politique du prince Louis-Napoléon devenu président de la République ; ne fut pas réélu à la Législative, mais, en 1863, fut envoyé, comme député des Bouches-du-Rhône, au Corps législatif, où il siégea parmi les membres de la gauche.

MARIE-AMÉLIE (de Bourbon), reine des Français, née en 1782 à Caserte, fille de Ferdinand IV, roi des Deux-Siciles ; épousa en 1809 à Palerme le duc d’Orléans, depuis roi des Français (Louis-Philippe) ; s’abstint sur le trône de tout rôle politique, et se consacra tout entière à l’éducation de ses enfants et à des œuvres de charité. Après la révolution de février 1848, elle vécut dans la retraite à Claremont, où elle mourut en 1866.

MAROCHETTI (Charles, baron de), sculpteur français, né à Turin en 1805 de parents naturalisés français, mort en 1868. On lui doit un des bas-reliefs de l’Arc de triomphe de l’Étoile, les statues équestres d’Emmanuel Philibert, du duc d’Orléans, de Napoléon Ier, de Richard Cœur de Lion, et un grand nombre de bustes estimés.

MATHIEU (Philippe-Antoine, dit MATHIEU DE LA DRÔME), né près Romans en 1808, m. en 1865 ; se fit connaître dès 1838 par ses doctrines socialistes, qu’il développa, après la révolution de février 1848, comme membre de la Constituante et de la Législative; rentra dans la vie privée après le coup d’État du 2 décembre 1851, se livra dès lors à des pronostics sur le temps, et publia des Almanachs qui jouirent d’une certaine popularité.

MATHIEU (J.-M.-Adrien-Césaire), prélat français, né à Paris en 1796 ; fit d'abord quelques études de droit et fut gérant des biens de M. de Montmorency ; puis entra dans les ordres, devint en 1823 secrétaire de l’évêque d’Évreux, et bientôt après un des grands vicaires de M. de Quélen, à Paris ; puis évêque de Langres en 1833, il fut promu, en 1834, à l’archevêché de Besançon, poste qu’il occupa jusqu’à sa mort (1875). Nommé cardinal en 1850, il siégea comme tel dans le sénat du second Empire, et prit plusieurs fois une part importante aux discussions relatives à la religion et à l’enseignement. Il fut, en 1865 l’objet d’une sentence d’abus pour avoir lu en chaire, malgré l’interdiction du Gouvernement, l’Encyclique du 8 décembre 1854. Outre ses Mandements, on cite de lui quelques ouvrages de polémique au sujet de la question italienne, notamment : le Pouvoir temporel des papes justifié par l’histoire (1863).

MATHIEU (Claude-Louis), astronome français, né à Mâcon en, 1783, m. en 1875 ; fut successivement élève de l’École polytechnique (1803) et de l’École des ponts et chaussées (1806) ; secrétaire du Bureau des longitudes (1808) ; astronome à l’Observatoire, professeur d’astronomie au Collège de France (1809), membre de l’Académie des sciences (1817) ; député de Saône-et-Loire, à la Chambre des députés, où il siégeait à l’extrême gauche à côté de son beau-frère François Arago (1834-1848) ; fit partie de la gauche à la Constituante, mais, non réélu à l’Assemblée législative, renonça à la vie politique.

MAXIMILIEN (Ferdinand-Joseph), archiduc d’Autriche et empereur du Mexique, né en 1832, était le second fils de l’archiduc François-Charles et le frère de l’empereur François-Joseph Ier ; servit d’abord comme vice-amiral dans la marine autrichienne ; fut quelque temps gouverneur du roy. Lombard-Vénitien ; fut, à la suite de l’expédition française du Mexique et de longues négociations diplomatiques, proclamé empereur par l’Assemblée des notables réunie à Mexico (10 juillet 1863) ; fut salué comme tel en son château de Miramar (Autriche) par une députation mexicaine, accepta la couronne qui lui était offerte et renonça à ses droits éventuels au trône d’Autriche (10 avril 1864) ; fit une entrée triomphale à Mexico (12 juin), et chercha vainement à organiser au Mexique un gouvernement monarchique régulier ; ne put se soutenir contre Juarez, président de l’ancienne république que soutenaient les États-Unis ; refusa de se retirer avec l’armée française, lorsqu’elle évacua le Mexique (13 mars 1867) ; continua seul une lutte inégale, fut pris à Queretaro (15 mai), livré à Juarez, condamné à mort par un conseil de guerre, et fusillé (19 juin). Ce prince avait un caractère aventureux, un esprit passionné pour les lettres et les arts. On a publié et traduit en français ses impressions de voyage, sous le titre de Mémoires de l’emp. Maximilien (1868). Il avait épousé l’une des filles du roi des Belges, Léopold Ier, qui devint en 1864 l’impératrice Charlotte, et dont la santé fut cruellement atteinte par ses revers. – On a sur Maximilien des études histor. de M. de Kératry et de M. Domenech.

MAZZINI (Joseph), homme politique italien, né à Gênes en 1808, mort en 1872. Il étudia le droit, mais quitta bientôt le barreau pour la littérature et la politique, et débuta par des articles de journaux et de revues, où il soutenait le mouvement romantique imprimé par Manzoni à la littérature italienne. Il s’affilia en 1830 aux Carbonari ; fut arrêté, et, après six mois de prison, condamné à quitter l’Italie. Retiré à Marseille, il y fonda en 1831 la société dite la jeune Italie, qui avait pour devise Dio e popolo, et pour but l’affranchissement de l’Italie, l’établissement d’une société démocratique et la lutte contre le catholicisme. Il souleva en Piémont des mouvements insurrectionnels, qui furent écrasés (1833 et 1834) ; vécut plusieurs années en Suisse, puis à Londres, d’où il s’entendait avec les comités révolutionnaires de Paris, et revint, après la révolution de 1848, en Italie pour y organiser une propagande nationale et républicaine. Après le meurtre de Rossi et la fuite du pape à Gaëte, il vint proclamer à Rome la république, et fut nommé dictateur avec deux collègues, Armellini et Safti inspira la constitution républicaine qui fut rédigée par une assemblée constituante, et fut l’âme de la résistance contre l’expédition française de 1849. Réfugié de nouveau à Londres, il y présida le comité national italien ; vint en 1853 provoquer sans succès à Milan une insurrection contre la domination autrichienne, sut échapper aux recherches de la police, et revint à Londres continuer son œuvre révolutionnaire. L’affranchissement de l’Italie s’accomplit en 1859, grâce à la politique du comte de Cavour ; et son unité se fit dans les années suivantes au profit du roi Victor-Emmanuel et en dehors de l’influence de Mazzini, qui fut accusé d’avoir mis, dans l’intérêt de la cause républicaine, des entraves au succès de la cause nationale. – Mazzini était le représentant le plus célèbre et le plus original de l’esprit révolutionnaire en Europe : il avait une rare puissance pour trouver des instruments résolus et dévoués ; il était éloquent, et exerçait un grand prestige par sa tenue austère et par la rigidité de sa vie privée. On lui a reproché d’avoir rarement payé de sa personne dans les soulèvements qu’il provoquait et de n’avoir pas reculé, pour l’exécution de ses desseins, devant l’idée de l’assassinat : il fut impliqué en 1857 et en 1864 dans des complots contre la vie de Napoléon III.

MÉLINGUE (Étienne Marin), acteur français, né à Caen en 1812, m. en 1875 ; fut d’abord sculpteur, puis peintre miniaturiste ; fit ses débuts au théâtre de Rouen, et obtint de grands succès sur les scènes de la Porte-Saint-Martin, de la Gaîté et de l’Ambigu. Ses principaux rôles ont été Buridan dans la Tour de Nesle et Chicot dans la Dame de Montsoreau. On a de lui quelques statuettes ; dans le drame de Benvenuto Ceilini, il reproduisait à chaque représentation son Hébé. – Sa femme (née à Bordeaux en 1813) a longtemps joué la tragédie à l’Odéon et au Théâtre-Français.

MÉRIMÉE (Prosper), littérateur français, né à Paris en 1803, mort en 1870. Fils d’un peintre de mérite, il s’occupa de bonne heure de littérature, en suivant la carrière de l’administration. D’abord secrétaire du comte d’Argout (1830), il devint secrétaire du ministère du commerce, chef de bureau à la marine, enfin inspecteur des monuments historiques de France. Il a publié plusieurs romans ou nouvelles : la Chronique du règne de Charles IX (1829) ; la Double méprise, Colomba, le Vase étrusque, la Vénus d’Ille (de 1830 à 1840) ; des essais dramatiques dans le goût de l’école romantique : le Théâtre de Clara Gazul (1825) ; enfin divers travaux historiques et archéologiques : Études sur '’histoire romaine (1841) ; Histoire de Don Pèdre Ier, roi de Castille (1843) ; les Faux Démétrius (1854); Mélanges historiques et littéraires (1855). On a donné de lui en 1873 une correspondance intéressante : Lettres à une inconnue. Les œuvres de Mérimée se distinguent toutes par un style d’une élégante sobriété. Il était membre de l’Académie française, et Napoléon III le nomma sénateur.

MÉRY (Joseph), littérateur français, né aux Aygalades, près Marseille, en 1798, m. en 1866 ; débuta dans des journaux de Marseille ; vint à Paris en 1824, publia avec Barthélemy la Villéliade (1826), satire politique, et le poëme héroïque de Napoléon en Égypte (1847) ; a donné depuis, outre des Mélodies poétiques (1853), de nombreux romans, écrits avec beaucoup d’imagination et de verve (Scènes de la vie italienne, Héra, la Floride, etc.), et quelques pièces de théâtre dont plusieurs ont été réunies sous ce titre : Théâtre de salon (1861).

MEYERBEER (Giacomo), né à Berlin en 1794, d’un riche banquier juif, m. en 1864 ; annonça de bonne heure les plus heureuses dispositions pour la musique ; se lia à Darmstadt avec Weber, étudia avec lui l’harmonie sous la direction de l’abbé Vogler, organiste de la cathédrale, et composa plusieurs oratorios qui eurent un grand succès ; donna en 1812, à Munich, et en 1814, à Vienne, ses premiers opéras : le Vœu de Jephté et Abimélech, auxquels on reprocha de manquer de chaleur et de mouvement ; reçut alors de Salieri le conseil d’étudier Rossini et la musique italienne, et acquit dans la pratique de ces nouveaux modèles plusieurs des qualités qui lui manquaient. Romilda e Constanza (1811), Sémiramide (1819), Emma, Margarita (1820), l’Esule di Grenata, I Crociata in Egitto (1825), opéras joués en Italie, marquèrent dans son talent une nouvelle phase, qui ne fut pas la dernière. Après s’être recueilli plusieurs années, pendant lesquelles, sous le coup de malheurs de famille, il composa de la musique religieuse (Stabat, Miserere, Te Deum, Psaumes, Cantiques), il donna une suite d’œuvres remarquables où l’on retrouve les qualités de sa seconde manière avec plus de vigueur et d’originalité : Robert le Diable (1831), les Huguenots (1836), le Prophète (1849), l’Étoile du Nord (1854), l’Africaine (œuvre posthume jouée en 1865).

MICHELET (Jules), historien français, né à Paris en 1198. après de brillantes études au lycée Charlemagne et un remarquable concours d’agrégation, il professa l’histoire et la philosophie au collége Rollin de 1821 à 1826 ; publia des Tableaux synchroniques de l’Histoire moderne, un Précis de l’Histoire moderne, remarquable par la netteté et la vivacité de l’exposition, et une traduction de Vico avec une étude sur l’auteur de la Scienza nuova, sous le titre de Principes de la philosophie de l’histoire (1827) ; fut nommé maître de conférences à l’École normale, et, après la révolution de 1830, chef de la section historique aux Archives du royaume ; publia en 1831 une Histoire romaine (2 vol. in-8) ; donna en 111 : le 1er volume de son Histoire de France, suivi depuis de 14 autres publiés par intervalles ; fut en 1834-35 suppléant de M. Guizot à la Sorbonne ; devint en 1838 membre de l’Académie des sciences morales et politiques, et succéda, au Collége de France, à Daunou dans la chaire d’histoire et de morale, dont il fit une sorte de tribune et où, de concert avec son collègue et ami M. Quinet, il continua par voie d’allusions plus ou moins détournées la propagande démocratique et anticatholique qu’il faisait en même temps dans des ouvrages de polémique : des Jésuites (1843) ; du Prêtre, de la femme et de la famille (1844) ; du Peuple (1846) ; Histoire de la Révolution, dont le 1er volume parut en 1847. Son cours fut fermé à la fin de l’année 1847 ; après la révolution de 1848, il déclina toute candidature à l’Assemblée nationale, pour se consacrer À ses travaux historiques, et remonta dans sa chaire, qui lui fut de nouveau interdite après le coup d’État du 2 décembre 1851. Il renonça, par refus de serment, à sa place aux Archives. Dans la retraite où il vécut jusqu’à sa mort (1874), il continua sa grande Histoire de France et son Histoire de la Révolution, publia quelques nouveaux livres de polémique, comme la Bible de l’humanité (1864) ; et, ayant contracté un second mariage avec une femme qui cultivait elle-même les lettres, et qui l'aida dans ses derniers ouvrages, il donna une série de publications fantaisistes et quelquefois étranges : l’Oiseau, l’Insecte, la Mer, la Femme, l’Amour (1857-1861). — Ce n’est pas seulement dans ces livres que M. Michelet a donné carrière à une imagination un peu aventureuse ; il lui a fait une place même dans ses ouvrages historiques, ce qui nuit souvent à ses qualités sérieuses, qui sont la pénétration, la finesse, l’étude approfondie des sources. Aux ouvrages déjà cités, il faut joindre une traduction des Mémoires de Luther (1835, 2 vol. in-8), une traduction des Œuvres choisies de Vico (1835, 2 vol. in-8), les Origines du droit français cherchées dans les symboles et formules du droit universel (1837, in-8), le Procès des Templiers, dans la Collection des Documents inédits sur l’histoire de France, etc.

MILL (John Stuart), économiste et philosophe anglais, né à Londres en 1806, m. en 1873 ; était fils d’un historien distingué, auteur de l’Histoire des Indes britanniques ; devint comme son père, un des principaux fonctionnaires de la Compagnie des Indes, puis député à la Chambre des communes où il proposa d’accorder aux femmes le droit de vote (1867). Ses principaux ouvrages sont : Système de Logique (1843) ; Principes d’économie politique (1848), ouvrage qui le place au premier rang des promoteurs du libre échange et dans lequel il reprend et pousse à outrance les théories de Malthus sur la population ; la Liberté ; le Gouvernement représentatif ; Aug. Comte et le positivisme ; de l’Émancipation des femmes. Il a collaboré au Journal des économistes. Il était membre correspondant de l’Institut.

