Dictionnaire pratique et historique de la musique/Festival

◄  Fes
FF  ►

Festival, n. m. Concert exceptionnel par son organisation, son but, le nombre de ses exécutants, ou les œuvres qui y sont interprétées. Le nom et l’usage en sont venus d’Angleterre, où depuis deux siècles les chœurs d’église ou les sociétés de chant ont coutume de se réunir à dates fixes pour des auditions solennelles. Le « F. des Trois chœurs » peut être choisi comme exemple. Formé des chanteurs des trois cathédrales de Gloucester, Worcester et Hereford, il est célébré annuellement et à tour de rôle dans chacune de ces trois villes, depuis 1724. Dans des séances données au bénéfice des veuves et des orphelins de clergymen et de chanteurs des trois diocèses, les membres de ce meeting font entendre, de jour, des œuvres de musique religieuse, telles que les Te Deum de Purcell et de Hændel, et de grandes antiennes des maîtres anglais classiques, et, dans les séances du soir, des oratorios anciens et nouveaux ; les solistes et les membres de l’orchestre sont engagés spécialement pour chaque session, qui se prolonge, depuis 1836, pendant quatre journées. Le F. triennal de Norwich fonctionne régulièrement depuis 1824 et comporte à chaque fois deux ou plusieurs séances d’oratorios et de musique profane et sacrée. Le F. de Leeds est triennal depuis 1874. Celui de Sheffield, l’un des plus récemment fondés, est annuel et s’est fait rapidement remarquer par l’excellence de ses chœurs. Parmi les F. organisés en raison de circonstances particulières, aucun ne fut aussi célèbre que celui de la « Commémoration de Hændel », qui eut lieu à Londres, à l’occasion du centième anniversaire de la naissance de ce maître, en 1784 ; il se composa de cinq concerts, où furent exécutées, par un ensemble de 525 chanteurs et instrumentistes, quelques-unes de ses œuvres ; le succès fut tel, qu’on dut renouveler quatre fois cette célébration jusqu’en 1791 ; la dernière fois, un millier de musiciens y participèrent. Les F. jouent un rôle important dans la vie musicale des Îles Britanniques, en ce que, non seulement s’y maintient le culte des chefs-d’œuvre classiques, mais encore nombre d’œuvres nouvelles du genre de l’oratorio, de la cantate ou de la symphonie y sont produites en d’excellentes conditions. L’Allemagne a des F. réguliers, dont le plus ancien en date, en même temps que le plus renommé, est le F. rhénan, fondé en 1824, célébré alternativement d’année en année, à Cologne, Dusseldorf et Aix-la-Chapelle, et dont la 89e réunion s’est tenue à Cologne en 1913. Le F. annuel de l’Association des musiciens allemands se transporte à chaque fois en des villes différentes ; fondé en 1865, tenu en 1914, pour sa 49e réunion, à Essen, il comporte en cinq journées un total formidable d’exécutions musicales de tous les genres, où les œuvres nouvelles tiennent assez de place pour former une sorte d’exposition annuelle de la production germanique. Le F. Beethoven, à Bonn, occasionné par l’inauguration de sa statue, en 1845, et les trois F. Bach, ou Bachfeste (Berlin, 1901, Eisenach, 1907, Leipzig, 1911), doivent être cités. Le nom forgé par Wagner pour les représentations de Bayreuth, Bühnenfestspiel, dont la traduction littérale serait « festival scénique », est une adaptation à l’art théâtral de l’acception de solennité que comporte le mot F. En France, on applique volontiers ce mot à des concerts qui n’ont guère d’autre importance que celle qui résulte de leur caractère inusité, ou de la présence sur l’estrade de très nombreux exécutants, comme il arrive dans un « F. orphéonique » ou un F. de musiques militaires. Certaines auditions rattachées aux expositions universelles ou aux événements du jour, comme a été le « F. des trois gardes », donné à Paris en 1916, ont laissé, à des titres divers, des souvenirs durables.