Dictionnaire pratique et historique de la musique/Hymne

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Hymne, n. 2 g. Dans son acception générale, chant en l’honneur de la divinité. L’usage est de classer ce mot dans le genre masculin, lorsqu’il désigne un chant de l’antiquité païenne, et dans le genre féminin, quand il s’applique à une œuvre poétique et musicale à l’usage des cultes chrétiens. || 1. La liturgie catholique latine réserve, sauf exception, le titre d’H. à des chants dont les textes sont versifiés et forment des strophes régulières. On en découvre l’origine dans les liturgies orientales et l’on regarde le Gloria in excelsis Deo, qui fait partie de l’ordinaire de la messe, comme l’un de ses premiers modèles. C’est en s’inspirant des usages de l’Orient que saint Ambroise, évêque de Milan au ive s., composa plusieurs H. et en introduisit l’usage dans son église, comme cantique populaires. La musique de ces pièces, conforme à leur mètre poétique, se chantait, disent les anciens auteurs, « presque en mesure », ce qui aidait à les fixer dans la mémoire des fidèles. Vers la même époque, la composition et le chant des H. se propagea dans les pays celtiques et dans les monastères de l’ordre de Saint-Benoît, par l’influence desquels le nombre et l’usage s’en accrurent rapidement. Au xiie s., Abélard put entreprendre d’en former un recueil. C’est à la suite du même courant d’inspiration que naquirent les proses rythmées d’Adam de Saint-Victor et de ses imitateurs. (Voy. Prose, Séquence.) Entre les H. les plus célèbres de la liturgie catholique figurent celles de l’Avent : Conditor alme siderum ; de Noël : A solis ortu cardine ; le Pange lingua de la Passion et celui du Corpus Christi ; l’Ave maris stella pour les fêtes de la sainte Vierge ; le Te lucis des Complies ; le Veni creator ; l’Iste confessor, composé en l’honneur de saint Martin ; l’Ut queant laxis pour la fête de saint Jean-Baptiste, qui a donné naissance aux noms des notes de la gamme ; le Vexilla regis, le Te Deum, etc. Toutes ces pièces ont été composées entre le ive et le ixe s., mais leurs mélodies ne sont conservées que par des manuscrits postérieurs, concordant néanmoins entre eux. À l’époque de la floraison de l’art polyphonique, les textes et les mélodies des H. furent souvent traités en contrepoint vocal ou instrumental. Une des plus célèbres œuvres de Palestrina est son livre d’H. pour toute l’année, Hymni totius anni (1589) à 4, 5 et 6 voix. Une des plus remarquables œuvres écrites pour l’orgue par les anciens maîtres français est le Livre d’H. de Titelouze (publié en 1621). Au xviie s., le poète Santeuil et les « plain-chantistes » parisiens s’essayèrent à écrire de nouvelles H., dont quelques-unes furent momentanément adoptées dans les églises de France. || 2. Dans l’église d’Angleterre et chez les sectes protestantes qui s’y rattachent par le culte ou par la langue, le titre d’H. est donné aux chants mesurés à une ou plusieurs voix qui ne relèvent pas directement du psautier, et que la communauté interprète en des occasions particulières. Les divers recueils d’H. et principalement le volume Ancient and modern hymns sans cesse réimprimé depuis 1858 et répandu à plusieurs millions d’exemplaires, en contiennent des centaines, qui correspondent aux cantiques et aux chorals français et allemands et dont fréquemment les paroles pieuses sont simplement adaptées à des airs profanes. || 3. Le nom d’H. a été parfois donné à des œuvres musicales de concert. Lorsque Beethoven fit entendre pour la première fois, à Vienne, en 1824, sa grande Messe en ré, elle fut annoncée au programme sous le titre de « Trois grandes H. ». Quelques-unes des compositions de circonstance écrites pour les fêtes de la Révolution française portèrent le même titre, notamment l’H. à l’Être suprême, de Gossec (vers 1793). || 4. On applique souvent le titre d’H. aux chants nationaux des différentes nations, et avec plus d’exactitude à ceux qui font une part au sentiment religieux. || 5. Enfin, dans la musique dramatique et profane, le nom d’H. est employé quelquefois pour caractériser une invocation quelconque ou un chant de triomphe : tel l’Hymne à la justice, de Magnard.