MIRVILLE (Ch.-J.-Eudes de Catteville, marquis de), né en 1802, m. en 1813 ; s’est fait un nom parmi les partisans du spiritisme par son livre sur les Esprits et leurs manifestations diverses (1853).

MOHL (Jules de), orientaliste français, né à Stuttgart en 1800, m. en 1875 ; fut d’abord élève en théologie en Allemagne et en Angleterre, puis se voua à l’étude des langues orientales, surtout du persan, fut élève d’Abel Rémusat et de S. de Sacy, se fit naturaliser Français, et devint en 1844 membre de l’Académie des inscriptions et belles-lettres, et en 1847, (professeur de persan au Collége de France. On lui doit la publication de Fragments relatifs à Zoroastre (texte persan, 1829) et la traduction du Schah Nameh de Firdousi (1838-1855, 4 vol. in-fol.).

MONNIER (Henri), littérateur et artiste français, né à Paris en 1799, m. en 1877 ; se distingua de bonne heure par son talent pour la caricature, et saisit également avec esprit les ridicules contemporains dans quelques ouvrages satiriques intitulés Scènes populaires (1831) ; Nouvelles scènes populaires (1835) ; les Bourgeois de Paris (1854) ; les Mémoires de Joseph Prudhomme (1857). Il a fait de ce dernier livre une comédie, qui fut son principal succès au théâtre, pour lequel il a également travaillé, la Grandeur et la décadence de Joseph-Prudhomme (1852). Sa principale création est Joseph Prudhomme, type du bourgeois ignorant, mais vaniteux, grand diseur de phrases emphatiques et vides de sens.

MORSE (Samuel-Finley-Breese), physicien américain, né à Charlestown (Massachusetts) en 1791, m. en l872 ; fut d’abord artiste peintre, et construisit en 1835 le Télégraphe écrivant dit Télégraphe de Morse, appareil qui a été adopté successivement en Amérique, en Allemagne et (1856) en France.

MUNOZ (Fernando), mari de la reine douairière d’Espagne, né en 1810, m. en 1873 ; était simple garde du corps, lorsqu’il fut remarqué par la veuve de Ferdinand VII, Marie-Christine, qui l’épousa, d’abord en secret, puis publiquement (1844) ; devint duc de Rianzarès et grand d’Espagne, mais se refusa toujours à jouer un rôle politique.

NAPOLÉON III (Charles-Louis-Napoléon BONAPARTE), empereur des Français, né à Paris aux Tuileries, le 20 avril 1808, mort en exil à Chislehurst (Angleterre), le 9 janvier 1873. Il était le 3e et dernier fils de Louis Bonaparte, roi de Hollande, et de la reine Hortense. L’aîné de ses frères mourut en bas âge. Après la chute de l’Empire, il séjourna avec sa mère et son second frère sur différents points de la frontière est de la France, et surtout en Suisse, au château d’Arenenberg. Après 1830, il prit part au mouvement italien en compagnie de son frère Charles-Louis, qui mourut de maladie à Forli ; et il faillit périr de même à Ancône (1831). Par la mort du duc de Reichstadt, il devint, en vertu des sénatus-consultes qui avaient réglé la succession impériale, le représentant direct de la dynastie napoléonienne, et commença à porter ombrage à la monarchie de Juillet, qui fit renouveler la loi de bannissement contre la famille Bonaparte (1832). De sa retraite d’Arenenberg il publia, de 1832 à 1836, divers ouvrages politiques et militaires (il était capitaine au 3e régiment d’artillerie de Berne) : Rêveries politiques ; Projet de constitution ; Confédérations politiques et militaires sur la Suisse ; Manuel d’artillerie à l’usage des officiers de la République helvétique. Le 26 octobre 1836, il essaya, à Strasbourg, avec le concours du colonel Vaudrey, de provoquer un mouvement militaire et de renverser le roi Louis-Philippe, fut arrêté, puis, après une courte détention, dirigé sur Lorient et débarqué aux États-Unis. Il revint bientôt en Europe, et séjourna quelque temps à Londres, où il publia les Idées napoléoniennes (1838). Le 6 août 1840, il fit à Boulogne une nouvelle tentative pour rétablir la dynastie napoléonienne, et cette fois fut traduit devant la Chambre des pairs : défendu par Berryer, il fut condamné à l’emprisonnement perpétuel, et enfermé au château de Ham. Il y écrivit plusieurs articles de journaux et divers opuscules (Fragments historiques ; de l’Extinction du paupérisme) ; étant parvenu à s’évader, le 26 mai 1846, il passa en Belgique, et de là en Angleterre. Après la révolution de février 1848, il vint immédiatement à Paris : invité par le Gouvernement provisoire à s’éloigner, il y consentit et se tint à l’écart lors des élections générales pour la Constituante ; mais, aux élections partielles de juin, il fut élu à Paris et dans trois départements. Son élection fut validée, malgré la commission exécutive, qui voulait faire revivre la loi de bannissement de 1832 ; mais, se voyant accusé de se poser en prétendant, il donna sa démission deux jours après son entrée à la Chambre, et retourna en Angleterre. Réélu en septembre de la même année par cinq départements, il revint en France, prit part aux travaux législatifs, et vota pour l’ensemble de la Constitution. Le 10 décembre, il fut élu président de la République par 5 334 226 voix contre 1 779 152 réparties entre ses concurrents. Il gouverna d’abord, pendant les derniers mois de la Constituante, avec un ministère pris dans les différentes fractions de la majorité, dont M. Odilon Barrot était le chef, et sous lequel fut entreprise l’expédition contre la République romaine. Dès la réunion de l’Assemblée législative, le siège de Rome provoqua de la part de la Montagne une demande de mise en accusation contre le Président et ses ministres, et amena l’émeute du 13 juin, aussitôt réprimée. En octobre 1849, il remplaça le ministère Odilon Barrot par un cabinet nouveau, sous lequel furent présentées et votées la loi du 31 mai, restrictive du suffrage universel, et quelques autres lois d’un caractère également répressif. L’approche des élections présidentielles, qui devaient avoir lieu en 1852, fut le signal de vives agitations dans le pays : les socialistes se livraient à une, propagande active, tandis que les partisans des dynasties de Bourbon et d’Orléans faisaient dans l’Assemblée une opposition plus ou moins directe au Président, qu’ils soupçonnaient d’aspirer à l’empire. Il chercha à modifier cette situation en révoquant de ses fonctions de commandant de l’armée et des gardes nationales de Paris le général Changarnier, que la partie monarchique de la Chambre considérait comme devant être le soutien d’une restauration. Après un essai de rapprochement, marqué par le ministère de conciliation du 10 avril, de nouveaux dissentiments éclatèrent : les amis de la présidence ayant demandé la révision de la Constitution, cette proposition devint l’objet de nombreuses manifestations et de pétitions appuyées par quatre-vingts conseils généraux. Le 14 octobre, un nouveau ministère proposa cette révision ainsi que l’abrogation de la loi du 31 mai : il soumit un projet de loi électorale à l’Assemblée, qui la rejeta, mais qui n’alla pas jusqu’à voter la proposition des questeurs ayant pour objet de donner au président de l’Assemblée le droit de réquisition directe de la force armée, en cas d’une tentative faite contre elle. La situation n’en était pas moins tellement tendue que tout le monde s’attendait à un conflit entre le Président et l’Assemblée. C’est dans ces conditions que, durant la nuit du 1er au 2 décembre, il fit garder à vue le président de l’Assemblée par la force armée, fit arrêter les principaux chefs du parti républicain et des partis royalistes, et lança deux proclamations, l’une au peuple, l’autre à l’armée, annonçant que l’Assemblée nationale était dissoute, la loi du 31 mai abrogée, le suffrage universel rétabli, et le peuple français convoqué dans ses comices pour se prononcer sur les bases d’une Constitution renouvelée du système du premier consul. Ce coup d’État, préparé avec l’énergique concours de M. de Morny, du général Saint-Arnaud et du préfet de police, M. de Maupas, triompha de toutes les résistances : une Haute Cour, instituée par la Constitution de 1848, fut dispersée avant d’avoir pu formuler un arrêt mettant en accusation le président de la République ; plus de deux cent vingt représentants, qui, réunis dans la mairie du 10 arrondissement, avaient décrété la déchéance du Président et investi le général Oudinot du commandement de la garde nationale et des troupes, furent également dispersés par la force ; la mise en état de siége de Paris et de la plupart des départements réprima ou prévint les mouvements populaires. Les faits accomplis furent sanctionnés par le suffrage universel : au plébiscite des 20 et 21 décembre, 7 439 216 voix, contre 740 737 opposants, donnèrent au prince Louis-Napoléon, avec les pouvoirs constituants, la présidence pour dix années. Le 14 janvier 1852 fut promulguée la nouvelle Constitution, qui instituait un Corps législatif élu par la nation, un Sénat et un conseil d’État recrutés par le pouvoir, et qui soumit au serment tous les fonctionnaires et les membres du Corps législatif. Le 22 janvier parut un décret qui confisquait les biens de la famille d’Orléans. La Constitution présidentielle ne dura que quelques mois. De divers côtés s’élevèrent des vœux pour le rétablissement de l’Empire, vœux qui furent encouragés par un voyage du prince-président à travers la France. Un nouvel appel fut fait au suffrage universel, et, au plébiscite des 21 et 22 novembre, le rétablissement de l’Empire fut voté par 7 824 129 voix : contre 253 145. Le prince fut proclamé empereur le 2 décembre 1852 sous le nom de Napoléon III. Il épousa, le 29 janvier suivant, Marie-Eugénie de Gusman, comtesse de Téba, fille du comte de Montijo, et eut de ce mariage, le 16 mars 18561 le prince impérial Napoléon-Louis-Jean-Joseph. Les principaux faits du règne de Napoléon III sont : 1o  à l’intérieur, l’amnistie pour délits politiques, d’abord conditionnelle (1852), puis pleine et entière (1859) ; la loi municipale de 1855, d’après laquelle le maire et les adjoints pouvaient être pris en dehors du conseil municipal et nommés par l’Empereur, et d’après laquelle les villes de Paris et Lyon étaient administrées par une commission nommée par décret impérial ; la loi de sûreté générale (1858), qui armait le Gouvernement d’un pouvoir discrétionnaire à l’égard des individus condamnés pour délits politiques, loi amenée par les attentats répétés contre la vie de l’Empereur (Pianori, 1855 ; Orsini, 1858, etc.), et rapportée en 1870 ; l’institution d’un conseil privé qui, en cas de mort de l’Empereur, devait former un conseil de régence ; les diverses tentatives de transformation de « l’Empire autoritaire » en « Empire libéral », notamment les décrets du 24 nov. 1860, qui augmentaient les attributions du Corps législatif, et établissaient des ministres sans portefeuille pour défendre devant cette Assemblée et devant le Sénat les projets du Gouvernement (MM. Baroche, Billault, Rouher), et la formation du ministère du 2 janvier 1870, dont M. Émile Ollivier devenait le chef ; enfin le plébiscite du 8 mai 1870, ayant pour objet de ratifier les réformes accomplies et de sanctionner à nouveau l’existence de l’Empire, et qui donna 7 160 341 voix favorables, et 1 523 628 contraires ; les voyages de l’Empereur dans les différentes parties de la France et jusqu’en Algérie ; les visites à Paris de presque tous les souverains de l’Europe ; les Expositions universelles de 1855 et de 1867 ; l’agrandissement de Paris par l’annexion des communes comprises dans l’enceinte des fortifications (1860), et la transformation prodigieuse de la capitale poursuivie par l’activité entreprenante du préfet de la Seine, M. Haussmann ; la jonction du Louvre aux Tuileries (1852-1857) ; une grande extension donnée aux travaux publics, non-seulement dans les grandes villes, mais dans les campagnes ; l’agrandissement du réseau des voies ferrées et des routes ; la transformation de la flotte ; la création de la grande navigation à vapeur transatlantique ; la formation de grandes Sociétés de crédit (Crédit foncier, Crédit mobilier, etc.) ; l’inauguration d’un système d’emprunts faits directement à la nation (emprunts de 1854, 1855,1859, 1864, 1870) ; le développement des Concours et Comices agricoles ; l’inauguration de la liberté commerciale par le rejet du système prohibitif et la conclusion de traités de commerce (1860) ; les encouragements donnés à l’instruction primaire et surtout aux cours d’adultes ; la création ou l’extension de nombreuses Sociétés de bienfaisance ; — 2o  à l’extérieur, la fin de la conquête de l’Algérie par une suite de campagnes et par la soumission de la Kabylie (1857) ; la guerre contre la Russie, entreprise (février 1854) avec l’alliance de l’Angleterre, et plus tard avec le concours du Piémont, signalée par la double expédition de la Baltique et de la Crimée, terminée par la prise de Sébastopol (sept. 1855), le Congrès et le Traité de Paris (20 mai 1856) ; l’expédition faite en Chine, de concert avec l’Angleterre, et bientôt terminée par le Traité de Tien-Tsin (1857), mais, après la violation de ce Traité, suivie d’une autre expédition anglo-française, qui fut signalée par la victoire de Palikao et la prise de Pékin (avril-octohre 1860) ; l’expédition contre l’Empire annamite, et l’établissement d’une colonie dans la basse Cochinchine (1862) ; la guerre contre l’Autriche, en faveur du roi de Piémont, Victor-Emmanuel (mai 1859) terminée par les préliminaires de Villafranca (4 juillet), et le Traité de Zurich (10 sept.), guerre qui préparait l’unité de l’Italie (accomplie en 1860 et 1861 par une suite d’insurrections à Parme, à Modène, en Toscane, dans les États Napolitains et Romains), et qui créait à côté de la France un grand royaume dont elle obtenait, comme garantie, les versants français des Alpes, Nice et la Savoie ; l’occupation de Rome par les troupes françaises, prolongée au milieu de tous ces événements, et qui ne prit fin qu’à la faveur des désastres de 1870 ; l’appui donné jusqu’à ce moment au pape pour le maintien de son pouvoir temporel dans les limites du patrimoine de saint Pierre, nonobstant l’opposition faite aux doctrines du Syllabus et l’interdiction de publier en France la deuxième partie de l’Encyclique du 8 décembre 1864 ; l’expédition de Syrie, à la suite du massacre des Maronites par les Druses, et l’occupation momentanée de cette province turque, avec le consentement des puissances européennes (1860-61) ; l’expédition contre le Mexique, entreprise d’abord (décembre 1861) de concert avec l’Espagne et l’Angleterre, puis (février 1862) poursuivie par la France seule, signalée par la prise de Mexico (4 juillet 1863) et aboutissant à la proclamation comme empereur du Mexique de l’archiduc d’Autriche Maximilien, qui, après la retraite de l’armée française (mars 1867), fut renversé et fusillé par Juarez (juin 1867) ; enfin, sous le ministère Ollivier, une guerre contre la Prusse (15 juillet 1870), à laquelle prirent part aussitôt toutes les autres puissances de l’Allemagne, et qui, après une série de revers, amena la prise de l’Empereur à Sedan (1er septembre), sa captivité à Wilhemshœhe (où il travailla avec le maréchal Bazaine à un rapport, encore inédit) sur les faits militaires de 1870), la déclaration de sa déchéance et de celle de sa dynastie, proclamée par le mouvement insurrectionnel du 4 septembre, et renouvelée par l’Assemblée nationale de Bordeaux (1er mars 1871), mesure contre laquelle il protesta au nom du droit plébiscitaire. — Malgré les désastres qui ont marqué la fin de son règne, Napoléon III laissera une grande place dans l’histoire, pour avoir donné à la France pendant quelques années en Europe un rôle prépondérant, et surtout pour avoir développé dans de grandes proportions sa prospérité agricole et industrielle, et pour l’avoir fait entrer dans les voies de la liberté commerciale. — Napoléon III a beaucoup écrit, soit avant, soit après son avènement au trône. On a publié ses OEuvres (1854-57, 4 vol. in-8), et séparément ses Œuvres militaires (1856, in-8). Il faut y ajouter, outre ses Proclamation et ses Messages au Corps législatif, une brochure intitulée : Politique de la France en Algérie, 1865, et l’Histoire de Jules César, 2 vol. in-8, 1865-69.

