Dictionnaire pratique et historique de la musique/Point

Point, n. m. Signe semblable au point de l’écriture ordinaire. Placé à la suite d’une figure de note ou de silence, il en augmente la durée de moitié. Une ronde pointée vaut une ronde et demie ou trois blanches. Un soupir pointé vaut un soupir et un demi-soupir. Lorsque la figure de note ou de silence est suivie de deux points, sa durée s’augmente de la moitié et du quart : une blanche suivie de deux points vaut une blanche, une noire et une croche. : Ex. :


\language "italiano"
porteeA = \relative do'' {
  \time 7/8 
  do2.. \bar "||" do2~ do4~ do8 \bar "||"
}
\score {
     \porteeA
  \layout {
    \context { \Staff \RemoveEmptyStaves 
                      \remove Clef_engraver
                      \remove Time_signature_engraver
    }
    indent = 0\cm
    \context { \Score \override SpacingSpanner.base-shortest-duration = #(ly:make-moment 1/64) }
    \override Score.BarNumber #'stencil = ##f
    line-width = #120
  }
  \midi { }
 }
\header { tagline = ##f}

Le point a été le germe de tous les systèmes de notation qui se sont développés depuis le moyen âge et sa forme agrandie subsiste encore dans la dorme des notes modernes. (Voir Notation.) Il a donné son nom au Contrepoint, qui, à l’origine, était représenté à l’œil par la superposition des lignes de points exprimant les parties de la composition contrepointique. Après que la notation neumatique se fut développée et transformée, le point prit dans la notation proportionnelle un sens nouveau, relatif à la figuration des valeurs de durée. On distingua alors, selon le rôle que l’on entendait faire jouer au point ajouté à une note :
 Le point de perfection, affirmant la valeur ternaire de la note lorsqu’il pouvait y avoir doute ;
 Le point de division, qui jouait le rôle de nos barres de mesure, pour séparer des rythmes que la théorie ordinaire aurait réunis ;
 Le point d’augmentation, seul conservé dans la notation actuelle, qui augmentait la note de la moitié de sa valeur, lorsqu’elle était binaire, et plus tard, le point de translation, le point d’altération, etc.

Le point était sous-entendu en certains cas dans la musique ancienne. Frescobaldi, dans ses Toccatas de 1614, prescrit à l’exécutant, lorsqu’il se trouvera en présence d’un passage où la main droite devra jouer des doubles croches pendant que la gauche jouera des croches, d’avoir à pointer chaque deuxième double croche :


\language "italiano"
globalH = { \clef treble \time 6/4 \key fa \major \autoBeamOff }
globalB = { \clef bass \time 6/4 \key fa \major \autoBeamOff }
sopMusic = \relative do' {
  do32[ re16. mi32 \set stemRightBeamCount = #1 fa16. \set stemLeftBeamCount = #1 sol32 la16. si32 dod16.] 
  \stemDown re32[ la16. si32 \set stemRightBeamCount = #1 dod16. \set stemLeftBeamCount = #1 re32 mi16. fad32 sol16.]~ sol4
}
altomusic = \relative do' {
  la2 la <re la>
}
basMusic = \relative do' {
  sib,8\rest sol'[ fa mi] fa[ mi re dod] re2
}
\score {
    \new PianoStaff <<
      \new Staff
        \new Voice = "sopranos" {
          \voiceOne
          \globalH
          \sopMusic
        }
      \new Staff
      <<
        \new Voice = "altos" {
          \voiceThree
          \globalB
          \altomusic
        }
        \new Voice = "basses" {
          \voiceTwo
          \globalB
          \basMusic
        }
      >>
    >>  % end PianoStaff
    \layout {
    \context { \Staff \RemoveEmptyStaves 
                      \remove Time_signature_engraver
    }
    indent = 0\cm
    \override Score.BarNumber #'stencil = ##f
    line-width = #120
  }
  \midi { }
}
\header { tagline = ##f}

Chez Couperin aussi, le point est sous-entendu en certain cas ; il décrit comme d’usage en France le fait d’écrire en notes égales plusieurs notes qui se succèdent par degrés conjoints, mais de les pointer. Sur une de ses pièces, l’Allemande La Laborieuse, Couperin écrit : « sans lenteur, et les doubles croches un tant soit peu pointées ». L’organiste Gigault conseille « pour animer son jeu plus ou moins adjouster des points où l’on voudra » (1685). Chez Couperin (1717), le point placé au-dessus de la note, dans un dessin mélodique, indique un agrément du genre des coulés, dans l’exécution duquel « la seconde note de chaque temps doit être plus appuyée », ce qui est diamétralement contraire à notre usage moderne.


