BUFFET, s. m. On entendait par ce mot, pendant le moyen âge, la chambre où l’on renfermait la vaisselle, des objets précieux, tels que vases, bijoux, curiosités ; on donna aussi, pendant les XIVe et XVe siècles, le nom de buffet au meuble que l’on plaçait, pendant les repas de cérémonie, au milieu de l’espace réservé entre les tables en fer à cheval, et sur lequel on rangeait des pièces d’orfèvrerie, des épices et confitures, comme sur des gradins. Le dressoir est un meuble servant au même usage, mais ordinairement appliqué contre le mur ; tandis que le buffet est isolé, on tourne autour, il pare le centre de la salle du festin. C’est surtout pendant le XVe siècle, alors que le luxe intérieur atteignit des proportions extravagantes, que les buffets furent en grand usage. À cette époque, le mot buffet indique non-seulement le meuble, mais tous les objets dont on le couvre ; on dit buffet pour exprimer l’ensemble de ces décorations de fêtes. Aux entrées de souverains, d’ambassadeurs, on offre un buffet, c’est-à-dire qu’on donne au personnage auquel on veut faire honneur un amas de vaisselle d’argent ou de vermeil contenant des rafraîchissements ; et, dans ce cas, le meuble et ce qu’il porte appartient audit personnage.

C’est au buffet, dans les repas d’apparat, que viennent les chevaliers, écuyers ayant la charge de servir les souverains, pour prendre les plats qui doivent être distribués sur les tables, « En celle salle avoit trois tables drécées, dont l’une fut au bout de dessus… Celle table étoit plus haute que les autres, et y montoit on à marches de degrés… Aux deux costés de ladite salle, tirant du long, furent les autres deux tables drécées, moult belles et moult longues ; et au milieu de ladite salle avoit un haut et riche buffet, faict à manière d’une lozange. Le dessouz dudict buffet estoit clos à manière d’une lice, et tout tapicé et tendu des armes de Monsieur le Duc ; et delà en avant commençoyent marches et degrez chargés de vaisselle, dont par le plus bas estoit la plus grosse, et par le plus haut estoit la plus riche et la plus mignole ; c’est à sçavoir par le bas la grosse vaisselle d’argent dorée, et par l’amont estoit la vaisselle d’or, garnie de pierrerie, dont il y avoit à très grand nombre. Audessus dudict buffet avoit une riche coupe garnie de pierrerie, et par les quarrés dudict buffet avoit grandes cornes de licornes toutes entières, moult grandes et moult belles ; et de toute la vaisselle de la pareure dudict buffet ne fut servi pour ce jour, mais avoyent autre vaisselle d’argent, de pots et de tasses, dont la salle et les chambres furent servies ce jour[1]. » C’est là un buffet d’apparat, destiné à récréer la vue pendant le repas.

Voici le buffet d’usage. « Au regard du service, Madame la nouvelle duchesse fut servie d’eschançon et d’escuyer tranchant, et de pannetier, tous Anglois, tous chevaliers, et gens de grande maison ; et l’huissier de salle cria : « Chevaliers, à la viande ! » Et ainsi ala-on au buffet la viande quérir ; et autour du buffet marchoyent tous les parens de Monsieur, et tous les chevaliers tant de l’ordre que de grand-maison, tous deux à deux, après les trompettes, devant la viande…[2] »

Le buffet, au moyen âge, n’était donc pas, à proprement parler, un meuble, mais une sorte d’échafaudage dressé pour une cérémonie ; il n’était décoré que par les étoffes dont il était tapissé et surtout par les objets de prix qu’il supportait. (Voy. Dressoir.)

Buffet s’entend aussi comme soufflet (voy. au Dictionnaire des ustensiles le mot Buffet).

  1. Mém. d’Oliv. de la Marche, mariage du duc Charles de Bourgogne avec Marguerite d’York. Édit. Buchon. p. 542, date 1474.
  2. Ibid.