NARVAEZ (Ramon-Marie), général et h. politique, né à Loja (Andalousie) en 1800, m. en 1868 ; servit d’abord sous Ferdinand VII ; fut, en 1836, un des soutiens de la reine Isabelle, et mit en déroute le général carliste Gomez ; devint dès lors le rival d’Espartero, lui succéda au pouvoir en 1844, et fut nommé président du Conseil et duc de Valence ; se signala par une série de mesures réactionnaires (rappel de la reine mère Marie-Christine, révision de la constitution de 1837, restriction de la liberté de la presse, etc.) ; fut à son tour renversé en 1848 ; revint au pouvoir en 1849, puis en 1856, où il remplaça O’Donnell, enfin en 1864, et, dans chacun de ses passages au ministère resta fidèle à la politique qu’il avait soutenue dès l’abord. Il avait été élevé au maréchalat.

NÉLATON (Auguste), célèbre chirurgien français, né en 1801, m. en 1873. Élève de Dupuytren il s’est illustré, non-seulement comme praticien, mais comme professeur à la Faculté de médecine, et comme savant. On lui doit l’invention d’une opération pour l’extraction de la pierre, en dehors des procédés de lithotripsie. Ses principaux ouvrages sont : Traité des tumeurs de la mamelle (1839) ; Parallèle des différents modes opératoires dans le traitement de la cataracte (1860) ; Éléments de pathologie chirurgicale (5 vol. in-8, 1844-59).

NETTEMENT (Alfred), littérateur français, né à Paris en 1805, mort en 1869 ; fut un des soutiens de la cause légitimiste, qu’il défendit dans la Quotidienne, la Mode, la Gazette de France, etc., et à l’Assemblée législative (1849). Il a laissé plusieurs ouvrages estimés : Histoire de la révolution de Juillet (1833) ; Histoire de la littérature française sous ta Restauration et sous la royauté de Juillet (1852), etc.

NIEL (Adolphe), maréchal de France, né à Muret en 1802, mort en 1869. Élève distingué de l’École polytechnique, il entra dans le génie et gagna tous ses grades jusqu’à celui de colonel en Algérie. Nommé général de brigade après l’expédition de Rome (1849), il fut chargé pendant plusieurs années de la direction du génie au ministère de la guerre, fut nommé général de division (1855), et dirigea les travaux du génie d’abord à Bomarsund, puis à Sébastopol (1855). Il prit une part brillante à la bataille de Solférino (1859), et fut nommé maréchal de France, puis (1867-1869) ministre de la guerre : comme tel, il entreprit d’organiser la garde mobile ; mais ses plans furent abandonnés par son successeur, le maréchal Lebœuf.

O’DONNELL (Léopold), gén. et h. politique espagnol, né en 1808, m. en 1867 ; servit d’abord sous Ferdinand VII ; se déclara pour Isabelle, combattit les Carlistes, et reçut de la régente le titre de comte de Lucena et le grade de lieutenant général (1833) ; s’efforça de soutenir la régente contre le parti d’Espartero et, lors du triomphe de celui-ci, déposa son commandement et suivit la reine mère en exil (1836) ; fut, après la chute d’Espartero, envoyé comme capitaine général à Cuba ; fut, à son retour, nommé sénateur et joua un grand rôle dans toutes les intrigues de cour qui remplirent le règne d’Isabelle ; se mit en juin 1854 à la tête du mouvement militaire et politique de Vicalvaro, qui rallia les progressistes, et dont les partisans sont désignés du nom de vicalvaristes, réclama le rétablissement de la constitution de 1837 et le bannissement de la reine mère, arriva au pouvoir comme ministre de la guerre, sous la présidence d’Espartero, son ancien adversaire ; parvint un instant à éliminer Espartero et à prendre sa place, mais se vit bientôt remplacé lui-même par Narvaez (octobre 1854) ; revint en 1858 au pouvoir, qu’il conserva jusqu’en 1863, et y gagna le titre de duc de Tétuan et le grade de maréchal dans une guerre heureuse contre le Maroc ; redevint un an ministre et président du conseil en 1865, fit reconnaître par l’Espagne le royaume d’Italie et eut à réprimer les agitations des progressistes fomentées par le général Prim.

OLOZAGA (don Salustiano), h. politique espagnol, né à Logrono vers 1803, m. en 1873 ; fut emprisonné en 1831 pour conspiration contre Ferdinand VII ; rentra en Espagne en 1833 ; devint député, chef de l’opposition monarchique, ambassadeur à Paris (1840-1843) ; fut chargé, à la majorité de la reine Isabelle (1843), de former un nouveau cabinet, essaya de dissoudre les Cortès, mais, ayant échoué, dut s’exiler quatre ans en Angleterre ; revint en Espagne en 1847 sur la foi de l’amnistie, fut réélu aux Cortès, mais emprisonné par Narvaez, puis relâché, condamné à l’exil, rappelé sous la pression des agitations populaires ; se remit à la tête du parti progressiste, prit une grande part à la Constitution de 1855 ; fut relégué au second plan par le triomphe du général O’Donnel (1856), mais fut de nouveau envoyé ambassadeur à Paris par le gouvernement provisoire de 1868.

ORTOLAN (Joseph-Louis-Elzéar), jurisconsulte français, né à Toulon (Var) en 1802, m. en 1873 ; fut d’abord professeur libre, puis occupa de 1836 à 1873 la chaire de législation générale comparée à l’École de droit de Paris ; a publié plusieurs ouvrages estimés, qui ont eu plusieurs éditions : Explication historique des Institutes de Justinien (1827) ; Hist. de la législation romaine (1828) ; Hist. du droit constitutionnel en France pendant le moyen âge (1831) ; Éléments du droit pénal (1866), et un volume de poésie : les Enfantines (1845). Son frère (Thédore Ortolan), officier de marine, né en 1808, a publié un important ouvrage de droit maritime : Règles internationales et diplomatie de la mer (2 vol. in-8, 1844).

OTHON Ier (Frédéric-Louis), roi de Grèce, naquit en 1815, du roi Louis Ier de Bavière, dont il était le second fils, m. en 1867 ; fut appelé à 17 ans au trône de Grèce par le protocole de Londres (7 mai 1832), avec un conseil de régence composé de Bavarois ; prit en main l’autorité à 20 ans, provoqua dès l’abord des soulèvements populaires en conservant comme président du conseil le chef de l’ancien conseil de régence, le comte d’Armansperg, qu’il ne révoqua que deux ans après (1837) ; se vit forcé par la révolution de septembre 1843 à accorder une constitution, qui fut modelée sur la Charte française de 1830, mais qui ne fonctionna que péniblement dans un pays sans expérience du gouvernement constitutionnel ; essaya de se rattacher les esprits à l’occasion des indemnités revendiquées à main armée par l’Angleterre (1849), et surtout lors de la guerre d’Orient, où il partagea l’émotion et les espérances de son peuple, et toléra, peut-être même encouragea l’envahissement des provinces turques par des bandes armées, ce qui amena l’occupation du Pirée par une division anglo-française (1854). Après un long voyage en Allemagne (1861), il fut en butte à une suite de conspirations militaires et d’émeutes qui amenèrent sa déchéance (23 oct. 1862).

PACINI (Jean), compositeur italien, né à Catane en 1796, m. en 1867 ; est auteur d’une trentaine d’opéras, parmi lesquels on distingue Giovanna d’Arco.

PATIN (Henri-Jean-Guillaume), professeur et littérateur français, né à Paris en 1793, m. en 1876 ; fut élève et bientôt maître de conférences à l’École normale, puis professeur de rhétorique au collége Henri IV ; se fit connaître par plusieurs prix académiques (Éloges de Bernardin de Saint-Pierre, de Lesage, de Bossuet, etc., qu’il a depuis réunis, avec quelques morceaux de choix, dans ses Mélanges de littérature ancienne et moderne, 1840) ; fut un instant suppléant de M. Villemain à la Faculté des lettres de Paris (1830) et y obtint en 1833 la chaire de poésie latine qu’il occupa avec la plus grande distinction pendant plus de trente ans ; il devint doyen en 1865. Un livre remarquable par l’érudition et le goût, sinon par le talent de style (Études sur les tragiques grecs), lui ouvrit, en 1843, l’Académie française dont il devint secrétaire perpétuel en 1870, à la mort de M. Villemain. On lui doit encore de savantes Études sur la poésie latine (1869).

PAYEN (Anselme), chimiste français, né à Paris en 1795, mort en 1871. Fils d’un grand industriel, il se fit élève de Vauquelin, de Chevreul et de Thenard pour être plus en état de seconder son père dans ses exploitations. À partir de 1823, il dirigea une fabrique de sucre à Vaugirard, où il essaya plusieurs procédés et amena dans la fabrication des progrès qui permirent d’abaisser le prix des produits. Il fut chargé, en 1835, de suppléer M. Dumas dans la chaire de chimie appliquée aux arts et à l’agriculture ; devint l’année suivante titulaire de cette chaire, et membre du Conseil des arts et manufactures, puis professa le même cours au Conservatoire des arts et métiers. Il a été membre et rapporteur de plusieurs jurys de l’industrie française, membre de l’Académie des sciences (1842) et correspondant de la plupart des Sociétés savantes de l’Europe. Il a laissé plusieurs ouvrages estimés : Traité élémentaire des réactifs ; Traité de la pomme de terre ; Mémoire sur le houblon, et Traité de la fabrication de diverses sortes de bières (1822-1829) ; Manuel du cours de chimie organique appliquée aux arts industriels et agricoles (1841-1843) ; Traité de la distillation des principales substances qui peuvent fournir de l’alcool, etc., etc.

PELOUZE (Théophile-Jules), chimiste français, né à Valognes en 1807, m. en 1867 ; passa plusieurs années dans le laboratoire de Gay-Lussac qu’il suppléa à l’École polytechnique en 1831 ; remplaça ensuite le baron Thenard au Coll. de France, et acheva sa carrière à la Monnaie, où il fut successivement (1833-48) essayeur, vérificateur et président de la Commission des monnaies. Il était de l’Académie des sciences depuis 1837. On lui doit plusieurs découvertes (éther œnanthique, coton-poudre, etc.), un important Traité de Chimie en collaboration avec M. Frémy (1853-56, 6 vol. in-8) et de nombreux mémoires insérés dans les Annales de physique et de chimie.

PÉRIER (Auguste-Casimir), homme politique français, né à Paris en 1811, mort en 1877 ; était le fils aîné du célèbre ministre de Louis-Philippe ; entra dans la carrière diplomatique et devint ministreplénipotentiaire au Hanovre ; quitta ses fonctions diplomatiques en 1846 pour venir siéger à la Chambre des députés ; fit partie de la Législative en 1849, et soutint d’abord la politique de L. Napoléon, mais fut parmi ceux qui protestèrent contre le coup d’État du 2 décembre ; s’occupa, sous l’Empire, de grands travaux agricoles dans ses propriétés du département de l’Aube, et y resta au moment de l’invasion, tandis que son fils servait dans un bataillon de mobiles ; fut emprisonné par les Allemands ; fut nommé représentant du peuple à l’Assemblée nationale de 1871 par trois départements, et se fit remarquer par sa compétence dans les questions financières ; devint, sous la présidence de M. Thiers, ministre de l’intérieur, du 11 octobre 1871 au 2 février 1872, et se distingua dans ce poste par une franche adhésion aux institutions républicaines en même temps que par la défense résolue des principes conservateurs. — Il a Publié quelques études d’économie politique : le Traité avec l’Angleterre, 1860 ; les Finances de l’Empire, 1861 ; la Réforme financière, 1862 ; les Finances et la Politique, 1863 ; les Sociétés de coopération, 1864 ; etc.

PERRAUD (J.-Joseph), sculpteur français, né à Morey (Jura), en 1821, m. en 1877 ; fut élève de MM. Ramey et Dumont, et se signala par un sentiment profond de l’art antique : son Enfance de Bacchus a obtenu la médaille d’honneur à l’Exposition de 1863.