\language "italiano"
porteeA = \relative do'' {
  \time 5/4
  s8 fa8[( mi-.) re( do-.)] s8 mi[( re) do( si-.)] \bar ""
}
\score {
   \porteeA
  \layout {
    \context { \Staff \RemoveEmptyStaves 
                      \remove Time_signature_engraver
    }
    \context { \Score \override SpacingSpanner.base-shortest-duration = #(ly:make-moment 1/16) }
    indent = 0\cm
    \override Score.BarNumber #'stencil = ##f
    line-width = #120
  }
 }
\header { tagline = ##f}

Le point au-dessus de la note prescrit aujourd’hui de la détacher légèrement. L’emploi du point sans qu’il soit noté persiste, principalement chez les instrumentistes français, jusque dans la 2e moitié du xviiie s., tel que Couperin l’avait indiqué. Les auteurs mentionnent les croches égales et inégales avec des diversités d’application dans leur usage, qui rendent l’affirmation d’une coutume uniforme tout à fait impossible. C’était « pour le goût du chant » que dans les séries de plusieurs notes semblables par temps, on supposait l’indication du point. J.-J. Rousseau (au mot Pointer) désigne cet usage comme français, et dit que les Italiens font les notes égales. Les exécutants, aux xviie-xviiie s., n’observaient pas avec rigueur la valeur du point. Il est reconnu que cette valeur était approximative chez les Français, ainsi que chez Bach et Hændel. Une succession de notes pointées :


\language "italiano"
melody = \relative do' {
  \override Staff.StaffSymbol.line-count = #0
  fa16 s fa8.[ fa16] s fa8.[ fa16 fa8. fa16]
}
\score {
  <<
    \new Voice = "mel" { \melody }
  >>
  \layout {
    \context { \Staff \RemoveEmptyStaves }
    \context { \Staff \remove Clef_engraver \remove Time_signature_engraver }
    \context { \Score \override SpacingSpanner.base-shortest-duration = #(ly:make-moment 1/16) }
    indent = 0\cm
    line-width = #120
    \override Score.BarNumber #'stencil = ##f
  }
}
\header { tagline = ##f}


telle qu’il s’en présentait très fréquemment dans les ouvertures, pouvait fort bien se jouer :


\language "italiano"
melody = \relative do' {
  \override Staff.StaffSymbol.line-count = #0
  fa32 s fa8..[ fa32] s fa8..[ fa32 fa8.. fa32] 
}
\score {
  <<
    \new Voice = "mel" { \melody }
  >>
  \layout {
    \context { \Staff \RemoveEmptyStaves }
    \context { \Staff \remove Clef_engraver \remove Time_signature_engraver }
    indent = 0\cm
    line-width = #120
    \override Score.BarNumber #'stencil = ##f
  }
}
\header { tagline = ##f}

Sans doute trouvait-on plus de piquant à cette exécution saccadée. Couperin remarque en 1717, au sujet de l’exécution en notes pointées de passages notés sans points que « les Italiens écrivent leur musique dans les vraies valeurs qu’ils ont pensées ». Il était recommandé de faire très courte la note de moindre valeur, dans un dessin avec notes pointées. Dannreuther cite à cet égard J.-P. Agricola (p. 191). Emm. Bach (1753) dit que les notes qui suivent les points doivent invariablement être jouées plus brèves que leur valeur. Le double point n’était pas en usage au temps de Bach et Hændel, comme notation, mais il se réalisait dans l’exécution :


\language "italiano"
porteeA = \relative do'' {
  \key do \major
  \time 3/4
  << { \voiceOne
          s8 do16.[ la32 re16. fa,32] fa8[ mi] s8 \bar "||"
          s8^\markup { \raise #3 { \hspace #-3 { \italic "Effet" }}} do'16.[ la32 re16. fa,32] fa8[ mi] s8 \bar "||"
     } 
  \new Voice { \voiceTwo 
         s8 fa8.[ re16] re8[ do ] s8 |
         s8 fa8..[ re32] re8[ do] s8_\markup { \italic { "etc." }} |
     } 
  >> 
}
\score {
   \porteeA
  \layout {
    \context { \Staff \RemoveEmptyStaves 
                      \remove Time_signature_engraver
    }
    indent = 0\cm
    \override Score.BarNumber #'stencil = ##f
    line-width = #120
  }
  \midi { }
 }
\header { tagline = ##f}
(Bach, Partita iii, Allemande.)
Le dessin, fréquent chez Bach, ainsi noté :

\language "italiano"
porteeA = \relative do'' {
  \key fa \major
  sib8.[ la32 sol fa] mi4 
}
\score {
   \porteeA
  \layout {
    \context { \Staff \RemoveEmptyStaves 
                      \remove Time_signature_engraver
    }
    indent = 0\cm
    \override Score.BarNumber #'stencil = ##f
    line-width = #120
  }
  \midi { }
 }
\header { tagline = ##f}
est incorrect avec le point simple ; il se joue :

\language "italiano"
porteeA = \relative do'' {
  \key fa \major
  sib8[~ sib32 la sol fa] mi4 
}
\score {
   \porteeA
  \layout {
    \context { \Staff \RemoveEmptyStaves 
                      \remove Time_signature_engraver
    }
    indent = 0\cm
    \override Score.BarNumber #'stencil = ##f
    line-width = #120
  }
  \midi { }
 }
\header { tagline = ##f}

Dans une succession de notes pointées, l’usage moderne le plus fréquent est de pointer la première de chaque groupe de deux notes. Au xviie s. les deux formes, 1re note pointée, ou seconde note pointée, étaient usitées, celle-ci plus rarement. On la trouve souvent chez Frescobaldi.