MOSAÏQUE, s. f. Ouvrages faits de petits cubes de pierres dures ou de pâtes de verre de diverses couleurs, collés sur les parements des monuments ou sur les aires au moyen d’un ciment composé de chaux, de sable très-fin, de pouzzolane ou de brique pilée. Les Romains des bas temps ont employé la mosaïque non-seulement pour décorer les aires des salles, mais aussi pour tapisser les murs. Il n’est pas nécessaire ici de répéter ce qui a été écrit sur ce sujet. Il nous suffit de constater que la mosaïque était fort souvent appliquée dans les monuments de l’époque mérovingienne en Occident. Grégoire de Tours parle des mosaïques qui décoraient plusieurs églises de son temps. Saint Pallade, évêque d’Auxerre, fit élever au VIIe siècle le monastère de Saint-Eusèbe ; l’abside de l’église était décorée de mosaïques dans lesquelles l’or entrait pour une grande partie[1]. En effet, le travail de mosaïque, auquel on donne le nom de byzantin, se compose de fonds d’or obtenus au moyen de petits cubes de pâtes de verre dorés et recouverts d’un émail transparent. Les sujets, les ornements se détachent sur ces fonds d’or. Ces sortes de mosaïques, très-répandues en Italie, en Sicile et en Orient, sont très-rares en France, puisque nous n’en connaissons qu’un seul exemple existant encore dans la petite église de Germigny-les-Prés, près de Sully-sur-Loire, exemple qui paraît dater du IXe siècle.
L’abbé Lebeuf, dans son Histoire du diocèse de Paris[2], dit que dans le château de Bicêtre, bâti par le duc de Berry, frère de Charles V, il y avait deux petites salles « enrichies d’un parfaitement bel ouvrage à la mosaïque. » Il est difficile aujourd’hui de se faire une idée de ce que pouvait être cet ouvrage de mosaïque du XIVe siècle, puisque nous ne connaissons aucun travail de ce genre ayant été exécuté en France depuis le XIIe siècle. Cependant nous possédons encore, dans les magasins de l’église abbatiale de Saint-Denis, les restes d’un pavé en mosaïque à fonds d’or et de couleur datant de la fin du XIIe siècle, et qui rappelle parfaitement, comme facture, les mosaïques italiennes de la même époque. Ce pavage, dont l’ensemble a été conservé par un dessin de Percier fait en 1797, représentait les travaux de l’année entourant un large compartiment occupé par des animaux fantastiques. Si la facture est italienne, le dessin est évidemment français. Mais il ne faut pas oublier que Suger avait fait venir, si l’on en croit ses gestes, des artistes de tous pays pour contribuer à l’érection de la nouvelle église, commencée en 1140. Toutefois, nous ne pouvons donner aux cartons qui ont dû servir à l’exécution de ce pavage une date antérieure à 1190[3]. En débarrassant cette même église de Saint-Denis des tristes superfétations qui en ont si profondément altéré le caractère, nous avons trouvé, sous les carrelages modernes, quantité de petits cubes de terre cuite vernissée de 0m,015 à 0m,02 de côté qui ont évidemment servi à faire des mosaïques par un procédé peu dispendieux. Au XIIe siècle, nos architectes ont quelquefois cherché à imiter ces pavages italiens, connus sous le nom d’opus alexandrinum, mais les pierres dures leur manquant, ils y suppléaient par la terre cuite vernissée. Plus habituellement, les carrelages en terre cuite avec dessins incrustés ou les dalles gravées remplaçaient chez nous les anciennes mosaïques gallo-romaines ou celles d’outre-monts. Quant aux mosaïques sur parements, ainsi que nous l’avons dit, il n’en existe qu’un nombre très-restreint de ce côté-ci des Alpes, et sont-elles antérieures au XIIe siècle. Les vitraux étaient la véritable décoration des édifices en France à dater de cette époque, et par le fait les vitraux sont une sorte de mosaïque translucide (voy. vitrail).
- ↑ L’abbé Lebeuf. Mémoires concernant l’hist. civile et ecclésiastique d’Auxerre, t. I, p. 149.
- ↑ T. X, p. 16.
- ↑ Il faut mentionner ici la mosaïque représentant les figures du zodiaque retrouvée en 1831 à Saint-Omer, et provenant de la tombe du prince Guillaume, mort à Aire en 1109 (abbaye de Saint-Bertin).