PERSIGNY (Jean-Gilbert-Victor FIALIN DE), homme politique français, né à Saint-Germain-Lespinasse (Loire) en 1808, mort en 1812. Fils d’un officier de l’Empire sans fortune, il fit ses études au collège de Limoges, s’engagea à dix-sept ans, et sortit le premier de l’école de Saumur (1828). Ayant quitté le service, il vint à Paris, y changea son nom de Fialin contre celui de vicomte de Persigny qui appartenait à sa famille, se jeta dans le journalisme, et embrassa dès 1834 la cause bonapartiste. Activement mêlé aux tentatives de Strasbourg et de Boulogne, il fut condamné par la Cour des pairs à vingt ans de détention. Rendu à la liberté en 1848, il devint un des membres les plus actifs du parti bonapartiste, fut, après le 10 décembre, nommé aide de camp du prince-président, et fut envoyé à l’Assemblée législative (1849). Il prit une grande part au coup d’État du 2 décembre, devint ministre de l’intérieur (1852), puis sénateur, ambassadeur à Londres (1855-1859), redevint ministre de l’intérieur (1859-1863), et resta depuis ce temps éloigné des affaires. Il avait été fait comte en 1852, lors de son mariage avec la fille du prince de la Moskowa, puis duc en 1863. — M. de Persigny se distinguait, parmi les serviteurs du second Empire, par un dévouement absolu à Napoléon III, dont il était depuis longtemps l’ami personnel.

PHILIPPE (Mathieu Bransiet, en religion frère), né en 1792, m. en 1874 ; entra en 1809 à Lyon, dans la congrégation des Frères de la Doctrine chrétienne ; devint en 1823 directeur des Écoles de Paris, et en 1838 supérieur général ; et donna, en cette qualité, une forte impulsion à l’enseignement primaire. Pendant la guerre de 1870-1871, il organisa les Frères de la Doctrine chrétienne en corps d’ambulanciers qui allaient relever les blessés sur les champs de bataille. Il a composé des livres élémentaires estimés.

PICARD (Louis-Joseph-Ernest), avocat et homme politique français, né à Paris en 1821, m. en 1877 ; débuta au barreau sous les auspices de M. Liouville, dont il devint le gendre ; fut envoyé en 1858, par le département de la Seine, au Corps législatif, et s’y fit remarquer par la vivacité incisive de sa parole comme un des cinq députés de l’opposition ; devint au septembre 1871, membre du gouvernement de la Défense nationale, et fut chargé du ministère des finances ; fit partie, comme ministre de l’intérieur, du premier ministère de M. Thiers ; fut ensuite (nov. 1871) ministre de France à Bruxelles, et, en 1875, sénateur inamovible ; a toujours depuis siégé au centre gauche.

PICOT (François-Édouard), peintre français, né à Paris en 1786, m. en 1868 ; fut élève de Vincent et membre de l’Institut (1836). Ses premiers ouvrages sont le Portrait de Talma, l’Amour et Psyché, l’Entrée du duc de Guise à Calais ; il a peint plusieurs plafonds au Louvre et à Versailles.

PIE IX (Jean-Marie, comte de Mastaï-Ferretti), pape, a occupé la chaire de Saint-Pierre pendant plus longtemps qu’aucun de ses prédécesseurs (trente-deux ans, de 1846 à 1878). Né à Sinigaglia en 1792, il quitta la carrière militaire pour entrer dans les ordres. Ordonné prêtre en 1827, il fut nommé archevêque de Spolète en 1827, puis transféré au siége d’Imola, et promu au cardinalat en 1840. Devenu pape en 1846, il inaugura son pontificat par des mesures qui eurent un certain retentissement : dissolution de la garde des Suisses, amnistie pour les délits politiques, établissement de la liberté de la presse, création d’une représentation nationale sous le nom de Consulte d’État. La guerre ayant éclaté, en 1848, entre le roi de Piémont, Charles-Albert, et l’Autriche, il se produisit en Italie une grande agitation au sujet de l’indépendance et de l’unité des États de la Péninsule ; le ministre du Pape, Rossi, qui luttait contre l’esprit révolutionnaire, fut assassiné sur les marches de la Chambre des députés ; une émeute éclata dans Rome, et la République fut proclamée. Pie IX alla demander un asile au roi de Naples, et séjourna à Gaëte près d’un an (de nov. 1848 à sept. 1849). L’expédition française lui rouvrit les portes de Rome. Il y rentra, avec invitation de poursuivre les réformes qu’il avait entreprises en 1847. Mais les événements de la première partie de son pontificat avaient inspiré à Pie IX une défiante réserve ; il apporta, dans les nouvelles mesures que prit sont gouvernement en matière politique, un esprit qui le fit accuser de marcher dans une voie contraire à celle où il était entré au début de son règne. Du reste, à partir de cette époque, le cardinal Antonelli, nommé secrétaire d’État, fut chargé presque exclusivement de tout ce qui se rattachait aux détails de la politique et de la diplomatie ; Pie IX se réserva les questions religieuses dont il s’occupa avec une grande activité. C’est dans cette seconde phase de son pontificat qu’il faut placer la multiplication des siéges épiscopaux, le développement considérable des missions, le rétablissement de la hiérarchie régulière dans la Grande-Bretagne. En dehors de ces œuvres particulières, trois grands actes dominent, sous le rapport religieux, tout le pontificat de Pie IX : la définition de l’Immaculée Conception en décembre 1854 ; la publication de l’Encyclique quanta cura, en décembre 1864, avec l’annexe connue sous le nom de Syllabus ; l’ouverture en 1869 au Vatican du premier concile œcuménique qui se soit tenu depuis celui de Trente (1545-1563), et où furent proclamées, le 18 juillet 1870, la pleine puissance du Pape dans l’Église et l’infaillibilité de ses jugements solennels. Tandis que s’accomplissaient ces actes, dans l’ordre religieux, des faits non moins graves avaient lieu dans l’ordre politique : les événements qui faisaient du roi de Piémont un roi d’Italie avaient leur contre-coup sur le pouvoir temporel de la papauté. L’annexion des duchés de Toscane, Parme et Modène entraîna celle des États du Pape. Le général Lamoricière se mit à la tête des troupes pontificales, qui furent dispersées par le général Cialdini (1860). Il restait encore à Pie IX Rome, Civita Vecchia et quelques petites places occupées par des garnisons françaises. Une attaque de Garibaldi, en 1866, fut repoussée, à Montana, par les troupes pontificales, soutenues des troupes françaises. Mais, à la suite des désastres de 1870, les Français quittèrent Rome, et l’armée du roi d’Italie entra dans la ville, après un court combat, le 20 septembre, jour où prit fin le pouvoir temporel des papes, constitué par Pépin le Bref et Charlemagne. Rome devint la capitale du royaume d’Italie. Une loi fixa les garanties conférées au Saint Siége pour son indépendance et le libre exercice de son pouvoir spirituel, et assigna au Pape une dotation annuelle et inaliénable de trois millions deux cent mille francs. Pie IX refusa la dotation et rejeta les garanties qu’il déclara illusoires. Il ne cessa de protester contre la violence et la spoliation, et depuis ce jour il ne quitta plus le Vatican où il se déclara prisonnier. Sa mort arriva le 10 février 1878, et la nouvelle de cette mort fut dans le monde entier l’objet de témoignages unanimes de respect et de vénération.

PILS (Adr.-Aug.-Isidore), peintre français, né à Paris en 1813, m. en 1875 ; fut élève de Picot, eut le grand prix de Rome en 1838, fut professeur de peinture à l’école des beaux-arts (1863), et membre de l’Acad. des beaux-arts. Il a surtout réussi dans la peinture religieuse et dans la peinture militaire.

PONCELET (Jean-Victor), général et géomètre français, né à Metz en 1788, mort en 1867. Élève de l’École polytechnique, il servit dans le génie jusqu’en 1812, où il fut prisonnier en Russie. Revenu en France, il fut nommé professeur à l’École d’application de Metz et se voua à l’étude de la géométrie descriptive, sur laquelle il publia plusieurs mémoires importants ; il devint professeur de mécanique à la Sorbonne, au Collége de France, général de brigade, commandant de l’École polytechnique, membre de l’Assemblée constituante de 1848, membre de l’Académie des sciences. Parmi ses ouvrages on distingue un Cours de mécanique appliquée aux machines, et un Traité des propriétés projectiles des figures (1862).

PONSARD (Francis), poëte dramatique, né à Vienne (Isère) en 1814, m. en 1867 ; débuta au théâtre par la trag. de Lucrèce (1842), qui fut une réaction contre les excès de l’école romantique. Les principales de ses autres œuvres sont : Agnès de Méranie (1846) ; Charlotte Corday (1850) ; l’Honneur et l’Argent (1853) ; Horace et Lydie (1851) ; Ulysse, trag. avec chœurs de Gounod (185l) ; la Bourse' (1856) ; le Lion amoureux (1865) : Galilée (1866). Il a encore publié un poëme, Homère (1852). Il fut élu membre de l’Acad. française en 1855.

PONSON DU TERRAIL (Pierre-Alexis, vicomte de), romancier français, né en 1829 à Montmaur (Isère), mort en 1871 : il se destina d’abord à la carrière maritime ; fut, en 1848, officier dans la garde mobile, et se mit à écrire des feuilletons dans les journaux. Dès 1850, il avait acquis une sorte de popularité par des romans d’aventures, qui se distinguaient par l’invention dans le détail des faits et une certaine puissance dans la peinture des caractères. Parmi ses nombreux ouvrages on a remarqué les Cavaliers de la nuit (1855), les Coulisses du monde (1857), les Gandins (1860), enfin et surtout les Aventures de Rocambole (1860), dont il a tiré un drame avec la collaboration d’Anicet Bourgeois.

POUILLET (Claude-Mathias), physicien français, né à Cuzance (Doubs) en 1791, m. en 1868 ; professa avec éclat aux Écoles normale et polytechnique, à la Faculté des sciences et au Conservatoire des arts et métiers, dont il devint directeur ; fut député sous la monarchie de Juillet, et donna sa démission de ses fonctions universitaires après le coup d’État du 2 déc. 1851. Il était, depuis 1837, membre de l’Acad. des sciences. Il a publié des livres classiques estimés : Éléments de physique expérimentale et de météorologie, 2 vol. in-8, 1856 ; Notions générales de physique, 1859, et, dans les Comptes rendus de l’Académie des sciences, de savants travaux sur les paratonnerres, les températures très-élevées ou très-basses, les nuages, la chaleur solaire, les lois des courants électriques, etc.

PRÉVOST-PARADOL (Lucien-Anatole), littérateur français, fils d’un officier de marine et d’une actrice du Théâtre-Français ; né en 1829. Il fit de brillantes études, fut un des élèves les plus distingués de l’École normale, fut couronné par l’Académie française pour un Éloge de Bernardin de Saint-Pierre, et fut, dès 1855, nommé professeur à la Faculté d’Aix. En 1856, il revint à Paris comme rédacteur du Journal des Débats et du Courrier du Dimanche : la distinction de sa plume lui fit une réputation rapide, mais son humeur caustique lui attira les rigueurs de l’administration. En 1869, il fut appelé à remplacer Ampère à l’Académie française. En 1870, sous le ministère Émile Ollivier, il se rallia au gouvernement impérial et fut nommé ministre plénipotentiaire à Washington : à peine arrivé à son poste, il apprit les premiers désastres du pouvoir auquel il venait de s’attacher ; cette pensée, jointe, dit-on, à des chagrins personnels, le poussa au suicide (août 1870). Il a laissé plusieurs ouvrages de littérature et de politique : Revue de l’histoire universelle (1854) ; Rôle de la famille dans l’éducation (1857) ; Essais de politique et de littérature (1859) ; Élisabeth et Henri IV (1864) ; Études sur les moralistes français (1864) ; la France nouvelle (1868).

PRIM (don Juan), général espagnol, né à Reus (Catalogne) en 1814. Il prit part, avec diverses alternatives de succès et de revers, aux guerres civiles qui agitèrent l’Espagne sous le règne d’Isabelle, et y figura parmi les Progressistes ; fut nommé député aux Cortès, devint général et comte de Reus, puis fut arrêté et emprisonné (1844) ; combattit en 1853 pour la Turquie contre la Russie ; obtint au Maroc des succès qui lui valurent les titres de marquis de Los Castillejos et de Grand d’Espagne, et fut chargé en 1861 de commander l’expédition espagnole contre le Mexique, s’opposa à la politique de Napoléon III et au rétablissement de l’empire du Mexique, et fut fait maréchal. En septembre 1868, il prit une part active à la révolution militaire qui déclara Isabelle déchue, et fut avec Serrano et Topete membre du gouvernement provisoire ; mais, ayant travaillé au rétablissement de la royauté en Espagne, il fut assassiné par des républicains (1870).

QUÉRARD (Joseph-Marie), bibliographe, né à Rennes en 1795, mort en 1865 ; a laissé plusieurs ouvrages très-estimés : la France Littéraire, 10 vol. in-8 (1826-39) ; La Littérature française contemporaine, ouvrage faisant suite au précédent, et qui a été continué par M. Bourquelot ; les Supercheries littéraires dévoilées, 5 vol. in-8 (1845-60) ; les Écrivains pseudonymes, 2 vol. in-8 (1854).

QUINET (Edgar), écrivain français, né à Bourg en 1803 ; alla terminer ses études dans les universités d’Allemagne, dont l’influence se fait sentir dans ses écrits ; publia en 1827 les Idées sur la philosophie de l’histoire de l’humanité de Herder (1827) 3 vol. in-8), donna en 1833 Ahasverus, qui fut mis à l’index par la cour de Rome, et, de 1836 à 1838, deux poëmes où il essayait de réaliser ses idées un peu systématiques sur l’épopée (Napoléon et Prométhée) ; devint, en 1839, professeur de littérature étrangère à la Faculté des lettres de Lyon, et en 1842 inaugura au Collége de France la chaire de littérature de l’Europe méridionale. À partir de ce moment il s’attacha à développer dans son enseignement et dans ses livres, sous une forme souvent un peu nuageuse, les idées révolutionnaires qu’il avait déjà indiquées dans quelques articles de la Revue des Deux-Mondes (de l’Avenir des religions ; de la Révolution et de la Philosophie, etc.) ; publia le Génie des religions (1842) ; les Jésuites (en collaboration avec M. Michelet, 1843) ; l’Ultramontanisme ; le Christianisme et la Religion française (1846). Son cours ayant été suspendu en 1846, à fut élu à Bourg député de l’opposition en 1847, remonta dans sa chaire après la révolution de 1848, fit partie de l’extrême gauche à l’Assemblée constituante et à l’Assemblée législative ; fut expulsé de France en 1852, fit dans l’exil de nouvelles publications politiques (la Révolution ; la République ; l’Esprit nouveau, etc.) ; fut nommé membre de l’Assemblée nationale de 1871, et y siégea à l’extrême gauche jusqu’à sa mort (1875). Il a été donné deux éditions (in-8 et in-12) de ses Œuvres complètes.

RANDON (Jacques-Louis-César-Alexandre, comte), maréchal de France, né à Grenoble en 1795, mort en 1871. Volontaire de la grande armée, il fut successivement lieutenant à la Moskowa et capitaine en 1813 ; ses opinions impérialistes retardèrent sa carrière sous la Restauration. Il fut nommé en 1830 chef d’escadron de chasseurs, prit une part brillante aux guerres d’Afrique, et devint maréchal de camp en 1841, lieutenant général en 1847. Après la révolution de 1848, il fut chargé du gouvernement de l’Algérie. Ministre de la guerre de janvier à octobre 1851, il redevint, après le coup d’État du 2 décembre, gouverneur général de l’Algérie, et dirigea l’expédition de Kabylie (1857). Sénateur (1852) et maréchal de France (1856), il occupa encore pendant plusieurs années (1859-1867) le ministère de la guerre.

RASPAIL (François-Vincent), chimiste et homme politique français, né à Carpentras en 1794, m. en 1878 ; fut élevé pour la carrière ecclésiastique, où il refusa d’entrer ; vint à Paris, où il mena une vie précaire comme simple répétiteur et préparateur au baccalauréat, et se livra avec passion à l’étude des sciences physiques ; publia dans les Annales des Sciences naturelles et autres recueils du même genre, de nombreux mémoires sur la botanique, la zoologie, la paléontologie, la médecine légale : il y fit preuve d’une grande puissance d’expérimentation, mais se fit des ennemis par ses diatribes contre les corps savants. De bonne heure partisan déclaré de la République, il combattit et fut blessé dans les journées de juillet 1830 ; écrivit dans les feuilles républicaines du temps, et s’attira plusieurs procès de presse et plusieurs condamnations ; composa, pendant ses séjours réitérés dans les prisons, divers ouvrages de science (Essai de chimie microscopique, 1831 ; Cours élémentaire d’agriculture et d’économie rurale, 1831 ; Nouveau système de chimie organique, 1833 ; Nouveau système de physiologie végétale et botanique, 1837) ; se fit une notoriété bruyante à l’occasion du procès de Mme La Farge, où il critiqua vivement l’expertise du docteur Orfila. Il a rendu son nom populaire, surtout dans les classes pauvres, par son Manuel de la santé, (1842 et suiv.), sorte d'encyclopédie usuelle de thérapeutique, ou il préconise le camphre comme une sorte de panacée universelle, et par le Fermier vétérinaire, manuel destiné au traitement des animaux domestiques, d’après la même médication. Il a exposé plus amplement son système, à l’adresse des savants[ dans une Histoire naturelle de la santé et de la maladie, 1843, 3 vol. in-8 ; et dans la Revue élémentaire de médecine et de pharmacie domestique, 2 vol. in-8, 1855, etc. Éloigné de la politique depuis plusieurs années, il y rentra en 1848, rédigea un journal révolutionnaire, l’Ami du peuple, présida un club, figura parmi les émeutiers qui envahirent l’Assemblée nationale le 15 mai, et fut, pour ce fait, condamné à cinq ans de prison. Il devint, aux élections de décembre 1851, le candidat du parti le plus avancé à la présidence de la République ; et, après la chute de l’Empire, siégea à l’extrême gauche de l’Assemblée nationale et de la Chambre des députés.

RATAZZI (Urbain), h. politique italien, né à Alexandrie en 1808, m. en 1873 ; fut d’abord avocat au barreau de Turin ; devint en 1848 député fit partie du cabinet sous lequel fut décidée l’expédition qui aboutit à la défaite de Novare (mars 1849) ; fut président de la Chambre (1852), rentra au ministère (1854-1858) avec M. de Cavour, et présenta plusieurs lois ayant pour but la séparation de l’Église et de l’État ; combattit vivement en 1861 la cession de Nice et de la Savoie à la France ; redevint président de la Chambre (1851), président du Conseil des ministres (1862), servit toutes les aspirations des Italiens vers Rome, tout en donnant satisfaction à la France qui imposait ses conditions en faveur du Saint-Siége ; donna sa démission en 1862, par suite du mécontentement causé par sa conduite énergique à l’égard de Garibaldi et son mariage avec une princesse de la famille Bonaparte (Mme de Solms) ; revint un instant aux affaires en 1867, après la retraite du ministère Ricasoli, et fut renversé après la défaite de Garibaldi à Mentana (1867) ; enfin reprit son siége à l’Assemblée, où il continua jusqu’à sa mort de jouer un rôle important.

RAYER (Pierre-François-Olive), médecin français, né à Saint-Sylvain (Calvados) en 1793, m. en 1867 ; fut professeur de médecine comparée, doyen de la Faculté de Paris (1862-64), membre de l’Académie de médecine et de celle des sciences ; a fondé la Société de biologie, et publié des ouvrages estimés : le Delirium tremens (1819) ; Traité théorique et pratique des maladies de la peau, 3 vol., 1832 ; Traité des maladies des reins, 3 vol., 1839 ; Archives de médecine comparée, 1842, etc.

REGNAULT (Henri-Victor), chimiste et physicien français, né à Aix-la-Chapelle en 1810. Élève de l’École polytechnique, il entra dans le service des mines, et se fit remarquer par des travaux sur la chimie organique ; devint membre de l’Académie des sciences (1840), professeur de chimie à l’École polytechnique, professeur de physique au Collége de France (1841), ingénieur en chef des mines (1847), directeur de la manufacture de Sèvres (1854). Il s’est surtout fait connaître par ses recherches sur les dilatations des fluides élastiques, sur la détermination de la densité des gaz, sur les chaleurs spécifiques des corps solides et liquides, sur l’hygromètre et sur la respiration des animaux. Il eut, en 1871, la douleur de perdre son fils, le peintre H. Regnault (voyez ce nom), au combat de Buzenval ; depuis, il vécut dans la retraite, et il mourut le 19 janvier 1878, jour anniversaire de la mort de son fils.

REGNAULT (Henri), peintre français, né à Paris en 1843. Fils du chimiste (voyez l’article précédent), il fut élève de Cabanel, obtint le grand prix de Rome en 1866, et envoya aux Salons de 1869 et de 1870 des toiles qui furent très-remarquées. Ses principales œuvres sont : Portrait du général Prim, ' Salomé et le Bourreau de Tanger. Ce jeune artiste, d’un talent original et vigoureux, coloriste remarquable, est mort héroïquement au combat de Buzenval (19 janvier 1871).

RÉMUSAT (Charles, comte de), écrivain et homme politique français, né à Paris en 1797 du comte de Rémusat, qui fut préfet du premier Empire, et de la comtesse Rémusat ; auteur d’un Essai sur l’éducation des femmes (voyez le Dictionnaire). Reçu avocat en 1820, il se livra à des études de philosophie, de législation et de politique, collabora de 1820 à 1830 à la Revue encyclopédique, au Globe, au Courrier français, etc. ; signa la protestation des journalistes contre les ordonnances de Juillet ; fut élu en 1830 député de la Haute-Garonne, et s’associa à la politique de Casimir Périer, son parent ; devint en 1836 sous-secrétaire d’État au ministère de l’intérieur, puis ministre de l’intérieur dans le cabinet du 1er mars 1840. Après la chute de ce cabinet, il accompagna son ami M. Thiers dans le centre gauche, et se livra de nouveau à ses travaux philosophiques et littéraires ; publia en 1842 des Essais de philosophie, ouvrage qui lui ouvrit, la même année, l’Académie des sciences morales et politiques, et bientôt après (1846) l’Académie française ; puis Abélard 1845) ; Saint Anselme de Cantorbéry (1852) ; l’Angleterre au dix-huitième siècle (1856) ; Bacon, sa vie, son temps, sa philosophie (1858) ; Politique libérale (1860) ; Channing, sa vie et ses œuvres (1861) ; une traduction du Théâtre de Schiller, de nombreux articles dans la Revue française, la Revue des Deux-Mondes, etc. Tous les écrits de M. de Rémusat sont d’un esprit fin et délicat autant qu’élevé. Après la révolution de Février il fit partie de l’Assemblée constituante et de l’Assemblée législative ; fut exilé en 1852 et ne rentra en France qu’avec ses amis politiques ; fut, au mois d’août 1871, nommé ministre des affaires étrangères par M. Thiers, qu’il suivit dans sa retraite au 24 mai 1873. Après avoir échoué à Paris le 27 avril en concurrence avec M. Barodet, ancien maire de Lyon du 4 septembre, il fut, au mois de novembre de la même année, envoyé à l’Assemblée nationale par le département de la Haute-Garonne, et y siégea au centre gauche jusqu’à sa mort (1875).

RITTER (Henri), philosophe allemand, né à Kerbst en 1791, mort en 1869, a professé la philosophie à Berlin, à Kiel et Gœttingue, et laissé des ouvrages estimés sur l’histoire de la philosophie : Histoire de la philosophie (1829-1853), qui a été en partie traduite en français (Histoire de la philosophie ancienne, traduite par M. Tissot, 4 vol. in-8, 1836 ; Histoire de la philosophie chrétienne, traduite par Trullars, 2 vol. in-8, 1843) ; Essai sur la philosophie allemande depuis Kant, 1853, etc.

ROQUEPLAN (L.-V.-Nestor), écrivain français, né à Montréal (Aude) en 1805, m. en 1870 ; était frère du peintre Camille Roqueplan (voyez le Dictionnaire). Il publia, vers la fin de la Restauration, quelques essais littéraires ; fut, à partir de 1827, rédacteur en chef du Figaro, et signa en juillet 1830 la protestation des journalistes ; fit paraître, en 1840, les Nouvelles à la main, revue spirituelle des hommes et des choses de son temps, et plus tard (1853-55) des livres humoristiques (Regain de la vie parisienne, les Coulisses de l’Opéra) ; dirigea successivement, de 1840 à 1860, les théâtres des Variétés, de l’Opéra et de l’Opéra-Comique, et fut chargé, en 1862, du feuilleton dramatique du Constitutionnel. Ses écrits et ses directions de théâtre lui ont valu la réputation d’un homme d’esprit et d’un véritable ami des arts ; et il a, en quelque sorte, caractérisé en sa personne le Parisien dans ce qu’il a de vif et d’aimable.

ROSSINI (Gioacchino-Antonio), célèbre compositeur italien, né en 1792, à Pesaro, de musiciens ambulants, mort en 1868 ; débuta à 16 ans par une symphonie, signala son génie dès 1813 par l’opéra de Tancredi, par les opéras-bouffes de l’Italiana in Algieri et de Il Turco in Italia (1814) et par les opéras de Il Barbiere di Seviglia (l816), et d’Otello (1817) ; écrivit pendant quinze ans, pour le Théâtre-Italien et pour l’Opéra français, de nombreuses partitions, qui toutes témoignent d’une facilité merveilleuse, et où l’élégance des mélodies domine sans exclure la puissance dramatique. Les principales partitions italiennes, composées pour le compte de l’impresario Barbaja, sont : la Cenerentola, la Gazza ladra (1817) ; Mose in Egitto (1818) ; la Donna del lago (1819) ; Matilde di Shabran (1821). En 1822, il épousa la prima donna de Milan, Mlle Colbrand, pour laquelle étaient écrits ses premiers rôles, et, par le concours du talent de cette cantatrice, arriva bientôt à une brillante fortune. En 1823 il composa sa dernière partition italienne, Semiramide ; puis, après un court et fructueux séjour à Vienne et à Londres, il vint s’établir à Paris (1824), où il arrangea pour l’Opéra son Maometto dans le Siége de Corinthe (1826), refondit son Moïse (1827), donna le Comte Ory (1828), et enfin Guillaume Tell (1829). Après s’être surpassé lui-même dans ce dernier chef d’œuvre, arrivé seulement à l’âge de 37 ans, en pleine possession de son génie et de sa renommée, il cessa de produire. Dans les 39 ans de sa vie qui s’écoulèrent depuis, il ne donna qu’une Messe et un Stabat (1832).

ROUGÉ (Emmanuel, vicomte de), égyptologue français, né à Paris en 1811, m. en 1873 ; s’occupa d’abord d’agriculture, puis se consacra aux études philologiques, et devint dès 1846 un des collaborateurs les plus assidus de la Revue archéologique ; fut nommé conservateur du Musée égyptien (1849), membre de l’Académie des inscriptions et belles-lettres (1853), conseiller d’État (1854), professeur d’archéologie égyptienne an Collége de France. Son travail le plus important est une étude sur le Livre des morts ou Rituel funéraire des anciens Égyptiens (dans la Revue archéologique.)

ROUSSEAU (Théodore), peintre français, né à Paris en 1812, mort en 1867, s’est illustré comme paysagiste. Il est remarquable pour la fraîcheur et la grâce. On cite surtout ses Vues de Fontainebleau.

RUSSELL (lord John), homme d’État anglais, né à Londres en 1792, m. en 1878. Il était le troisième fils du duc de Bedford, qui l’envoya terminer ses études à la seule Université libérale des trois royaumes, l’Université d’Édimbourg. Il partit à 17 ans pour visiter l’Europe. Élu, à sa majorité, membre de la Chambre des communes, il proposa plusieurs fois un projet de réforme électorale, dont il fit un projet de loi, quand il fut ministre en 1870, mais qui, repoussé par la Chambre des lords, ne passa que par l’intervention directe du roi Guillaume IV. Il fut depuis cette époque le chef du parti libéral à la Chambre des communes, attacha son nom à la grande réforme économique qui assura le triomphe de la liberté commerciale (1846), et signa en 1860 le traité de commerce avec la France. En 1861 il fut élu à la pairie sous le nom de comte Russell, et, à la mort de lord Palmerston (oct. 1865), devint chef du cabinet. Il a laissé plusieurs écrits, parmi lesquels on remarque une Vie de William Russell, un Essai sur la Constitution anglaise et un livre Sur les causes de la Révolution française.

SAINTE-BEUVE (Charles-Augustin), littérateur français, né à Boulogne-sur-Mer en 1804, mort en 1869. Il étudia la médecine, mais la quitta bientôt pour se livrer à la littérature. Il y débuta par des articles de critique au journal le Globe et par un excellent Tableau de la poésie française au XVIe siècle (1828), plusieurs fois réimprimé. Il s’essaya avec moins de succès dans la poésie (Poésies de Joseph Delorme, 1829 ; les Consolations, 1830 ; les Pensées d’août, 1838), et dans le roman (Volupté, 1834) ; mais il conquit un rang éminent dans la critique littéraire par une série d’études, publiées d’abord dans des Revues, puis réunies en volumes sous le titre de Critiques et portraits littéraires (1832-39, 5 vol. in-8), Portraits contemporains (1844). On y admira une immense littérature, un rare talent pour mêler la biographie à la critique, des portraits saisissants de vérité et de relief, une grande souplesse d’esprit et de style pour comprendre et faire comprendre les œuvres les plus différentes d’inspiration et de goût. Mais nulle part ces qualités ne parurent plus saillantes que dans les Causeries du lundi (1851-1862, 13 vol. in-12) et les Nouveaux lundis (1863-69, 11 vol. in-12), remarquables études de philosophie, d’histoire et de littérature qui se succédèrent chaque semaine pendant quinze ans dans le Constitutionnel et le Moniteur universel. On a encore de lui une Histoire de Port-Royal (1840-1860, 5 vol. in-8 ; 3e édition, 5 vol. in-12 ; 1868) ; Chateaubriand et son groupe littéraire (1860, 2 vol. in-8) ; Étude sur Virgile (1867, 1 vol. in-12), ce dernier ouvrage est l’esquisse des leçons que Sainte-Beuve devait faire au Collège de France dans un cours de poésie latine, qui fut interrompu par des manifestations d’un caractère tout politique. Il fut appelé en 1865 au Sénat, où il se signala par la hardiesse de son langage dans les questions religieuses. Il était de l’Académie française depuis 1845.

SAINTINE (Joseph-Xavier BONIFACE, connu sous le nom de), littérateur français, né à Paris en 1796, mort en 1865, a longtemps travaillé pour le théâtre en collaboration avec MM. Scribe, Ancelot, Varin, etc. Il a écrit plusieurs romans estimés : les Métamorphoses de la femme (1846) ; Seul! (1849), etc., et dont un est devenu populaire, Picciola (1836).

SAINT-GEORGES (Jules-Henri VERNOY de), auteur dramatique français, né à Paris en 1801 m. en 1875 ; a composé, soit seul, soit en collaboration avec divers auteurs, un grand nombre des livrets qui se sont succédé sur les scènes de l’Opéra, de l’Opéra-Comique et du Théâtre-Lyrique, de 1827 à 1862 ; il a signé seul les Mousquetaires de la Reine, le Val d’Andorre, le Corsaire, etc. Il a aussi publié plusieurs romans, parmi lesquels on distingue l’Espion du grand monde (185l), d’où il a tiré un drame pour l’Ambigu.

SAINT-MARC GIRARDIN (Marc Girardin, dit), littérateur français, né à Paris en 1801, m. en 1873 ; fit de brillantes études au collége Henri IV ; fut reçu avocat et agrégé des classes supérieures (1823), et nommé prof. au collége Louis-le-Grand (1826) ; débuta dans les lettres par plusieurs travaux couronnés par l’Acad. fr. (Éloge de Lesage, 1822 ; Éloge de Bossuet, 1824 ; Tableau de la litt. fr. au XVIIe s., 1828) ; fut, après 1830, appelé à la suppléance de M. Guizot à la Faculté des lettres, nommé maître des requêtes au conseil d’État, enfin (1834) prit possession de la chaire de poésie française à la Faculté des lettres, qu’il occupa avec éclat jusqu’en 1863, devint un des rédacteurs ordinaires du Journal des Débats, député de Saint-Irieix (Haute-Vienne), membre du Conseil royal de l’instruction publique (1831), membre de l’Acad. franç. (1844) ; se tint à l’écart de la politique sous la République et l’Empire, fut envoyé par les électeurs de la Haute-V1enne à l’Assemblée nationale de 1871, et y devint président du centre droit, et vice-president de l’Assemblée. Les qualités des écrits de Saint-Marc Girardin sont celles qui distinguaient son cours, beaucoup d’esprit et de finesse, non sans quelque malice, un goût délicat, mais un peu exclusif, une constante préoccupation des idées morales, et l’art de rendre toujours agréable la sévérité des doctrines. Ses principaux ouvrages sont : Cours de littérature dramatique ou de l’usage des passions dans le drame (4. vol. 1843 et suiv.) ; Essais de littérature et de morale (1844, 2 vol.) ; Souvenirs et voyages ; Souvenirs et réflexions politiques d’un journaliste (1859) ; La Fontaine et les fabulistes (1867).

SAMSON (Joseph-Isidore), artiste et auteur dramatique français, né à Saint-Denis en 1793, mort en 1811. Admis au Conservatoire en 1812, il y obtint le premier prix de Comédie, et débuta sur plusieurs théâtres de province en compagnie d’une jeune actrice, qu’il avait épousée. Après de grands succès au théâtre de Rouen, il entra au second théâtre français (1819), puis (1817) à la Comédie-Française, où il joua Jusqu’en 1863 avec un succès presque égal dans l’ancien et dans le nouveau répertoire ; la franchiser la verve et la distinction de son jeu lui ont laissé un nom parmi les meilleurs de nos acteurs comiques. Il était professeur au Conservatoire depuis 1829, et a compté parmi ses élèves Mmes Rachel, Arnould-Plessy, Augustine et Madeleine Brohan, Favart, Rose Chéri, etc. Il a donné plusieurs comédies, parmi lesquelles on distingue la Belle-Mère et le Gendre, le Péché de jeunesse, le Veuvage (1839-45), la Dot de ma fille (1854) ; celle qui a obtenu le plus de succès est la Famille Poisson (1849). On a aussi de lui un poëme didactique : l’Art théâtral (1869).

SAND (Aurore Dupin, dame Dudevant, connue sous le nom de GEORGE SAND), née à Paris en 1804, m. en 1876 ; était fille d’un officier de l’Empire, qu’elle perdit de bonne heure ; fut d’abord élevée au château de Nohant, dans le Berri, entre sa mère et sa grand’mère, puis au couvent des Augustines anglaises, à Paris ; épousa, à 18 ans. M. Dudevant, dont elle se sépara en 1831, pour aller vivre librement à Paris. Elle composa, cette année, son premier roman, Rose et Blanche, en collaboration avec Jules Sandeau, puis Indiana, Valentine (1832), Lélia (1833) ; fit, en 1833-34, avec Alfred de Musset un voyage en Italie, dont elle reproduisit les impressions dans plusieurs de ses romans, particulièrement dans les Lettres d’un voyageur (1834), et donna, vers la même époque, Jacques, André, Mauprat, le Secrétaire intime, Lavinia, Metella, les Maîres mosaïstes, l’Uscoque, Horace, Pauline, etc. À partir de 1837, plusieurs de ses œuvres portent d’une manière plus marquée le caractère qu’avaient présente déjà quelques-unes des premières : ce sont, sous la forme de romans, des thèses de philosophie indépendante et de politique ou d’économie sociale, qui reflètent ses idées de quelque personnage contemporain dont elle subit l’influence, par exemple les philosophes Lamennais et Pierre Leroux, le musicien Chopin, le républicain Michel de Bourges, etc. De ce genre sont les Lettres à Marcie, Spiridion, la Comtesse de Rudolstad, Horace, Consuelo, le Compagnon du tour de France, le Meunier d’Angibault, le Péché de M. Antoine. De 1844 à 1850, George Sand se dégage de ses prétentions philosophiques et publie des romans qui ne sont plus que des études de mœurs et de sentiments : Jeanne, Tévérino, Lucrezia, Floriani, le Piccinino, La Filleule, Mont-Revêche, les Maîtres sonneurs, le Marquis de Villemer, Jean de la Roche. C’est à cette époque qu’appartiennent des romans pastoraux, dont on goûta beaucoup le naturel et la simplicité (la Petite Fadette, François le Champi, la Mare au Diable). Mais si, dans ses romans, George Sand était revenue à la pure littérature, elle n’abandonnait pas la politique : après la révolution de 1848, elle s’y jeta avec ardeur, rédigea quelques-uns des bulletins révolutionnaires publiés par le ministre de l’intérieur Ledru-Rollin, et se lia avec les hommes des opinions les plus avancées. Le calme qui se fit dans la société après les journées de Juin rendit George Sand à ses travaux littéraires. Elle se tourna alors vers le théâtre, où elle n’avait fait encore qu’une tentative malheureuse (Cosima ou la haine dans l’amour, 1840) ; elle mit en drames quelques-uns de ses romans les plus touchants (François le Champi, Mauprat, etc.), et composa quelques pièces sur des sujets nouveaux : Claudie, le Mariage de Victorine, les Vacances de Pandolphe, le Démon du foyer, Molière, le Pressoir, Maître Favilla, Françoise, etc. Quelques-unes de ces pièces furent applaudies, mais une seule obtint un grand succès, le Marquis de Villemer. Elles ont toutes été réunies dans le Théâtre de George Sand (3 vol. in-18) et dans le Théâtre de Nohant (in-18). Elle ne renonça cependant pas au roman, et, dans ses dernières années, elle publia encore un grand nombre de récits de divers genres : le Château des Désertes, Histoire du véritable Gribouille, les Beaux messieurs de Bois doré, la Famille de Germandre, Valvèdre, la Vitte noire, Tamaris, Mlle de la Quintinie, etc., etc. Enfin elle publia une Histoire de ma vie, et, dans Elle et lui, rappela d’une manière désobligeante le souvenir de son amitié avec Alfred de Musset : attaque posthume à laquelle le frère de l’auteur répondit vivement dans un ouvrage du même genre, Lui et elle. — Par sa fécondité, par la merveilleuse souplesse et en même temps par la pureté de son style, George Sand s’est placée parmi les plus grands écrivains du XIXe siècle. Elle possédait à un haut degré le talent de raconter, et excellait à analyser les sentiments de l’âme humaine, à peindre la nature et à traiter les questions d’esthétique ; mais elle se laisse souvent emporter par une imagination fougueuse, ne concentre pas toujours assez l’intérêt, et plus d’une fois s’efforce vainement de donner la vie à des abstractions. Enfin la hardiesse indépendante de ses opinions en politique, en philosophie et même en morale paraît quelquefois excessive aux juges les moins rigoureux. – George Sand a laissé une fille (Mme Clésinger) et un fils qui s’est fait un nom dans les lettres, M. Maurice Sand.

SANGUIN (Charles), marquis de Livry, vaudevilliste français, né à Paris en 1797 d’une ancienne et noble famille, m. en 1867 ; fut officier dans la garde royale, donna sa démission en 1830, et se fit un nom dans les lettres par des vaudevilles pleins d’esprit et de gaieté (1828-1840). Il était connu comme auteur sous le nom de Charles de Livry.

SANTA-ANNA (Antonio Lopez de), homme politique mexicain, né à Mexico vers 1800, mort en 1877 ; se signala en 1821 dans la guerre d’indépendance contre l’Espagne, et en 1823 dans la lutte républicaine contre l’empereur Iturbide ; se mêla activement aux compétitions de Pedrazza et de Querrero, candidats à la présidence ; devint lui-même président en 1833 ; prit part en 1837 à la défense de la Vera-Cruz contre les Français et y perdit une jambe ; fut de nouveau président en 1841, puis banni ; devint dictateur en 1847, et fut encore obligé de fuir à la Jamaïque ; fut de nouveau investi de la dictature en 1852, et de nouveau chassé par un soulèvement populaire ; devint, sous l’empereur Maximilien, grand maréchal de l’empire (1864), et rentra dans la vie privée après le rétablissement du pouvoir de Juarez (1871).

SCHAMYL (Iman), chef des tribus du Caucase. Né de parents tartares en 1797, à Himry (Daghestan), il combattit de 1824 à 1835, sous Kasimollak, contre la domination moscovite, puis devint lui-même à la fois le chef suprême et le prophète des Circassiens ; appuyant son autorité militaire sur son titre de mourchid (envoyé de Dieu), il soutint pendant plus de vingt ans avec succès contre les Russes une lutte acharnée, dont il fit à la fois une guerre nationale et une guerre sainte : il tint longtemps en échec, avec une poignée de montagnards, de nombreuses armées commandées par les meilleurs généraux. Enfin, en 1859, cerné par des forces considérables, il fut fait prisonnier et envoyé à Saint-Pétersbourg. Il mourut en 1871.

SCHLEICHER (Auguste), savant philologue allemand, né à Meiningen en 1811, mort en 1868. Après avoir successivement étudié et enseigné les langues classiques et orientales à Leipzig, à Tubingue, à Bonn, à Prague, il se fixa à Iéna, où il fit un cours de grammaire comparée. Le plus important de ses ouvrages est son célèbre Compendium de la grammaire comparée des Langues indo-européennes (en allemand), auquel l’Institut de France décerna en 1867 le prix Volney.

SCHNEIDER (Eugène), industriel et homme politique français, né à Bidestroff (Meurthe-et-Moselle) en 1805, m. en 1875. Issu d’une famille seigneuriale de Bidestroff, il entra jeune dans la maison de banque du baron Seillière ; fut chargé en 1830 de la direction des forges de Bazeilles ; devint bientôt après (1836), avec son frère aîné, gérant de l’usine du Creuzot et releva cet établissement qui était en pleine décadence ; resté seul gérant (1845-75), il en fit la plus grande usine du monde. Les bâtiments occupent une surface de 21 hectares, comprenant des hauts fourneaux, des aciéries, de grandes forges, des ateliers de construction, etc. La production totale est de 190 000 tonnes de fonte, et de 160 000 tonnes de fer et acier. Les houillères du Creuzot donnent 190 000 tonnes de houille, et, avec les annexes, 715 000 tonnes. Dans la ville, qui comptait 3000 âmes comme population totale en 1837, le nombre seul des ouvriers s’élève aujourd’hui à près de 10 000 (ils vont à 15 000, avec les services extérieurs). M. Schneider a institué pour cette agglomération des écoles gratuites, des hospices et un ensemble de services d’assistance qui lui valurent la grande médaille d’or à l’Exposition universelle. À l’époque des traités de commerce qui établirent le libre échange, il soutint énergiquement la lutte avec l’Angleterre, et arriva à exporter près des deux tiers des produits de l’usine dans toutes les parties du monde. — À la mort de son frère (1845), il lui succéda comme conseiller général de Saône-et-Loire ; à la même époque, il entra dans la carrière politique, devint député de l’arrondissement d’Autun, et fit partie de la majorité ministérielle. Il se tint éloigné des affaires publiques après la révolution de février 1848. Sous la présidence du prince Louis-Napoléon, il fut appelé, comme ministre de l’agriculture et du commerce, à faire partie d’un cabinet transitoire « composé d’hommes spéciaux » (janvier-avril 1851) ; fut, après le 2 décembre membre de la Commission consultative ; devint en 1852 candidat au Corps législatif ; fut élu député et bientôt nommé vice-président. À la mort de M. de Morny (1865), après la courte présidence de M. Walewski, il fut choisi par l’Empereur comme président de cette Assemblée, dont les suffrages le maintinrent au fauteuil quand le droit de nommer son président lui fut rendu (décembre 1869). M. Schneider déploya dans ces fonctions des qualités exceptionnelles de courtoisie, de finesse, de fermeté et de présence d’esprit : à la séance révolutionnaire du 4 septembre, comme à la sortie, il fit preuve d’un courage et d’un sang-froid qui le mettent à la hauteur des plus illustres présidents. Il fut dignement secondé par son chef de cabinet, M. Bouillet, fils de l’auteur de ce Dictionnaire. Dans les conseil de l’Empereur, où il était fort écouté, M. Schneider représentait l’opinion modérée. Après le 4 septembre 1870, il se consacra tout entier à l’usine du Creuzot dont il doubla presque en quelques années la production, et où il eut la satisfaction de rendre des services signalés à la transformation de l’artillerie française. M. Schneider était de plus membre du Comité de perfectionnement des arts et manufactures, et régent de la Banque de France où il joua un rôle prépondérant lors du renouvellement de son privilége. Il laisse un fils, M. Henri Schneider, aujourd’hui gérant du Creuzot, et un petit-fils, M. Eugène Schneider, qu’il affectionnait particulièrement. — M. Schneider était à la fois un homme politique consciencieux, avisé, dévoué à son pays, un industriel doué du génie des grandes créations, un homme du monde plein d’affabilité, un homme de goût et un ami des arts : il avait formé une galerie particulière remarquable, l’une des dernières qui aient existé en Europe.

SCHNETZ (Jean-Victor), peintre français, né en 1787, mort en 1870. Élève de David, de Gros et de Gérard il fut à diverses reprises directeur de l’Académie française à Rome (1840-1861), et a laissé des toiles estimées pour la fermeté du dessin, et dont plusieurs sont au musée du Luxembourg.

SOULOUQUE, empereur d’Haïti sous le nom de Faustin Ier, né en 1789 à Saint-Domingue, d’une famille d’esclaves ; passa par tous les grades de l’armée d’Haïti et fut élu en 1847 président de la république ; s’entoura d’une garde nègre, à l’aide de laquelle il répandit la terreur dans la bourgeoisie des villes ; se fit élire empereur (26 août 1848), et se livra à une sorte de parodie de Napoléon Ier, créant de grandes charges de la couronne, une noblesse, des princes, des marquis, des ducs, se faisant sacrer et s’arrogeant pour liste civile le septième des revenus de l’État ; il essaya vainement de conquérir l'île entière, fut renversé en 1859 par Geffrard, qui rétablit la république, et mourut en France (1867).

STERN (Daniel), pseudonyme de Marie de Flavigny, comtesse d’Agoult, femme de lettres française, née à Francfort-sur-le-Mein en 1805, m. en 1876. Elle écrivit en 1841-42, dans un journal, deux nouvelles, Hervé et Valentia, qui furent très-remarquées, et qui furent suivies d’études sur l’état politique et intellectuel de l’Allemagne et de diverses œuvres d’histoire ou d’imagination parmi lesquelles on distingue une Histoire de la révolution de 1848, et le roman passionné de Nélida.

STRAUSS (le docteur David), théologien allemand, né à Ludwigsbourg (Wurtemberg) en 1808, m. en 1874, ; était simple répétiteur au séminaire protestant de Tubingue quand il fit paraître (1833) une Vie de Jésus, ouvrage empreint d’un esprit de rationalisme qui le fit destituer, mais fut presque immédiatement traduit dans toutes les langues de l’Europe (en français, par Littré, 4 vol. in-8, 1839-40). Il a depuis (1864) écrit une Vie populaire de Jésus, dont l'idée lui a été inspirée par l’ouvrage de M. Renan. Il a du reste apporté lui-même des adoucissements à sa doctrine dans quelques écrits postérieurs, par exemple la Dogmatique chrétienne dans son développement historique (1840). Il fut en 1848 nommé député à la diète wurtembergeoise, mais ne tarda pas à donner sa démission pour se consacrer à ses études.

TAMBURINI (Antonio), chanteur italien, né à Faenza en 1800, m. en 1876 ; montra de bonne heure de rares dispositions pour la musique, et fut à douze ans engagé dans les chœurs de l’Opéra de Faenza ; se fit applaudir sur les diverses scènes lyriques, de l’Italie et pendant vingt ans chanta au Théâtre italien de Paris. Il excellait dans Don Juan.

TECHENER (Joseph), bibliophile français, né à Orges (Haute-Marne) en 1802, m. en 1873; était libraire-éditeur ; a fondé en 1834 le Bulletin des bibliophiles et publié une Histoire de la bibliophilie (1861-63).

THALBERG (Sigismond), pianiste et compositeur suisse, né à Genève en 1812, mort en 1871. Après avoir obtenu, dès l’âge de quinze ans, de grands succès dans les salons de Vienne, il commença, en 1830, une série de voyages et de concerts, qui rendirent sa réputation européenne et qui le conduisirent jusqu'en Amérique. Comme compositeur, il a laissé des études estimées, des fantaisies ou variations sur des thèmes d’opéras, parmi lesquelles on distingue la Prière de Moïse.

THIBOUST (Lambert), auteur dramatique français, né en 1826, m. en 1867 ; est auteur de plus de cinquante pièces, drames ou vaudevilles, souvent remarquables par leur verve et leur esprit, et parmi lesquelles on distingue : la Corde sensible (1852) ; les Filles de marbre (1853) ; un Mari dans du coton (1862) ; les Jocrisses de l’amour (1865).

THIERS (Louis-Adolphe), homme politique et historien français, né à Marseille en 1797, mort en 1877 ; était d'une famille de commerçants ruinés par la révolution, et parent des Chénier ; fut reçu avocat à Aix en 1820, mats quitta bientôt le barreau pour l’étude de la philosophie et de l’histoire ; fut couronné par l’Académie d’Aix pour un Éloge de Vauvenargues (1821) ; vint à Paris, et entra, par la recommandation de son compatriote Manuel, à la rédaction du Constitutionnel, s’y fit bientôt un nom comme polémiste et comme critique d’art, et réunit en volumes ses articles sur le Salon de 1822 et sur les Pyrénées et le midi de la France (1823). En même temps il se faisait remarquer par la vivacité de son esprit, par l’éclat et la solidité de sa conversation, dans les salons de l’opposition, et était reçu familièrement chez Laffitte et Talleyrand. Son Histoire de la Révolution française (10 vol. 1823-27) eut un immense succès, surtout après 1830, parce qu’elle présentait, en face de la Restauration, une réhabilitation partielle des actes et une apologie assez résolue des principes de la Révolution. Il allait s’embarquer, en 1829, pour un voyage autour du monde, quand fut constitué le ministère Polignac (août 1829) ; il resta pour défendre les opinions libérales contre les tendances absolutistes du nouveau ministère, fonda le National pour soutenir cette maxime constitutionnelle que « le roi règne et ne gouverne pas », posa nettement en face de la monarchie de droit divin la candidature éventuelle du duc d’Orléans au trône ; fut poursuivi et condamné pour un de ses articles ; rédigea, le 26 juillet 1830, la protestation des journalistes contre les Ordonnances, organisa la résistance légale, et, après les journées des 27, 28 et 29, décida le duc d Orléans à accepter le titre de lieutenant général du royaume (ler août), puis celui de « roi des Français » (9 août). Il devint alors conseiller d’État, sous-secrétaire d’État au ministère des finances sous le baron Louis et sous Laffite, et député d’Aix. Ministre de l’intérieur, après la mort de Casimir Périer, dans le cabinet du 11 octobre 1832, il mit un terme aux menées légitimistes par l’arrestation de la duchesse de Berry ; fut un instant ministre du commerce et des travaux publics, et donna une grande activité à ces derniers travaux par le vote d’un crédit de cent millions ; rentra au ministère de l’intérieur pour lutter contre l’agitation révolutionnaire, fit écraser les insurrections de Lyon et de Paris en avril 1834 ; et, après l’attentat de Fieschi (28 juillet 1835), fit voter des lois restrictives sur la presse et le jury, connues sous le nom de Lois de septembre. En 1836, comme ministre des affaires étrangères, il était partisan d’une intervention en Espagne ; mais, n’ayant pu vaincre la résistance du roi, il céda la présidence du Conseil à M. Molé, qu’il renversa bientôt par la coalition des diverses oppositions (1838). C’est à ce moment que commence entre M. Thiers et M. Guizot une rivalité d’ambition et de talent, dans laquelle le premier personnifie le centre gauche de la Chambre, fit le second le centre droit. De nouveau président du Conseil et ministre des affaires étrangère, dans le cabinet du 1er mars 1840, M. Thiers prit parti pour Méhémet-Ali contre la Turquie, et vit la France exclue du concert européen par le traité du 15 juillet, fit des préparatifs de gerre, fit construire les fortifications de Paris, mais, ne se sentant pas appuyé par le roi, se retira, céda la place à M. Guizot, et passa dans l’opposition, où il resta jusquà la chute de la dynastie de Juillet. Devenu membre de l’Académie française depuis 1833, et de l’Académie des sciences morales et politiques, il consacra à l’histoire le temps que lui laissait la politique, et entreprit l’Histoire du Consulat et de l’Empire, ouvrage monumental, dont les 20 volumes lui coûtèrent vingt ans de travail (1842-1862). Chef de la gauche dynastique, et peu partisan des agitations de la rue, M. Thiers ne prit pas part à la campagne des banquets réformistes de 1847 ; et même quand le ministère interdit le banquet du 12e arrondissement, il fut d’avis d’y renoncer ; mais il conseilla à l’opposition de donner sa démission collective. Lorsque éclata la révolution de Février, il fut, avec M. Odilon Barrot, chargé par Louis-Philippe de former un ministère, qui fut impuissant à maîtriser les événements. Après la proclamation de la République, il devint suspect de regrets dynastiques, et, aux élections générales, il ne put se faire renommer député par les Bouche-du-Rhône ; mais au 4 juin, il fut élu par quatre départements, vint siéger à droite, et se posa comme un des chefs les plus résolus du « parti de l’ordre » : c’est à cette époque que se place la publication de son livre du Droit de propriété. Il vota, au 10 décembre, pour la présidence du prince L. Napoléon, dont il soutint quelque temps la politique, notamment pour l’expédition de Rome (1849), pour la loi sur l’instruction publique (15 mars 1850) ; mais bientôt il se mêla activement aux conflits entre la Chambre et l’Élysée, dénonça les projets de restauration impériale, et, au coup d’État du 2 décembre 1851, fut arrêté, enfermé à Mazas, puis conduit à la frontière. Autorisé à rentrer en France, après la proclamation de l’Empire, il vécut pendant onze ans dans la retraite, s’occupant de lettres et de beaux-arts ; donnant de nouvelles éditions de quelques-unes de ses anciennes études (Law et son système de finances, le Congrès de Vienne, etc.), et achevant son Histoire du Consulat et de l’Empire. Quand ce livre fut terminé, il se laissa porter comme candidat de l’opposition à Paris, et, rentré dans la carrière parlementaire, engagea contre le second Empire une lutte d’autant plus redoutable qu’elle n’avait rien de violent dans la forme. En juillet 1870, il combattit le projet de guerre contre la Prusse ; au 4 septembre, il se tint à l’écart du mouvement révolutionnaire d’où sortit la République, mais prêta au gouvernement de la Défense nationale l’appui de son influence personnelle auprès des grandes puissances européennes, dont il alla vainement solliciter l’intervention en faveur de la paix. Aux élections du 8 février 1871, il fut élu député par vingt-six départements et opta pour Paris : nommé chef du pouvoir exécutif par l’Assemblée nationale, il négocia avec le prince de Bismark les conditions de la paix, qui dut être achetée par cinq milliards et par la cession de l’Alsace et d’une parte de la Lorraine, mais le territoire de Belfort était maintenu à la France (26 février) ; il soutint contre l’insurrection du 18 mars et contre le gouvernement révolutionnaire de la Commune une lutte de plus de deux mois, prit alors envers les représentants de quelques grandes villes de province l’engagement de maintenir la République, s’opposa dès lors énergiquement à toutes les tentatives des partisans de la monarchie, fut proclamé président de la République, donna tous ses soins à la libération du territoire, et s’imposa la mission d’acclimater en France « la République conservatrice » ; mais, ne se voyant pas suivi dans cette voie par la majorité de l’Assemblée, il se retira devant un vote de défiance (24 mai 1873), fut remplacé par le maréchal de Mac-Mahon, et prit place comme simple député au centre gauche. Ses obsèques (en septembre 1877), faites avec un grand éclat à Paris, furent l’occasion d’une manifestation contre le ministère du 16 mai, dont MM. de Broglie et de Fourtou étaient les chefs.

TRIMM (Timothée). Voyez LESPÈS.

TROPLONG (Raymond-Théodore), jurisconsulte, magistrat et homme politique, né en 1795 à Saint-Gaudens (Haute-Garonne), m. en 1869 ; débuta dans la magistrature comme substitut (1819) ; devint avocat général à Nancy (1829), conseiller à la Cour de cassation (1835), pair de France (1846), 1er président à la Cour de Paris (déc. 1848), 1er président de la Cour de cassation, sénateur (1852), puis de 1854 à sa mort occupa le fauteuil de président du Sénat. Il était membre du conseil privé. Il avait été appelé en 1840 à l’Académie des sciences morales et politiques pour ses travaux de jurisprudence dont le plus considérable est : le Code civil expliqué (1833-58, 28 vol. in-8). On lui doit aussi : De l’influence du christianisme sur le droit civil des Romains (1843).

TROUSSEAU (Armand), médecin français, né à Tours en 1801, m. en 1867 ; fut reçu docteur en 1825 et agrégé en 1826 ; fut, en 1828, chargé d’une mission dans le centre de la France pour y étudier les maladies épidémiques, puis d’une autre à Gibraltar pour étudier la fièvre jaune, et publia sur ce dernier sujet les Documents recueillis par la commission dont il faisait partie (1828, 2 vol. in-8) ; devint médecin des hôpitaux (1831) et professeur de thérapeutique et de matière médicale (1839) ; il se distingua dans sa chaire par la facilité, l’élégance et la pureté de sa parole, et se fit dans les hôpitaux une grande réputation comme praticien : il a fait le premier, et avec succès, l’opération de la trachéotomie. Il fut élu représentant à la Constituante (1848) et membre de l’Acad. de médecine (1856). On lui doit, outre de nombreux mémoires insérés dans la France médicale et dans les Archives de médecine, les ouvrages suivants : Traité élimentaire de thérapeutique et de matière médicale (1836), de la Phthisie laryngée, livre couronné par l’Académie de médecine (1837), Clinique médicale de l’Hôtel-Dieu (1861). Il a fondé, en 1834, le Journal des connaissances médico-chirurgicales.

VAILLANT (J.B.-Philibert), maréchal de France, né à Dijon en 1790, m. en 1872 ; fut élève de l’École polytechnique et de l’École d’application de Metz ; prit part aux dernières campagnes de l’Empire, et se signala en 1815 dans la défense de Paris et à Waterloo ; s’occupa de travaux sur l’art militaire et principalement sur le rôle de l’arme du génie ; prit en 1830 une part active aux travaux du siége d’Alger, où il eut la jambe cassée par un biscaïen ; fut nommé colonel au siége d’Anvers (1833) ; fut nommé en 1839 commandant de l’École polytechnique, et appelé en 1840 à diriger une partie des travaux des fortifications de Paris ; fut nommé lieutenant général en 1845, et, comme commandant en second de l’armée expéditionnaire d’Italie, assura la prise de Rome (1849) ; devint maréchal de France (1851), sénateur, membre de l’Académie des sciences (1853), président du Bureau des longitudes, ministre de la guerre (1854-59) ; prit une part active à l’expédition d’Italie comme major général de l’armée (1859) ; fut ministre de la maison de l’Empereur (1860-70), et signa les décrets qui réorganisaient l’École des beaux-arts et proclamaient la liberté des théâtres ; enfin prit part à la défense de Paris pendant le siége de 1870-71.

VELPEAU (Alfred-Marie), chirurgien français, né à la Brèche (Indre-et-Loire), en 1795, m. en 1867 ; était fils d’un maréchal ferrant, s’instruisit d’abord tout seul, vint à Tours refaire ses études (1821) ; fut reçu docteur en 1823, nommé au concours chirurgien de la Pitié (1830) et professeur de clinique chirurgicale (1835) ; fut membre de l’Académie de médecine et de l’Académie des sciences (1842). Sa clinique, à l’hôpital de la Charité, l’a rendu aussi célèbre que ses livres, dont les plus importants sont : Traité d’anatomie chirurgicale (1825) ; Éléments de médecine opératoire (1832) ; Embryologie ou ovologie humaine (1833) ; Anatomie chirurgicale, générale et topographique (1836) ; Traité des accouchements (1835) ; Traité des maladies du sein (1853). VICTOR-EMMANUEL II, roi d’Italie, né en 1820 du roi de Piémont Charles Albert, mort en 1878. Il accompagna son père, en 1849, dans la campagne contre l’Autriche, et se distingua par sa bravoure à la bataille de Novare, après laquelle son père abdiqua en sa faveur. Devenu roi, d’accord avec le chef de son ministère, le comte de Cavour, et malgré la sincérité de ses sentiments religieux, il défendit énergiquement contre l’Église les droits de l’État, enleva le monopole de l’enseignement aux corporations religieuses et vendit les biens nationaux ; entra, par le traité du 10 avril 1855, dans l’alliance contre la Russie, prit part à la guerre de Crimée, et resserra son intimité avec le gouvernement impérial français par le mariage de sa fille Clotilde avec le prince Napoléon. Soutenu par la France dans la guerre contre l’Autriche, il dut à cette alliance d’abord la Lombardie (juin 1859), puis la Toscane, Parme, Modène et les Romagnes, qui s’offrirent à lui, et qu’il put annexer à ses États, en cédant à la France Nice et la Savoie. Après l’expédition de Garibaldi en Sicile et dans l’Italie méridionale (1860) qu’il encouragea d’abord en secret, puis qu’il soutint ouvertement, les populations du royaume de Naples et les États pontificaux (moins la ville de Rome et le territoire voisin de cette ville), consultés par la voie du suffrage universel, se donnèrent à lui, et il devint roi d’Italie, avec Florence pour capitale. En 1866, il s’allia avec la Prusse contre l’Autriche, et, malgré les échecs de Custozza et de Lissa, agrandit son royaume de la Vénétie. En septembre 1870, à la suite des défaites de Napoléon III, qui jusqu’alors avait soutenu le pape contre les entreprises des Garibaldiens (par exemple à Mentana, 1866), il entra dans Rome, qui devint la capitale du royaume d’Italie. Grâce à cette politique heureuse qui répondait à toutes les aspirations des Italiens, Victor-Emmanuel a joui durant tout son règne d’une grande popularité ; et comme souverain, il est toujours resté fidèle aux règles du gouvernement parlementaire, établi en Piémont sous le règne de Charles-Albert.

VIENNET (Jean-Guillaume), littérateur français, né à Béziers en 1777, m. en 1868 ; fut d’abord officier d’artillerie et fut décoré par l’Empereur à Lutzen ; entra, sous la Restauration, dans le corps royal d’état-major, d’où il fut rayé à la suite de la publication de ses Épîtres (1827) ; devint la même année député de l’Hérault, siégea dans les rangs de la gauche, mais, après 1830, se montra un des soutiens les plus décidés du gouvernement nouveau, et fut nommé pair de France (1840). Il avait été appelé en 1830 à l’Académie française. Il a laissé de nombreux ouvrages, romans, histoires, poëmes, tragédies, comédies, satires, et Fables, dont la plupart ont un caractère politique.

VILLEMAIN (Abel-François), professeur, écrivain et homme politique français, né à Paris en juin 1790, et mort en mai 1870. Il fut de bonne heure distingué par Fontanes, qui le nomma professeur de rhétorique au lycée Charlemagne (1810), et bientôt maître de conférences de littérature française à l’École normale. Il débuta dans les lettres par un Éloge de Montaigne (18l2) et un Éloge de Montesquieu (18l6) couronnés par l’Académie française. Un instant suppléant de M. Guizot dans la chaire d’histoire moderne, il fut en 1816 appelé par Royer-Collard à la chaire d’éloquence française, où il se fit remarquer par la nouveauté de ses aperçus, la finesse de sa critique, l’élégance exquise et l’heureuse vivacité de sa parole. Il publia en 1819 une Hisroire de Cromwell, ouvrage distingué, mais où l’auteur n’avait pas trouvé l’emploi de son véritable talent ; en 1822 une traduction de la République de Cicéron, d’après les fragments retrouvés par A. Maï ; et en 1825, Lascaris et un Essai sur l’état des Grecs depuis la conquête musulmane, ouvrages qui avaient pour but d’aider au mouvement d’opinion qui s’opérait en faveur de la Grèce opprimée par les Turcs. Il avait été reçu à l’Académie française en 1822 avait été dès 1819 appelé aux fonctions de chef de la division de l’imprimerie et de la librairie, et éta1t devenu, sous le ministère Decazes, maître des requêtes au conseil d’État. Il fut destitué de cette dernière fonction en 1827, pour avoir rédigé, avec Lacretelle et Chateaubriand, la supplique adressée au roi par l’Académie contre le rétablissement de la censure ; il reprit alors avec un très-grand éclat son cours de littérature française à la Faculté des lettres ; à côté de MM. Cousin et Guizot. Nommé députe d’Évreux en 1830, il siégea parmi les membres de l’opposition, et signa l’adresse des 221. Louis-Philippe l’appela en 1832 à la Chambre des pairs, où il combattit les lois de septembre et soutint le ministère Molé contre la coalition. Nommé ministre de l’instruction publique le 13 mai 1839, il fut écarté par le cabinet du 1er mars 1840 et remplacé par M. Cousin ; il reprit ce poste en octobre 1840, mais, en 1844, épuisé par les luttes qu’amena la préparation de la loi sur l’enseignement secondaire, il tomba malade, perdit de nouveau son portefeuille, et s’honora en refusant une pension de 15 000 fr. que le ministère voulait lui faire voter par la Chambre. Il ne fit guère plus acte d’homme public que par quelques discours à la Chambre des pairs, et la révolution de 1848 acheva de le rendre à la vie privée. Il se consacra désormais exclusivement aux lettres : secrétaire perpétuel de l’Académie française depuis 1835, il déploya dans ces fonctions une activité et un dévouement sans égal, rédigeant chaque année, sur les divers prix décernés par l’Académie, des rapports qui sont des modèles d’éloquence académique. Outre les ouvrages cités plus haut, M. Villemain a publié de nombreuses études de critique et d’histoire qui toutes se distinguent par une vaste érudition et par l’élégante pureté du style : Discours et Mélanges, 1823 ; Nouveaux Mélanges, 1827 ; Études de littérature ancienne et étrangère, 1846 ; Études d’histoire moderne, 1846 ; Tableau de l’éloquence chrétienne au IVe siècle, 1849 ; Souvenirs et Nouveaux souvenirs contemporains, 1856-58 ; Choix d’études sur la littérature contemporaine, 1857 ; la Tribune française, Chateaubriand, 1857 ; Essais sur le génie de Pindare, 1859, etc. ; enfin il avait écrit, ou du moins préparé, une Histoire de Grégoire VII. Mais son œuvre capitale est son Cours de littérature au XVIIIe siècle et son Cours de la littérature du moyen âge, reproduction des remarquables leçons qu’il avait faites à la Faculté des lettres de 1827 à 1830. On y trouve, avec une lecture immense, beaucoup de goût, de facilité et de finesse. Ces leçons, retouchées par l’auteur sont devenues un livre souvent réimprimé (6 Vol. in-8 ou in-12) : e11es ont élargi les voies de la critique moderne, et substitué à l’étroite appréciation des beautés et des défauts l’histoire littéraire et ses aperçus variés sur le caractère des écrivains et de leur époque.

VINCENT (Alex.-Joseph), mathématicien et érudit français, né à Hesdin (Pas-de-Calais) en 1797, m. en 1868 ; enseigna les mathématiques et la physique dans l’Université, et se fit connaître par les travaux les plus difficiles et les plus variés sur les mathématiques, la physique, l’archéologie, la philologie et particulièrement la musique et la métrique des Grecs. Ses travaux, d’une nature toute spéciale, l’ont conduit à l’Académie des inscriptions (1850), et sont pour la plupart contenus dans des recueils savants (Journal de Liouville ; Notices et extraits des manuscrits, publiés par l’Académie des inscriptions ; Mémoires de cette Académie, Revue archéologique, etc.).

VITET (Louis), littérateur français, né à Paris en 1802, m. en 1873 ; fut élève de l’École normale (1819) et quelque temps professeur ; débuta dans les lettres à la rédaction du Globe ; publia de 1826 à 1829, une série de scènes dramatiques sur la Ligue (les Barricades, les États de Blois, la Mort de Henri III) ; devint, après 1830, inspecteur des monuments historiques (1831), conseiller d’État (1836-1848), député de la Seine-Inférieure (1836), et soutint jusqu’au bout la politique de M. Guizot ; fut envoyé à la Législative de 1849 et fit partie de la majorité contre-révolutionnaire, mais désapprouva le coup d’État du 2 décembre et se tint à l’écart sous l’Empire ; rentra dans la politique en 1871, siégea à l’Assemblée nationale dans le centre droit, et fut vice-président de l’Assemblée. On lui doit, outre ses études sur la Ligue, réunies en 2 vol. en 1844, et continuées par les États d’Orléans (1849), de remarquables écrits d’archéologie et de critique d’art : Eustache Le Sueur (1843) ; Monographie de l’Église de Noyon (1845) ; Fragments et mélanges (1846) ; le Louvre (1862) ; Essais historiques et littéraires (1862) ; Études sur l’hist. de l’art (1864). – Il était de l’Académie des inscriptions et de l’Académie française.

WALEWSKI (Alex.-Joseph-Colonna, comte), diplomate français, né à Walewice en 1810, m. en 1868 ; servit quelque temps dans l’armée, après 1830 ; fit représenter aux Français une com. en 5 actes (l’École du Monde, 1840), écrivit dans les journaux et fonda le Messager ; entra dans la diplomatie en 1840, devint ambassadeur à Londres (1854), ministre des affaires étrangères (1855-60) et présida en cette qualité le congrès de Paris (1856) ; ministre d’État (1860-63), enfin (1865-66) présid. du Corps législatif.

WOLOWSKI (L.-François-Michel-Raymond), économiste français, né à Varsovie en 1810 ; mort en 1877 ; était fils d’un président de la diète polonaise ; fit ses études en France, prit part à la révolution de 1830 ; mais, après les désastres de la Pologne, revint en France et s’y fit naturaliser (1833) ; fonda la Revue de législation et de jurisprudence ; s’occupa, avec son beau-frère, Léon Faucher, de questions industrielles et financières ; devint professeur d’économie politique et de législation industrielle au Conservatoire des Arts-et-Métiers (1839), représentant de la Seine à l’Assemblée constituante (1848) et à l’Assemblée législative, vota dans l’une et l’autre avec le parti démocratique modéré ; renonça sous l’Empire à la politique, s’occupa exclusivement de questions économiques, et soutint dans sa chaire et dans la presse la cause de la liberté commerciale ; devint de nouveau représentant de la Seine en 1871, et y siégea parmi les membres de la gauche. Il était membre de l’Académie des sciences morales et politiques depuis 1855. Il a collaboré au Journal des économistes, à la Revue des Deux-Mondes, etc. Les principaux ouvrages sont : Sociétés par actions (1839) ; de l’Organisation du travail (1845) ; Études d’économie politique et de statistique (1848) ; de l’Organisation du crédit foncier (1849) ; une traduction des Principes d’économie politique de G. Roscher, etc.